L’accord sur le nucléaire de Biden devrait museler les agents de Téhéran

Joe Biden lèvera les sanctions contre l’Iran qui ne sont pas conformes à l’accord sur le nucléaire. (Photo, Getty Images)
Joe Biden lèvera les sanctions contre l’Iran qui ne sont pas conformes à l’accord sur le nucléaire. (Photo, Getty Images)
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Publié le Vendredi 09 avril 2021

L’accord sur le nucléaire de Biden devrait museler les agents de Téhéran

L’accord sur le nucléaire de Biden devrait museler les agents de Téhéran
  • Washington ne perdrait peut-être pas la guerre, mais il perdrait probablement la paix
  • Les futurs présidents américains ne doivent pas disposer de prétextes faciles pour annuler les accords et relancer les hostilités

Le président Joe Biden a annoncé qu’il s’apprête à lever les sanctions contre l’Iran qui ne sont pas conformes à l’accord sur le nucléaire.

Il ne fait aucun doute que le Plan d’action global commun (JCPoA) mis en place par l’administration Obama, et communément appelé « accord sur le nucléaire », était une grande réussite diplomatique. En effet, plusieurs décennies après la Révolution islamique en Iran en 1979, Washington, Londres et Téhéran, entre autres, ont réussi à s’unir et à convenir d’un traité international.

Néanmoins, le JCPoA présentait de graves lacunes qui le rendaient non durable dès le départ. Bien qu’il ait réussi à limiter la capacité nucléaire de l’Iran, l’accord a donné libre cours à Téhéran pour attaquer d’autres intérêts et alliés des États-Unis au Moyen-Orient grâce à son vaste réseau de mandataires établi depuis longtemps et qui se consacre à cet objectif.

L’Iran finance, arme, forme et aide à diriger de nombreuses factions, telles que le gouvernement d’Assad en Syrie, le Hezbollah au Liban, le Hamas dans les territoires palestiniens occupés, les Houthis au Yémen et, récemment, les Talibans afghans. De plus, l’Iran soutient un certain nombre de petits groupes et cellules terroristes qui ont mené des attaques contre des moyens diplomatiques et militaires américains pendant des décennies.

Un Washington dirigé par les démocrates pourrait mettre un terme à ces excès et mener ce combat sans tenir compte du JCPoA. Cependant, n’importe quel partisan de l’Iran pourrait utiliser plus tard les activités de ces mandataires contre les intérêts américains dans la région comme prétexte pour faire couler l’accord et mettre les États-Unis sur la voie d’une confrontation militaire directe avec Téhéran. Et Washington ne manque certainement pas de personnalités qui désirent faire exactement cela.

Il est donc impératif que Biden ressuscite l’accord afin de s’assurer que Téhéran ne se dote pas de l’arme nucléaire. Le seul autre moyen de l’empêcher potentiellement de réaliser cet objectif est la guerre qui, à l’issue de la guerre en Irak, devrait évidemment être évitée. L’Iran est un pays bien plus grand et puissant que ne l’était l’Irak, et parmi la population iranienne, même ceux qui détestent le gouvernement détesteraient encore plus l’intervention occidentale, et se rallieraient aux forces d’invasion.

C’est sans oublier que l’Iran entretient des liens économiques et stratégiques avec la Russie et la Chine, qui aideraient Téhéran dans ses efforts pour se défendre. Le conflit est non seulement un plan d’action immoral, mais il nuirait également aux intérêts américains. Washington ne perdrait peut-être pas la guerre, mais il perdrait probablement la paix.

Mais si l’on veut éviter la guerre au cours de l’administration actuelle et de celles qui suivent, les traités conclus entre les États-Unis et l’Iran pour garantir la paix devront être politiquement durables. Les futurs présidents américains ne doivent pas disposer de prétextes faciles pour annuler les accords et relancer les hostilités.

Cela signifie avant tout qu’il faut empêcher Téhéran de poursuivre sa guerre par procuration contre les États-Unis au Moyen-Orient.

Évidemment, cette situation va dans les deux sens. Téhéran compte également de nombreuses voix anti-américaines, et ses propres conservateurs nationalistes ont de fortes raisons politiques de saper toute détente avec les États-Unis et de provoquer une confrontation directe. C’est pour cette raison que Washington doit lui aussi faire des concessions. Mais il faut avant tout qu’il reconnaisse publiquement que c’était l’ancien président Donald Trump qui a renoncé le premier au JCPoA, que Téhéran a respecté l’accord lui-même malgré ses activités malignes dans la région, et que le peuple iranien mérite peut-être une certaine compensation pour les difficultés économiques qui ont suivi la réimposition de sanctions par Trump.

Toutes ces idées sont vraies, et les reconnaître comme telles doit être le fondement de tout effort de bonne foi pour reconstruire l’accord sur le nucléaire. Toutefois, en échange de cette bonne foi, il faudrait exiger que l’Iran réponde avec tout autant de bonne foi et cesse de financer tous les mandataires et groupes terroristes opposés aux États-Unis dans la région. Un accord doit être conclu, car l’échec mènerait probablement à une guerre sans gagnants : les deux pays perdront leur statut, leur argent, leur pouvoir et la vie de leurs soldats, et des millions d’innocents pris entre deux feux souffriront et mourront inutilement. C’est un scénario que personne ne peut se permettre.

 

  • Le Dr Azeem Ibrahim est directeur au Centre pour la politique globale et auteur de l'ouvrage « The Rohingyas  : Inside Myanmar's Genocide » (Hurst, 2017). Twitter : @AzeemIbrahim

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur arabnews.com