Covid, conflits, climat: les priorités du Royaume-Uni tout en dirigeant le Conseil de sécurité

Barbara Woodward, représentante permanente du Royaume-Uni auprès de l’ONU. (AFP / Archive)
Barbara Woodward, représentante permanente du Royaume-Uni auprès de l’ONU. (AFP / Archive)
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Publié le Mardi 02 février 2021

Covid, conflits, climat: les priorités du Royaume-Uni tout en dirigeant le Conseil de sécurité

  • En tant que présidente du conseil ce mois-ci, la Grande-Bretagne vise à surmonter les différences entre les membres et les accords de courtage, a déclaré l’envoyé
  • Le Premier ministre britannique Boris Johnson présidera la session du Conseil en se concentrant sur la dimension sécuritaire des changements climatiques

NEW YORK: Avec l’élection cette année de l’Inde, de la Norvège, de l’Irlande, du Kenya et du Mexique en tant que membres non permanents et rotatifs du Conseil de sécurité, les 15 membres de l’organe de l’Organisation des Nations unies (ONU) ont une population combinée de 3,5 milliards de personnes.

«C’est une avancée significative qui mérite d’être examinée», expliquait lundi Barbara Woodward, la représentante permanente du Royaume-Uni auprès de l’ONU, alors que le Royaume-Uni succède à la Tunisie à la présidence mensuelle du Conseil.

«L’objectif global du Royaume-Uni est de permettre au Conseil de sécurité de relever les défis mondiaux les plus importants», poursuit-elle, décrivant l’ordre du jour du Conseil pour le mois. «Ces défis peuvent se résumer en trois mots: Covid, conflits et climat.»

L’arrivée des nouveaux membres, ainsi qu’un engagement renouvelé en faveur du multilatéralisme de la part de la nouvelle administration à Washington, a ouvert la voie à un Conseil qui pourrait créer des opportunités pour de nouveaux accords, confie Mme Woodward.

La représentante permanente du Royaume-Uni auprès de l’ONU promet de se concentrer sur la transparence et les résultats, et de prendre en compte le point de vue des jeunes, car les défis actuels auxquels le monde est confronté sont «intergénérationnels».

«Une réconciliation avec la nature est la tâche déterminante du XXIe siècle», a déclaré le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. L’une des tâches du Conseil de sécurité est de maintenir la paix et la sécurité internationales. Dans cet objectif, le Premier ministre britannique, Boris Johnson, présidera ce mois-ci une session du Conseil axée sur la dimension sécuritaire des changements climatiques et ses liens avec la prévention des conflits.

«Nous voulons examiner en particulier les menaces que le climat fait peser sur les conflits, la paix et la sécurité, et la manière dont les sécheresses mènent à la famine», explique Barbara Woodward. «La famine et les inondations peuvent provoquer des déplacements et très facilement provoquer des conflits. Nous voulons donc explorer ce type de liens et chercher des moyens de prévenir les risques pour la paix et la sécurité.»

Alors que la pandémie de Covid-19 se poursuit, le ministre britannique des Affaires étrangères, Dominic Raab, présidera également une réunion du Conseil de sécurité pour discuter des effets du déploiement des vaccins sur la paix et la sécurité internationales, et des moyens de gérer les cessez-le-feu dans les zones de conflit.

Il examinera également la logistique pour le déploiement des fonds collectés par Covax, le programme de distribution de vaccins codirigé par l’Organisation mondiale de la Santé, dans l’objectif de surmonter les obstacles auxquels les pays les plus pauvres sont confrontés pour accéder aux fournitures de vaccins ainsi que les implications pour la paix et la sécurité de la disponibilité des vaccins dans le monde à des rythmes différents.

«Nous restons très attachés au déploiement mondial du vaccin», explique la représentante permanente du Royaume-Uni. «C’est un truisme de dire qu’aucun de nous n’est en sécurité tant que nous ne sommes pas tous en sécurité.»

«Le véritable défi est celui de la logistique de la distribution des vaccins dans les pays du Sud. Nous consacrerons notre présidence à faire parvenir des vaccins dans les zones difficiles.»

Le Conseil de sécurité n’est jamais aussi efficace que lorsqu’il prend la forme d’une assemblée pour résoudre les problèmes, et le Royaume-Uni souhaite aider à surmonter les différences entre les membres et à négocier des accords», ajoute Barbara Woodward.

«Tout au long de notre présidence, nous encouragerons des discussions ouvertes et constructives ainsi que l’interactivité et le débat», poursuit-elle.

Une réunion cependant, sur l’utilisation des armes chimiques en Syrie, ne sera pas une discussion ouverte. «Une certaine pression d’un État membre l’a rendu impossible», confie Mme Woodward. Des réunions séparées auront lieu pour discuter de la situation humanitaire et politique dans ce pays ravagé par la guerre.

«Il est désolant que nous ayons fait si peu de progrès sur ce conflit de longue date et ses implications humanitaires», ajoute-t-elle. «Le nombre de personnes qui ont besoin d’une aide humanitaire en Syrie est passé d’environ 2 millions à 13 millions, soit les trois quarts de la population.»

Au cours de sa présidence du Conseil, le Royaume-Uni mettra également en évidence la menace permanente que représente Daech. Selon Barbara Woodward, la question la plus difficile à cet égard est de savoir que faire des combattants étrangers capturés en Syrie. Selon elle, pour les Britanniques, ces terroristes étrangers devraient être jugés le plus près possible de l’endroit où ils ont commis leurs crimes.

La situation au Yémen est également à l’ordre du jour du mois, «où le processus politique a été gravement endommagé après l’attaque de l’aéroport d’Aden à la fin de l’année», poursuit Mme Woodward. «Et plus inquiétant encore, la famine menace 13,5 millions de personnes dans le pays.»

Sur la question palestinienne, elle souligne que son pays a demandé à plusieurs reprises à Israël de mettre fin à l'expansion illégale de ses colonies en Cisjordanie et a condamné la récente décision de procéder à de nouvelles implantations.

«Il y a des signes encourageants», confie-t-elle. «Les États-Unis ont réaffirmé leur attachement à une solution à deux États, à un réengagement auprès des autorités palestiniennes et à un travail avec le Quatuor.» Le Quatuor – l’ONU, les États-Unis, l’Union européenne et la Russie – est impliqué dans les efforts de médiation du processus de paix israélo-palestinien.

Concernant l'Iran et la possibilité de relancer le Plan d'action global conjoint (JCPOA), communément appelé «accord nucléaire iranien», Mme Woodward explique que des «négociations assez importantes» doivent avoir lieu sur la question, mais que le JCPOA reste un «point central». L'accord a été signé en 2015, mais le président Donald Trump a retiré les États-Unis de l'accord en 2018. Selon l'administration Biden, les États-Unis pourraient revenir à l'accord, mais de nouvelles négociations seront nécessaires.

Barbara Woodward exprime également sa préoccupation à la suite de l’annonce récente de l’Iran et les preuves de ses nouvelles activités d’enrichissement d’uranium dans le cadre de son programme nucléaire, censé être limité par le JCPOA.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.