Conflit israélo-palestinien: la position de la France à travers le temps

le président de la République, Jacques Chirac, s'entretient avec le président de l'Autorité palestinienne, Yasser Arafat, le 25 novembre 1998, au palais de l'Elysée à Paris, lors d'une réunion sur le processus de paix israélo-palestinien. (Photo d'archive, MICHEL LIPCHITZ / AP POOL / AFP)
le président de la République, Jacques Chirac, s'entretient avec le président de l'Autorité palestinienne, Yasser Arafat, le 25 novembre 1998, au palais de l'Elysée à Paris, lors d'une réunion sur le processus de paix israélo-palestinien. (Photo d'archive, MICHEL LIPCHITZ / AP POOL / AFP)
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Publié le Mercredi 25 octobre 2023

Conflit israélo-palestinien: la position de la France à travers le temps

  • Le 12 octobre dernier, lors d’une allocution télévisée, Emmanuel Macron a rappelé la position historique de Paris sur le conflit entre israélo-palestinien: une solution à deux États
  • Si la solution espérée par la France afin de régler le conflit est claire, son expression dans les discours officiels des représentants du gouvernement de Macron n’a pas toujours été la même à travers le temps

PARIS: Emmanuel Macron s’est rendu ce matin en Israël afin d’apporter son «soutien» à Tel-Aviv alors que l'armée israélienne poursuit son offensive contre la bande de Gaza.

Plus tard dans la journée, Emmanuel Macron a rencontré le chef de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas à Ramallah et a jugé que «rien ne saurait justifier» les «souffrances» des civils à Gaza, après avoir insisté sur la libération des otages et plaidé pour une coalition internationale contre le Hamas.

De son côté, Abbas a demandé à Emmanuel Macron d'œuvrer pour «faire cesser l'agression sauvage» d'Israël sur la bande de Gaza.

Le 12 octobre dernier, lors d’une allocution télévisée, le chef d’État français a rappelé la position historique de Paris sur le conflit entre israélo-palestinien: une solution à deux États. Il s’agit d’une ligne que «la France défend avec constance, qu’elle continue à défendre sans varier et qu’elle continuera de porter», avait-il déclaré. 

Si la solution espérée par la France afin de régler le conflit est claire, son expression dans les discours officiels des représentants du gouvernement de Macron n’a pas toujours été la même à travers le temps.

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Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu serre la main du président français Emmanuel Macron après leur conférence de presse commune à Jérusalem, le 24 octobre 2023. (Photo, AFP)

En effet, à la suite de l'attaque menée par le Hamas le 7 octobre, des voix se sont élevées en faveur d'Israël, tant du côté du clan présidentiel que sur la plupart des bancs de l'Assemblée nationale. 

Cependant, les voix appelant à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza et à la condamnation des bombardements dans la zone la plus densément peuplée du monde, se font plus timides. «Israël a le droit de se défendre», entend-on dire – une position qui s’aligne sur celle des États-Unis.

Le groupe parlementaire La France insoumise (LFI) a été le seul à plaider en faveur d'un cessez-le-feu, qualifiant les frappes israéliennes sur Gaza de «génocide ethnique». D'ailleurs la cheffe de file de LFI, Mathilde Panot s'est illustrée lundi 23 octobre avec un discours fort, à l'Assemblée nationale appelant au cessez-le-feu. 

« La France, autrefois voix de la paix à travers le monde, est entre vos mains devenues un État aligné. Aligné sur les États-Unis et sur le gouvernement israélien va-t-en-guerre d’extrême droite », a notamment lancé la députée LFI dans une ambiance tendue, face à une Première ministre, Elisabeth Borne, visiblement agacée.

À travers le temps, la position officielle de la France n'a pas dérivé en préconisant une solution à deux États, mais son discours a été bien plus pondéré que ce que préconise aujourd'hui la majorité présidentielle.

Du temps de De Gaulle

Il fut un temps, en 1967, où le général de Gaulle prononça ces mots lors d'une conférence de presse: «Certains même redoutaient que les Juifs, jusqu'alors dispersés, mais qui étaient restés ce qu'ils avaient été de tout temps, c'est à dire un peuple d'élite, sûr de lui-même et dominateur, n'en viennent, une fois rassemblés dans le site de leur ancienne grandeur, à changer en ambition ardente et conquérante les souhaits très émouvants qu'ils formaient depuis dix-neuf siècles: “L'an prochain à Jérusalem”.» 

Ces déclarations ont suscité la controverse, mais à la lumière de l'histoire et de la colonisation de la Palestine, ils semblent presque visionnaires aujourd’hui. Lors de la même conférence, De Gaulle a affirmé que «La France prêche la modération face aux Palestiniens», tout en précisant: «Si Israël est attaqué, nous ne le laisserons pas détruire, mais si vous attaquez, nous condamnerons votre initiative.»

Joignant le geste à la parole, De Gaulle imposa un embargo sur les armes à Israël lorsque ce pays a lancé, le 5 juin 1967, une attaque préventive contre l'Égypte, marquant ainsi le début de la guerre des Six-Jours.

Pour Pascal Boniface, directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques, «c’est une rupture». «Même si les relations entre la France et Israël resteront nourries, l’alliance fondamentale est cassée. Israël va prendre les États-Unis comme protecteur», explique-t-il dans une vidéo traitant le conflit israelo-palestinien, publiée la semaine dernière sur sa chaine Youtube.

Valéry Giscard d’Estaing

En 1974, Valéry Giscard d’Estaing revigore la cause palestinienne lorsqu’il déclare qu’«à partir du moment où la communauté internationale reconnaît l'existence d'un peuple palestinien, ce peuple doit pouvoir disposer d'une patrie [...] Le contenu de la résolution 242 doit être atteint, réalisé, c'est-à-dire que chacun des États de cette partie du monde puisse vivre enfin dans des frontières sûres et reconnues.»

La résolution 242, déjà votée à l’ONU par la France de De Gaulle, réclame notamment le retrait d'Israël des nouveaux territoires qu’elle occupe.

Cette position était celle de la France et de la Communauté économique européenne (CEE) à l'époque. Six ans plus tard, la France et la CEE ont reconnu, à travers la déclaration de Venise, le droit des Palestiniens à l'autonomie gouvernementale.

D’ailleurs, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, la France a adopté une approche sans réserve en se rapprochant des pays arabes. Elle est même allée jusqu'à reconnaître l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), présidée par Yasser Arafat. De plus, la France a voté en faveur de l'octroi du statut d'observateur aux Nations unies pour l'OLP.

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Le président français François Mitterrand s'adresse le 04 mars 1982 à la Knesset à Jérusalem. Mitterrand s'est rendu en 1982 à Jérusalem pour défendre, devant le Parlement israélien, le principe d'un Etat palestinien et d'un Etat d'Israël rassuré à l'intérieur de frontières reconnues et acceptées. AFP PHOTO (Photo by GABRIEL DUVAL / AFP)

Malgré un rapprochement avec Tel-Aviv sous la présidence de Mitterrand, la position française est demeurée constante: celle d'une solution à deux États. Mitterrand, premier président français à visiter Israël, a exprimé ces aspirations au sein même du Parlement israélien. Il avait alors affirmé: «Le dialogue suppose que chaque partie puisse aller au bout de son droit, ce qui pour les Palestiniens peut le moment venu signifier un État.»

«You want me to take my plane and to go back to France?»

Le 22 octobre 1996, alors qu’il visitait la vieille ville de Jérusalem, le président français Jacques Chirac s’emporta contre les services de sécurité israéliens qui repoussaient des passants. Sa question, posée ce jour-là, est depuis entrée dans la légende: «You want me to take my plane and to go back to France?» («Vous voulez que je reprenne mon avion et que je retourne en France?»), lance-t-il, visiblement agacé par le comportement de la sécurité israélienne. Ces derniers s’étaient interposés entre lui et des passants venus le saluer. Chirac s’adressant à un des responsables de la sécurité, lui dit: «Ceci n’est pas une méthode, c’est de la provocation.»

Selon Pascal Boniface, Jacques Chirac tirera «une popularité immense» de cet épisode, notamment dans les pays arabes. Sa proximité affichée avec le président Yasser Arafat perpétue le mythe et crispe Israël.  

La nouvelle génération 

Sous les présidences de Nicolas Sarkozy et de François Hollande, la position de la France sur le conflit israélo-palestinien demeure inchangée, malgré les intentions du président socialiste de reconnaître la Palestine, tel que prévu dans son programme électoral. De plus, les deux anciens présidents ont exprimé des opinions divergentes quant au rôle que devrait jouer l'Union européenne dans ce conflit.

Nicolas Sarkozy, qui a participé à une manifestation en soutien à Israël en France à la suite de l'attaque du 7 octobre du Hamas contre Israël, a souligné l'importance de la prépondérance du rôle de l'Europe dans ce contexte. «C'est inacceptable pour l'être humain et encore plus pour l'Europe car la Shoah a eu lieu ici. Les pogroms, les camps de la mort ont eu lieu en Allemagne par le régime nazi. Pour nous, Français, juifs ou pas, l'existence et la sécurité d'Israël sont non négociables», a-t-il déclaré lors du Forum des entrepreneurs à Marseille le 19 octobre dernier. «Je crois en la diversité au Moyen-Orient. La voie de sortie ne pourra être que politique et diplomatique», a-t-il conclu.

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Nicolas Sarkozy, chef du parti UMP au pouvoir en France, visite le Mur occidental dans la vieille ville de Jérusalem, le 15 décembre 2004. (Photo d'archive, AFP)

Quant à François Hollande, invité à réagir à la situation au Proche-Orient lors de son intervention sur RTS (Suisse) le 12 octobre, il a souligné: «Il y a eu un arrêt de ce processus et donc l'oubli de la question palestinienne.» 

Hollande a par ailleurs assuré comprendre la colère du peuple palestinien, qui subit des occupations illégales et un siège à Gaza, dénonçant toutefois les exactions d'un «groupe terroriste qui tue indifféremment». Pour lui, «la solution à deux États est encore possible sur le plan politique. Cela supposerait néanmoins de démanteler des colonies et retrouver une solution de délimitation pour qu'il y ait deux États. Il faudrait aussi qu'il y ait une autorité palestinienne légitime. Or, il n'y a pas eu d'élections depuis des années dans les territoires en Cisjordanie et à Gaza. Nous sommes face à une autorité qui n'a pas le soutien clair de la population pour aller vers une négociation». Il a aussi plaidé en faveur d’une riposte «retenue» d'Israël.

 


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.


Droits de douane: la France déçue de l'accord UE-USA

Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
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  • La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir
  • Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission"

PARIS: La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir sur ses modalités d'application.

Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission".

Se projetant vers la suite, le ministre de l'Economie Eric Lombard a lui estimé lundi soir que "cet accord n'est pas complet" et que "le travail continue". Car "l'accord n'est pas finalisé et nous veillerons à ce qu'il soit amélioré", a-t-il dit dans une interview à Libération.

"Les discussions doivent se poursuivre pour les produits pharmaceutiques - on comprend que certains génériques seront exemptés -, sur l'acier, sur l'aluminium, sur les produits chimiques, sur les semi-conducteurs et sur les vins et les produits agricoles", précise-t-il.

"Il ne faudrait pas que cet accord soit la fin de l'histoire, auquel cas nous nous serions tout simplement juste affaiblis", avait estimé sur France Inter dès lundi matin le ministre français délégué au Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin.

"Maintenant, il va y avoir une négociation technique" et "nous pouvons nous saisir de cette séquence pour nous renforcer", a-t-il ajouté.

Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ont annoncé dimanche en Ecosse un accord douanier prévoyant que les produits européens exportés aux Etats-Unis soient taxés à 15%.

Avec l'espoir d'éviter une escalade commerciale, l'UE s'est aussi engagée à 750 milliards de dollars d'achats d'énergie - visant notamment à remplacer le gaz russe - et à 600 milliards d'investissements supplémentaires aux Etats-Unis.

A Paris, si on concède que cet accord va apporter de la "stabilité" aux entreprises, on insiste surtout sur son caractère "déséquilibré", selon les termes utilisés par plusieurs membres du gouvernement.

"Notre responsabilité aujourd'hui, c'est de faire en sorte que cet accord, in fine, soit le moins déséquilibré possible", a déclaré sur RTL le ministre de l'Industrie et de l'Energie Marc Ferracci.

- Prochains jours déterminants -

MM. Ferracci et Saint-Martin ont plaidé pour un "rééquilibrage" portant sur les services, en particulier le numérique, en rappelant que si la balance commerciale des Etats-Unis avec l'Europe est déficitaire pour les biens, celle des services est excédentaire.

Concernant les échanges de biens, la France affichait en 2024 un excédent commercial de 16,4 milliards de dollars à l'égard des Etats-Unis selon les Américains, mais les Douanes françaises évoquent pour la même période un déficit de 4,2 milliards d'euros.

Les négociateurs européens devront utiliser "l'ensemble des outils qui sont à leur disposition" et notamment envisager "de limiter l'accès des entreprises américaines aux marchés publics européens", a insisté M. Ferracci.

Du côté des entreprises, Patrick Martin, le président du Medef, première organisation patronale française, a estimé que "si les choses sont bien ce qui nous a été annoncé, ce n'est pas admissible". "Il faut continuer à négocier", selon lui.

La CPME, deuxième organisation patronale, a dit anticiper "des répercussions désastreuses" pour les petites et moyennes entreprises. Et le mouvement des ETI (Meti) a évoqué "des conséquences particulièrement préoccupantes pour les entreprises de taille intermédiaire".

Selon les secteurs, les sentiments sont ambivalents.

"Il y a du soulagement parce que cet accord donne de la visibilité", a déclaré à l'AFP Emmanuel Guichard, délégué général de la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA). Mais "ce n'est pas un bon accord pour nous, tout simplement parce qu'on avait 0% de droits de douane en janvier vers les Etats-Unis et maintenant on va être à 15%."

"La catastrophe est évitée", en référence aux 30% de droits de douane évoqué par M. Trump, "mais les prochains jours seront déterminants pour le secteur français des vins et spiritueux", déclare dans un communiqué la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS), à laquelle se joint l’ensemble des interprofessions françaises (CNIV) et de la filière.

Dans l'agroalimentaire, l'organisation patronale du secteur, l'Ania, a dénoncé un "accord clairement inéquitable (...) qui fragilise notre position".

Seuls les secteurs qui pourraient bénéficier d'une exemption de droits de douane, comme l'aéronautique, se sont montrés complètement soulagés.

Le Gifas (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) a salué dans une déclaration transmise à l'AFP une exonération "bonne pour une industrie équilibrée entre la France et les Etats-Unis" et qui permettra de "conserver des emplois qualifiés en France à tous les niveaux de la chaîne de sous-traitance."

Les organisations patronales et les fédérations des filières économiques affectées par cet accord seront reçues mercredi à Bercy.