Frappes israéliennes sur l'Iran: des dégâts limités et un message fort

Un taxi passe devant un panneau publicitaire représentant des missiles et des drones à Téhéran le 20 avril 2024, un jour après que les médias d'État iraniens ont rapporté des explosions dans la province centrale d'Ispahan. (Photo par ATTA KENARE / AFP)
Un taxi passe devant un panneau publicitaire représentant des missiles et des drones à Téhéran le 20 avril 2024, un jour après que les médias d'État iraniens ont rapporté des explosions dans la province centrale d'Ispahan. (Photo par ATTA KENARE / AFP)
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Publié le Mardi 23 avril 2024

Frappes israéliennes sur l'Iran: des dégâts limités et un message fort

  • «Le choix de la base aérienne près d'Ispahan était significatif car elle constitue la principale source de défense aérienne des installations nucléaires de la province», explique Arash Azizi
  • Si des drones quadricoptères ont été utilisés, ils «ont probablement été lancés depuis l'intérieur de l'Iran», ce qui soulignerait «la présence du Mossad sur le terrain et combien l'Iran est son terrain de jeu», dit une experte

PARIS: L'attaque de représailles sur l'Iran attribuée à Israël vendredi est restée limitée en termes de dégâts infligés, maintenant la tension à un niveau maîtrisé, mais elle a aussi démontré la capacité d'Israël à frapper des sites stratégiques de la République islamique.

Les deux pays se mènent depuis des décennies une guerre de l'ombre, marquée d'un côté par des opérations clandestines israéliennes, parfois même depuis le sol iranien, et de l'autre par des opérations de groupes armés pro-iraniens, dont le Hamas à Gaza et le Hezbollah libanais.

Et le brusque regain de tensions bilatérales fait courir le risque d'un conflit ouvert qui menacerait l'équilibre fragile de toute la région.

Dans le fracas de l'après 7 octobre, date de l'attaque du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël, le premier acte de la crise bilatérale actuelle date du 1er avril, avec une frappe sur le consulat iranien à Damas qui a fait 16 morts. Parmi eux figuraient sept membres du corps des Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de Téhéran par laquelle le régime pilote son rayonnement régional.

Téhéran a répondu le 13 avril avec une attaque de quelque 350 drones et missiles, quasiment tous interceptés par Israël et ses alliés.

Un message pour l'Iran 

Selon le New York Times, citant des sources en Israël et en Iran, la réponse d'Israël vendredi a ciblé le radar d'un système de défense russe S-300 d'une base aérienne de la province d'Ispahan (centre), non loin de l'usine d'enrichissement d'uranium de Natanz.

Au moins un missile a été tiré depuis un avion de chasse hors de l'espace aérien iranien, en même temps semble-t-il qu'une attaque de petits drones quadricoptères (à quatre hélices), possiblement actionnés cette fois-ci depuis l'Iran, avec pour mission de semer la confusion dans la défense iranienne.

Israël n'a rien revendiqué mais sa responsabilité semble ne souffrir aucun doute. "L'objectif de l'opération était précisément de rappeler à l'Iran ce dont Israël pourrait être capable", explique à l'AFP Arash Azizi, de l'université de Clemson, aux Etats-Unis.

"Le choix de la base aérienne près d'Ispahan était significatif car elle constitue la principale source de défense aérienne des installations nucléaires de la province".

De fait, les services secrets israéliens sont depuis longtemps soupçonnés d'opérations de sabotage en Iran.

Selon les médias américains, c'est au Mossad qu'est attribué l'assassinat en 2020 du scientifique nucléaire iranien Mohsen Fakhrizadeh par une mitrailleuse assemblée près de son domicile, puis actionnée à distance.

Des agents israéliens ont même capturé et interrogé des membres des Gardiens de la Révolution à l'intérieur même de l'Iran, selon certains médias, dont la chaîne de télévision Iran International, basée à Londres.

D'autres attaques de drones israéliens ont été évoquées après des explosions mystérieuses sur des sites sensibles ces dernières années, mais elles n'ont jamais été formellement confirmées.

«Le Rubicon franchi»

Les responsables iraniens ont raillé la dernière attaque israélienne, le ministre des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian se moquant sur NBC des "jouets" de son adversaire.

Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a pour sa part salué les "succès" de l'attaque du 13 avril, qui ont selon lui illustré la "grandeur" de l'Iran sur la scène internationale.

Mais Alexandre Grinberg, expert de l'Iran à l'Institut de Jérusalem pour la stratégie et la sécurité (JISS), estime que le choix d'Israël et la cible elle-même montrent que le Mossad est bien présent en territoire ennemi.

"Le message d'Israël, c'est de dire +nous pouvons frapper n'importe où en Iran+, vu qu'Ispahan est situé dans le centre de l'Iran, relativement loin, et qu'Israël sait exactement où elle peut frapper".

Quant à l'absence de confirmation de la frappe par Téhéran, elle semble logique. "Dès que vous reconnaissez l'étendue réelle des dégâts, vous admettez le pouvoir de l'ennemi".

Holly Dagres, experte de la région à l'Atlantic Council, estime elle aussi que si des drones quadricoptères ont été utilisés, ils "ont probablement été lancés depuis l'intérieur de l'Iran", ce qui soulignerait "encore une fois la présence du Mossad sur le terrain et combien l'Iran est son terrain de jeu".

L'escalade des dernières semaines semble marquer une pause. Mais elle peut repartir de plus belle à la moindre étincelle, notamment si Israël met à exécution ses menaces d'offensive sur la ville de Rafah, à l'extrême-sud de la bande de Gaza.

"A certains égards, nous sommes revenus à la situation d'avant le 1er avril, le royaume de la zone grise, des opérations non-attribuables, du sabotage", estime Arash Azizi.

"Cela convient à l'Iran comme à Israël. Mais le Rubicon franchi le 1er Avril a fait monter les enchères".


Gaza: la Défense civile annonce au moins 20 morts dont des enfants dans deux frappes aériennes à Khan Younès

Une première frappe a visé une maison familiale du quartier d'al-Manara, dans le sud-est de la ville, faisant 14 morts dont neuf enfants de moins de seize ans, selon le porte-parole de l'organisme, Mahmoud Bassal. (AFP)
Une première frappe a visé une maison familiale du quartier d'al-Manara, dans le sud-est de la ville, faisant 14 morts dont neuf enfants de moins de seize ans, selon le porte-parole de l'organisme, Mahmoud Bassal. (AFP)
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  • L'armée israélienne poursuit ses opérations dans la bande de Gaza et a lancé une nouvelle offensive dans le nord du territoire où, selon elle, les combattants du Hamas se regroupent
  • Selon la Défense civile, plus de 770 personnes sont mortes dans le nord depuis le début de cette offensive le 6 octobre

TERRITOIRES PALESTINIENS: Au moins 20 personnes, dont des enfants, ont été tuées dans deux frappes aériennes israéliennes nocturnes sur Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé vendredi la Défense civile du territoire palestinien.

Une première frappe a visé une maison familiale du quartier d'al-Manara, dans le sud-est de la ville, faisant 14 morts dont neuf enfants de moins de seize ans, selon le porte-parole de l'organisme, Mahmoud Bassal.

Une autre a visé une seconde maison à proximité, tuant six personnes, a-t-il précisé.

Les victimes ont été transportées à l'hôpital européen de la ville, où les corps de plusieurs enfants ont été enveloppés d'un linceul par leurs proches, selon des photographes de l'AFP.

L'armée israélienne a seulement indiqué dans un communiqué avoir "éliminé plusieurs terroristes depuis les airs et le sol et démantelé de nombreuses infrastructures terroristes".

L'armée israélienne poursuit ses opérations dans la bande de Gaza et a lancé une nouvelle offensive dans le nord du territoire où, selon elle, les combattants du Hamas se regroupent.

Selon la Défense civile, plus de 770 personnes sont mortes dans le nord depuis le début de cette offensive le 6 octobre.

La guerre a Gaza a été déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien sur le sud d'Israël le 7 octobre 2023.

L'attaque a entraîné la mort de 1.206 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur les données officielles israéliennes, incluant les otages tués ou morts en captivité.

Sur les 251 personnes alors enlevées, 97 restent otages à Gaza, dont 34 ont été déclarées mortes par l'armée.

En représailles, Israël a juré d'anéantir le Hamas, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007, et lancé une offensive dans laquelle au moins 42.847 Palestiniens ont été tués, majoritairement des civils, d'après les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, jugées fiables par l'ONU.


Trois journalistes tués au Liban, qui dénonce un «crime de guerre » israélien

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BEYROUTH: Trois journalistes ont été tués dans une frappe israélienne vendredi au Liban, le gouvernement dénonçant un "crime de guerre" au moment où Israël intensifie ses bombardements contre le Hezbollah tout en menant une offensive terrestre dans le sud du pays.

L'armée israélienne poursuit parallèlement son offensive dans la bande de Gaza contre le mouvement islamiste palestinien Hamas, allié du Hezbollah et lui aussi soutenu par l'Iran, où des frappes aériennes ont fait au moins vingt morts, selon la Défense civile.

Au Liban, la chaîne pro-iranienne Al Mayadeen a annoncé la mort d'un cameraman, Ghassan Najjar, et d'un ingénieur de radiodiffusion, Mohammad Reda, dans une frappe qu'elle a qualifiée de "délibérée contre une résidence de journalistes".

 


Blinken estime « vraiment urgent » de parvenir à une «solution diplomatique » au Liban

"Nous voulons nous assurer que, dans des endroits comme Beyrouth, il y a un réel effort pour s'assurer que les gens sont sains et saufs et que les civils ne sont pas pris dans ces tirs croisés", a dit M. Blinken. (AFP)
"Nous voulons nous assurer que, dans des endroits comme Beyrouth, il y a un réel effort pour s'assurer que les gens sont sains et saufs et que les civils ne sont pas pris dans ces tirs croisés", a dit M. Blinken. (AFP)
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  • "Nous avons le sentiment qu'il est vraiment urgent de parvenir à une solution diplomatique et à la mise en œuvre intégrale de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies, afin qu'il puisse y avoir une véritable sécurité le long de la front
  • M. Blinken a déclaré qu'il était essentiel d'"obtenir les ententes nécessaires à la mise en œuvre complète" de cette résolution

LONDRES: Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a estimé vendredi à Londres qu'il était "vraiment urgent" de parvenir à une "solution diplomatique" au Liban.

"Nous avons le sentiment qu'il est vraiment urgent de parvenir à une solution diplomatique et à la mise en œuvre intégrale de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies, afin qu'il puisse y avoir une véritable sécurité le long de la frontière entre Israël et le Liban", a déclaré M. Blinken après avoir rencontré le Premier ministre libanais Najib Mikati dans la capitale britannique.

La résolution 1701 adoptée en 2006 a mis fin à une guerre précédente entre le Hezbollah et Israël. Elle prévoit la cessation des hostilités entre les deux parties et stipule que seuls l'armée libanaise et les Casques bleus doivent être déployés dans le sud du Liban, frontalier d'Israël.

M. Blinken a déclaré qu'il était essentiel d'"obtenir les ententes nécessaires à la mise en œuvre complète" de cette résolution.

Il a également plaidé en faveur de la protection des civils, sans appeler à un cessez-le-feu.

"Nous voulons nous assurer que, dans des endroits comme Beyrouth, il y a un réel effort pour s'assurer que les gens sont sains et saufs et que les civils ne sont pas pris dans ces tirs croisés", a-t-il ajouté.

M. Mikati n'a fait aucune remarque à la presse à l'occasion de sa rencontre avec M. Blinken.

La veille, au cours de la conférence sur le Liban à Paris, il avait déclaré que seuls l'État et l'armée libanaise devraient porter des armes.

Le ministre jordanien des Affaires étrangères, Ayman Safadi, qui s'est entretenu séparément avec M. Blinken à Londres, a déclaré que le gouvernement libanais avait clairement fait savoir qu'il mettrait en œuvre la résolution 1701. "L'agression contre le Liban doit immédiatement cesser. Rien ne justifie sa poursuite", a dit M. Safadi.

Au moins 1.552 personnes ont été tuées au Liban depuis le début de la campagne de frappes aériennes israéliennes le 23 septembre, d'après un comptage de l'AFP reposant sur des données officielles.