A Gaza, les hôpitaux sont devenus des camps de déplacés improvisés

Des Palestiniens se tiennent la tête alors qu'ils sont assis sur les marches d'un hôpital après une frappe aérienne israélienne sur des bâtiments à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 17 octobre 2023 (Photo, AFP).
Des Palestiniens se tiennent la tête alors qu'ils sont assis sur les marches d'un hôpital après une frappe aérienne israélienne sur des bâtiments à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 17 octobre 2023 (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 18 octobre 2023

A Gaza, les hôpitaux sont devenus des camps de déplacés improvisés

  • Les déplacés, qui espèrent un refuge contre les bombes, s'ajoutent désormais aux ambulances qui arrivent en trombe
  • Les soignants de Gaza s'inquiètent pour tous les malades chroniques, désormais en danger de mort faute de médicament, électricité et eau

KHAN YOUNÈS: Certains font du pain, d'autres étendent des vêtements à sécher: dans les hôpitaux de Gaza, les déplacés, qui espèrent un refuge contre les bombes, s'ajoutent désormais aux ambulances qui arrivent en trombe, au ballet des brancardiers et aux médecins qui opèrent à la chaîne.

Amira, 44 ans, s'est installée avec ses enfants dans la cour de l'hôpital Nasser de Khan Younès, dans le sud du petit territoire palestinien, vers lequel les Gazaouis se sont déplacés par centaines de milliers depuis que l'armée israélienne les a appelés à quitter les zones situées au nord.

"Tout notre corps gratte, ça fait une semaine qu'on ne s'est pas douchés, la mort nous serait plus clémente", dit-elle à l'AFP, en préparant des sandwiches avec les quelques galettes de pain qu'elle a pu récupérer pour ses enfants.

Depuis le 7 octobre et l'attaque sanglante du Hamas, dont les commandos ont tué plus de 1.400 personnes en Israël, en majorité des civils, et pris 199 otages, le bilan ne cesse de s'alourdir dans la bande de Gaza, pilonnée sans répit par l'armée israélienne.

On compte déjà quelque 3.000 morts, dont des centaines d'enfants, et plus de 10.000 blessés, selon les autorités du Hamas. Et les soignants dans cette petite bande de terre pauvre et surpeuplée s'inquiètent pour tous les malades chroniques, désormais en danger de mort faute de médicament, électricité et eau.

«C'est l'horreur»

Mais jusqu'ici, le terminal de Rafah vers l'Egypte, l'unique ouverture sur le monde de Gaza qui ne soit pas aux mains d'Israël, reste fermé.

Il a été bombardé pour la quatrième fois lundi soir et Israéliens, Egyptiens et Américains ne parviennent pas à s'accorder sur un mécanisme pour faire entrer l'aide, laisser sortir les étrangers de Gaza et donner les garanties de sécurité réclamées par Egyptiens et Israéliens.

"C'est l'horreur", décrit Abou Assaad al-Qoudsi, resté lui dans la ville de Gaza malgré l'appel à évacuer, et qui s'est réfugié à l'hôpital al-Chifa, le plus grand du territoire palestinien.

"Il y a des familles entières avec leurs enfants, parfois des nourrissons, des personnes âgées", énumère pour l'AFP cet homme âgé.

Tous espèrent échapper aux frappes aériennes dans les hôpitaux même si l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a déjà recensé que "111 infrastructures médicales ont été visées, 12 cadres soignants ont été tués et 60 ambulances visées", expliquait lundi son patron régional Ahmed al-Mandhari à l'AFP.

Et mardi soir, au moins 200 personnes ont été tuées dans une frappe israélienne ayant touché l'enceinte de l'hôpital Ahli Arab, à Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas. Israël a démenti toute implication, indiquant que le Djihad islamique était "responsable du tir de roquette raté qui a touché l'hôpital".

Ibrahim Teyssir, lui aussi, s'était précipité sur l'hôpital al-Chifa parce que, dit-il à l'AFP, "personne n'a pitié de nous".

"Qu'est-ce qu'on a fait pour mériter ça? Qu'est-ce que les enfants ont fait? Qu'est-ce que les femmes ont fait?", s'emporte-t-il.

«Danger de mort ou d'épidémies»

"La plupart des gens du peuple n'appartiennent à aucun groupe armé", plaide-t-il encore, alors qu'Israël explique pilonner Gaza  - où vivent 2,4 millions de personnes, pour moitié des enfants - pour "liquider" le Hamas.

A Khan Younès, l'hôpital Nasser est devenu un grand campement improvisé: dans sa cour, des centaines de familles ont posé des matelas de fortune sur lesquels, chaque nuit, elles essayent de fermer l'oeil, malgré le fracas des frappes aériennes et le froid de plus en plus mordant.

Les Gazaouis qui, déjà avant la guerre, dépendaient pour 60% d'entre eux de l'aide alimentaire pour se nourrir, vivent aussi depuis "six jours sans aucune électricité", rapporte l'ONU.

Et si Israël assure avoir rétabli partiellement l'approvisionnement en eau, le robinet ouvert dans l'est de Khan Younès n'apporte aux Gazaouis que "moins de 4% de leur consommation d'avant" la guerre.

Pour l'Unicef, "si de l'eau et du carburant ne rentrent pas immédiatement à Gaza", en état de siège après 16 ans de blocus israélien, ses habitants sont "en danger imminent de mort ou d'épidémies".

Dans certains campements de déplacés, assure même Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), "des centaines de personnes doivent partager un seul cabinet de toilette".


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.


Gaza 2025: 15 journalistes tués, selon le Syndicat des journalistes palestiniens

 Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
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  • Le dernier rapport du syndicat fait état d'une augmentation des arrestations, des menaces et du harcèlement des journalistes par les Israéliens
  • Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes

LONDRES: Au moins 15 professionnels des médias ont été tués à Gaza depuis le début de l'année 2025, selon un nouveau rapport publié par le Syndicat des journalistes palestiniens.

Le rapport, publié ce week-end par le comité des libertés du syndicat chargé de surveiller les violations commises par Israël à l’encontre des journalistes, souligne la persistance du ciblage direct des professionnels des médias.

Sept journalistes ont été tués en janvier et huit en mars, selon le rapport.

Par ailleurs, les familles de 17 journalistes ont été endeuillées, tandis que les habitations de 12 autres ont été détruites par des tirs de roquettes et d’obus. De plus, 11 personnes ont été blessées au cours de ces attaques.

Le rapport note que la violence à l'encontre des équipes de journalistes ne se limite pas aux attaques mortelles. Il fait état de l'arrestation de 15 journalistes, à leur domicile ou alors qu'ils étaient en mission. Certains ont été libérés quelques heures ou quelques jours plus tard, tandis que d'autres sont toujours en détention.

Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes, dont beaucoup ont été avertis d'évacuer les zones qu'ils couvraient.

Le rapport relève également une intensification du harcèlement judiciaire, avec plus d’une dizaine de cas où des journalistes – en majorité issus du quotidien Al-Quds, basé en Cisjordanie – ont été convoqués pour interrogatoire et se sont vu interdire de couvrir des événements aux abords de la mosquée Al-Aqsa et dans la vieille ville de Jérusalem.

En Cisjordanie occupée, environ 117 journalistes ont été victimes d'agressions physiques, de répression ou d'interdictions de reportage, en particulier à Jénine et à Jérusalem. La commission a également recensé 16 cas de confiscation ou de destruction de matériel de travail.

Les violences à l'encontre des journalistes surviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. Les forces israéliennes ont intensifié leur offensive, coupant les approvisionnements vitaux des 2,3 millions d'habitants de Gaza, laissant l'enclave au bord de la famine.

Les actions d'Israël font désormais l'objet d'audiences à la Cour internationale de justice de La Haye, où Tel-Aviv est accusé de violer le droit international en restreignant l'aide humanitaire à Gaza.

Le bilan humanitaire est catastrophique.

Selon le ministère de la santé de Gaza, plus de 61 700 personnes ont été tuées à Gaza depuis qu'Israël a lancé son offensive le 7 octobre 2023. Plus de 14 000 autres sont portées disparues et présumées mortes, les civils constituant la grande majorité des victimes.

Le Comité pour la protection des journalistes, organisme de surveillance de la liberté de la presse basé à Washington, a également lancé un signal d’alarme face au nombre élevé de journalistes tués, indiquant qu’au moins 176 d’entre eux – en grande majorité des Palestiniens – ont perdu la vie depuis le début de l’offensive israélienne sur les territoires occupés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com