Robert Badinter, père de l'abolition de la peine de mort, s'est éteint

L'ancien ministre français de la Justice Robert Badinter prononce un discours lors de la commémoration du 40e anniversaire de l'abolition de la peine de mort au Panthéon, à Paris, le 9 octobre 2021. (AFP)
L'ancien ministre français de la Justice Robert Badinter prononce un discours lors de la commémoration du 40e anniversaire de l'abolition de la peine de mort au Panthéon, à Paris, le 9 octobre 2021. (AFP)
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Publié le Samedi 10 février 2024

Robert Badinter, père de l'abolition de la peine de mort, s'est éteint

  • La disparition de Robert Badinter , qui a aussi présidé le Conseil constitutionnel, annoncée à l'AFP par sa collaboratrice Aude Napoli, a suscité de nombreux hommages
  • Ministre de la Justice du président socialiste François Mitterrand (1981-1986), Robert Badinter porta la loi du 9 octobre 1981 qui abolit la peine de mort dans une France alors majoritairement en faveur de ce châtiment suprême

PARIS: Un hommage national sera rendu à l'ancien ministre de la Justice et avocat Robert Badinter, père de l'abolition de la peine de mort en France en 1981, décédé dans la nuit de jeudi à vendredi à l'âge de 95 ans.

La disparition de Robert Badinter , qui a aussi présidé le Conseil constitutionnel, annoncée à l'AFP par sa collaboratrice Aude Napoli, a suscité de nombreux hommages.

Saluant sur X "une figure du siècle, une conscience républicaine, l'esprit français", Emmanuel Macron a annoncé, en marge d'un déplacement à Bordeaux, qu'un "hommage national" lui serait rendu.

"Il aura consacré chaque seconde de sa vie à se battre pour ce qui était juste, à se battre pour les libertés fondamentales. L'abolition de la peine de mort sera à jamais son legs pour la France", a de son côté écrit sur X le Premier ministre Gabriel Attal.

Son lointain successeur, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, ancien avocat, a évoqué un "garde des Sceaux visionnaire" qui "laisse un vide à la hauteur de son héritage: incommensurable".

A son initiative, il a ouvert vendredi soir, jusqu'à dimanche, les portes de la Chancellerie aux anonymes qui souhaitaient rendre hommage à Robert Badinter en leur ouvrant un recueil de condoléances.

"C'est grâce à lui que la justice ne tue plus en France", a rappelé l'une de ces visiteurs du soir, Axelle Tessandier, autrice. "C'est un repère, une de ces figures rares qui, comme Simone Veil, ont marqué l'histoire du siècle".

Ministre de la Justice du président socialiste François Mitterrand (1981-1986), Robert Badinter porta la loi du 9 octobre 1981 qui abolit la peine de mort dans une France alors majoritairement en faveur de ce châtiment suprême.

Il s'investit par la suite, jusqu'à son "dernier souffle de vie", pour l'abolition universelle de la peine capitale.

«Juste entre les justes»

Il naît à Paris le 30 mars 1928 dans une famille juive émigrée de Bessarabie (l'actuelle Moldavie). Son père, arrêté sous ses yeux pendant la Seconde Guerre mondiale à Lyon, meurt en déportation en Pologne.

Après des études de lettres et de droit et un diplôme de l'université Columbia, il devient avocat au barreau de Paris et mène parallèlement une carrière d'enseignant universitaire.

Cofondateur avec Jean-Denis Bredin d'un prestigieux cabinet d'avocats, il défend des personnalités, des grands noms de la presse ou de l'entreprise, et plaide occasionnellement aux assises.

Son combat contre la peine de mort trouve son origine au matin du 28 novembre 1972: un de ses clients, Roger Bontems, complice d'une prise d'otages meurtrière, vient d'être guillotiné.

"Je me suis juré, en quittant la cour de la Santé ce matin-là à l'aube, que toute ma vie je combattrais la peine de mort", avait-il déclaré à l'AFP en 2021.

En 1977, il évite la peine capitale au meurtrier d'enfant Patrick Henry, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Après cela, cinq autres hommes échappent grâce à lui à l'échafaud. Ce qui lui vaudra d'être détesté pendant longtemps, pour son supposé laxisme à l'égard des criminels.

Cet homme à la fine silhouette et aux épais sourcils noirs était marié depuis 1966 à la philosophe Elisabeth Badinter, née Bleustein-Blanchet, avec qui il a eu trois enfants.

Après son départ du gouvernement, il a présidé pendant neuf ans le Conseil constitutionnel (1986-1995).

Sénateur socialiste de 1995 à 2011, il a la satisfaction de voir l'abolition de la peine de mort inscrite dans la Constitution en 2007.

Toujours très actif, il planche sur une réforme de l'ONU dans les années 2000 et sur la réforme du code du travail pendant le quinquennat de François Hollande.

Le président du Conseil constitutionnel Laurent Fabius lui a rendu hommage en évoquant auprès de l'AFP "un juste entre les justes", qui a fait "progresser le droit et l'humanisme".

Un être «lumineux»

Le leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon a pour sa part salué la "force de conviction sans pareille" d'un être "tout simplement lumineux". L'ancien président socialiste François Hollande a lui salué le "message" de "dignité humaine" de Robert Badinter.

Marine Le Pen a de son côté évoqué "une figure marquante du paysage intellectuel et juridique", tout en rappelant qu'"on pouvait ne pas partager tous les combats" de l'ancien garde des Sceaux.

De nombreux avocats, jeunes et plus âgés, ont dit avoir été inspirés par lui.

"J'ai beaucoup lu pour préparer ma plaidoirie, et ses livres +L'exécution+ et +L'abolition+ en ont fait partie", a rappelé Me Olivia Ronen.

Robert Badinter est mort le jour anniversaire de la rafle de la rue Sainte-Catherine à Lyon, le 9 février 1943, au cours de laquelle son père avait été arrêté.

"Cette histoire singulière a fait de lui un grand homme, un +mensch+ (un homme de bien, NDLR), lui qui a dédié sa vie pour celle de tous les autres, pour les droits de l'homme et les libertés", a affirmé le grand rabbin de France Haïm Korsia.


Laurent Wauquiez dépose une proposition de loi pour interdire le voile aux mineures

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  • Sa proposition vise à modifier la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public
  • Il apparaît toutefois peu probable que ce texte soit examiné avant deux mois : la journée annuelle réservée aux propositions du groupe LR n’est prévue que le 22 janvier

PARIS: Le chef des députés Les Républicains Laurent Wauquiez a déposé lundi une proposition de loi pour interdire aux mineures de porter le voile dans l'espace public, mais son examen rapide semble peu probable et sa constitutionnalité mise en doute par des juristes.

M. Wauquiez veut interdire "à tout parent d'imposer à sa fille mineure ou de l'autoriser à porter, dans l'espace public, une tenue destinée à dissimuler sa chevelure", selon l'article unique de sa proposition de loi.

Il s'appuie notamment sur un rapport sur les Frères musulmans commandé par le gouvernement et publié en mai dernier, relatant l'augmentation "massive et visible du nombre de petites filles portant le voile".

Il estime que "le voilement de jeunes filles" heurte les principes républicains "les plus fondamentaux", tels que la "protection de l'enfant", "la liberté de conscience" et "l'égalité entre les hommes et les femmes".

Sa proposition vise à modifier la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public.

Il apparaît toutefois peu probable que ce texte soit examiné avant deux mois : la journée annuelle réservée aux propositions du groupe LR n’est prévue que le 22 janvier.

En outre, des professeurs de droit public interrogés par l'AFP émettent de sérieuses réserves quant à la conformité avec la Constitution de cette proposition déjà formulée, tout en la circonscrivant aux moins de 15 ans, par le patron des députés macronistes Gabriel Attal en mai - même si celui-ci n'avait pas déposé de texte.

Pour la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina, elle n'a "aucune chance d'être conforme", rappelant que la loi sur la dissimulation du visage que son texte vient modifier a un motif de "sécurité à l'ordre public" et ne "vise aucune religion en particulier".

Or, M. Wauquiez cible très clairement le voile islamique dans l'espace public, contrevenant "au principe de liberté de religion", ajoute l'enseignante.

Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’Université de Lille, se dit également "très réservé".

Bien que le texte se heurte au principe de liberté religieuse, Laurent Wauquiez justifie sa démarche par la "préservation des droits de l’enfant", ce qui est "assez habile", reconnaît-il, mais insuffisant pour garantir sa conformité constitutionnelle.

Assimiler le port du voile par une mineure à "une forme d’asservissement" reste juridiquement fragile. "Incontestablement, une fillette de 9 ans pourrait le faire par mimétisme ou sous l'effet d’une instrumentalisation", observe-t-il. "Mais une adolescente de 16 ans peut davantage le porter par conviction personnelle."

Il rappelle par ailleurs que l’interdiction de dissimulation du visage est justifiée par des raisons de sécurité, avec la nécessité de pouvoir "identifier les personnes", un raisonnement difficilement transposable au fait de se couvrir la chevelure.


Quatre associations musulmanes portent plainte contre un sondage Ifop

Le recteur de la grande mosquée de Lyon, Kamel Kabtane, pose dans la grande mosquée de Lyon le 30 septembre 2025. (AFP)
Le recteur de la grande mosquée de Lyon, Kamel Kabtane, pose dans la grande mosquée de Lyon le 30 septembre 2025. (AFP)
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  • Les Conseils départementaux du culte musulman (CDCM) du Loiret, de l'Aube, des Bouches-du-Rhône et de Seine-et-Marne ont déposé plainte contre X auprès du tribunal judiciaire de Paris après la publication le 18 novembre du sondage Ifop
  • Les CDCM sont l'échelon départemental du Conseil français du culte musulman (CFCM), ex-instance de représentation de l'islam auprès des pouvoirs publics, tombée en disgrâce en 2021

PARIS: Quatre associations du culte musulman ont porté plainte lundi pour dénoncer le manque d'objectivité supposé d'un sondage Ifop sur le rapport des fidèles à l'islam, ont annoncé leurs avocats à l'AFP.

Les Conseils départementaux du culte musulman (CDCM) du Loiret, de l'Aube, des Bouches-du-Rhône et de Seine-et-Marne ont déposé plainte contre X auprès du tribunal judiciaire de Paris après la publication le 18 novembre du sondage Ifop "Etat des lieux du rapport à l'islam et à l'islamisme des musulmans de France".

Les CDCM sont l'échelon départemental du Conseil français du culte musulman (CFCM), ex-instance de représentation de l'islam auprès des pouvoirs publics, tombée en disgrâce en 2021.

Ce sondage "viole le principe d'objectivité posé par la loi du 19 juillet 1977 relative à la publication et la diffusion des sondages d'opinion", se "fonde sur des questions orientées" et se "focalise sur des résultats minoritaires mis en avant à des fins polémiques", accusent les avocats Mes Raphaël Kempf et Romain Ruiz, dans un communiqué.

Selon eux, le sondage distille "le poison de la haine dans l'espace public", renforçant "les amalgames".

Contacté par téléphone, François Kraus, directeur du pôle politique/actualités de l'Ifop, a indiqué qu'il répondrait à l'AFP par écrit, ce qu'il n'avait pas fait dans l'après-midi.

Le CFCM avait déjà dans un communiqué vendredi déploré "une nouvelle mise à l’index des citoyens français de confession musulmane et de leurs pratiques religieuses", avec des analyses et données "contestables".

L'enquête Ifop, basée sur un échantillon de 1.005 personnes de religion musulmane, a été commandée par le média confidentiel "Ecran de veille", qui se présente comme "le mensuel pour résister aux fanatismes".

L'attention médiatique et politique s'est beaucoup focalisée sur le sous-échantillon des 15-24 ans, constitué de 291 personnes, et révélant une forte pratique (87% se considèrent religieux, 67% disent prier "au moins une fois par jour", 83% font le ramadan)

François Kraus écrit dans sa conclusion sur le site de l'Ifop que "cette enquête dessine très nettement le portrait d'une population musulmane traversée par un processus de réislamisation, structurée autour de normes religieuses rigoristes et tentée de plus en plus par un projet politique islamiste".

Le sondage a provoqué de vives réactions, l'extrême droite y voyant un signe d'"islamisation", tandis que des représentants de la communauté musulmane ont regretté "une stigmatisation".

"A mal poser les questions, on finit toujours par fabriquer les peurs qu’on prétend mesurer", affirmait dans son billet hebdomadaire le recteur de la Grande mosquée de Paris Chems-eddine Hafiz.

Le politiste Haouès Seniguer qualifie pour sa part de raccourci "grossier et réducteur" l'idée, sous-jacente selon lui au sondage, qu'une observance stricte de l'islam soit la porte d'entrée mécanique vers l'islamisme.


Macron invité de RTL mardi matin

 Emmanuel Macron, en déplacement en Afrique en ce début de semaine, sera l'invité de RTL mardi matin à 07h35, a annoncé la radio lundi dans un communiqué. (AFP)
Emmanuel Macron, en déplacement en Afrique en ce début de semaine, sera l'invité de RTL mardi matin à 07h35, a annoncé la radio lundi dans un communiqué. (AFP)
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  • Après sa participation au G20 ce week-end à Johannesburg et une visite au Gabon, le chef de l'Etat Français a décollé lundi pour l'Angola, où il doit participer au sommet Union européenne-Union africaine
  • Emmanuel Macron se rendra notamment jeudi à Varces (Isère), sur un site de l'armée de terre, où il pourrait annoncer l'instauration d'un service militaire volontaire

PARIS: Emmanuel Macron, en déplacement en Afrique en ce début de semaine, sera l'invité de RTL mardi matin à 07h35, a annoncé la radio lundi dans un communiqué.

Le président de la République sera notamment interrogé sur la situation internationale, alors qu'une nouvelle réunion de la "coalition des volontaires" au soutien de l'Ukraine est prévue mardi en visioconférence.

Après sa participation au G20 ce week-end à Johannesburg et une visite au Gabon, le chef de l'Etat a décollé lundi pour l'Angola, où il doit participer au sommet Union européenne-Union africaine.

M. Macron sera aussi interrogé sur "les menaces qui pèsent sur la France", selon le communiqué de RTL.

Emmanuel Macron se rendra notamment jeudi à Varces (Isère), sur un site de l'armée de terre, où il pourrait annoncer l'instauration d'un service militaire volontaire.