L'Égypte s'inquiète de la victoire des islamistes en Syrie

Cette photo aérienne montre la mosquée Khalid ibn al-Walid entourée de bâtiments détruits dans la ville centrale de Homs, en Syrie, le 4 janvier 2025. (Photo AFP)
Cette photo aérienne montre la mosquée Khalid ibn al-Walid entourée de bâtiments détruits dans la ville centrale de Homs, en Syrie, le 4 janvier 2025. (Photo AFP)
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Publié le Dimanche 05 janvier 2025

L'Égypte s'inquiète de la victoire des islamistes en Syrie

  • L'Égypte s'inquiète des répercussions potentielles de ce changement sur la Syrie dans son ensemble.
  • La chute d'Assad a aussi bouleversé l'équilibre géopolitique du Moyen-Orient, diminuant l'influence de l'Iran, allié fidèle d'Assad, tout en ouvrant la voie à la Turquie, soutien de longue date de l'opposition syrienne.

LE CAIRE : L'arrivée au pouvoir en Syrie d'islamistes ayant chassé le président Bachar al-Assad suscite l'inquiétude de l'Égypte, un peu plus de dix ans après la prise de pouvoir d'Abdel Fattah al-Sissi, qui a renversé les Frères musulmans.

L'Égypte a soutenu M. Assad jusqu'au dernier moment, et maintenant, avec les islamistes de Hayat Tahrir al-Sham (HTS) au pouvoir depuis le 8 décembre, elle s'inquiète des répercussions potentielles de ce changement sur la Syrie dans son ensemble.

« Pour l'Égypte, cela suscite bien sûr de l'appréhension, notamment en raison de l'histoire de la Confrérie des Frères musulmans dans le pays », explique Merissa Khurma, directrice du programme pour le Moyen-Orient au centre de réflexion Wilson Center, basé à Washington.

Plusieurs autres pays arabes ont rapidement pris contact avec les nouvelles autorités de Damas, tandis que Le Caire a fait preuve d'une plus grande prudence.

Après avoir déclaré soutenir le pouvoir de Bachar al-Assad trois jours seulement avant d'être évincé, le ministre des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a attendu trois semaines avant d'appeler son nouvel homologue syrien et d'exhorter les autorités de facto à faire preuve d'inclusivité.

Samedi, un avion cargo égyptien a atterri à l'aéroport de Damas pour la première livraison d'aide humanitaire du Caire depuis la chute d'Assad, a indiqué le ministère égyptien des Affaires étrangères.

- « Chiffon rouge » -

Dans les jours qui ont suivi la chute d'Assad, les déclarations de M. Sissi étaient on ne peut plus mesurées : « Ceux qui prennent les décisions en Syrie sont les citoyens du pays. Ils peuvent soit la détruire, soit la reconstruire », a-t-il déclaré devant des personnalités des médias affiliés à l'État.

« La réaction de l'Égypte a été extrêmement prudente », a déclaré à l'AFP Mirette Mabrouk, chercheuse au Middle East Institute, basé à Washington. Selon elle, les lignes rouges de l'Égypte sont la sécurité, les islamistes et les acteurs non étatiques.

« Or, en Syrie aujourd'hui, vous avez au pouvoir des acteurs non étatiques et des islamistes, c'est un chiffon rouge pour l'Égypte », a-t-elle ajouté.

Le Caire a pris des mesures préventives. Selon l'Initiative égyptienne pour les droits de l'homme (EIPR), les forces de sécurité ont arrêté 30 Syriens qui célébraient la chute d'Assad, dont trois risquent l'expulsion.

Les restrictions d'obtention de visas à l'encontre des Syriens, qui sont environ 150 000 à vivre en Égypte, ont également été renforcées.

La télévision d'État a diffusé un montage combinant des scènes de troubles, des exercices militaires et des projets de développement, accompagné d'un discours de M. Sissi en 2017 dans lequel il affirmait que les acteurs à l'origine de la guerre en Syrie pourraient se tourner vers l'Égypte.

Elle a aussi montré une photo du chef du HTS, Ahmed al-Sharaa, aux côtés de Mahmoud Fathi, une figure des Frères musulmans accusée de terrorisme en Égypte.

L'arrivée au pouvoir en Syrie de Hayat Tahrir al-Sham (HTS) à l'issue d'une offensive éclair ne plaît guère au Caire. Il s'agit d'une coalition islamiste issue d'al-Qaïda et soutenue par la Turquie, alliée fidèle des Frères musulmans.

Elle ravive les souvenirs du règne éphémère d'un an de la Confrérie sous l'ancien président égyptien Mohamed Morsi, et entre en conflit avec l'image de Sissi comme rempart contre l'islamisme.

- Changement de dynamique -

Si le HTS a modéré sa rhétorique, s'est engagé à protéger les minorités et a juré de ne pas « exporter la révolution », le Caire reste sceptique.

La chute d'Assad a aussi bouleversé l'équilibre géopolitique du Moyen-Orient, diminuant l'influence de l'Iran, allié fidèle d'Assad, tout en ouvrant la voie à la Turquie, soutien de longue date de l'opposition syrienne.

Pour l'Égypte, ce changement de dynamique alimente les craintes de voir la Turquie, avec laquelle les relations se sont récemment améliorées après des années d'exécrabilité, devenir le plus puissant allié de la Syrie, compte tenu de la rivalité entre Le Caire et Ankara.

Le Caire ne peut toutefois pas se permettre de rester à l'écart éternellement. Les pays du Golfe, notamment l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Qatar, ont déjà pris contact avec les nouveaux dirigeants syriens.

Mais pour Le Caire, tout rapprochement est censé être assorti de conditions. Le Caire insiste avant tout sur un partage du pouvoir qui empêcherait les islamistes de monopoliser le pouvoir, note Mme Mabrouk.


Syrie: opération israélienne aéroportée près de Damas, selon un média d'Etat

Israël, qui mène régulièrement des frappes en Syrie, n'a pas confirmé cette opération mais son ministre de la Défense, Israël Katz, a affirmé jeudi que les forces israéliennes opéraient "jour et nuit" partout où cela était nécessaire pour la sécurité du pays. (AFP)
Israël, qui mène régulièrement des frappes en Syrie, n'a pas confirmé cette opération mais son ministre de la Défense, Israël Katz, a affirmé jeudi que les forces israéliennes opéraient "jour et nuit" partout où cela était nécessaire pour la sécurité du pays. (AFP)
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  • L'aviation israélienne avait frappé mardi ce site près de Kesweh, à une trentaine de km au sud de Damas, tuant six soldats syriens, selon le ministère syrien des Affaires étrangères
  • Mercredi, le site a été bombardé à nouveau, selon la télévision d'Etat, puis l'armée israélienne a "mené une opération aéroportée dont les détails ne sont pas encore connus", a rapporté l'agence de presse officielle Sana, citant une source gouvernementale

DAMAS: Un média d'Etat syrien a affirmé jeudi que l'armée israélienne avait mené mercredi soir une opération aéroportée dans un secteur au sud de Damas qu'elle avait auparavant bombardé.

Israël, qui mène régulièrement des frappes en Syrie, n'a pas confirmé cette opération mais son ministre de la Défense, Israël Katz, a affirmé jeudi que les forces israéliennes opéraient "jour et nuit" partout où cela était nécessaire pour la sécurité du pays.

Si ce raid est confirmé, il s'agirait de la première opération du genre près de la capitale depuis l'arrivée au pouvoir en décembre d'une coalition islamiste qui a renversé le président Bachar al-Assad.

L'aviation israélienne avait frappé mardi ce site près de Kesweh, à une trentaine de km au sud de Damas, tuant six soldats syriens, selon le ministère syrien des Affaires étrangères.

Mercredi, le site a été bombardé à nouveau, selon la télévision d'Etat, puis l'armée israélienne a "mené une opération aéroportée dont les détails ne sont pas encore connus", a rapporté l'agence de presse officielle Sana, citant une source gouvernementale.

Depuis décembre, Israël a mené des centaines de frappes sur la Syrie et des incursions terrestres dans le sud du pays.

Un responsable du ministère de la Défense avait indiqué mardi à l'AFP que le site visé par Israël abritait des bâtiments de l'armée syrienne.

Des soldats syriens avaient trouvé mardi des "dispositifs de surveillance et d'écoute" dans la zone avant les frappes israéliennes, selon Sana, qui ne précise pas qui les avait installés.

"Les frappes aériennes et les drones ont continué à empêcher l'accès à la zone jusqu'à mercredi soir", avant l'opération aéroportée, a indiqué la même source.

"D'après ce que nous comprenons, les forces syriennes ont découvert des dispositifs de surveillance et de renseignement, apparemment israéliens", a expliqué au bureau de l'AFP à Jérusalem l'analyste israélienne Carmit Valensi.

"Les forces israéliennes tentaient essentiellement de démanteler les dispositifs de renseignement qui avaient été installés, afin d'empêcher qu'ils ne tombent entre les mains de diverses forces syriennes", a-t-elle ajouté.

Le site abritait des armes utilisées par le Hezbollah libanais, soutenu par l'Iran et allié de M. Assad, selon selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), basé au Royaume-Uni mais disposant d'un vaste réseau de sources en Syrie.

Interrogée par l'AFP, l'armée israélienne n'a fait aucun commentaire sur les frappes.

"Nos forces opèrent sur tous les théâtres de guerre, jour et nuit, pour la sécurité d’Israël", a écrit jeudi M. Katz, sans plus de détails, sur son compte X.

Israël et la Syrie sont techniquement en état de guerre depuis des décennies, mais ont entamé un dialogue sous l'égide des Etats-Unis depuis la prise de pouvoir par le président par intérim  Ahmad al-Chareh, dans le but affiché de parvenir à des arrangements de sécurité.

 


Gaza: des experts de l'ONU dénoncent des «disparitions forcées» sur des sites d'aide

Des experts des droits de l'Homme de l'ONU ont qualifié de "crime odieux" jeudi des informations faisant état de "disparitions forcées" de Palestiniens affamés en quête de nourriture dans des sites de distribution gérés par la Fondation Humanitaire de Gaza. (AFP)
Des experts des droits de l'Homme de l'ONU ont qualifié de "crime odieux" jeudi des informations faisant état de "disparitions forcées" de Palestiniens affamés en quête de nourriture dans des sites de distribution gérés par la Fondation Humanitaire de Gaza. (AFP)
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  • Les sept experts indépendants ont assuré dans une déclaration commune avoir reçu des informations selon lesquelles plusieurs personnes, dont un enfant, avaient disparu après avoir visité des sites de distribution d'aide à Rafah
  • L'armée israélienne était "directement impliquée dans les disparitions forcées de personnes cherchant de l'aide", ont ajouté les experts, mandatés par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, mais qui ne parlent pas au nom des Nations Unies

GENEVE: Des experts des droits de l'Homme de l'ONU ont qualifié de "crime odieux" jeudi des informations faisant état de "disparitions forcées" de Palestiniens affamés en quête de nourriture dans des sites de distribution gérés par la Fondation Humanitaire de Gaza.

Les sept experts indépendants ont assuré dans une déclaration commune avoir reçu des informations selon lesquelles plusieurs personnes, dont un enfant, avaient disparu après avoir visité des sites de distribution d'aide à Rafah.

L'armée israélienne était "directement impliquée dans les disparitions forcées de personnes cherchant de l'aide", ont ajouté les experts, mandatés par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, mais qui ne parlent pas au nom des Nations Unies.

"Les signalements de disparitions forcées visant des civils affamés cherchant à exercer leur droit fondamental à se nourrir ne sont pas seulement choquants, mais équivalent à de la torture", ont-ils déclaré. "Utiliser la nourriture comme un outil pour mener des disparitions ciblées et massives doit cesser immédiatement", selon eux.

De son côté, la Fondation humanitaire de Gaza (GHF) a déclaré jeudi qu'il n'y avait "aucune preuve de disparitions forcées" dans ses sites d'aide dans les territoires palestiniens, après que des experts de l'ONU ont fait état d'informations sur de telles exactions.

"Nous opérons dans une zone de guerre où de graves allégations pèsent contre toutes les parties opérant en dehors de nos sites. Mais à l'intérieur des installations de la GHF, il n'y a aucune preuve de disparitions forcées", a déclaré la fondation dans un communiqué à l'AFP.

L'ONU a déclaré une famine dans le gouvernorat de Gaza la semaine dernière, accusant l'"obstruction systématique" des livraisons humanitaires par Israël. Israël, qui a accusé le Hamas de piller l'aide fournie par l'ONU, a imposé un blocus total sur Gaza entre mars et mai.

Une fois que les restrictions ont commencé à s'assouplir, la GHF, une organisation privée soutenue par Israël et les États-Unis, a été créée pour distribuer l'aide alimentaire, mettant de fait à l'écart les agences de l'ONU.

Le bureau des droits de l'Homme de l'ONU a déclaré la semaine dernière qu'il avait documenté la mort de 1.857 Palestiniens cherchant de l'aide depuis fin mai, dont 1.021 près des sites du GHF.


Liban: des formations palestiniennes remettent leurs armes à l'armée

Des formations palestiniennes ont remis jeudi à l'armée libanaise des armes lourdes qu'elles détenaient dans trois camps de réfugiés du sud du pays, ont annoncé les autorités libanaises et palestiniennes. (AFP)
Des formations palestiniennes ont remis jeudi à l'armée libanaise des armes lourdes qu'elles détenaient dans trois camps de réfugiés du sud du pays, ont annoncé les autorités libanaises et palestiniennes. (AFP)
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  • Le Liban accueille environ 222.000 réfugiés palestiniens, selon l'ONU, dont une majorité vit dans des camps. En vertu d'un accord tacite, les organisations palestiniennes contrôlent ces camps où l'armée libanaise ne pénètre pas
  • Dans un communiqué, le Comité de dialogue libano-palestinien (officiel) a annoncé jeudi que "huit camions" contenant "des armes lourdes appartenant aux factions de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) ont été remis à l'armée

TYR: Des formations palestiniennes ont remis jeudi à l'armée libanaise des armes lourdes qu'elles détenaient dans trois camps de réfugiés du sud du pays, ont annoncé les autorités libanaises et palestiniennes.

Lors d'une visite à Beyrouth en mai, le président palestinien Mahmoud Abbas avait conclu avec le président libanais Joseph Aoun un accord prévoyant la remise aux autorités de toutes les armes présentes dans les camps palestiniens.

L'application de cet accord a commencé le 21 août lorsque le Fatah de Mahmoud Abbas a remis des armes dans le camp de réfugiés de Bourj al-Barajneh, à la périphérie de Beyrouth.

Le Liban accueille environ 222.000 réfugiés palestiniens, selon l'ONU, dont une majorité vit dans des camps. En vertu d'un accord tacite, les organisations palestiniennes contrôlent ces camps où l'armée libanaise ne pénètre pas.

Dans un communiqué, le Comité de dialogue libano-palestinien (officiel) a annoncé jeudi que "huit camions" contenant "des armes lourdes appartenant aux factions de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) dans les camps de Rachidiyé, Bass et Bourj Chemali ont été remis à l'armée".

Un photographe de l'AFP a vu au moins sept camions dans une caserne de l'armée dans la ville côtière de Tyr, que jouxte le camp de Rachidiyé.

Le Fatah est la plus importante composante de l'OLP dont le Hamas islamiste ou le Jihad islamique, alliés du Hezbollah libanais, ne font pas partie.

Selon le communiqué, le processus va se poursuivre dans les autres camps palestiniens du Liban.

A Ramallah, en Cisjordanie occupée, le porte-parole de la présidence palestinienne, Nabil Abou Roudeina, a confirmé que "la deuxième partie d'armes de l'OLP" dans les trois camps avait été remise, conformément à l'accord.

La remise des armes des formations palestiniennes intervient dans le cadre de la décision des autorités libanaises de désarmer tous les groupes non étatiques.

Sous forte pression américaine, le gouvernement libanais a également chargé ce mois-ci l’armée d’élaborer un plan visant à désarmer le Hezbollah pro-iranien d’ici la fin de l’année.

Des factions armées palestiniennes, dont le Hamas, ont revendiqué des tirs sur le territoire israélien au cours de la guerre entre Israël et le Hezbollah qui s'est terminée en novembre 2024.