Des Palestiniens détenus par Israël racontent privations et mauvais traitements

Les forces de sécurité israéliennes montent la garde devant la prison militaire d'Ofer, entre Ramallah et Baytunia, dans la ville de Cisjordanie occupée, le 25 novembre 2023 (Photo, AFP).
Les forces de sécurité israéliennes montent la garde devant la prison militaire d'Ofer, entre Ramallah et Baytunia, dans la ville de Cisjordanie occupée, le 25 novembre 2023 (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 06 décembre 2023

Des Palestiniens détenus par Israël racontent privations et mauvais traitements

  • Des détenus palestiniens racontent un quotidien de privations et des conditions de détention qui se sont radicalement dégradées après l'attaque inédite du mouvement islamiste le 7 octobre
  • Depuis cette date, les autorités pénitentiaires israéliennes «ont tout retiré» aux détenus palestiniens

RAMALLAH: Sortis des prisons israéliennes à la faveur d'un accord d'échange avec le Hamas, des détenus palestiniens racontent un quotidien de privations et des conditions de détention qui se sont radicalement dégradées après l'attaque inédite du mouvement islamiste le 7 octobre.

Ce jour-là, le Hamas a tué 1.200 personnes en Israël, en majorité des civils, selon les autorités. L'armée a lancé des frappes de représailles sur la bande de Gaza tenue par le Hamas, qui ont fait plus de 16.200 morts, pour 70% des femmes et des mineurs, selon le gouvernement du Hamas.

Depuis cette date, les autorités pénitentiaires israéliennes "ont tout retiré" aux détenus palestiniens, a affirmé Rouba Assi, 23 ans dont plus de deux en prison, au moment de sa libération il y a une semaine dans le cadre d'échange de prisonniers palestiniens contre la libération d'otages emmenés par le Hamas à Gaza durant l'attaque.

Le 7 octobre, les autorités pénitentiaires ont annoncé dans un communiqué "l'état d'urgence en prison": pour les détenus palestiniens, plus de sortie de cellule -donc de parloirs-, plus d'achat à la cantine ni d'alimentation des prises électriques dans les cellules, et des fouilles surprises plus fréquentes.

A même le sol

Le Club des prisonniers, une ONG palestinienne qui recense les détenus de Cisjordanie et de Jérusalem-Est occupées par Israël, assure que les visites de délégués du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ont également cessé. Le CICR ne commente pas.

Rouba Assi peut comparer. Entre 2020 et 2022, elle a été incarcérée 21 mois pour "appartenance à une organisation illégale", son mouvement étudiant marxiste qui appelle à "la libération de la Palestine", et "jets de pierres".

Puis, elle est sortie. En pleine guerre à Gaza, elle a été de nouveau arrêtée, aux côtés de plus de 3.580 autres Palestiniens selon le Club des prisonniers. Les prisons israéliennes comptent aujourd'hui quelque 7.800 détenus palestiniens, d'après la même source.

Là, dit-elle, elle a trouvé des conditions de détention bien différentes: "dans la prison de Damon", dans le nord-est d'Israël, "on dormait à sept dans des cellules prévues pour trois détenues, à même le sol, sans matelas et sans couverture malgré le froid et ce, peu importe l'âge".

«Cimetière»

"On se couchait souvent sans avoir mangé et les portions qu'on recevait étaient maigres", poursuit Rouba Assi. "Tous les acquis des années de lutte des prisonniers palestiniens ont été effacés d'un coup".

Amnesty International affirme avoir "des témoignages et des preuves vidéos de tortures et de mauvais traitements de détenus palestiniens violemment passés à tabac, humiliés, notamment forcés à garder la tête baissée, à s'agenouiller au sol pour l'appel et à chanter des chants israéliens dans d'horribles conditions de détention".

L'AFP a pu visionner ces images.

Ramzi Abbassi, militant palestinien de 36 ans de Jérusalem-Est, très suivi sur les réseaux sociaux, a aussi été libéré en échange d'otages israéliens, de la prison Ketziot, dans le désert du Néguev, réputée pour être la plus dure.

"Ils nous tabassaient matin et soir", accuse-t-il. "Des prisonniers ont eu des jambes ou des bras cassés après le 7 octobre et ils n'ont reçu aucun soin."

Cette prison, dit-il à l'AFP, est "un cimetière pour les vivants, les détenus y vivent sans nourriture, sans habits propres, ils sont laissés à l'abandon".

Contactées à plusieurs reprises par l'AFP, les autorités pénitentiaires n'ont pas souhaité commenter ces accusations.

Amnesty évoque aussi des images largement diffusées en ligne de "soldats israéliens frappant et humiliant des Palestiniens détenus, les yeux bandés, déshabillés et les poignets entravés".

«Vengeance»

Selon le témoignage d'un Palestinien de Jérusalem-Est recueilli par l'ONG, des détenus étaient contraints "de faire l'éloge d'Israël et d'insulter le Hamas". "Mais même quand un détenu le faisait, ils n'arrêtaient pas de le frapper".

Dans une lettre sortie de prison par l'un des Palestiniens libérés récemment, adressée notamment au CICR et rendue publique, des prisonniers dénoncent "une vengeance" des autorités israéliennes.

Cette missive rappelle que six prisonniers sont morts dans des prisons israéliennes depuis le 7 octobre.

L'administration pénitentiaire répond qu'ils ont été autopsiés et sont morts pour des raisons de santé indépendantes des conditions de détention.

La question des prisonniers, lancinante dans les Territoires occupés, est revenue sur le devant de la scène avec la prise d'environ 240 otages par le Hamas le 7 octobre.

Le Hamas et ses alliés, surtout le Djihad islamique, qui comptent des centaines de membres dans les prisons israéliennes, ne cessent de répéter que les otages -civils et militaires israéliens- serviront de monnaie d'échange pour "vider" les prisons israéliennes des détenus palestiniens.

En une semaine de trêve, du 24 novembre au 1er décembre, 240 prisonniers palestiniens sont sortis en échange de 80 otages israéliens. Mais, note le Club des prisonniers, dans le même temps, des centaines d'autres Palestiniens sont entrés en prison.


Syrie: Chareh lance un appel à l'unité un an après la chute d'Assad

Le président syrien Ahmed al-Chareh a exhorté lundi, un an après la chute de Bachar al-Assad, son peuple à s'unir pour rebâtir un pays ravagé par des années de guerre civile. (AFP)
Le président syrien Ahmed al-Chareh a exhorté lundi, un an après la chute de Bachar al-Assad, son peuple à s'unir pour rebâtir un pays ravagé par des années de guerre civile. (AFP)
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  • Après les prières du matin à mosquée des Omeyyades, il a salué "les sacrifices et l'héroïsme des combattants" ayant renversé il y a un an l'ex-dictateur Assad, selon un communiqué de la présidence
  • Ahmed al-Chareh, ancien jihadiste de 43 ans, était devenu dans la foulée chef d'Etat par intérim après 14 ans de guerre civile et plus de cinq décennies d'un régime familial à la main de fer

DAMAS: Le président syrien Ahmed al-Chareh a exhorté lundi, un an après la chute de Bachar al-Assad, son peuple à s'unir pour rebâtir un pays ravagé par des années de guerre civile.

"La phase actuelle exige que tous les citoyens unissent leurs efforts pour bâtir une Syrie forte, consolider sa stabilité, préserver sa souveraineté", a déclaré le dirigeant, endossant pour l'occasion l'uniforme militaire comme le 8 décembre 2024, quand il était entré dans Damas à la tête de forces rebelles.

Après les prières du matin à mosquée des Omeyyades, il a salué "les sacrifices et l'héroïsme des combattants" ayant renversé il y a un an l'ex-dictateur Assad, selon un communiqué de la présidence.

Ahmed al-Chareh, ancien jihadiste de 43 ans, était devenu dans la foulée chef d'Etat par intérim après 14 ans de guerre civile et plus de cinq décennies d'un régime familial à la main de fer.

Il a rompu avec son passé jihadiste et réhabilité la Syrie sur la scène internationale, obtenant la levée des sanctions internationales, mais reste confronté à d'importantes défis sécuritaires.

De sanglantes violences intercommunautaires dans les régions des minorités druze et alaouite, et de nombreuses opérations militaires du voisin israélien ont secoué la fragile transition.

"C'est l'occasion de reconstruire des communautés brisées et de panser des divisions profondes", a souligné dans un communiqué le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres.

"L'occasion de forger une nation où chaque Syrien, indépendamment de son appartenance ethnique, de sa religion, de son sexe ou de son affiliation politique, peut vivre en sécurité, dans l'égalité et dans la dignité".

Les célébrations de l'offensive éclair, qui ont débuté fin novembre, doivent culminer lundi avec une parade militaire et un discours du président syrien.

Elles sont toutefois marquées par le boycott lancé samedi par un chef spirituel alaouite, Ghazal Ghazal. Depuis la destitution d'Assad, lui-même alaouite, cette minorité est la cible d'attaques.

L'administration kurde, qui contrôle une grande partie du nord et du nord-est de la Syrie, a également annoncé l'interdiction de rassemblements et événements publics dimanche et lundi "en raison de la situation sécuritaire actuelle et de l'activité accrue des cellules terroristes".

 


Liban: l'armée annonce six arrestations après une attaque visant des Casques bleus

Israël, dont l'accord de trêve prévoit pourtant le retrait total du pays voisin, maintient de son côté dans la zone cinq positions militaires dans la région. La Finul a à plusieurs reprises accusé les troupes israéliennes de tirs à son encontre. (AFP)
Israël, dont l'accord de trêve prévoit pourtant le retrait total du pays voisin, maintient de son côté dans la zone cinq positions militaires dans la région. La Finul a à plusieurs reprises accusé les troupes israéliennes de tirs à son encontre. (AFP)
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  • L'armée a souligné dans un communiqué qu'elle ne tolérerait aucune attaque contre la Finul mettant en avant son "rôle essentiel" dans le sud du Liban
  • "Les attaques contre les Casques bleus sont inacceptables", avait de fustigé vendredi la Finul, rappelant "aux autorités libanaises leur obligation d'assurer" sa sécurité

BEYROUTH: Six personnes ont été arrêtées au Liban, soupçonnées d'être impliquées dans une attaque d'une patrouille de Casques bleus jeudi dans le sud du pays, qui n'a pas fait de blessés, a annoncé l'armée libanaise samedi.

L'incident s'était produit jeudi soir, selon un communiqué de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) quand "des Casques bleus en patrouille ont été approchés par six hommes sur trois mobylettes près de Bint Jbeil". "Un homme a tiré environ trois coups de feu sur l'arrière du véhicule. Personne n'a été blessé".

L'armée a souligné dans un communiqué qu'elle ne tolérerait aucune attaque contre la Finul mettant en avant son "rôle essentiel" dans le sud du Liban, où, déployée depuis 1978, elle est désormais chargée de veiller au respect du cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la dernière guerre entre Israël et le Hezbollah pro-iranien.

"Les attaques contre les Casques bleus sont inacceptables", avait de fustigé vendredi la Finul, rappelant "aux autorités libanaises leur obligation d'assurer" sa sécurité.

Bastion du Hezbollah, le sud du Liban subit ces dernières semaines des bombardements réguliers de la part d'Israël, qui assure viser des cibles du mouvement chiite et l'accuse d'y reconstituer ses infrastructures, en violation de l'accord de cessez-le-feu.

Israël, dont l'accord de trêve prévoit pourtant le retrait total du pays voisin, maintient de son côté dans la zone cinq positions militaires dans la région. La Finul a à plusieurs reprises accusé les troupes israéliennes de tirs à son encontre.

Mercredi, le quartier général de la Finul a accueilli à Naqoura, près de la frontière avec Israël, de premières discussions directes, depuis des décennies, entre des responsables israélien et libanais, en présence de l'émissaire américaine pour le Proche-Orient Morgan Ortagus.

Le président libanais, Joseph Aoun, a annoncé de prochaines discussions à partir du 19 décembre, qualifiant de "positive" la réunion tenue dans le cadre du comité de surveillance du cessez-le-feu, disant que l'objectif était d'éloigner "le spectre d'une deuxième guerre" au Liban.


Les efforts pour panser les «profondes divisions» de la Syrie sont ardus mais «pas insurmontables», déclare Guterres

Des Syriens font la queue dans les rues de Damas en attendant un défilé de la nouvelle armée syrienne, pour marquer le premier anniversaire de l'éviction de Bashar Assad, le 8 décembre 2025. (AP)
Des Syriens font la queue dans les rues de Damas en attendant un défilé de la nouvelle armée syrienne, pour marquer le premier anniversaire de l'éviction de Bashar Assad, le 8 décembre 2025. (AP)
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  • Antonio Guterres salue "la fin d'un système de répression vieux de plusieurs décennies", "la résilience et le courage" des Syriens
  • La transition offre l'opportunité de "forger une nation où chaque Syrien peut vivre en sécurité, sur un pied d'égalité et dans la dignité"

NEW YORK : Les efforts pour guérir les "profondes divisions" de la Syrie seront longs et ardus mais les défis à venir ne sont "pas insurmontables", a déclaré dimanche le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, à l'occasion du premier anniversaire de la chute du régime Assad.

Une offensive surprise menée par une coalition de forces rebelles dirigées par Hayat Tahrir al-Sham et des milices alliées a rapidement balayé les zones tenues par le régime à la fin du mois de novembre 2024. En l'espace de quelques jours, elles se sont emparées de villes clés et ont finalement capturé la capitale Damas.

Le 8 décembre de l'année dernière, alors que les défenses du régime s'effondraient presque du jour au lendemain, le président de l'époque, Bachar Assad, a fui la République arabe syrienne, mettant fin à plus de 50 ans de règne brutal de sa famille.

"Aujourd'hui, un an s'est écoulé depuis la chute du gouvernement Assad et la fin d'un système de répression vieux de plusieurs décennies", a déclaré M. Guterres, saluant la "résilience et le courage" des Syriens "qui n'ont jamais cessé de nourrir l'espoir en dépit d'épreuves inimaginables".

Il a ajouté que cet anniversaire était à la fois un moment de réflexion sur les sacrifices consentis en vue d'un "changement historique" et un rappel du chemin difficile qui reste à parcourir pour le pays.

"Ce qui nous attend est bien plus qu'une transition politique ; c'est la chance de reconstruire des communautés brisées et de guérir de profondes divisions", a-t-il déclaré, ajoutant que la transition offre l'occasion de "forger une nation où chaque Syrien - indépendamment de son appartenance ethnique, de sa religion, de son sexe ou de son affiliation politique - peut vivre en sécurité, sur un pied d'égalité et dans la dignité".

M. Guterres a souligné que les Nations Unies continueraient à soutenir les Syriens dans la mise en place de nouvelles institutions politiques et civiques.

"Les défis sont importants, mais pas insurmontables", a-t-il déclaré. "L'année écoulée a montré qu'un changement significatif est possible lorsque les Syriens sont responsabilisés et soutenus dans la conduite de leur propre transition.

Il a ajouté que les communautés à travers le pays construisent de nouvelles structures de gouvernance et que "les femmes syriennes continuent de mener la charge pour leurs droits, la justice et l'égalité".

Bien que les besoins humanitaires restent "immenses", il a souligné les progrès réalisés dans la restauration des services, l'élargissement de l'accès à l'aide et la création de conditions propices au retour des réfugiés et des personnes déplacées.

Des efforts en matière de justice transitionnelle sont en cours, a-t-il ajouté, ainsi qu'un engagement civique plus large. M. Guterres a exhorté les gouvernements à soutenir fermement une "transition dirigée par les Syriens et prise en charge par les Syriens", précisant que le soutien doit inclure le respect de la souveraineté, la suppression des obstacles à la reconstruction et un financement solide pour le redressement humanitaire et économique.

"En ce jour anniversaire, nous sommes unis dans un même but : construire les fondations de la paix et de la prospérité et renouveler notre engagement en faveur d'une Syrie libre, souveraine, unie et ouverte à tous", a ajouté M. Guterres.