ENTRETIEN : La société Metito présente sa stratégie visant à fournir de l'eau à la région

Illustration par Luis Grañena
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Publié le Dimanche 16 mai 2021

ENTRETIEN : La société Metito présente sa stratégie visant à fournir de l'eau à la région

  • Rami Ghandour, directeur exécutif, explique pourquoi il est impératif que le Moyen-Orient comprenne que « l'eau n'est pas gratuite »
  • Une statistique brutale suffit à récapituler le défi en matière d'eau au Moyen-Orient : la région héberge 6 % de la population mondiale, alors qu'elle ne dispose que de 1 % de l'eau douce nécessaire.

Rami Ghandour, directeur général de Metito Utilities, une société de distribution d'eau dont le siège est aux EAU, connaît ces chiffres par cœur. Il peut vous indiquer la proportion de la population de l'Égypte qui habite des villes à forte consommation d'eau (97 %) et la quantité d'eau consommée par habitant dans la région du Conseil de coopération du Golfe (CCG) en comparaison avec les États-Unis (une quantité nettement supérieure).

« La première chose à faire est de réaliser que l'eau n'est pas gratuite. Elle est assez coûteuse. Ainsi, les gens sont tenus de s'en occuper », déclare-t-il à Arab News.

Depuis plus de 60 ans, Metito gère l'eau dans la région et dans le monde, depuis sa création au Liban en 1958 par la famille d'entrepreneurs Ghandour, dont les membres demeurent à ce jour des actionnaires importants.

En effet, cette entreprise est un leader mondial en matière d'infrastructures de l'eau. Elle exploite des installations d'assainissement, de traitement de l'eau et de dessalement dans 46 pays et joue un rôle de plus en plus important dans l'initiative mondiale en faveur d'une utilisation plus renouvelable et durable des ressources de la planète.

Peut-on donc qualifier Metito de fournisseur de services publics, d'entreprise d'infrastructure ou de prestataire de services environnementaux ?

« Vous pouvez cocher toutes ces cases. Historiquement, nous sommes une entreprise environnementale dans le sens où nous dessalons de l'eau, fournissons de l'eau aux gens, traitons et recyclons les eaux usées, qu'elles soient industrielles ou domestiques. Plus récemment, nous avons étendu nos activités aux énergies renouvelables », précise M. Ghandour.

Le groupe Metito, qui bénéficie du soutien de grands investisseurs tels que la société japonaise Mitsubishi et la branche d'investissement de la Banque mondiale, s’articule autour de trois axes d'activité : une unité de conception et de construction qui couvre l'ensemble du processus d'ingénierie, d'approvisionnement et de construction –  et dont les projets dépassent, à ce jour, les 3 000 à travers le monde – ; la division des services publics et des investissements qui offre le financement de projets, des services de conseil et de gestion ; enfin, l'unité des produits chimiques qui conçoit des produits chimiques écologiques ainsi que des solutions de traitement pour les clients.

 « Nous conservons volontairement une certaine autonomie entre les différentes entreprises. Nous sommes toutefois en mesure de développer des projets – ce qui constitue le cœur de notre activité –,  et de les proposer aux populations afin de favoriser à la fois un environnement plus sain ainsi que l'amélioration des besoins fondamentaux de l'homme », ajoute M. Ghandour.

L'eau –  qu'elle soit bon marché, gratuite ou subventionnée – a longtemps été perçue comme acquise au Moyen-Orient, en dépit de la pression croissante, sur les ressources en raison de la croissance démographique et des usages tant agricoles qu'industriels. Pour M. Ghandour, cet état d'esprit doit être revu.

« La région dispose évidemment de juridictions, y compris ici aux Émirats arabes unis, où les prix du marché sont payés en totalité, où le coût est entièrement amorti et où les taxes sont exigées. Mais il existe d'autres zones où l'eau est subventionnée en grande quantité, ce qui encourage le gaspillage", souligne-t-il.

BIOGRAPHIE

NAISSANCE

Beyrouth 1975

 

FORMATION

Maîtrise en génie chimique de l'Université de Cambridge

MBA en finance et gestion d'entreprise de la Wharton Business School

 

CARRIÈRE

Ingénieur des procédés, Bechtel Londres

Consultant en gestion, Boston Consulting Group, New York

Directeur général, Metito Utilities

Directeur, Metito Group

Les programmes d'éducation publique – qui encouragent par exemple les gens à fermer les robinets et à laver leur voiture moins souvent –  jouent évidemment un rôle de sensibilisation du public, mais les plus grands défis sont de nature plus structurelle.

À titre d'exemple, c'est l'agriculture qui consomme le plus d'eau dans la région, et non la consommation domestique des particuliers.

Les gouvernements –  dont celui de l'Arabie saoudite –  ont réussi à encourager un usage plus efficace de l'eau pour l'agriculture, et les nouvelles technologies telles que les cultures hydroponiques et verticales peuvent également promouvoir un usage optimal des ressources en eau.

Par ailleurs, certains pays se sont engagés dans une démarche plus radicale : ils achètent des terres agricoles dans d'autres parties du monde dotées de meilleures ressources en eau, y cultivent des denrées qu'ils importent par la suite dans le Golfe.

Toutefois, M. Ghandour souligne qu'il existe d'autres moyens simples et efficaces d'optimiser l'utilisation de l'eau. Les fuites et les vols d'eau constituent des problèmes de taille dans certains pays.

« Les gens ne font que s'aider au niveau personnel et la règlementation n'est pas assez contraignante pour éviter ce problème », ajoute-t-il.

En outre, la réutilisation de l'eau offre un grand potentiel. Singapour en est un exemple : ce pays a fait de grands progrès dans la réutilisation de l'eau à des fins domestiques, industrielles et agricoles.

Dans la région du Golfe, un des phénomènes qui met les environnementalistes sur les nerfs est l'utilisation abusive de l'eau précieuse dans les terrains de golf ou les espaces verts publics, dans des régions qui ne sont que des déserts arides.

Toutefois, M. Ghandour souligne que cette eau provient de plus en plus souvent d'une eau recyclée qui n'est pas forcément consommable par l'homme, mais qui est parfaitement utilisable pour l'irrigation. Dubaï, par exemple, possède une installation novatrice de recyclage des eaux usées qui met à la disposition des utilisateurs deux robinets pour différents usages de l'eau.

La société Metito a présenté une offre pour un projet au Botswana, en Afrique, où les eaux usées sont directement recyclées en eau potable, l'un des deux projets de ce type dans le monde. 

La société examine également la technologie utilisée dans un projet pionnier en Californie, qui consiste à recycler les eaux usées directement dans les aquifères souterrains qui alimentent à nouveau le cycle de consommation.

En effet, le golfe Arabique, aride, nécessitera toujours le recours au dessalement, même si la région optimise sa consommation, évite les fuites et adopte des stratégies de facturation efficaces.

Le dessalement a été le pilier principal de l'infrastructure qui a permis à la région de bénéficier de hauts taux de croissance économique pendant des décennies. Cependant, il a également fait l'objet de critiques de la part des écologistes, et ce pour deux raisons : la consommation de combustibles à base de carbone, comme le pétrole et le gaz, dans le processus coûteux de conversion de l'eau de mer en eau utilisable, mais aussi le surplus de saumure (eau salée) expulsé en mer en tant que produit dérivé de ce processus.

D'après M. Ghandour, la deuxième réserve est moins significative, dans la mesure où le golfe Arabique et la mer Rouge constituent des voies maritimes à marée ouverte, mais aussi parce que certaines installations de dessalement aux EAU sont construites du côté de l'océan Indien, ce qui permet à la saumure de se répandre dans un bassin d'eau plus étendu. L'utilisation de combustibles fossiles hydrocarbonés pour produire de l'eau, en revanche, est une préoccupation bien différente.

« Je dissocierais la question de la consommation d'énergie de celle du dessalement. Heureusement, le modèle économique des énergies renouvelables est devenu largement plus compétitif. Aujourd'hui, les énergies renouvelables sont souvent moins coûteuses que les énergies fossiles », a-t-il ajouté.

Les mégaprojets d'Arabie saoudite ont constitué un terrain d'essai idéal pour ce nouveau modèle. La société Metito est engagée dans deux installations de dessalement alimentées par l'énergie solaire dans le cadre du développement de la ville de NEOM. Ces installations fonctionnent avec de l'énergie renouvelable et des sources provenant du réseau électrique du pays. Metito a aussi remporté un contrat pour la construction d'une énorme usine de dessalement dans la zone industrielle de Jubail, dans la province orientale. M. Ghandour fait allusion à d'autres gros contrats en perspective en Arabie Saoudite.

De l'autre côté de la mer Rouge, en Égypte, Metito mène également d'énormes projets, notamment un programme ambitieux pour irriguer le désert du Sinaï avec de l'eau recyclée et provenant du canal de Suez.

Les besoins de l'Arabie saoudite en eau propre, efficace et réutilisable, vont probablement croître de manière exponentielle au cours de la prochaine décennie. Ainsi, outre les mégaprojets tels que NEOM et Qiddiya à la périphérie de Riyad, il existe des plans gigantesques qui prévoient de doubler la taille de la capitale de l'Arabie saoudite d'ici 2030, sans compter l'initiative destinée à planter 10 milliards d'arbres dans le Royaume en vue d'atténuer les émissions de carbone. M. Ghandour juge-t-il que ces plans ambitieux sont envisageables, du point de vue d'un expert en eau ?

En effet, la manière dont l'Arabie saoudite et les autres pays du Golfe abordent cette tâche est prometteuse, selon lui, notamment en raison des investissements de plus en plus importants du secteur privé. « Je dirais que c'est le moyen le plus efficace de réaliser ces projets en appliquant des normes de conformité environnementale très rigoureuses », dit-il, en tenant compte des normes plus strictes désormais exigées par les investisseurs internationaux du secteur privé, en conformité avec les normes ESG (environnementales, sociales et de gouvernance).

« Cette tendance incite chacun à prendre en compte les priorités ESG, de façon à ce que tout le monde cherche à réaliser des projets de manière durable. Les Saoudiens sont certes particulièrement impliqués dans ce processus », ajoute-t-il.

Et pense-t-il que le Royaume sera en mesure d'arroser tous ces arbres ? 

« Je ne dispose pas des détails du plan d'irrigation de ces arbres, mais je dirais oui, en tant que spectateur. Le pays développe ses capacités de dessalement à un rythme élevé grâce à ces projets de partenariat entre le secteur public et le secteur privé.

« Il possède des sources d'eau supplémentaires, les eaux usées qui peuvent être réutilisées dans l'irrigation des arbres. Aujourd'hui, un grand volume d'eaux usées est gaspillé dans le Royaume. Voilà donc un domaine dans lequel la réutilisation de l'eau présenterait un avantage considérable pour l'environnement », ajoute-t-il.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com.


IA: pour la présidente de Microsoft France, il n'y a pas de «bulle»

 "Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs. (AFP)
"Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs. (AFP)
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  • Microsoft propose son propre assistant IA, baptisé Copilot, et contrôle 27% du capital de la start-up OpenAI, le créateur de ChatGPT, chatbot le plus utilisé au monde
  • En France, 40,9% des citoyens en âge de travailler ont adopté l'IA, assure Mme de Bilbao, contre 26,3% aux États-Unis, ce qui place la France à la cinquième place mondiale en termes d'adoption, selon une étude du Microsoft AI Economy Institute

PARIS: "Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs.

Pour certains experts, les investissements colossaux dans l'IA semblent démesurés par rapport aux bénéfices générés, alimentant la peur d'une survalorisation du secteur.

Mais selon Corine de Bilbao, à la tête de la filiale française du géant américain des logiciels depuis 2021, "il y a des signes forts" de solidité comme le fait que cette technologie se diffuse "dans toutes les sphères de la société".

Microsoft propose son propre assistant IA, baptisé Copilot, et contrôle 27% du capital de la start-up OpenAI, le créateur de ChatGPT, chatbot le plus utilisé au monde, dans laquelle Microsoft a investi plus de 13 milliards de dollars.

En France, 40,9% des citoyens en âge de travailler ont adopté l'IA, assure Mme de Bilbao, contre 26,3% aux États-Unis, ce qui place la France à la cinquième place mondiale en termes d'adoption, selon une étude du Microsoft AI Economy Institute.

Un milliard d'agents IA

L'énergéticien français TotalEnergies utilise par exemple Copilot et des agents IA, capables de réaliser des tâches de façon autonome, à travers des cas d'usage "dans la maintenance, les achats, la sécurité", énumère la patronne.

Tandis que l'assureur italien Generali a "adopté massivement l'IA et automatisé plus d'un million d'opérations", ajoute-t-elle.

"Plus d'un milliard d'agents à l'échelle mondiale vont être diffusés dans les entreprises" d'ici 2028, s'enthousiasme Corine de Bilbao, citant une étude IDC pour Microsoft.

L'irruption de l'intelligence artificielle dans les entreprises peut toutefois se traduire par des vagues de licenciements comme chez Amazon, le groupe informatique HP ou encore l'assureur allemand Allianz Partners.

Microsoft France, qui compte près de 2.000 employés, a de son côté supprimé 10% de ses effectifs via un accord collectif de rupture conventionnelle sur la base du volontariat.  -

"C'est lié à la transformation de certains métiers, mais pas à l'IA", assure la dirigeante, ajoutant qu'en parallèle Microsoft est en train de recruter "des profils plus techniques", comme des "ingénieurs solutions", pour s'adapter aux demandes de ses clients.

"L'IA suscite beaucoup de peur", reconnaît Mme de Bilbao."On préfère parler de salariés augmentés" plutôt que d'emplois supprimés, poursuit-elle, beaucoup de tâches considérées comme rébarbatives pouvant être réalisées avec l'assistance de l'intelligence artificielle.

Selon elle, l'enjeu central est surtout celui de la formation des salariés à ces nouveaux outils.

"Nouvelle économie" 

"Il n'y aura pas de déploiement de l'IA s'il n'y a pas de valeur partagée, si l'ensemble des citoyens, des étudiants, des entreprises ne sont pas formés", souligne la patronne.

En France, le géant de Redmond (Etat de Washington) a déjà formé 250.000 personnes à l'IA sur un objectif d'un million d'ici 2027 et veut accompagner 2.500 start-up françaises.

"Un écosystème complet se développe entre les fournisseurs de modèles de langage, les infrastructures, on est en train de créer une nouvelle économie autour de cette IA", déclare Corine de Bilbao.

Microsoft a ainsi annoncé en 2024 un investissement de 4 milliards d'euros en France lors du sommet Choose France pour agrandir ses centres de données dans les régions de Paris et Marseille (sud), et construire un datacenter dans l'est de la France, près de Mulhouse.

"Ca avance très bien", explique-t-elle, sans donner de date à laquelle le centre sera opérationnel. "Cela ne pousse pas comme des champignons, ce sont des projets qui prennent quelques années en général", entre le dépôt de permis, de construction et l'accompagnement.

Pour 2026, le défi sera de passer d'une intelligence artificielle "expérimentale à une IA opérationnelle, qui délivre de la valeur pour les entreprises, à la fois sur leurs revenus, la productivité, et qui les aide à se transformer", conclut-elle.


Mercosur: Paris et Rome contrarient les plans de l'UE, ultimatum de Lula

Cette photographie montre des drapeaux européens flottant devant le bâtiment Berlaymont, siège de la Commission européenne à Bruxelles, le 2 décembre 2025. (AFP)
Cette photographie montre des drapeaux européens flottant devant le bâtiment Berlaymont, siège de la Commission européenne à Bruxelles, le 2 décembre 2025. (AFP)
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  • L’Italie rejoint la France pour demander un report de l’accord UE–Mercosur, menaçant la signature espérée par Ursula von der Leyen et ouvrant la voie à une minorité de blocage au sein des Vingt-Sept
  • Le Brésil met la pression, tandis que les divisions européennes persistent entre défense des agriculteurs et impératif économique face à la concurrence chinoise et américaine

BRUXELLES: L'Italie a rejoint la France mercredi pour réclamer un report de l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur, ce qui risque d'empêcher Ursula von der Leyen de parapher ce traité en fin de semaine, au grand dam du Brésil.

Une signature dans les prochains jours est "prématurée", a lâché Giorgia Meloni à la veille d'un sommet européen à Bruxelles.

La cheffe du gouvernement italien veut d'abord des garanties "suffisantes" pour le secteur agricole, et se dit "convaincue qu'au début de l'année prochaine, toutes ces conditions seront réunies".

Cette sortie est une douche froide pour la Commission européenne. Bruxelles n'a cessé de marteler ces derniers jours qu'une signature était indispensable avant la fin de l'année, pour la "crédibilité" de l'Union européenne et afin de ne pas contrarier les partenaires latino-américains.

Prudent, l'exécutif européen fait mine d'y croire encore. "Les chefs d'Etat et de gouvernement vont en discuter au sommet européen" ce jeudi, a dit à l'AFP Olof Gill, porte-parole de la Commission.

Au Brésil, le président Lula, qui avait appelé à la responsabilité Emmanuel Macron et Georgia Meloni, a posé une forme d'ultimatum.

"Si on ne le fait pas maintenant, le Brésil ne signera plus l'accord tant que je serai président", a-t-il menacé. "Si jamais ils disent non, nous serons désormais fermes avec eux, parce que nous avons cédé sur tout ce qu'il était possible de céder diplomatiquement".

- "Billet remboursable" -

La prise de position de Rome sur ce dossier est potentiellement décisive.

Avec la France, la Pologne et la Hongrie, l'Italie est en capacité de former une minorité de blocage au sein des Vingt-Sept, ce qui empêcherait un examen de l'accord durant la semaine.

"Ca risque d'être très chaud", convient un diplomate européen anonymement, alors que l'Allemagne comme l'Espagne insistent pour approuver ce traité de libre-échange le plus vite possible.

Le chancelier allemand, Friedrich Merz, a promis d'exercer une pression "intensive" sur ses partenaires européens mercredi soir et jeudi matin, en appelant à ne pas "chipoter" avec les grands traités commerciaux.

Emmanuel Macron a prévenu que "la France s'opposerait de manière très ferme" à un éventuel "passage en force" de l'Union européenne, a rapporté la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

Paris ne considère pas encore comme "acquis" le report de la signature du traité, mais les déclarations de Giorgia Meloni sont la "preuve" que "la France n'est pas seule", a-t-elle ajouté.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, espérait parapher ce traité lors du sommet du Mercosur samedi dans la ville brésilienne de Foz do Iguaçu. Mais elle a besoin au préalable de l'aval d'une majorité qualifiée d'Etats membres à Bruxelles.

"J'espère qu'elle a un billet (d'avion) remboursable", glisse une source diplomatique européenne.

- Manifestation à Bruxelles -

Cet accord commercial avec l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay permettrait à l'UE d'exporter davantage de véhicules, de machines, de vins et de spiritueux, tout en facilitant l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel ou soja sud-américains, ce qui inquiète les filières concernées.

Les agriculteurs européens ne décolèrent pas et annoncent une dizaine de milliers de manifestants jeudi à Bruxelles contre ce traité.

Pour rassurer la profession, l'UE a ajouté des mesures de sauvegarde: un suivi des produits agricoles sensibles et une promesse d'intervention en cas de déstabilisation du marché.

Un compromis a été trouvé mercredi soir sur ce volet entre des eurodéputés et des représentants des États membres: les garanties pour les agriculteurs y sont supérieures à ce qu'avaient voté les Vingt-Sept en novembre, mais en deçà de la position adoptée par le Parlement européen mardi.

Elles ne devraient toutefois pas suffire à la France. Le bras de fer avec Bruxelles s'inscrit dans un contexte de vaste mobilisation agricole dans l'Hexagone contre la gestion par les autorités de l'épidémie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

Et au sein de l'Union européenne, une série d'États redoutent que Paris ne se contente pas d'un report du Mercosur mais essaye de faire échouer le traité, malgré plus de 25 ans de négociations.

Allemands, Espagnols et Scandinaves comptent quant à eux sur cet accord pour relancer une économie européenne à la peine face à la concurrence chinoise et aux taxes douanières des États-Unis.


Automobile: les équipementiers français pressent Bruxelles d'imposer un contenu local

 Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
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  • Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe
  • Mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie"

PARIS: Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi.

Dans cette missive adressée à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et datée du 12 décembre, les dirigeants des équipementiers Valeo, Forvia et OPmobility demandent à la Commission "des mesures claires sur le contenu local lors des annonces du 16 décembre".

Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe, mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie", écrivent Christophe Périllat (Valeo), Martin Fisher (Forvia) et Félicie Burelle (OPmobility).

"Les perspectives actuelles indiquent que 350.000 emplois et 23% de la valeur ajoutée des automobiles dans l'UE sont en danger d'ici 2030 si des mesures fortes ne sont pas prises de manière urgente", ajoutent-ils.

Ces équipementiers soutiennent "la position des ministres français en faveur de +flexibilités ciblées+ dans la réglementation sur (les émissions de) CO2 si elle est assortie de conditions de critères de contenu local, dans l'intérêt des emplois, du savoir-faire dans l'automobile" et de "l'empreinte carbone" en Europe.

Les constructeurs automobiles européens et l'Allemagne notamment réclament depuis des semaines de nets assouplissements dans l'interdiction de vendre des voitures neuves thermiques ou hybrides prévue à partir de 2035.

Les annonces de la Commission sont attendues mardi après-midi.

La semaine dernière, plusieurs ministres français avaient envoyé une lettre aux commissaires européens pour dire qu'ils acceptaient des "flexibilités ciblées", à condition qu'elles s'accompagnent d'une règlementation incitative à la production en Europe.

"On est prêt à faire preuve de flexibilité", avait ensuite expliqué Roland Lescure, ministre français de l'Economie. "Si vous voulez vendre encore un peu de moteurs thermiques en 2035 très bien, mais il faut qu’ils soient faits en Europe", avec "au moins 75% de la valeur ajoutée faite en Europe", avait-il ajouté.