Un modèle européen pour propulser les startups du CCG

EU-INC a pris de l'ampleur et bénéficie désormais du soutien d'un large éventail de fondateurs de start-ups, de fonds d'investissement et de cabinets d'avocats. (File/AFP)
EU-INC a pris de l'ampleur et bénéficie désormais du soutien d'un large éventail de fondateurs de start-ups, de fonds d'investissement et de cabinets d'avocats. (File/AFP)
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Publié le Samedi 15 novembre 2025

Un modèle européen pour propulser les startups du CCG

Un modèle européen pour propulser les startups du CCG
  • EU-INC pourrait transformer le paysage européen des startups, et offrir une source d’inspiration directe pour un cadre régional unifié dans le Golfe
  • Un standard commun dans le CCG faciliterait les exits, renforcerait l’investissement et permettrait l’émergence de véritables champions régionaux et mondiaux

Les entrepreneurs et investisseurs européens se plaignent depuis longtemps du paysage réglementaire fragmenté de l’UE. Bien qu’un vrai entrepreneur trouve toujours des moyens de franchir les obstacles, cette manière de faire ajoute des lourdeurs inutiles et rend la croissance des entreprises et des investissements plus complexe et plus coûteuse. Cela a poussé un groupe de fondateurs, d’investisseurs et d’experts juridiques européens à lancer EU-INC, une initiative visant à tout simplifier et à permettre aux startups de se développer.

EU-INC est une solution paneuropéenne conçue pour unifier et simplifier la manière dont les startups opèrent sur le continent. Elle envisage une nouvelle entité juridique unique, reconnue dans tous les États membres, soutenue par un registre centralisé au niveau européen. Avec des documents d’investissement standardisés, des stock-options valables dans toute l’UE et des règles d’imposition et d’emploi adaptées localement, EU-INC pourrait permettre à chaque fondateur de construire et d’étendre son entreprise en Europe sans barrières réglementaires inutiles.

L’objectif d’EU-INC est d’en faire une réalité — et l’initiative a gagné en dynamique, soutenue par une large base de fondateurs, de fonds et de cabinets juridiques. Suite à cette mobilisation, la proposition est désormais discutée à Bruxelles.

Il ne fait aucun doute qu’il s’agirait d’un grand accomplissement et d’un véritable changement de paradigme. Cela libérerait le talent et l’ambition de l’Europe pour créer des entreprises de rang mondial, au lieu d’être ralentie — voire stoppée — par la fragmentation entre nations. Ses créateurs rappellent souvent aux décideurs européens qu’en octobre 2024, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen déclarait :
« Une startup de Californie peut se développer et lever des fonds dans tous les États-Unis. Mais une startup en Europe doit affronter 27 barrières nationales différentes. Nous devons faciliter la croissance en Europe. »

L’initiative EU-INC répond à cela en créant un cadre unifié pour les startups. Et bien que cela ne concerne que les startups, cela faciliterait in fine les levées de fonds et les investissements transfrontaliers, tout en étendant la présence de ces entreprises à travers l’Europe.

EU-INC a gagné en dynamique et en soutien auprès d’une large base de fondateurs, de fonds et de cabinets juridiques. 

                                   Khaled Abou Zahr

L’équipe derrière cette proposition a annoncé qu’elle avait été soumise au commissaire à la Justice Michael McGrath, à la commissaire aux Startups Ekaterina Zaharieva ainsi qu’à un groupe de travail dédié au sein de la Commission européenne. Le Conseil européen et le Parlement européen ont exprimé leur intérêt pour ce que Bruxelles appelle le « 28e régime ». La communauté travaille désormais à façonner la proposition législative, attendue au premier trimestre de l’année prochaine, pour une mise en œuvre prévue en 2027.

Alors que l’issue reste incertaine pour l’Europe, ce plan peut inspirer le Conseil de coopération du Golfe (CCG) pour soutenir le développement de son propre écosystème régional de startups et diversifier fortement les économies de ses États membres.

Dans le Golfe, la facilité de faire des affaires est exceptionnelle, soutenue par des infrastructures impeccables. Vous pouvez créer une société et obtenir un permis de résidence en Arabie saoudite ou à Bahreïn plus rapidement que n’importe où ailleurs dans le monde. Mais la création d’une plateforme qui permettrait à une entreprise d’opérer ou de lever des fonds dans le cadre d’un seul et même système réglementaire à travers le Golfe devrait être envisagée. Cela permettrait l’émergence de géants régionaux prêts à conquérir le reste du monde.

Cela deviendrait une plateforme pour l’expansion mondiale. Le Golfe s’est forgé une véritable marque : il attire talents, touristes et capitaux du monde entier, ce qui aurait été inimaginable il y a seulement une décennie. Une entreprise qui réussit dans l’environnement compétitif du CCG a la capacité de devenir un géant global. C’est donc une valeur ajoutée pour toute la région, créant un cercle vertueux.

Beaucoup de mes amis en Europe ont soit déménagé, soit poursuivi des opportunités dans le Golfe. Leur point de vue est inébranlable : les dirigeants du Golfe sont beaucoup plus à l’écoute, sensibles aux besoins des entreprises et pragmatiques quant aux moyens de les soutenir. Il existe une volonté réelle de simplifier les processus, de soutenir les entreprises et de développer un environnement dynamique et attractif.

Dans le Golfe, il existe une volonté réelle de simplifier les processus, de soutenir les entreprises et de développer un environnement dynamique. 

                                                            Khaled Abou Zahr

Peut-être que la pièce manquante du puzzle est un cadre régional unique permettant la naissance de nouveaux géants régionaux. Cela combinerait capital régional et soutien aux nouvelles entreprises. Cela résoudrait aussi les blocages actuels auxquels font face entreprises et fonds.

Bien que l’environnement du Golfe soit dynamique, les startups y rencontrent aujourd’hui des problèmes similaires à leurs homologues européennes. Pour résumer, les investisseurs investissent dans des fonds, qui eux-mêmes investissent dans des startups. Pour que le cycle fonctionne, ces fonds (private equity ou venture capital) doivent sortir de leurs investissements au bout de sept à dix ans. Cela implique de pouvoir revendre leurs participations, soit à une autre entreprise, soit via une introduction en bourse.

Ce processus permet de rendre l’argent — et si possible des gains — à l’investisseur initial, qui peut alors réinvestir, relançant le cycle. Mais dans les conditions actuelles du marché, les fonds rencontrent un problème d’exits : ils n’arrivent pas à vendre leurs participations. L’investisseur initial ne reçoit donc pas son argent, ce qui rend difficile la justification de nouveaux engagements financiers.

Les États-Unis sont l’endroit où ce cycle fonctionne parfaitement, avec des marchés locaux accessibles. Cette facilité contribue à créer des marchés plus vastes, des entreprises plus grandes et davantage de transactions d’investissement. C’est pourquoi un standard régional unique faciliterait les exits transfrontaliers, permettant aux investisseurs de vendre plus facilement leurs participations, de recycler le capital, de restaurer la confiance et d’encourager davantage d’investissements. Une bourse régionale devrait également faire partie du dispositif.

Le moment est venu pour le Golfe de franchir ce pas audacieux. Avoir un standard commun pour les entreprises et leur fonctionnement aiderait celles-ci à croître et à opérer sans friction à travers les marchés. Il est temps de voir une startup née dans le Golfe devenir un géant mondial. J’estime que ce serait la pierre angulaire indispensable.

Khaled Abou Zahr est le fondateur de SpaceQuest Ventures, une plateforme d'investissement axée sur l'espace. Il est PDG d'EurabiaMedia et rédacteur en chef d'Al-Watan al-Arabi.

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com