Accusé de crimes de guerre, un réfugié irakien aux prises avec la justice française

Un combattant irakien des Hashed al-Shaabi (unités de mobilisation populaire) vérifie le 8 avril 2018 le tombeau gravement endommagé de feu le dictateur irakien Saddam Hussein dans le village d'Al-Awja, à la périphérie de Tikrit.  (AHMAD AL-RUBAYE / AFP)
Un combattant irakien des Hashed al-Shaabi (unités de mobilisation populaire) vérifie le 8 avril 2018 le tombeau gravement endommagé de feu le dictateur irakien Saddam Hussein dans le village d'Al-Awja, à la périphérie de Tikrit. (AHMAD AL-RUBAYE / AFP)
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Publié le Mercredi 17 février 2021

Accusé de crimes de guerre, un réfugié irakien aux prises avec la justice française

  • En 2016, 36 hommes avaient été pendus pour ce massacre, après un procès critiqué notamment par l'ONG Human Rights Watch pour son manque de transparence
  • Il aurait ensuite travaillé pour les services irakiens après le retrait américain, jusqu'à son incarcération en 2012 pour des activités d'"opposant" politique

PARIS : Criminel de guerre ou bouc émissaire? Un réfugié irakien, accusé d'avoir participé à un massacre en 2014 dans son pays, vient d'obtenir une nouvelle libération en France, où la justice peine à consolider le dossier en vue d'un éventuel procès.

Mis en examen à Paris en mars 2018 pour "assassinats terroristes" et "crimes de guerre", Ahmed Hamdane Mahmoud Ayach El Aswadi, 35 ans, assure depuis trois ans que le dossier a été monté de toutes pièces par les autorités irakiennes, qui avaient émis un mandat d'arrêt contre lui en 2015.

Elles l'accusaient d'avoir participé au massacre du camp Speicher de Tikrit les 12 et 13 juin 2014, où 1.700 recrues militaires chiites avaient été exécutées par l'organisation Etat islamique (EI).

Des accusations graves que le trentenaire - ayant obtenu le statut de réfugié en 2017 - a toujours rejetées. 

En 2016, 36 hommes avaient été pendus pour ce massacre, après un procès critiqué notamment par l'ONG Human Rights Watch pour son manque de transparence. Parmi les condamnés figurait le dénonciateur d'Ahmed Hamdane.

"Investigations fastidieuses"

Depuis son interpellation, la justice française s'efforce, avec moult difficultés, de corroborer les accusations.

Récemment, le juge d'instruction a lui-même reconnu que les "investigations en cours, longues et fastidieuses, notamment sur le plan international, n'ont pas permis pour l'instant de confirmer ou d'infirmer" les dénégations de l'Irakien.

Le 8 février, estimant que la détention de M. Hamdane n'était plus "justifiée" pour la fin des investigations, le magistrat l'a, avec l'aval du parquet antiterroriste, remis en liberté sous contrôle judiciaire, malgré une brève fuite en mai 2020 lors d'une première libération. Avec une condition toutefois: suivre le programme de déradicalisation "Pairs", destiné aux personnes poursuivies ou condamnées pour terrorisme.

Pour autant, plusieurs zones d'ombre subsistent sur le parcours du réfugié, qui a multiplié les affiliations mouvantes et suspectes dans le chaos irakien : aux enquêteurs, il a affirmé avoir été enlevé et torturé par des islamistes, ce qui l'aurait poussé à collaborer avec les services de renseignement américains de 2006 à 2010. 

Il aurait ensuite travaillé pour les services irakiens après le retrait américain, jusqu'à son incarcération en 2012 pour des activités d'"opposant" politique.

Il a raconté s'être enfui avec plusieurs co-détenus le 11 juin 2014, être entré en contact avec les forces kurdes et avoir "monté un réseau de renseignement" pour elles. Avant de prendre en 2015 la route des migrants, jusqu'à son arrivée en France. 

En 2019, le FBI a confirmé qu'il avait "travaillé pour les services de sécurité irakiens" et "rencontré des représentants de plusieurs autres pays" en 2007, laissant entendre qu'il s'agissait d'autres services de sécurité.

Mais il a aussi désigné Hamdane comme "un combattant d'Al Qaïda", ayant "joué un rôle de facilitateur pour le compte de l'EI" avant la proclamation du califat. Sans toutefois apporter de preuves de ces assertions.

Sa fuite en Allemagne, où réside son épouse, juste après sa première libération, pose aussi question. Rapidement retrouvé - il s'était présenté à la police au bout de quelques jours - il avait été remis à la France et réincarcéré le 13 août.

Le réfugié, qui avait effectué une tentative de suicide en avril 2018, a expliqué avoir eu "peur", craignant de servir de monnaie d'échange contre des jihadistes français détenus en Irak. 

"Instrumentalisation ?"

"Plus on avance, plus la force des accusations des autorités irakiennes s'amoindrit", assure son avocat, Me Mohamed El Monsaf Hamdi. 

"Il y a très probablement eu une volonté d'instrumentalisation des justices française et internationale de la part de Bagdad pour régler des problèmes de politique interne", estime l'avocat, le pouvoir cherchant selon lui des coupables pour calmer la colère des familles du massacre de Tikrit.

Me Hamdi en veut pour preuve que les autorités irakiennes ont refusé d'envoyer des éléments étayant leurs accusations. "Quel crédit doit-on accorder à un système incapable de fournir le moindre dossier judiciaire sur l'un des siens, contre lequel il a émis un mandat d'arrêt?", s'interroge l'avocat. 

"Après plus de 35 mois de détention provisoire, dont la quasi-totalité en isolement, mon client est très atteint psychologiquement", souligne Me Hamdi. "Néanmoins, il demeure tout à fait disposé à coopérer afin que la vérité se manifeste".

La réussite de ce dossier revêt une importance particulière pour le pôle "Crimes contre l'humanité" du tribunal judiciaire de Paris, créé en 2012 pour mettre en œuvre les ambitions de la justice française, compétente pour poursuivre les crimes les plus graves à travers le monde dès lors qu'un suspect passe en France.

Une quarantaine d'enquêtes du pôle, initialement focalisé sur le génocide au Rwanda, concerne désormais la Syrie et l'Irak. Elles ont débouché à ce jour sur la mise en examen de trois personnes, dont M. Hamdane, mais pas encore sur un procès.


La France rapatrie treize femmes et enfants depuis les camps en Syrie, une première depuis deux ans

La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
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  • La France a rapatrié dix enfants et trois femmes détenus dans des camps jihadistes en Syrie, marquant la première opération du genre depuis deux ans
  • Deux femmes ont été placées en garde à vue, et une troisième présentée à un juge antiterroriste

PARIS: La France a rapatrié tôt mardi matin dix enfants et trois femmes âgées de 18 à 34 ans qui étaient détenus dans des camps de prisonniers jihadistes dans le nord-est de la Syrie, une première depuis deux ans.

Parmi les femmes, "deux ont été placées en garde à vue, sur commission rogatoire du juge d'instruction", a annoncé le Parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué.

"Une autre femme, faisant l'objet d'un mandat d'arrêt, sera présentée à un juge d'instruction dans la journée" en vue d'une possible mise en examen, a-t-il ajouté.

"Les mineurs sont pris en charge dans le cadre de procédures d'assistance éducative sous la responsabilité du parquet" de Versailles, a indiqué le Pnat, qui "assurera le suivi centralisé des mineurs concernés, en lien avec les parquets territoriaux".

"La France remercie les autorités syriennes de transition ainsi que l'administration locale du Nord-Est syrien qui a rendu possible cette opération", a déclaré de son coté le porte-parole du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.

Cette opération est une première depuis juillet 2023 en France, où ces retours restent une question sensible, dix ans après la vague d'attentats jihadistes sur le sol national.

Au total, 179 enfants et 60 femmes adultes ont été rapatriées depuis 2019, précise une source diplomatique.

Mais ces opérations avaient cessé à l'été 2023, faute de volontaires selon les autorités, et ce malgré des condamnations internationales dont celle de la Cour européenne des droits de l'Homme en 2022.

- "Arbitraire" -

"Pour les familles qui attendaient leurs petits-enfants, neveux et nièces depuis plus de six ans, c'est un immense et indescriptible soulagement", a déclaré l'avocate des femmes rapatriées, Marie Dosé, dans un communiqué transmis à l'AFP.

Mais "la France laisse derrière elle 110 autres enfants français, toujours détenus dans le camp Roj", l'un des camps contrôlés comme d'autres centres et prisons par les forces kurdes, depuis plus de six ans, dénonce-t-elle.

Des dizaines de milliers de personnes, d'une cinquantaine de nationalités et soupçonnées de liens avec l'organisation jihadiste État islamique, sont retenues dans ces camps.

En juin, quelque 120 enfants et une cinquantaine de femmes françaises y étaient encore retenus, selon le Collectif des Familles unies, qui rassemble leurs proches.

Après ce rapatriement nocturne, ce collectif a rediffusé sur X mardi matin son message habituel dénonçant la détention sur place d'enfants "coupables de rien" dans "des conditions indignes".

Car pour ces familles, rien n'est encore réglé. "Une nouvelle fois, la France fait le choix de l'arbitraire", regrette Marie Dosé.

"La France, qui refusait de rapatrier des enfants tant que leurs mères n'avaient pas donné leur accord, refuse aujourd'hui leur retour alors qu'ils sont devenus majeurs. Ce faisant et plus que jamais, la France décide donc de faire payer à ces enfants le choix de leurs parents", estime-t-elle aussi.

Elle dénonce également le sort de femmes sans enfant ou dont les enfants sont décédés, et que la France refuse désormais de rapatrier, ainsi que d'enfants nés en France et "conduits de force en Syrie" avant de pouvoir acquérir la nationalité, ou de jeunes majeurs enfermés dans d'autres lieux de détention syriens.

Pour Matthieu Bagard, responsable du pôle expertise Syrie de l'ONG Avocats sans frontières France, "ce rapatriement démontre une nouvelle fois que la France a la possibilité d'organiser ces opérations". Mais il déplore lui aussi la situation des femmes et jeunes majeurs toujours "illégalement détenus".

En février, l'administration kurde a annoncé, en coordination avec l'ONU, son intention de vider d'ici fin 2025 les camps du nord-est de la Syrie des déplacés syriens et irakiens, y compris les proches présumés de jihadistes.


Après «Bloquons tout» et les promesses de «rupture», les syndicats dans la rue jeudi

"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
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  • Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi
  • Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme"

PARIS: "Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées.

Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi. "(Il) ne s'est engagé à rien du tout. Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", a-t-elle lancé.

Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme". Depuis vendredi, il reçoit les syndicats représentatifs - à l'exception de Frédéric Souillot (FO) qui souhaite le rencontrer après le 18. Mais ces derniers maintiennent leur appel à la mobilisation du 18, espérant peser de tout leur poids sur les futures orientations budgétaires.

CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires seront ainsi unis jeudi dans la rue, pour la première fois depuis le 6 juin 2023 - date de la dernière mobilisation contre la réforme des retraites.

Les mesures avancées cet été sont "d'une brutalité sans précédent", dénonçaient-ils fin août dans un communiqué commun, regrettant que l'ancien gouvernement choisisse "encore une fois de faire payer les travailleuses et les travailleurs, les précaires, les retraité·es, les malades".

Ils pointent "des coupes dans les services publics, (...), une énième réforme de l'assurance chômage, le gel des prestations sociales et celui des salaires des fonctionnaires comme des contractuel·les, la désindexation des pensions de retraites, le doublement des franchises médicales, la remise en cause de la 5ème semaine de congés payés…".

L'abandon de la suppression de deux jours fériés, unanimement décriée par le monde syndical, constitue "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a estimé Sophie Binet.

Même la CFDT, pourtant peu rompue aux cortèges syndicaux, maintient sa participation: vendredi, Marylise Léon a réaffirmé que son syndicat était "plus que jamais motivé pour aller dans la rue", à l'issue de son entrevue avec Sébastien Lecornu.

"Le budget tel qu'il a commencé à être construit n'est pas compatible avec la justice sociale, fiscale et environnementale donc il y a vraiment besoin de le revoir de fond en comble", a-t-elle estimé lundi sur France Inter.

Sur la durée ? 

Sur la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat, Mme Léon a pourtant apprécié que le Premier ministre dise être conscient de la nécessité de "faire quelque chose".

"Le budget, il va se décider dans la rue", insiste Mme Binet. Ainsi, "il faut faire une démonstration de force jeudi prochain et après", laissant entrevoir une mobilisation dans la durée.

Lundi, la CGT annonçait déjà plus de 220 manifestations, un chiffre encore amené à évoluer.

Les organisations syndicales parviendront-elles à dépasser l'affluence du mouvement citoyen "Bloquons tout" - qui a rassemblé près de 200.000 personnes le 10 septembre selon le ministère de l'Intérieur, sans toutefois parvenir à paralyser le pays ? Les manifestants du 10, parfois méfiants vis-à-vis des syndicats, participeront-ils à cette nouvelle journée ?

Aucune inquiétude côté syndical: "Nous avons déjà d'excellents retours sur la mobilisation de jeudi", assure Frédéric Souillot (FO).

"Nous avons l'objectif d'avoir un million de personnes avec nous", avance de son côté Cyril Chabanier (CFTC).

"La colère sociale est toujours là", abonde Julie Ferrua, co-déléguée générale de Solidaires.

De leur côté, les autorités s'attendent à une mobilisation plus importante que le 10 septembre et craignent la présence de plusieurs centaines de manifestants radicaux dans des cortèges. Une cellule de crise sera ouverte dès mardi au ministère de l'Intérieur.

Après le 18, ce sera le tour des agriculteurs de la FNSEA, le 26 septembre, de mener "une grande journée d'actions" autour des échanges internationaux de produits agricoles.


Lecornu va mettre fin aux "avantages à vie" des ex-ministres dès 2026

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu concrétise une promesse phare pour réduire le « décalage » entre les élites politiques et la réalité des Français, dans un contexte de forte défiance envers sa nomination

PARIS: Fini le chauffeur et la voiture de fonction "à vie" pour les anciens de Matignon: les avantages octroyés aux ex-Premiers ministres seront "supprimés" dès 2026, a annoncé lundi Sébastien Lecornu, concrétisant l'une de ses premières promesses, très symbolique pour l'opinion.

Il n'est "pas concevable" que les anciens ministres "puissent bénéficier d'avantages à vie en raison d'un statut temporaire", a écrit le locataire de Matignon sur X, confirmant la mise en place de cette réforme dès le 1er janvier 2026.

"La protection policière ne sera accordée aux anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur que pour une durée limitée, et reconduite en fonction de la réalité du risque. Tous les autres moyens mis à disposition des anciens Premiers ministres à vie le seront dorénavant pour une durée limitée", a expliqué M. Lecornu sur ce réseau social.

Sollicité par l'AFP, Matignon a expliqué que le gouvernement avait préparé une "instruction" à destination du Secrétariat général du gouvernement, en vue de revoir le décret du 20 septembre 2019, qui avait déjà restreint les privilèges accordés aux anciens Premiers ministres.

Ces derniers peuvent actuellement se voir octroyer "sur leur demande, un véhicule de fonction et un conducteur automobile", à la charge de l'Etat. Ils peuvent aussi bénéficier d'un "agent pour leur secrétariat particulier" pendant dix ans à compter de la fin de leurs fonctions et au plus tard jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 67 ans.

Des avantages qui ne s'appliquent pas pour les "ex" de Matignon lorsque ces derniers disposent déjà de ces privilèges via leur mandat (parlementaire ou local) ou leur fonction publique.

- "Mettre fin aux derniers privilèges" -

Une autre instruction du chef du gouvernement à l'attention de la Direction générale de la police nationale (DGPN) permettra de créer "un cadre" relatif à la "protection policière" des anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur, a détaillé Matignon.

"On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts si ceux qui sont à la tête de l'État n'en font pas. La réforme, ce n'est pas toujours +pour les autres+, cela crée la suspicion", avait lancé Sébastien Lecornu dans un entretien donné à plusieurs titres de la presse régionale durant le week-end.

"Beaucoup de choses ont été réglées pour les anciens présidents de la République. Je vais donc mettre fin aux derniers privilèges", avait-il encore promis, quelques jours seulement après sa prise de fonctions à Matignon, durant laquelle il s'était inquiété du "décalage" observé entre la vie politique et la vie "réelle" des Français.

Le Premier ministre, nommé mardi par Emmanuel Macron après la chute de François Bayrou, met ainsi en musique l'une de ses premières promesses, alors qu'il consulte en parallèle les forces politiques, syndicales et patronales en vue de former un gouvernement susceptible de survivre aux menaces de censure des oppositions.

Il doit aussi batailler contre une opinion publique très défiante vis-à-vis de sa nomination, même si les chiffres de confiance des Français à son égard varient selon les instituts de sondage.

Son prédécesseur, François Bayrou, avait déjà annoncé vouloir passer au crible ces privilèges ministériels: il avait confié fin août une mission à l'ex-député socialiste René Dosière pour identifier les "avantages indus, excessifs, inacceptables" dans un contexte de dérapage des finances publiques.

En réalité, l'économie à espérer de ces annonces est dérisoire par rapport aux dizaines de milliards d'euros recherchées par les gouvernements successifs. Les privilèges accordés au titre du décret de 2019 (chauffeur, secrétariat, véhicule) ont coûté 1,58 million d'euros à l'Etat en 2024, selon le gouvernement.

Un montant auquel il faut ajouter les dépenses de protection policière, évaluées à 2,8 millions d'euros par an dans un rapport parlementaire de 2019.