A bout de force, des migrants africains errent dans le désert entre Tunisie et Libye

Des gardes-frontière libyens donnent de l’eau à des migrants assoiffés, le 30 juillet près d’Al-Assah, à la frontière entre Libye et Tunisie (Photo, AFP).
Des gardes-frontière libyens donnent de l’eau à des migrants assoiffés, le 30 juillet près d’Al-Assah, à la frontière entre Libye et Tunisie (Photo, AFP).
Un migrant s’effondre à son arrivée, près du poste frontalier d’Al'Assah (Photo, AFP).
Un migrant s’effondre à son arrivée, près du poste frontalier d’Al'Assah (Photo, AFP).
Des migrants partagent de la nourriture à Al'Assah, le 30 juillet (Photo, AFP).
Des migrants partagent de la nourriture à Al'Assah, le 30 juillet (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 01 août 2023

A bout de force, des migrants africains errent dans le désert entre Tunisie et Libye

  • Il est midi, l'heure où la chaleur est insoutenable par plus de 40 degrés, une patrouille retrouve un homme évanoui et tente de le ranimer
  • Depuis environ deux semaines, les gardes-frontières libyens disent avoir secouru des centaines de migrants

AL’ASSAH: Marchant jusqu'à l'épuisement, des migrants d'Afrique subsaharienne arrivent quotidiennement par centaines en Libye, après avoir été abandonnés à la frontière, en plein désert, par les forces de sécurité tunisiennes, selon leurs témoignages et ceux de gardes-frontières libyens recueillis par l'AFP.

Une centaine d'Africains ont été secourus dimanche par des gardes libyens alors qu'ils erraient dans une zone aride inhabitée près du Sebkhat al-Magta, un lac salé, le long de la frontière tuniso-libyenne, a constaté une équipe de l'AFP.

Il est midi, l'heure où la chaleur est insoutenable par plus de 40 degrés, une patrouille retrouve un homme évanoui et tente de le ranimer en versant quelques gouttes d'eau sur ses lèvres. Il respire à peine.

Au loin, dans la brume de chaleur, on distingue six points noirs. Quelques minutes plus tard, ces rescapés expliquent en arabe qu'ils viennent de Tunisie.

Depuis environ deux semaines, les gardes-frontières libyens disent avoir secouru des centaines de migrants, déposés, selon eux, par les autorités tunisiennes à la frontière, à la hauteur de la localité d'Al'Assah, à 150 kilomètres au sud-ouest de Tripoli.

A la suite d'affrontements entre migrants et habitants ayant coûté la vie à un Tunisien le 3 juillet, des centaines d'Africains ont été chassés de Sfax, principal point de départ en Tunisie pour l'émigration clandestine vers l'Europe.

Ils s'écroulent, épuisés

Selon l'ONG Human Rights Watch, au moins "1.200 ressortissants subsahariens" ont alors été "expulsés" par les forces de sécurité tunisiennes aux frontières avec la Libye à l'est, et l'Algérie à l'ouest.

Le Croissant rouge tunisien en a par la suite mis à l'abri plus de 600 à Ras Jedir, zone tampon séparant Tunisie et Libye, et environ 200 du côté algérien.

Mais près d'Al'Assah, à 40 kilomètres au sud de Ras Jedir, ils continuent d'affluer, hébétés, par grappes de deux ou trois ou par dizaines. Epuisés par la chaleur et la soif, ils s'écroulent aux pieds des gardes.

Ces derniers temps, les gardes-frontières libyens, la direction de la lutte contre l'immigration saharienne et les militaires du "Bataillon 19" effectuent des patrouilles quotidiennes.

"Nous sommes à la ligne de démarcation entre Libye et Tunisie et voyons arriver de plus en plus de migrants chaque jour", déplore Ali Wali, porte-parole du Bataillon 19.

Il explique avoir autorisé l'AFP à les accompagner en patrouille "pour faire taire ceux (en Tunisie, ndlr) qui prétendent que nous avons fabriqué tout cela et amené les migrants ici", à la frontière.

Dans leur rayon d'action de 15 kilomètres autour d'Al'Assah, ils récupèrent "selon les jours 150, 200, 350, parfois jusqu'à 400/500 clandestins", dit-il.

Aujourd'hui, ils sont 110, dont deux femmes. Deux autres signalées par un migrant n'ont pas été retrouvées. Un militaire scrute l'horizon avec ses jumelles.

Les survivants ont franchi la frontière sans le savoir, marchant dans la direction indiquée par les policiers tunisiens: la Libye.

Deux jours de marche

Haytham Yahiya est Soudanais. Il travaillait depuis un an dans le bâtiment en Tunisie, où il était arrivé en passant clandestinement par le Niger puis l'Algérie.

"J'étais au travail quand ils m'ont attrapé et amené ici, d'abord dans une voiture de police, puis dans un camion militaire (des forces de sécurité tunisiennes, ndlr) puis ils m'ont abandonné en me disant d'aller en Libye", dit-il.

Sous un soleil de plomb, sans eau ni nourriture, certains ont "marché deux jours".

C'est le cas d'Alexander Unche Okolo, entré illégalement "en Tunisie en traversant l'Algérie". Il a "passé un peu de temps à Tunis" avant d'être "arrêté dans la rue" récemment puis "emmené au désert du Sahara", explique ce Nigérian de 41 ans.

Emu, il montre l'écran de son téléphone: "ils me l'ont cassé et m'ont frappé", accuse-t-il.

Selon M. Wali, samedi, "deux corps ont été trouvés, et deux jours avant, cinq dont une femme avec son bébé, en plus de cinq autres corps retrouvés il y a une semaine".

"Comment voulez-vous qu'ils survivent à ça ? La chaleur, sans eau et une marche de deux, trois jours", dit le porte-parole.

Au moins 17 morts

Selon des organisations humanitaires en Libye contactées par l'AFP, le bilan est d'au moins 17 morts ces trois dernières semaines.

A Ras Jedir, ils sont encore 350 dans un campement de fortune, dont 65 enfants et 12 femmes enceintes: "Leurs conditions de vie sont très problématiques", indique à l'AFP un responsable humanitaire en Libye. Selon lui, environ 180 autres migrants, dont 20 enfants, sont provisoirement hébergés à Al'Assah.

A Ras Jedir, cela fait une dizaine de jours qu'ils ont commencé à recevoir de l'eau, de la nourriture et des soins médicaux du Croissant rouge libyen.

Leur situation s'améliore "mais ce n'est pas soutenable dans la durée, il n'y a pas de sanitaires, ni de réservoirs d'eau, ni de véritables abris", souligne la source humanitaire.

Le gouvernement de Tripoli a fait savoir ces derniers jours qu'il refusait une "réinstallation" sur son territoire des migrants arrivant de Tunisie. La Libye a été épinglée par plusieurs rapports de l'ONU dénonçant des violences à l'encontre des 600.000 migrants qu'elle détient, pour la plupart dans des camps.


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.


Gaza 2025: 15 journalistes tués, selon le Syndicat des journalistes palestiniens

 Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
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  • Le dernier rapport du syndicat fait état d'une augmentation des arrestations, des menaces et du harcèlement des journalistes par les Israéliens
  • Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes

LONDRES: Au moins 15 professionnels des médias ont été tués à Gaza depuis le début de l'année 2025, selon un nouveau rapport publié par le Syndicat des journalistes palestiniens.

Le rapport, publié ce week-end par le comité des libertés du syndicat chargé de surveiller les violations commises par Israël à l’encontre des journalistes, souligne la persistance du ciblage direct des professionnels des médias.

Sept journalistes ont été tués en janvier et huit en mars, selon le rapport.

Par ailleurs, les familles de 17 journalistes ont été endeuillées, tandis que les habitations de 12 autres ont été détruites par des tirs de roquettes et d’obus. De plus, 11 personnes ont été blessées au cours de ces attaques.

Le rapport note que la violence à l'encontre des équipes de journalistes ne se limite pas aux attaques mortelles. Il fait état de l'arrestation de 15 journalistes, à leur domicile ou alors qu'ils étaient en mission. Certains ont été libérés quelques heures ou quelques jours plus tard, tandis que d'autres sont toujours en détention.

Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes, dont beaucoup ont été avertis d'évacuer les zones qu'ils couvraient.

Le rapport relève également une intensification du harcèlement judiciaire, avec plus d’une dizaine de cas où des journalistes – en majorité issus du quotidien Al-Quds, basé en Cisjordanie – ont été convoqués pour interrogatoire et se sont vu interdire de couvrir des événements aux abords de la mosquée Al-Aqsa et dans la vieille ville de Jérusalem.

En Cisjordanie occupée, environ 117 journalistes ont été victimes d'agressions physiques, de répression ou d'interdictions de reportage, en particulier à Jénine et à Jérusalem. La commission a également recensé 16 cas de confiscation ou de destruction de matériel de travail.

Les violences à l'encontre des journalistes surviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. Les forces israéliennes ont intensifié leur offensive, coupant les approvisionnements vitaux des 2,3 millions d'habitants de Gaza, laissant l'enclave au bord de la famine.

Les actions d'Israël font désormais l'objet d'audiences à la Cour internationale de justice de La Haye, où Tel-Aviv est accusé de violer le droit international en restreignant l'aide humanitaire à Gaza.

Le bilan humanitaire est catastrophique.

Selon le ministère de la santé de Gaza, plus de 61 700 personnes ont été tuées à Gaza depuis qu'Israël a lancé son offensive le 7 octobre 2023. Plus de 14 000 autres sont portées disparues et présumées mortes, les civils constituant la grande majorité des victimes.

Le Comité pour la protection des journalistes, organisme de surveillance de la liberté de la presse basé à Washington, a également lancé un signal d’alarme face au nombre élevé de journalistes tués, indiquant qu’au moins 176 d’entre eux – en grande majorité des Palestiniens – ont perdu la vie depuis le début de l’offensive israélienne sur les territoires occupés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'armée israélienne a frappé plus de 50 «cibles terroristes» au Liban au cours du dernier mois

Un homme prend des photos après des frappes israéliennes suite aux ordres d'évacuation, dans la banlieue sud de Beyrouth, le 27 avril 2025. (AFP)
Un homme prend des photos après des frappes israéliennes suite aux ordres d'évacuation, dans la banlieue sud de Beyrouth, le 27 avril 2025. (AFP)
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  • Dimanche, Israël a frappé le sud de Beyrouth pour la troisième fois depuis l'entrée en vigueur du fragile cessez-le-feu du 27 novembre
  • Le Premier ministre israélien Netanyahu a promis d'empêcher le Hezbollah d'utiliser la banlieue sud de Beyrouth comme "refuge"

JERUSALEM : L'armée israélienne a déclaré lundi qu'elle avait frappé plus de 50 "cibles terroristes" au Liban au cours du mois dernier, malgré le cessez-le-feu de novembre qui a mis fin à la guerre entre Israël et les militants du Hezbollah.
Dimanche, Israël a frappé le sud de Beyrouth pour la troisième fois depuis l'entrée en vigueur du fragile cessez-le-feu du 27 novembre, ce qui a incité le président libanais Joseph Aoun à demander à la France et aux États-Unis, qui en sont les garants, d'y mettre fin.
"Au cours du mois dernier, les forces de défense israéliennes ont frappé plus de 50 cibles terroristes au Liban. Ces frappes ont été menées à la suite de violations du cessez-le-feu et des accords entre Israël et le Liban, qui constituaient une menace pour l'État d'Israël et ses citoyens", a déclaré l'armée dans un communiqué.
Le bureau du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a déclaré que la frappe de dimanche visait un bâtiment utilisé par le Hezbollah pour stocker des "missiles guidés avec précision" et a promis d'empêcher le groupe militant soutenu par l'Iran d'utiliser la banlieue sud de Beyrouth comme "refuge".
Le chef du Hezbollah, Naim Qassem, a déclaré dans un discours lundi que l'attaque "n'a aucune justification" et l'a qualifiée d'"attaque politique visant à changer les règles par la force".
Israël a continué à mener des frappes régulières au Liban malgré la trêve, qui visait à mettre fin à plus d'un an d'hostilités avec le Hezbollah, lesquelles ont culminé avec une campagne de bombardements israéliens intensifs et une incursion terrestre.
En vertu de cet accord, le Hezbollah devait retirer ses combattants au nord du fleuve Litani, à une trentaine de kilomètres de la frontière israélienne, et démanteler toute infrastructure militaire restante au sud.
Israël devait retirer toutes ses forces du Sud-Liban, mais des troupes restent sur cinq positions jugées "stratégiques".