A l'AIEA, le conflit Israël-Hamas plane sur le dossier nucléaire iranien

Rafael Grossi, directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), prend la parole lors de la réunion du Conseil des gouverneurs de l'AIEA au siège de l'agence à Vienne, en Autriche, le 22 novembre 2023. (AFP)
Rafael Grossi, directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), prend la parole lors de la réunion du Conseil des gouverneurs de l'AIEA au siège de l'agence à Vienne, en Autriche, le 22 novembre 2023. (AFP)
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Publié le Vendredi 24 novembre 2023

A l'AIEA, le conflit Israël-Hamas plane sur le dossier nucléaire iranien

  • Si la diplomatie française assure gérer «les crises de manière séparée», elle souligne aussi la nécessité de «traiter les activités déstabilisatrices de l'Iran dans la région»
  • L'Iran dispose désormais de 128,3 kg d'uranium enrichi à 60%, selon le dernier rapport. Soit plus de trois fois la matière en théorie nécessaire pour fabriquer une bombe atomique, à un niveau de 90%

VIENNE: Exclusion d'inspecteurs de l'AIEA, caméras de surveillance toujours débranchées et bientôt de quoi fabriquer trois bombes: l'escalade nucléaire iranienne suscite de fortes inquiétudes, mais les puissances occidentales rechignent à agir par peur d'envenimer les tensions au Proche-Orient.

"Le tableau est sombre mais le fait est qu'en ce moment, personne n'a envie de provoquer une réaction de l'Iran dans le contexte de la guerre entre Israël et le Hamas palestinien", résume un diplomate de haut rang.

Au Conseil des gouverneurs de l'Agence de l'énergie atomique (AIEA), réuni cette semaine au siège viennois, les Etats-Unis et les pays européens du groupe E3 (France, Allemagne et Royaume-Uni) ont condamné le manque de coopération de Téhéran. Tout en s'abstenant de soumettre une résolution critique.

Pourtant "des limites sans précédent ont été franchies", selon les propos de l'ambassadrice américaine Laura Holgate.

Paris s'est aussi dit "particulièrement préoccupé par l'escalade nucléaire absolument injustifiée et injustifiable", par la voix de la porte-parole du Quai d'Orsay Anne-Claire Legendre.

«Coup dur»

L'accord international de 2015 encadrant les activités atomiques de Téhéran en échange d'une levée des sanctions internationales a de fait volé en éclats, à la suite du retrait de Washington en 2018 décidé par le président américain de l'époque, Donald Trump.

Son successeur Joe Biden a tenté de le ranimer via des discussions menées à Vienne mais elles sont au point mort depuis l'été 2022.

Sur le terrain, le constat de l'instance onusienne est sans appel.

L'Iran dispose désormais de 128,3 kg d'uranium enrichi à 60%, selon le dernier rapport. Soit plus de trois fois la matière en théorie nécessaire pour fabriquer une bombe atomique, à un niveau de 90%.

"C'est un volume conséquent, surtout si vous n'en avez aucune utilité", observe une source diplomatique, alors que l'Iran dément vouloir se doter de l'arme nucléaire.

La République islamique traîne par ailleurs des pieds pour réinstaller l'équipement de surveillance déconnecté l'an dernier. Et surtout, elle a récemment retiré l'accréditation d'un groupe d'inspecteurs à l'expertise précieuse.

Ils sont huit Français et Allemands à être affectés par cette décision, d'après le haut diplomate. Un neuvième, de nationalité russe, avait été banni plus tôt dans l'année pour avoir décelé une modification technique au niveau des cascades de centrifugeuses qui avait provoqué un pic d'enrichissement à 84%, un record.

Ces mesures ont porté "un coup dur" à notre travail, a encore déploré mercredi le directeur général de l'AIEA, Rafael Grossi, qui multiplie depuis des mois les efforts infructueux.

«Eviter un embrasement»

"Il faut être deux pour danser le tango", regrette-t-il en privé, raconte un des diplomates.

D'autant que face à "l'apathie" des puissances occidentales, l'Iran "se sent enhardi". Il bénéficie en outre de la "protection" de Moscou sur fond d'approfondissement des relations militaires entre les deux pays depuis l'invasion russe de l'Ukraine.

"La réticence du Conseil des gouverneurs de l'AIEA est compréhensible. C'est un cas où la géopolitique l'emporte sur les questions de non-prolifération", commente pour l'AFP Kelsey Davenport, experte de l'Arms Control Association.

La communauté internationale redoute une extension du conflit à la frontière entre Israël et le Liban, où les échanges de tirs sont quotidiens, voire au-delà dans la région. Avec à la manoeuvre des milices pro-Iran, ennemi numéro un d'Israël et soutien clé du groupe islamiste palestinien Hamas.

"Vu qu'on ne sait pas quel degré d'interconnexion Téhéran entretient avec ces groupes", les dirigeants occidentaux sont soucieux de "prendre le plus de précautions possibles", souligne Héloïse Fayet, chercheuse au Centre des études de sécurité de l'Institut français des relations internationales (Ifri).

Si la diplomatie française assure gérer "les crises de manière séparée", elle souligne aussi la nécessité de "traiter les activités déstabilisatrices de l'Iran dans la région". "Nous travaillons en ce sens pour éviter un embrasement régional", insiste Mme Legendre.

Pour Mme Davenport cependant, l'inaction observée à Vienne avant même le conflit actuel - la dernière résolution remonte à novembre 2022 - "envoie un mauvais message à Téhéran et à tous ceux qui aspirent à l'arme nucléaire".

"Devant la montée des tensions régionales et un Iran au seuil de la bombe", "les Etats-Unis ou Israël risquent de mal jauger les intentions nucléaires de Téhéran", dit-elle, appelant l'administration Biden à tout faire pour sortir de l'impasse.


Gaza: le Hamas rencontre les médiateurs au Caire

L'Egypte et le Qatar sont des médiateurs de longue date dans les pourparlers indirects avec Israël et le Hamas pour mettre un terme à la guerre à Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023. (AFP)
L'Egypte et le Qatar sont des médiateurs de longue date dans les pourparlers indirects avec Israël et le Hamas pour mettre un terme à la guerre à Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023. (AFP)
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  • Cette rencontre intervient au lendemain de frappes israéliennes sur Gaza, Israël ayant accusé le Hamas de violations du cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, ce que le mouvement islamiste a réfuté
  • La source a précisé que la rencontre avec les médiateurs au Caire devrait porter notamment sur "les dizaines de frappes aériennes israéliennes" ayant fait la veille "des dizaines de morts dans la bande de Gaza"

LE CAIRE: Une délégation du Hamas, conduite par Khalil al-Hayya, rencontre lundi au Caire des responsables égyptiens et qataris pour évoquer le cessez-le-feu fragile et l'après-guerre à Gaza, a indiqué à l'AFP une source proche des négociations.

Cette rencontre intervient au lendemain de frappes israéliennes sur Gaza, Israël ayant accusé le Hamas de violations du cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, ce que le mouvement islamiste a réfuté.

La source a précisé que la rencontre avec les médiateurs au Caire devrait porter notamment sur "les dizaines de frappes aériennes israéliennes" ayant fait la veille "des dizaines de morts dans la bande de Gaza".

L'Egypte et le Qatar sont des médiateurs de longue date dans les pourparlers indirects avec Israël et le Hamas pour mettre un terme à la guerre à Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023.

"Unifier" les mouvements 

Par ailleurs, "la délégation, aux côtés de plusieurs dirigeants du mouvement, tiendra des réunions avec des responsables égyptiens au sujet du dialogue interpalestinien que l'Egypte doit prochainement parrainer", a précisé la source familière des négociations.

L'Egypte a déjà accueilli plusieurs rencontres entre les mouvements politiques palestiniens, notamment les deux principaux groupes politiques palestiniens, le Hamas et le Fatah de Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne.

Ces deux mouvements sont opposés depuis des décennies.

"Ce dialogue vise à unifier le corps politique palestinien et à aborder les grandes questions, notamment l'avenir de la bande de Gaza et la formation d'un comité d'experts indépendants chargé de la gestion du territoire", a déclaré la source, faisant écho à la mise en place d'une autorité de transition formée de technocrates chapeautée par un comité dirigé par le président américain Donald Trump, et proposée par ce dernier.

Le Hamas a déjà fait savoir qu'il ne tenait pas à gouverner la bande de Gaza, ravagée par deux ans de guerre.

Plusieurs responsables politiques palestiniens ont également évoqué ces derniers mois la création d'un groupe de gestionnaires palestiniens, non affiliés, en charge d'administrer le territoire où le Hamas avait pris le pouvoir par la force en 2007.

Une autre source informée a affirmé que "les contacts et efforts des médiateurs ont permis hier soir de rétablir le calme et de réactiver le cessez-le-feu à Gaza", ajoutant que "les médiateurs continueront de suivre et de surveiller les violations israéliennes".


Gaza: la Défense civile annonce un nouveau bilan de 45 morts dans des frappes israéliennes dimanche

La Défense civile de la bande de Gaza a fait état d'au moins 45 personnes tuées dimanche au cours de frappes aériennes israéliennes dans le territoire palestinien, révisant à la hausse un précédent bilan de 33 morts. (AFP)
La Défense civile de la bande de Gaza a fait état d'au moins 45 personnes tuées dimanche au cours de frappes aériennes israéliennes dans le territoire palestinien, révisant à la hausse un précédent bilan de 33 morts. (AFP)
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  • Quatre hôpitaux du territoire palestinien ont confirmé ce bilan de 45 décès à l'AFP, disant avoir reçu morts et blessés
  • L'armée israélienne a déclaré avoir frappé dans la journée des dizaines de cibles du Hamas à travers le territoire palestinien, Israël et le Hamas s'accusant mutuellement de violer un cessez-le-feu parrainé par le président américain Donald Trump

GAZA: La Défense civile de la bande de Gaza a fait état d'au moins 45 personnes tuées dimanche au cours de frappes aériennes israéliennes dans le territoire palestinien, révisant à la hausse un précédent bilan de 33 morts.

L'armée israélienne a déclaré avoir frappé dans la journée des dizaines de cibles du Hamas à travers le territoire palestinien, Israël et le Hamas s'accusant mutuellement de violer un cessez-le-feu parrainé par le président américain Donald Trump, en vigueur depuis le 10 octobre.

"Au moins 45 personnes ont été tuées du fait de frappes aériennes israéliennes sur plusieurs endroits de la bande de Gaza", a indiqué Mahmoud Bassal, le porte-parole de la Défense civile, service de secours opérant sous l'autorité du Hamas.

Quatre hôpitaux du territoire palestinien ont confirmé ce bilan de 45 décès à l'AFP, disant avoir reçu morts et blessés.

L'hôpital Al-Awda à Nuseirat a recensé 24 morts, l'hôpital Al-Aqsa à Deir al-Balah 12, l'hôpital Nasser à Khan Younès cinq et celui d'Al-Shifa à Gaza-ville  quatre.

Des dizaines de blessés ont également été pris en charge par ces hôpitaux. L'armée israélienne a déclaré à l'AFP qu'elle vérifiait les informations concernant les frappes.

Parmi les victimes figure, selon M. Bassal, six personnes tuées quand une frappe israélienne a ciblé "un groupe de civils" dans la ville de Zuwaida (centre).

Il a également fait état de deux autres Gazaouis, dont un journaliste, tués dans la partie ouest de cette ville.

Deux frappes distinctes ont par ailleurs tué six personnes, dont des enfants, près de Nuseirat (centre) et blessé 13 autres, a-t-il indiqué.

Il a aussi fait état d'une femme et deux enfants tués dans une frappe de drone sur une tente abritant des personnes déplacées au nord de Khan Younès (sud).

Dans la soirée, l'armée israélienne a annoncé cesser ses frappes et reprendre l'application du cessez-le-feu.

Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

 


Mohammed ben Salmane et Emmanuel Macron discutent de l'évolution de la situation à Gaza

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  • Les entretiens ont porté sur la situation dans la bande de Gaza et sur les efforts en cours pour mettre fin au conflit et rétablir la stabilité au Moyen-Orient
  • Le prince Mohammed et M. Macron ont souligné l'importance d'alléger immédiatement les souffrances humanitaires du peuple palestinien et de parvenir à un retrait israélien complet

RIYADH : Le prince héritier Mohammed bin Salman a reçu dimanche un appel téléphonique du président français Emmanuel Macron, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

Les deux dirigeants ont passé en revue la coopération dans divers domaines et ont discuté des développements régionaux et internationaux d'intérêt commun.

Les entretiens ont porté sur la situation dans la bande de Gaza et sur les efforts en cours pour mettre fin au conflit et rétablir la stabilité au Moyen-Orient.

Le prince Mohammed et M. Macron ont souligné l'importance d'alléger immédiatement les souffrances humanitaires du peuple palestinien et de parvenir à un retrait israélien complet.

Ils ont également souligné la nécessité de prendre des mesures concrètes en vue d'une paix juste et durable fondée sur la solution des deux États.