Face à une Assemblée divisée, le Sénat «donne le la»

La présidente de l'Assemblée nationale française Yael Braun-Pivet (à gauche) préside une session parlementaire à l'Assemblée nationale française à Paris le 13 juin 2023. (Photo, AFP)
La présidente de l'Assemblée nationale française Yael Braun-Pivet (à gauche) préside une session parlementaire à l'Assemblée nationale française à Paris le 13 juin 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 17 juin 2023

Face à une Assemblée divisée, le Sénat «donne le la»

  • Réforme de la justice, industrie verte, régulation de l'espace numérique ou encore plein emploi sont autant de projets de loi déposés sur le bureau du Sénat en premier lieu
  • Bruno Retailleau souligne aussi le «rôle décisif» des sénateurs en commission mixte paritaire (CMP) pour trouver des compromis

PARIS: La réforme des retraites l'a placé au coeur du réacteur, le gouvernement lui réserve désormais la primeur sur de nombreux textes qu'il infléchit notablement: le Sénat à majorité de droite profite des divisions de la nouvelle Assemblée nationale pour asseoir son pouvoir.

Au point que la rumeur - totalement invraisemblable il y a quelques mois - de l'arrivée possible du président du Sénat Gérard Larcher (LR) à Matignon a pu circuler avec une certaine insistance.

"En 2014, je ne pouvais pas faire un média sans qu'on me demande +à quoi sert le Sénat+". La question ne se pose plus aujourd’hui, se réjouit le chef de file des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau.

"Le Sénat a trouvé une nouvelle jeunesse", constate le patron des sénateurs socialistes Patrick Kanner.

"Hier simplement utile, le Sénat est aujourd’hui devenu indispensable au pouvoir exécutif", relevait aussi l'ancien garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas en mars dernier dans une tribune au Monde.

«Premier filtre»

Le vote de la réforme des retraites a marqué un tournant en faisant apparaître au grand jour le contraste entre les deux chambres : l'Assemblée où le débat n'a pu aller au bout, et la chambre haute qui a réussi à adopter le texte dans les délais, offrant au gouvernement un minimum d'assise parlementaire.

Mais il a aussi révélé, par sa guérilla procédurale, un durcissement inédit de la gauche sénatoriale, que la droite a eu du mal à endiguer et qui a brouillé quelque peu l'image lisse que cherche à préserver la chambre haute.

"Différents épisodes ont montré qu’on pouvait faire un travail parlementaire, y compris frictionnel, dans le respect des institutions", veut rassurer Patrick Kanner.

En inscrivant les textes d’abord au Sénat, "le gouvernement évite un débat de charpie à l'Assemblée nationale. Il s’assure un premier filtre qu’il peut de fait maîtriser", estime le sénateur du Nord.

Ainsi les deux projets de loi d'Agnès Pannier-Runacher sur les énergies renouvelables et le nucléaire ont abouti malgré de mauvais oracles.

Réforme de la justice, industrie verte, régulation de l'espace numérique ou encore plein emploi sont autant de projets de loi déposés sur le bureau du Sénat en premier lieu.

Bruno Retailleau souligne aussi le "rôle décisif" des sénateurs en commission mixte paritaire (CMP) pour trouver des compromis.

Et quand le gouvernement ne trouve pas de majorité à l'Assemblée nationale et que le Sénat dit "non", c'est le blocage, comme pour le projet de loi de programmation budgétaire 2023-2027, enlisé depuis octobre 2022. De son adoption peuvent pourtant dépendre le versement de fonds européens.

«Une institution du pouvoir»

Pour peser encore un peu plus, le Sénat multiplie les propositions de loi poil-à-gratter, souvent assises sur une réflexion au long cours et censées combler "la torpeur" du gouvernement. C'est le cas sur des sujets aussi divers que l'audiovisuel, tout récemment, ainsi que la lutte contre les incendies, qui pourrait aboutir avant l'été, ou encore l'agriculture.

Le constitutionnaliste Dominique Rousseau relève "une évolution paradoxale" du Sénat, en remontant aux origines de la Ve République. Les pères de la Constitution de 1958, le général De Gaulle et Michel Debré, "étaient persuadés qu'il n'y aurait pas de majorité gaulliste à l'Assemblée nationale et que par conséquent ils devraient s'appuyer sur le Sénat".

Michel Debré défendait alors "une puissante deuxième chambre": "Si nous avions la possibilité de faire surgir demain une majorité nette et constante (à l'Assemblée, ndlr), il ne serait pas nécessaire de prévoir un Sénat dont le rôle principal est de soutenir, le cas échéant, un gouvernement contre une assemblée trop envahissante parce que trop divisée".

Au terme de "contre-pouvoir" mis en avant par Gérard Larcher, Dominique Rousseau préfère celui de "pouvoir". Le Sénat est "une institution du pouvoir", dit-il.

Le constitutionnaliste est plus sceptique quant à l'image de modernité que la chambre haute s'emploie à déployer: "si le Sénat n'est plus la chambre du seigle et de la châtaigne, il n'est pas non plus devenu la chambre du métavers".


Metz: un forcené tué par balles, un policier touché à la main

Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet. (AFP)
Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet. (AFP)
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  • Alors que les forces de l'ordre interviennent, "l'homme est retranché chez lui et refuse de se rendre à la police", a poursuivi M. Grosdidier
  • Un peu avant 3H00, l'homme, installé au premier étage, "faisait feu depuis sa fenêtre sur la patrouille située dans la rue", a indiqué dans un communiqué le procureur de la République adjoint de Metz, Thomas Bernard

STRASBOURG: Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet.

Les faits ont commencé dimanche soir dans une rue très passante de la vieille ville de Metz. "Vers 22h00, un individu menace depuis sa fenêtre, avec une arme à canon long, un passant", a rapporté le maire François Grosdidier sur sa page Facebook.

Alors que les forces de l'ordre interviennent, "l'homme est retranché chez lui et refuse de se rendre à la police", a poursuivi M. Grosdidier.

Un peu avant 3H00, l'homme, installé au premier étage, "faisait feu depuis sa fenêtre sur la patrouille située dans la rue", a indiqué dans un communiqué le procureur de la République adjoint de Metz, Thomas Bernard.

"Il sortait alors de son studio, tenant dans chaque main un revolver, et faisait feu sur les policiers présents dans le couloir", a-t-il ajouté. "Un policier était blessé à une main, tandis qu'un de ses collègues tirait à trois reprises, touchant l'individu à l'abdomen et au bras".

L'homme de 56 ans a été hospitalisé mais est décédé lundi matin. "Son casier judiciaire porte trace de neuf condamnations", selon M. Bernard.

Le policier blessé a également été hospitalisé.

L'homme détenait "plusieurs armes, de poing et d'épaule, dans son appartement", selon le maire qui a salué l'intervention des forces de l'ordre.


Tourisme en France : entre recherche de soleil, contraintes budgétaires et destinations alternatives

Cette photo prise le 22 mars 2024 montre un bateau navette naviguant sur la Garonne alors que l'église Saint-Louis-des-Chartrons (à gauche) surplombe les quais de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. Bordeaux accueillera certains des tournois de football des Jeux olympiques de Paris 2024 l'été prochain. (AFP)
Cette photo prise le 22 mars 2024 montre un bateau navette naviguant sur la Garonne alors que l'église Saint-Louis-des-Chartrons (à gauche) surplombe les quais de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. Bordeaux accueillera certains des tournois de football des Jeux olympiques de Paris 2024 l'été prochain. (AFP)
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  • les Français semblent partager la même priorité : partir en vacances sans trop grever leur budget.
  • L’ensoleillement demeure un facteur clé dans les choix de destination. Les zones méditerranéennes continuent de séduire, au détriment des régions plus tempérées

RIYAD : Alors que l'été 2025 se profile, les Français semblent partager la même priorité : partir en vacances sans trop grever leur budget. Si 61 % d’entre eux envisagent de prendre quelques jours de congé, selon un sondage OpinionWay pour Liligo, leur comportement de consommation évolue. Pour la première fois en cinq ans, le budget moyen baisse de 74 euros par personne.

L’ensoleillement demeure un facteur clé dans les choix de destination. Les zones méditerranéennes continuent de séduire, au détriment des régions plus tempérées comme la Bretagne, la Normandie ou le nord de la France. Cette tendance s’explique notamment par deux étés précédents jugés peu cléments sur le plan météorologique, ce qui dissuade certains vacanciers de s'y rendre à nouveau.

Dans les établissements touristiques du Grand Ouest, les professionnels constatent un recul des séjours d'une semaine, compensé par une légère hausse des courts séjours (2 à 6 nuits). Les réservations de dernière minute restent fréquentes et très dépendantes des prévisions météorologiques du dimanche soir.

Confrontés à une inflation persistante et à des inquiétudes concernant leur pouvoir d’achat, les Français adaptent leurs comportements. Ils réduisent leurs dépenses dans les restaurants, les commerces ou les activités annexes, et sont plus prudents dans la planification de leurs séjours. Les formules « tout compris », jugées plus économiques et prévisibles, rencontrent un succès croissant.

Selon le cabinet Pro tourisme, les prix des hébergements touristiques ont grimpé de 27 % en quatre ans. Dans ce contexte, les territoires proposant des tarifs plus accessibles, comme l’intérieur des terres ou les destinations proches des grandes agglomérations comme l’Eure, la Vienne, l’Ain ou l’Oise, enregistrent une forte progression des recherches, parfois jusqu’à +150 %.

Si les littoraux restent prisés, un rééquilibrage s’opère en faveur des zones rurales et périurbaines. Ces destinations sont non seulement plus abordables, puisque les locations y sont en moyenne 20 à 30 % moins chères que sur la côte, mais elles offrent également un cadre de vie plus agréable.

Ces destinations répondent à une demande croissante de nature, de tranquillité et d’authenticité. La France rurale, longtemps en retrait, bénéficie désormais d’une attractivité renouvelée. Un phénomène accentué par l’essor du télétravail, le besoin de déconnexion et la quête d’expériences plus simples. L’arrière-pays n’est plus perçu comme une alternative de repli, mais comme un véritable choix de qualité.

Sur le plan international, la France reste solidement installée comme première destination mondiale avec 100 millions de touristes étrangers en 2024, devant l’Espagne. Les métropoles touristiques qui accueillent une clientèle étrangère à fort pouvoir d’achat, comme Paris, Cannes, Nice ou les régions viticoles, affichent des perspectives encourageantes.

Les analystes estiment que les Jeux Olympiques 2024 ont amplifié la visibilité de la France sur la scène mondiale, générant un regain d’intérêt pour la capitale et ses alentours. À Paris, la fréquentation touristique devrait rester élevée en 2025 grâce à l’effet post-événementiel.

Entre contraintes économiques, recherche d’ensoleillement et désir de proximité, le tourisme en France est en pleine mutation. Les professionnels s’adaptent à une clientèle plus exigeante, plus mobile et surtout plus attentive à l’équilibre entre plaisir et dépenses. Le paysage touristique français, longtemps polarisé entre le littoral et la montagne, s’enrichit désormais d’une diversité de choix stratégiques, économiques et culturels.


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.