A l'Assemblée nationale, un an qui compte au moins double

Des manifestants sont assis devant le Palais Bourbon (Assemblée nationale française) lors d'une manifestation lors de la 14e journée d'action après que le gouvernement a poussé une réforme des retraites au parlement sans vote, en utilisant l'article 49.3 de la Constitution, à Paris le 6 juin 2023. (Photo, AFP)
Des manifestants sont assis devant le Palais Bourbon (Assemblée nationale française) lors d'une manifestation lors de la 14e journée d'action après que le gouvernement a poussé une réforme des retraites au parlement sans vote, en utilisant l'article 49.3 de la Constitution, à Paris le 6 juin 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 14 juin 2023

A l'Assemblée nationale, un an qui compte au moins double

  • L'Assemblée est divisée en trois blocs: les scrutins donnent des sueurs froides à l'exécutif, les séances sont traversées de pics de tension et les textes cheminent cahin caha
  • Une soixantaine de projets ou propositions de loi ont été définitivement adoptés au total, sur le pouvoir d'achat, l'assurance chômage, les énergies ou encore le régalien

PARIS: L'Assemblée nationale nouvelle formule, où le camp présidentiel n'est plus en position de force, passe son premier anniversaire entre fatigue et résignation, dans l'attente d'une possible nouvelle donne au gouvernement.

Lundi, les députés ont rejeté à 50 voix près une 17e motion de censure contre Elisabeth Borne, sur un air de déjà-vu.

Et la patronne des députés LFI Mathilde Panot d'évoquer une "guerre d'usure": "Ce n'est que partie remise. Tôt ou tard, vous tomberez, car la colère a dépassé la question des retraites", a-t-elle asséné à la cheffe du gouvernement, en ce jour anniversaire du premier tour des élections législatives il y a un an.

A l'initiative de la motion de censure, l'alliance de gauche Nupes l'a votée d'un bloc avec les députés du Rassemblement national, comme déjà auparavant, dans une "alliance des contraires" épinglée par les macronistes.

"Il n'y a pas de majorité alternative", martèle la locataire de Matignon, qui avait échappé à neuf voix près en mars à un renversement, lors d'une précédente motion.

Ainsi va l'Assemblée, divisée en trois blocs: les scrutins donnent des sueurs froides à l'exécutif, les séances sont traversées de pics de tension et les textes cheminent cahin caha.

Une soixantaine de projets ou propositions de loi ont été définitivement adoptés au total, sur le pouvoir d'achat, l'assurance chômage, les énergies ou encore le régalien.

"On n'a pas dénaturé nos projets" et "la majorité est plus étroite mais plus solide", se félicite-t-on dans le camp présidentiel, sans "méthode Coué ou triomphalisme".

Nombre de députés, contraints à davantage de présence dans l'hémicycle pour assurer les votes, sont lessivés. "C'est fatigant, le volume sonore, et intellectuellement aussi", lâche l'une.

"En circonscription, on a des retours pas toujours élogieux" sur l'image donnée, "mais les gens savent d'où vient le bordel", affirme Maud Bregeon, porte-parole du groupe Renaissance, en pointant les extrêmes.

Un an à l'Assemblée nationale en cinq temps forts

Démarrage en fanfare post-législatives, puis des mois laborieux, marqués par la bataille tumultueuse des retraites: les députés ont connu une année épique, avant une suite de quinquennat incertaine.

Rentrée mouvementée

C'est la "claque": les macronistes perdent aux élections législatives de juin la majorité absolue et voient débarquer d'un côté quelque 150 députés de l'alliance des gauches Nupes, de l'autre 89 élus Rassemblement national, plus gros groupe d'extrême droite de toute l'histoire en France.

Les premiers, très offensifs dans l'hémicycle sous l'impulsion des mélenchonistes, bousculent les codes et font tomber la cravate. Les autres, emmenés par Marine Le Pen, jouent le contraste en affichant leur "sérieux". Ils accèdent à des postes clés de l'institution, au grand dam de certains jusque dans la majorité.

Au Perchoir, une femme, pour la première fois: Yaël Braun-Pivet, encore novice en politique en 2017, n'était pourtant pas la candidate d'Emmanuel Macron. L'élue des Yvelines marque ensuite son indépendance à plusieurs occasions, mais se voit aussi reprocher d'être "l'agent du pouvoir exécutif".

La saison des 49.3

La Première ministre Elisabeth Borne appelle les parlementaires à "bâtir ensemble" des "compromis". A l'été, le paquet de mesures en faveur du pouvoir d'achat passe au forceps, grâce aux voix des députés Les Républicains et du RN.

Il en va autrement des budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale à l'automne, pour lesquels la cheffe du gouvernement doit recourir dix fois à l'arme constitutionnelle du 49.3 permettant de faire adopter des textes sans vote. A chaque fois, les députés LFI, seuls ou avec l'ensemble de la Nupes, déposent une motion de censure contre le gouvernement. Le groupe RN fait de même à deux reprises. Les motions sont rejetées, faute du soutien des députés LR. Mêmes causes, mêmes effets: ce scénario des 49.3 à répétition, vécu comme une "brutalité" par la gauche, pourrait se reproduire à l'automne prochain.

Le RN dérape

Le 3 novembre, brusque interruption de la séance: l'élu RN Grégoire de Fournas vient de lancer "qu'il retourne en Afrique", pendant une question sur des migrants de l'insoumis - et noir - Carlos Martens Bilongo. L'Assemblée vote le lendemain son exclusion pour 15 jours de séance, décision rarissime et plus lourde sanction disciplinaire possible.

Le député récuse tout racisme, mais l'épisode met à mal la stratégie de dédiabolisation du RN. Gauche et macronistes s'emploient à montrer le "vrai visage" de l'extrême droite, et épinglent le "vide" des propositions issues de leurs rangs voire leur "mutisme". Pour sa part, Marine Le Pen trace sa route et prépare 2027.

Les retraites: Des mois de fièvre

Lundi 6 février : en plein hiver, l'hémicycle est incandescent. Olivier Dussopt ouvre les débats sur la réforme des retraites sous les "vendu". Entre invectives et sanctions de députés, l’examen tourne au chaos. "Personne n'a craqué", criera à la gauche Olivier Dussopt 12 jours plus tard. "On est là", chante LFI, et le premier round s'achève sans vote.

Au Sénat ensuite, l'exécutif peut compter sur les voix de la droite, et sort l'arme du vote bloqué pour dribbler les amendements de la gauche. Au retour à l'Assemblée, l'exécutif est échaudé par l'incertitude autour des députés LR, et ne veut pas risquer le vote. Le 16 mars, Élisabeth Borne prononce les mots fatidiques "article 49 alinéa 3", à peine audible sous la bronca et la Marseillaise chantée par les Insoumis. Le 20 mars, elle survit de justesse à une motion de censure, à neuf voix près.

La loi toujours très contestée est promulguée mi-avril après le feu vert du Conseil constitutionnel. Le groupe indépendant des députés Liot et la gauche abattent une dernière carte: un texte d'abrogation des 64 ans est mis à l'ordre du jour de l'Assemblée le 8 juin. Las, sa mesure phare est jugée irrecevable et il n'y a pas de vote. Mais les députés de gauche font le "serment de ne jamais lâcher le combat".

Bras de fer sur l'immigration

C'est le nouveau serpent de mer. L'exécutif avait présenté un premier texte voulu "équilibré", entre mesures coercitives et régularisations dans les métiers en tension. Mais Les Républicains, conscients du prix de leurs voix et soucieux de ne plus apparaître en supplétifs, entendent bien imposer leurs propositions très dures.

Matignon missionne Gérald Darmanin pour trouver un accord et pouvoir présenter une mouture en juillet... sans fracturer la macronie sur sa gauche. Mission impossible ?

«Risque LR»

Les élus La France insoumise assument de faire entendre "la colère des gens". En embuscade, les députés RN ont signé quelques coups d'éclat. Aucun camp n'est en reste, en réalité.

"L'Assemblée vit, vote des textes, remplit ses missions", défend sa présidente Yaël Braun-Pivet, première femme au Perchoir.

"Il faut avancer" et "ce n'est pas mon tempérament de renoncer à trouver des majorités" texte par texte, campe la Première ministre, qui a dû toutefois dégainer dix fois l'arme constitutionnelle du 49.3 pour faire passer les budgets à l'automne, et une onzième fois sur la réforme des retraites.

Près des deux tiers des Français (65%) considèrent que l'absence de majorité absolue pour Emmanuel Macron est une bonne chose pour la démocratie et le débat - une proportion toutefois en recul, selon un sondage Elabe pour BFMTV.

"Ils nous ont rendu la tâche plus difficile et en sont heureux", retient Aurore Bergé, patronne du groupe Renaissance, qui toutefois "ne sai(t) pas si ça peut durer quatre ans" encore ainsi.

D'autant que, observe une de ses collègues, plus les mois passent, plus les oppositions ont tendance à se "radicaliser", y compris LR qui fait monter les enchères sur l'immigration, prochain gros morceau législatif.

"Cette Assemblée n'a pas beaucoup d'avenir si on n'apprend pas à fonctionner par coalition", considère un autre responsable de la majorité, qui lorgne à droite.

Car "le risque LR", c'est-à-dire que le groupe d'Olivier Marleix vote une motion de censure, "va être décuplé à partir de septembre", et alors il y aurait de grandes chances que le gouvernement chute, expose un cadre de l'exécutif. En pareil cas, "on fait une alliance avec eux ou on dissout" l'Assemblée - une prérogative du chef de l'Etat.

Alors autant anticiper, et passer un accord de gouvernement dès à présent avec la droite, poussent certains. Le scénario agite les esprits au Palais Bourbon, avant le terme mi-juillet des 100 jours qu'a fixés Emmanuel Macron pour relancer le quinquennat.


Les autorités françaises tentent de préparer les esprits à la guerre

Le chef d'état-major des Armées, le général Fabien Mandon, a donné un grand coup d'accélérateur à ce projet mardi devant le congrès des maires de France, déclarant qu'il fallait que le pays restaure sa "force d'âme pour accepter de nous faire mal pour protéger ce que l'on est" et soit prête à "accepter de perdre ses enfants".La déclaration a provoqué un coup de tonnerre dans le débat public et sur les plateaux télévisés des chaînes d'information. (AFP)
Le chef d'état-major des Armées, le général Fabien Mandon, a donné un grand coup d'accélérateur à ce projet mardi devant le congrès des maires de France, déclarant qu'il fallait que le pays restaure sa "force d'âme pour accepter de nous faire mal pour protéger ce que l'on est" et soit prête à "accepter de perdre ses enfants".La déclaration a provoqué un coup de tonnerre dans le débat public et sur les plateaux télévisés des chaînes d'information. (AFP)
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  • Les autorités tentent depuis des mois de préparer les esprits des Français à des sacrifices en cas de guerre, mais le message peine à infuser dans une population qui se sent loin des combats en Ukraine et protégée par sa dissuasion nucléaire
  • Les partis politiques d'opposition au camp présidentiel se hérissent, accusant Emmanuel Macron de préparer la guerre contre la Russie

PARIS: Les autorités tentent depuis des mois de préparer les esprits des Français à des sacrifices en cas de guerre, mais le message peine à infuser dans une population qui se sent loin des combats en Ukraine et protégée par sa dissuasion nucléaire.

Le chef d'état-major des Armées, le général Fabien Mandon, a donné un grand coup d'accélérateur à ce projet mardi devant le congrès des maires de France, déclarant qu'il fallait que le pays restaure sa "force d'âme pour accepter de nous faire mal pour protéger ce que l'on est" et soit prête à "accepter de perdre ses enfants".

La déclaration a provoqué un coup de tonnerre dans le débat public et sur les plateaux télévisés des chaînes d'information.

Les partis politiques d'opposition au camp présidentiel se hérissent, accusant Emmanuel Macron de préparer la guerre contre la Russie: "Un chef d'état-major des Armées ne devrait pas dire ça" (groupe parlementaire LFI, gauche radicale), "51.000 monuments aux morts dans nos communes ce n'est pas assez ? Oui à la défense nationale mais non aux discours va-t-en-guerre" (Fabien Roussel, parti communiste).

"Il faut être prêt à mourir pour son pays (...) en revanche, il faut que la guerre qui soit menée soit juste (...) ou que la nécessité fasse que ce soit carrément la survie de la nation qui soit en jeu", a dit Louis Aliot, du Rassemblement national (extrême droite). "Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de Français qui sont prêts à aller mourir pour l'Ukraine", a-t-il ajouté.

Depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, les autorités françaises - à l'instar d'autres gouvernements européens - déploient un discours récurrent pour faire comprendre à la population l'instabilité croissante provoquée par les ambitions de Moscou et les positions mouvantes de l'allié américain.

La France doit "se préparer à l'hypothèse d'un engagement majeur de haute intensité dans le voisinage de l'Europe à horizon 2027-2030, parallèle à une hausse massive des attaques hybrides sur son territoire", résume la Revue nationale stratégique de 2025, feuille de route des autorités.

Plus largement, elles essayent aussi d'accroître la capacité de la société à surmonter une crise éventuelle.

Le gouvernement publie ce jeudi un guide "face aux risques", regroupant des conseils pour réagir à un large éventail de menaces, des inondations aux cyberattaques ou des guerres.

Territoire national 

Mais même si 64% des Français craignent que le conflit militaire se propage jusqu'en France (sondage Elabe de mars 2025), nombre d'entre eux continuent de se sentir éloignés de la guerre.

"Parce que la France a été un champ de bataille pendant les deux guerres mondiales, que leurs traces sont visibles, il faut comprendre que la représentation de la guerre pour les Français, demeure très nettement l'invasion du territoire", explique à l'AFP la chercheuse Bénédicte Chéron, qui publie en janvier "Mobiliser. Faut-il rétablir le service militaire en France?" (Éditions du Rocher).

Et les déclarations du général Mandon interviennent dans un contexte "de forte défiance envers les autorités politiques", rappelle Mme Chéron, estimant que les Français ont "du mal à accepter l'idée d'engager massivement des forces, d'en payer le prix — des morts, des blessés, coût économique etc —  pour autre chose que protéger le territoire d'une invasion".

Quant à la perception de la dissuasion nucléaire, elle est peut-être myope. "La dissuasion nucléaire ne peut pas nous protéger de toutes les menaces, elle n'a pas été conçue dans ce but, malgré ce que peut penser la population", explique Héloïse Fayet, chercheuse sur la dissuasion à l'institut français des relations internationales (IFRI). "La résilience et les forces armées conventionnelles sont donc aussi indispensables".

"Par exemple ce n'est pas la dissuasion nucléaire qui va empêcher des incursions de drones sur le territoire, des actions de sabotage ou la désinformation", toute la palette des actions dites hybrides, explique-t-elle.

Mais "ces actions hybrides sont sans commune mesure avec ce que les Français continuent de percevoir comme étant, à tort ou à raison, la +vraie guerre+", estime Mme Chéron.

"En l'état, les seuils de perturbation qu'elles franchissent ne sont pas très élevés et pas de nature à faire accepter les contraintes d'une mobilisation des Français", assure-t-elle.


Marseille attend des «actes» de Darmanin et Nuñez pour faire face au narcobanditisme

Gérald Darmanin et Laurent Nuñez, ex-préfet de police des Bouches-du-Rhône, passeront la journée dans la deuxième ville de France auprès des magistrats et des enquêteurs en première ligne dans ce combat. Ils doivent aussi échanger en début d'après-midi avec la famille Kessaci. (AFP)
Gérald Darmanin et Laurent Nuñez, ex-préfet de police des Bouches-du-Rhône, passeront la journée dans la deuxième ville de France auprès des magistrats et des enquêteurs en première ligne dans ce combat. Ils doivent aussi échanger en début d'après-midi avec la famille Kessaci. (AFP)
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  • Dans la matinée, le ministre de l'Intérieur est arrivé à la préfecture de police où il a salué les forces de l'ordre, a constaté un journaliste de l'AFP
  • Son homologue de la justice commençait lui par une visite à la prison des Beaumettes

MARSEILLE: Une semaine après l'assassinat de Mehdi Kessaci, les ministres de l'Intérieur et de la Justice sont jeudi à Marseille, dans un contexte où la lutte contre le narcobanditisme "est loin d'être gagnée".

Gérald Darmanin et Laurent Nuñez, ex-préfet de police des Bouches-du-Rhône, passeront la journée dans la deuxième ville de France auprès des magistrats et des enquêteurs en première ligne dans ce combat. Ils doivent aussi échanger en début d'après-midi avec la famille Kessaci.

Dans la matinée, le ministre de l'Intérieur est arrivé à la préfecture de police où il a salué les forces de l'ordre, a constaté un journaliste de l'AFP. Son homologue de la justice commençait lui par une visite à la prison des Beaumettes.

L'assassinat en plein jour de Mehdi Kessaci, qui voulait devenir policier, a tétanisé la ville. La justice étudie la piste d'"un crime d'intimidation" visant Amine. Mais ce dernier a prévenu qu'il ne se tairait pas et a appelé à descendre dans la rue "par milliers" samedi pour une marche blanche.

"Le premier sentiment que j'ai c'est la culpabilité", a confié Amine Kessaci à la radio Franceinfo, la voix brisée par l'émotion. "Ce qu'on peut reprocher aujourd'hui à Mehdi Kessaci c'est d'être le frère d'Amine Kessaci et de me dire que mon frère est aujourd'hui dans ce cercueil à ma place."

Enchaînant les interventions dans les médias, il a demandé que son frère soit reconnu à titre posthume "comme un gardien de la paix".

Le "haut du spectre" 

Interrogée sur l'assassinat de Mehdi Kessaci, la procureure de Paris Laure Beccuau, en charge de l'enquête, a estimé mercredi soir sur Franceinfo que "ceux qui étaient capables de ce type d'agissement scandaleux faisaient partie du haut du spectre de la criminalité organisée".

Avant la marche blanche de samedi, le maire divers gauche de Marseille, Benoît Payan a lui appelé à ne "pas avoir peur". Même si dans les milieux associatifs, dans les médias et dans les couloirs du palais de justice, la peur, les doutes, l'envie d'être prudent sont bien là.

Des magistrats plaident pour une anonymisation dans les procédures concernant des narcotrafiquants, comme la DZ Mafia, qui n'hésitent pas à recruter des adolescents sur les réseaux sociaux pour leur demander d'exécuter "un contrat" pour quelques milliers d'euros seulement.

"La lutte contre la criminalité organisée est de plus en plus dure. Le climat se tend, va crescendo (...) La lutte n'est pas perdue mais elle est difficile et loin d'être gagnée", confie à l'AFP une source judiciaire.

Au tribunal, tout le monde se souvient de la soufflante reçue de la part de l'ex-garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, en mars 2024. Il leur avait reproché leur défaitisme: une juge d'instruction avait dit devant une commission parlementaire craindre "que nous soyons en train de perdre la guerre contre les trafiquants à Marseille".

Mardi, le président Emmanuel Macron a appelé à adopter face au narcotrafic la même approche que contre "le terrorisme". Sur cette stratégie, des détails sont attendus jeudi.

500 dossiers à juger 

Les effectifs de police et de justice ont été musclés à Marseille ces dernières années pour rattraper un retard historique dans la 2e ville de France.

Benoît Payan réclame aujourd'hui "encore plus" de moyens.

"On n'a rien trouvé de mieux que de supprimer la préfecture de police à Marseille", tacle-t-il, interrogé par l'AFP et "si on avait plus d'effectifs de policiers judiciaires, de magistrats, peut-être que ça serait différent".

"Il faut s'attaquer à tous les niveaux de la chaîne, du chef de réseau international au consommateur", a déclaré de son côté Renaud Muselier, président Renaissance de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Gérald Darmanin a dit avoir réclamé aux Emirats l'extradition d'"une quinzaine" de narcotrafiquants présumés.

La juridiction marseillaise, troisième de France, a été renforcée ces dernières années avec aujourd'hui 143 magistrats du siège et 60 au parquet, mais toujours moins qu'à Bobigny.

A la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 500 procédures criminelles sont en attente de jugement. Parmi elles, le dossier des assassins présumés de Brahim, le grand frère d'Amine, tué en 2020 avec deux autres jeunes hommes.

Mais l'embolie judiciaire est telle que des dates de procès n'ont toujours pas été fixées même si ce dossier "fera l'objet d'un audiencement prioritaire", promet-on.


Les députés approuvent la mise en place d'une taxe de deux euros pour les «petits colis»

L'Assemblée nationale a approuvé mercredi la mise en place d'une taxe de deux euros ciblant les "petits colis" d'une valeur inférieure à 150 euros d'origine extra-européenne, qui servira à financer les dispositifs pour contrôler ces produits. (AFP)
L'Assemblée nationale a approuvé mercredi la mise en place d'une taxe de deux euros ciblant les "petits colis" d'une valeur inférieure à 150 euros d'origine extra-européenne, qui servira à financer les dispositifs pour contrôler ces produits. (AFP)
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  • La mesure a suscité de vifs débats, le Rassemblement national dénonçant une "taxe sur la consommation populaire et les classes moyennes"
  • Ces discussions interviennent alors que la plateforme de commerce en ligne d'origine chinoise Shein est sous le feu des critiques, accusée de vendre de nombreux produits non conformes et illicites

PARIS: L'Assemblée nationale a approuvé mercredi la mise en place d'une taxe de deux euros ciblant les "petits colis" d'une valeur inférieure à 150 euros d'origine extra-européenne, qui servira à financer les dispositifs pour contrôler ces produits.

208 députés contre 87 ont approuvé cette mesure proposée par le gouvernement dans le cadre de l'examen en première lecture du budget de l'Etat. Le RN a voté contre, la gauche, la coalition gouvernementale et le groupe ciottiste UDR, allié de Marine Le Pen, pour.

La mesure a suscité de vifs débats, le Rassemblement national dénonçant une "taxe sur la consommation populaire et les classes moyennes", quand la ministre Amélie de Montchalin (Comptes publics) a défendu une "redevance" destinée à contrôler des produits souvent "dangereux".

Ces discussions interviennent alors que la plateforme de commerce en ligne d'origine chinoise Shein est sous le feu des critiques, accusée de vendre de nombreux produits non conformes et illicites.

"Ce n'est pas une taxe pour empêcher la concurrence déloyale chinoise, c'est une taxe sur la consommation populaire et les classes moyennes", a dénoncé le député Jean-Philippe Tanguy (RN).

"Faire croire aux Français qu'en taxant les petits colis, vous arriverez à augmenter de manière spectaculaire le nombre de contrôles, c'est se moquer du monde", a renchéri la présidente du groupe, Marine Le Pen, soulignant que "l'année dernière, 0,125 % de colis ont été vérifiés".

La France insoumise s'est également dite soucieuse des répercussions de la taxe sur les consommateurs, exigeant pour les protéger que les plateformes soient taxées directement et non les colis, et menaçant de voter contre la mesure.

Le gouvernement a déposé un amendement destiné à répondre à cette préoccupation, permettant que la taxe soit payée via "le tuyau de la TVA", qui est "alimenté par les plateformes". Cela a convaincu LFI de soutenir la proposition gouvernementale.

La taxe devrait rapporter environ 500 millions d'euros, destinés selon Mme de Montchalin à financer l'achat de scanners pour contrôler les colis et embaucher des douaniers.

Elle s'est félicitée que la France mette en oeuvre la taxe "dès le 1er janvier", comme la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, neuf mois plus tôt que les autres pays de l'UE.

"Ceux qui ce soir ne voteront pas cette taxe (...) n'ont pas choisi la France, ils n'ont pas choisi nos commerçants, ils auront choisi la Chine et sa submersion", a-t-elle tonné.

Elle a par ailleurs rappelé que les ministres des Finances de l'Union européenne se sont accordés la semaine dernière pour supprimer l'exonération de droits de douane dont bénéficient ces petits colis.

Juste avant minuit, les députés ont en revanche supprimé un autre article du projet de loi, visant à fiscaliser l'ensemble des produits à fumer, avec ou sans tabac ou nicotine.

"Nous sommes 700. 000 personnes à avoir réussi à arrêter de fumer grâce à la cigarette électronique", une alternative efficace pour "sauver des vies" qui est "bien moins dangereuse que la cigarette", a argumenté le député Renaissance Pierre Cazeneuve. Parmi elles, de nombreux députés, dont lui-même.