Gaza : des centaines de personnes fuient l'hôpital Al-Shifa, évacué sur ordre d'Israël

Des tentes et des abris utilisés par des Palestiniens déplacés se trouvent dans la cour de l'hôpital Al Shifa pendant l'opération terrestre israélienne autour de l'hôpital, dans la ville de Gaza. (Reuters)
Des tentes et des abris utilisés par des Palestiniens déplacés se trouvent dans la cour de l'hôpital Al Shifa pendant l'opération terrestre israélienne autour de l'hôpital, dans la ville de Gaza. (Reuters)
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Publié le Samedi 18 novembre 2023

Gaza : des centaines de personnes fuient l'hôpital Al-Shifa, évacué sur ordre d'Israël

  • L'hôpital Al-Shifa est devenu le centre de la guerre entre Israël et le Hamas
  • Israël affirme que le Hamas exploite une base sous Al-Shifa, ce que les militants nient

KHAN YOUNES: Des centaines de personnes ont évacué samedi le plus grand hôpital de Gaza où s'entassaient plus de 2.000 malades, médecins et réfugiés pris au piège par la guerre entre le Hamas et Israël dans le territoire palestinien où une frappe aérienne a fait 26 morts dans la nuit.

Au 43e jour de guerre, au moins 2.300 patients, soignants et déplacés se trouvaient dans l'hôpital al-Shifa, un immense complexe situé dans l'ouest de la ville de Gaza, selon l'ONU, et l'inquiétude internationale va grandissante pour leur sort.

Ils sont sortis à pied de l'hôpital, selon un journaliste de l'AFP sur place, mais des responsables médicaux ont souligné que 120 patients étaient encore présents, incapables de se déplacer. Parmi eux figurent des bébés prématurés, a affirmé le ministère de la Santé du Hamas.

Ces colonnes de déplacés, de personnel médical et de patients, certains blessés et très faibles, ont pris la direction de la route Salaheddine, qui mène vers le sud de Gaza où l'armée israélienne enjoint la population de se réfugier.

Les soldats israéliens qui mènent pour le quatrième jour consécutif un raid sur l'hôpital al-Shifa avaient ordonné via haut-parleur samedi matin son évacuation "sous une heure".

Fouille minutieuse

L'armée israélienne, dont les chars encerclent l'hôpital, fouille "bâtiment par bâtiment" le complexe abritant, selon elle, un repaire du Hamas installé notamment dans un réseau de tunnels souterrains. Le mouvement islamiste palestinien dément catégoriquement ces allégations, accusant Israël de s'en servir comme prétexte pour cibler l'hôpital.

Des soldats interrogent également les personnes présentes à l'intérieur de l'établissement.

L'électricité a cessé d'y fonctionner il y a plusieurs jours et ses chefs de service rapportent que plusieurs dizaines de patients sont décédés "parce que les équipements médicaux vitaux ont cessé de fonctionner en raison de la coupure du courant".

Les bombardements de représailles sur la bande de Gaza sont incessants depuis que le Hamas a mené le 7 octobre une attaque d'une ampleur inédite sur le sol israélien qui a fait 1.200 morts, en majorité des civils, et enlevé avec d'autres groupes armés environ 240 personnes, selon les autorités israéliennes.

Des pourparlers en vue de la libération des otages se tiennent via une médiation du Qatar, mais Israël refuse tout cessez-le-feu tant qu'ils n'auront pas tous été relâchés.

Les corps de deux femmes otages, dont une jeune soldate de 19 ans, Noa Marciano, ont été retrouvés cette semaine dans des bâtiments près de l'hôpital al-Shifa. L'armée a également perdu 51 soldats, morts au combat à Gaza.

Selon le ministère de la Santé du Hamas, les frappes israéliennes ont tué au moins 12.000 civils palestiniens, dont 5.000 enfants.

Dans la nuit de vendredi à samedi, une frappe contre trois immeubles de Khan Younès a encore fait 26 morts et 23 blessés graves, selon le directeur de l'hôpital Nasser de cette ville du sud de la bande de Gaza.

"Je dormais et on a été surpris par la frappe, au moins 20 bombes ont été larguées", a affirmé à l'AFP Imed al-Moubacher, 45 ans.

"D'un coup, la maison a pris feu, je me suis retrouvée avec du gravier dans la bouche, j'ai aussitôt cherché mon mari et mes filles", a ajouté son épouse, Sabrine Moussa.

"J'ai vu des restes humains partout, j’ai crié à l’aide", a-t-elle dit, précisant que son frère avait été tué lors d'une frappe sur la maison familiale début novembre.

"Injustifiable"

Israël, qui a juré "d'anéantir" le Hamas, mène en parallèle aux bombardements des opérations terrestres depuis le 27 octobre. Elles se concentrent dans le nord du territoire, dans la ville de Gaza transformée en champ de ruines et autour des hôpitaux. L'armée accuse le Hamas de les utiliser comme des bases et de se servir des malades comme de "boucliers humains".

Le territoire est placé depuis le 9 octobre en état de "siège complet" par Israël, qui a coupé les livraisons de nourriture, d'eau, d'électricité et de médicaments passant par le terminal de Rafah, à la frontière avec l'Egypte dans le sud de Gaza. Selon le Hamas, 24 des 35 hôpitaux de Gaza ont cessé fonctionner.

Face aux pénuries, la population est confrontée "à un risque immédiat de famine", a averti le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies.

Le patron de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a critiqué "l'échelle de la réponse d'Israël de plus en plus injustifiable". Il a souligné que son agence était "impartiale (..) comme le reste du système des Nations unies".

Selon l'ONU, plus des deux tiers des 2,4 millions d'habitants de la bande de Gaza ont été déplacés par la guerre. La plupart ont fui vers le sud en emportant le minimum et survivent dans le froid qui s'installe.

Le carburant rentre

A la demande des Etats-Unis, Israël a autorisé vendredi l'entrée quotidienne de deux camions-citernes dans la bande de Gaza. Une première livraison de 17.000 litres de carburant est arrivée en soirée au terminal de Rafah afin de redémarrer les générateurs électriques des hôpitaux et des réseaux de télécommunications, selon l'autorité de la partie palestinienne du terminal.

Israël refusait jusqu'ici de laisser passer le carburant, affirmant que cela pourrait profiter aux activités militaires du Hamas, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007 et est classé comme  organisation terroriste par les Etats-Unis, l'Union européenne et Israël.

Mais ces livraisons ne représentent qu'une petite partie des quantités de carburant, soit 50 camions, qui pénétraient quotidiennement à Gaza avant le début de la guerre, selon l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa).

Cette agence avait annoncé vendredi qu'elle ne serait bientôt plus en mesure de coordonner la distribution de l'aide humanitaire à Gaza en raison de la coupure des communications.

Selon l'Unrwa, 70% de la population n'a pas accès à l'eau potable dans le sud du territoire, où les égouts ont commencé à se déverser dans les rues, les stations d'épuration ayant cessé de fonctionner faute de carburant.

Samedi matin, des enfants palestiniens blessés ont pu quitter Gaza via Rafah pour être évacués vers des hôpitaux des Emirats arabes unis, selon des images de l'AFP.

 


Syrie: Chareh lance un appel à l'unité un an après la chute d'Assad

Le président syrien Ahmed al-Chareh a exhorté lundi, un an après la chute de Bachar al-Assad, son peuple à s'unir pour rebâtir un pays ravagé par des années de guerre civile. (AFP)
Le président syrien Ahmed al-Chareh a exhorté lundi, un an après la chute de Bachar al-Assad, son peuple à s'unir pour rebâtir un pays ravagé par des années de guerre civile. (AFP)
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  • Après les prières du matin à mosquée des Omeyyades, il a salué "les sacrifices et l'héroïsme des combattants" ayant renversé il y a un an l'ex-dictateur Assad, selon un communiqué de la présidence
  • Ahmed al-Chareh, ancien jihadiste de 43 ans, était devenu dans la foulée chef d'Etat par intérim après 14 ans de guerre civile et plus de cinq décennies d'un régime familial à la main de fer

DAMAS: Le président syrien Ahmed al-Chareh a exhorté lundi, un an après la chute de Bachar al-Assad, son peuple à s'unir pour rebâtir un pays ravagé par des années de guerre civile.

"La phase actuelle exige que tous les citoyens unissent leurs efforts pour bâtir une Syrie forte, consolider sa stabilité, préserver sa souveraineté", a déclaré le dirigeant, endossant pour l'occasion l'uniforme militaire comme le 8 décembre 2024, quand il était entré dans Damas à la tête de forces rebelles.

Après les prières du matin à mosquée des Omeyyades, il a salué "les sacrifices et l'héroïsme des combattants" ayant renversé il y a un an l'ex-dictateur Assad, selon un communiqué de la présidence.

Ahmed al-Chareh, ancien jihadiste de 43 ans, était devenu dans la foulée chef d'Etat par intérim après 14 ans de guerre civile et plus de cinq décennies d'un régime familial à la main de fer.

Il a rompu avec son passé jihadiste et réhabilité la Syrie sur la scène internationale, obtenant la levée des sanctions internationales, mais reste confronté à d'importantes défis sécuritaires.

De sanglantes violences intercommunautaires dans les régions des minorités druze et alaouite, et de nombreuses opérations militaires du voisin israélien ont secoué la fragile transition.

"C'est l'occasion de reconstruire des communautés brisées et de panser des divisions profondes", a souligné dans un communiqué le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres.

"L'occasion de forger une nation où chaque Syrien, indépendamment de son appartenance ethnique, de sa religion, de son sexe ou de son affiliation politique, peut vivre en sécurité, dans l'égalité et dans la dignité".

Les célébrations de l'offensive éclair, qui ont débuté fin novembre, doivent culminer lundi avec une parade militaire et un discours du président syrien.

Elles sont toutefois marquées par le boycott lancé samedi par un chef spirituel alaouite, Ghazal Ghazal. Depuis la destitution d'Assad, lui-même alaouite, cette minorité est la cible d'attaques.

L'administration kurde, qui contrôle une grande partie du nord et du nord-est de la Syrie, a également annoncé l'interdiction de rassemblements et événements publics dimanche et lundi "en raison de la situation sécuritaire actuelle et de l'activité accrue des cellules terroristes".

 


Liban: l'armée annonce six arrestations après une attaque visant des Casques bleus

Israël, dont l'accord de trêve prévoit pourtant le retrait total du pays voisin, maintient de son côté dans la zone cinq positions militaires dans la région. La Finul a à plusieurs reprises accusé les troupes israéliennes de tirs à son encontre. (AFP)
Israël, dont l'accord de trêve prévoit pourtant le retrait total du pays voisin, maintient de son côté dans la zone cinq positions militaires dans la région. La Finul a à plusieurs reprises accusé les troupes israéliennes de tirs à son encontre. (AFP)
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  • L'armée a souligné dans un communiqué qu'elle ne tolérerait aucune attaque contre la Finul mettant en avant son "rôle essentiel" dans le sud du Liban
  • "Les attaques contre les Casques bleus sont inacceptables", avait de fustigé vendredi la Finul, rappelant "aux autorités libanaises leur obligation d'assurer" sa sécurité

BEYROUTH: Six personnes ont été arrêtées au Liban, soupçonnées d'être impliquées dans une attaque d'une patrouille de Casques bleus jeudi dans le sud du pays, qui n'a pas fait de blessés, a annoncé l'armée libanaise samedi.

L'incident s'était produit jeudi soir, selon un communiqué de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) quand "des Casques bleus en patrouille ont été approchés par six hommes sur trois mobylettes près de Bint Jbeil". "Un homme a tiré environ trois coups de feu sur l'arrière du véhicule. Personne n'a été blessé".

L'armée a souligné dans un communiqué qu'elle ne tolérerait aucune attaque contre la Finul mettant en avant son "rôle essentiel" dans le sud du Liban, où, déployée depuis 1978, elle est désormais chargée de veiller au respect du cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la dernière guerre entre Israël et le Hezbollah pro-iranien.

"Les attaques contre les Casques bleus sont inacceptables", avait de fustigé vendredi la Finul, rappelant "aux autorités libanaises leur obligation d'assurer" sa sécurité.

Bastion du Hezbollah, le sud du Liban subit ces dernières semaines des bombardements réguliers de la part d'Israël, qui assure viser des cibles du mouvement chiite et l'accuse d'y reconstituer ses infrastructures, en violation de l'accord de cessez-le-feu.

Israël, dont l'accord de trêve prévoit pourtant le retrait total du pays voisin, maintient de son côté dans la zone cinq positions militaires dans la région. La Finul a à plusieurs reprises accusé les troupes israéliennes de tirs à son encontre.

Mercredi, le quartier général de la Finul a accueilli à Naqoura, près de la frontière avec Israël, de premières discussions directes, depuis des décennies, entre des responsables israélien et libanais, en présence de l'émissaire américaine pour le Proche-Orient Morgan Ortagus.

Le président libanais, Joseph Aoun, a annoncé de prochaines discussions à partir du 19 décembre, qualifiant de "positive" la réunion tenue dans le cadre du comité de surveillance du cessez-le-feu, disant que l'objectif était d'éloigner "le spectre d'une deuxième guerre" au Liban.


Les efforts pour panser les «profondes divisions» de la Syrie sont ardus mais «pas insurmontables», déclare Guterres

Des Syriens font la queue dans les rues de Damas en attendant un défilé de la nouvelle armée syrienne, pour marquer le premier anniversaire de l'éviction de Bashar Assad, le 8 décembre 2025. (AP)
Des Syriens font la queue dans les rues de Damas en attendant un défilé de la nouvelle armée syrienne, pour marquer le premier anniversaire de l'éviction de Bashar Assad, le 8 décembre 2025. (AP)
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  • Antonio Guterres salue "la fin d'un système de répression vieux de plusieurs décennies", "la résilience et le courage" des Syriens
  • La transition offre l'opportunité de "forger une nation où chaque Syrien peut vivre en sécurité, sur un pied d'égalité et dans la dignité"

NEW YORK : Les efforts pour guérir les "profondes divisions" de la Syrie seront longs et ardus mais les défis à venir ne sont "pas insurmontables", a déclaré dimanche le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, à l'occasion du premier anniversaire de la chute du régime Assad.

Une offensive surprise menée par une coalition de forces rebelles dirigées par Hayat Tahrir al-Sham et des milices alliées a rapidement balayé les zones tenues par le régime à la fin du mois de novembre 2024. En l'espace de quelques jours, elles se sont emparées de villes clés et ont finalement capturé la capitale Damas.

Le 8 décembre de l'année dernière, alors que les défenses du régime s'effondraient presque du jour au lendemain, le président de l'époque, Bachar Assad, a fui la République arabe syrienne, mettant fin à plus de 50 ans de règne brutal de sa famille.

"Aujourd'hui, un an s'est écoulé depuis la chute du gouvernement Assad et la fin d'un système de répression vieux de plusieurs décennies", a déclaré M. Guterres, saluant la "résilience et le courage" des Syriens "qui n'ont jamais cessé de nourrir l'espoir en dépit d'épreuves inimaginables".

Il a ajouté que cet anniversaire était à la fois un moment de réflexion sur les sacrifices consentis en vue d'un "changement historique" et un rappel du chemin difficile qui reste à parcourir pour le pays.

"Ce qui nous attend est bien plus qu'une transition politique ; c'est la chance de reconstruire des communautés brisées et de guérir de profondes divisions", a-t-il déclaré, ajoutant que la transition offre l'occasion de "forger une nation où chaque Syrien - indépendamment de son appartenance ethnique, de sa religion, de son sexe ou de son affiliation politique - peut vivre en sécurité, sur un pied d'égalité et dans la dignité".

M. Guterres a souligné que les Nations Unies continueraient à soutenir les Syriens dans la mise en place de nouvelles institutions politiques et civiques.

"Les défis sont importants, mais pas insurmontables", a-t-il déclaré. "L'année écoulée a montré qu'un changement significatif est possible lorsque les Syriens sont responsabilisés et soutenus dans la conduite de leur propre transition.

Il a ajouté que les communautés à travers le pays construisent de nouvelles structures de gouvernance et que "les femmes syriennes continuent de mener la charge pour leurs droits, la justice et l'égalité".

Bien que les besoins humanitaires restent "immenses", il a souligné les progrès réalisés dans la restauration des services, l'élargissement de l'accès à l'aide et la création de conditions propices au retour des réfugiés et des personnes déplacées.

Des efforts en matière de justice transitionnelle sont en cours, a-t-il ajouté, ainsi qu'un engagement civique plus large. M. Guterres a exhorté les gouvernements à soutenir fermement une "transition dirigée par les Syriens et prise en charge par les Syriens", précisant que le soutien doit inclure le respect de la souveraineté, la suppression des obstacles à la reconstruction et un financement solide pour le redressement humanitaire et économique.

"En ce jour anniversaire, nous sommes unis dans un même but : construire les fondations de la paix et de la prospérité et renouveler notre engagement en faveur d'une Syrie libre, souveraine, unie et ouverte à tous", a ajouté M. Guterres.