Il est temps que la Palestine soit reconnue comme membre à part entière de l’ONU 

(Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 02 avril 2023

Il est temps que la Palestine soit reconnue comme membre à part entière de l’ONU 

Il est temps que la Palestine soit reconnue comme membre à part entière de l’ONU 
  • Les dirigeants israéliens demandent que les États-Unis se tiennent en dehors des affaires intérieures du pays
  • Il y a désormais peu de raisons pour que les États-Unis et d'autres défendent constamment Israël dans les forums internationaux

Le débat entre Tel-Aviv et Washington a inclus une demande des dirigeants israéliens pour que les États-Unis restent en dehors des affaires intérieures du pays.

Si cette demande est logique pour un État souverain, elle est illogique pour des États qui ne respectent pas leurs propres engagements internationaux ou la Charte des Nations Unies. Dans l'ordre de l'après-Seconde Guerre mondiale, les États membres sont tenus de respecter à la fois l'esprit et le texte de leurs engagements internationaux. Le préambule de la résolution 242 du Conseil de sécurité de l'ONU note «l'inadmissibilité de l'acquisition de territoire par la guerre». La même résolution souligne également la nécessité d'œuvrer pour une paix juste et durable au Moyen-Orient. Ce qui s'est passé en Israël depuis un certain temps, notamment avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu, s'y oppose totalement.

Un haut responsable israélien – le ministre des Finances Bezalel Smotrich, qui est également membre du cabinet de sécurité et qui supervise la situation dans les territoires occupés – s'est exprimé et a agi en totale opposition à cet engagement. Aucun responsable israélien ne parle ou ne travaille à une «solution juste», car l'administration actuelle de Netanyahu ne fait même pas de tentatives superficielles pour tenir des négociations politiques mettant fin à l'occupation militaire longtemps rejetée ou à l'entreprise de colonisation (également illégale).

En outre, dans un discours prononcé lors d'un forum français de droite et derrière un pupitre qui comprenait une carte montrant le soi-disant Grand Israël, couvrant la Palestine, la Jordanie et certaines parties de la Syrie et du Liban, Smotrich a nié l'existence du peuple palestinien. Il a semblé faire allusion à la possibilité de leur expulsion et de l'annexion de la terre palestinienne parce que, selon lui, «les Palestiniens n’existent pas». Ce haut responsable israélien raciste et dangereux n'a été ni licencié ni critiqué publiquement.

Par conséquent, à la lumière du rejet continu de tout effort de paix, et en tenant compte de la propre demande d'Israël selon laquelle d'autres ne devraient pas interférer dans sa politique, il y a désormais peu de raisons pour que les États-Unis et d'autres défendent constamment Israël dans les forums internationaux.

Ce qu'il faut, ce n'est pas la répétition de la rhétorique diplomatique condamnant Israël ou même un sermon en faveur de la solution à deux États. Ce qu'il faut, c'est une position internationale qui renforce sérieusement l'engagement du monde envers l'autodétermination palestinienne.

Il y a désormais peu de raisons pour que les États-Unis et d'autres défendent constamment Israël dans les forums internationaux. - Daoud Kuttab 


Une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU reconnaissant la Palestine comme État membre à part entière confirmerait ce que la majorité des États membres ont déjà décidé et forcerait Israël à négocier avec l'État de Palestine sur les questions de frontières et de relations bilatérales.

Les parlements européens ont également massivement recommandé à leurs gouvernements de faire de même. Mais plutôt que d'agir séparément, comme l'a fait la Suède lorsqu'elle a reconnu la Palestine, les pays européens ont choisi de le faire collectivement, au bon moment, et avec la capacité de faire la différence. Alors, ne serait-ce pas le meilleur moment pour cela ?

Les États-Unis pourraient également faire preuve de leur soutien en votant pour, ou au moins, en s'abstenant d'un tel vote au CSNU. Selon le dernier sondage Gallup, 49 % des démocrates américains sympathisent davantage avec les Palestiniens, contre 38 % qui tendent plus vers les Israéliens. Maintenant – bien avant le début de la prochaine campagne présidentielle américaine – pourrait être politiquement le meilleur moment pour l'administration Biden de prendre une décision aussi courageuse. Ce serait la prérogative de la Maison Blanche n'ayant pas besoin du soutien du Congrès.

Un vote pour l'adhésion à part entière de la Palestine enverrait le message à Israël que ses jours pour obtenir une carte blanche des États-Unis et d'autres pays occidentaux sont désormais comptés, à la fois en termes de statut démocratique d'Israël et de son attitude envers ses voisins palestiniens et arabes.

En plus de reconnaître la Palestine comme un État sous occupation, la communauté mondiale, ainsi que les pays arabes voisins, doivent travailler dur avec le peuple palestinien pour l'aider à se détacher d'une dépendance malsaine d’Israël. L'économie palestinienne doit être libérée de cette dépendance forcée et de sérieux efforts doivent être mis en place afin d’aider à atteindre la pleine indépendance. Bien que cela puisse nécessiter des ressources supplémentaires, le peuple palestinien est suffisamment résilient pour pouvoir continuer à construire non seulement un pays indépendant, mais aussi un pays fondé sur la transparence démocratique et une véritable adhésion à la séparation des pouvoirs - un système judiciaire indépendant et une presse libre, ainsi que de véritables efforts en faveur de la transparence et de l'État de droit.

En bref, pour faire face à la situation au Moyen-Orient, le monde devrait — pour que son comportement soit conforme à ses propres valeurs et principes — aller au-delà de la simple adhésion à la solution à deux États et se plonger dans la mise en œuvre d'une telle position. Cette dernière peut commencer par reconnaître la Palestine et faire en sorte qu'elle puisse être un État contigu, indépendant et démocratique vivant en paix avec tous ses voisins.

Daoud Kuttab est un journaliste palestinien de Jérusalem. Il est un ancien professeur de journalisme de l'université de Princeton. Twitter: @daoudkuttab

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com