Selon Nawaf Salam, «le Liban peut être sauvé»

Nawaf Salam, ancien ambassadeur du Liban à l’ONU et juge à la Cour internationale de justice. (Photo d'archives AFP)
Nawaf Salam, ancien ambassadeur du Liban à l’ONU et juge à la Cour internationale de justice. (Photo d'archives AFP)
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Publié le Mardi 06 juillet 2021

Selon Nawaf Salam, «le Liban peut être sauvé»

  • C’est un diagnostic sans appel que livre Salam à Arab News en français: le Liban est aujourd’hui sous une emprise communautaire
  • Conscient des défauts et des dégâts engendré par le communautarisme, Salam affirme à Arab News en français qu’il faudra commencer par «sortir de ce carcan»

PARIS: Alors que la course vers l’abîme du Liban semble se précipiter, le titre du livre publié par Nawaf Salam, ancien ambassadeur du Liban à l’ONU et actuel juge à la Cour internationale de justice de La Haye, est de nature à nous interpeller.

C’est pour évoquer cet ouvrage, Le Liban d’hier à demain, paru chez Actes Sud, ainsi que la situation dans son pays, qu’Arab News en français a décidé de rencontrer son auteur.  

salam
La couverture du livre de Nawaf Salam. (Photo fournie).

L’ouvrage de Salam laisse d’emblée entrevoir une lueur d’espoir: oui, le Liban est un pays qui peut être sauvé, une nation qui peut survivre et dépasser ses crises actuelles.

Les Libanais sont aujourd’hui «des citoyens empêchés dans un pays inachevé».

Nawaf Salam

Fruit d’un travail longuement mûri, ce livre réunit huit articles sur le système politique libanais qui entrent en résonance avec les crises profondes que traverse actuellement le pays.

C’est un diagnostic sans appel que livre Salam à Arab News en français: le Liban est aujourd’hui sous une emprise communautaire qui fait de ses habitants «des citoyens empêchés dans un pays inachevé».

L’écrivain décrit la guerre du Liban comme l’expression «de la fragilité du consensus entre les diverses factions libanaises [et de] l’échec de la formule de partage des pouvoirs à s’adapter aux changements sociaux et démographiques».

Il analyse les fondements du confessionnalisme, système gouvernemental qui se trouve selon lui à l’origine de tous les maux actuels du pays, et s’attache en particulier à la période de la guerre du Liban, qui court de 1975 à 1990. 

Il décrit cette guerre comme l’expression de «la fragilité du consensus entre les diverses factions libanaises [et de] l’échec de la formule de partage des pouvoirs à s’adapter aux changement sociaux et démographiques» qui ont eu lieu entre les années 1960 et 1970.

Il est également nécessaire, pour comprendre cette période, de ne pas négliger les facteurs externes recherchés par les protagonistes libanais pour renforcer leur position face à leurs adversaires locaux.

Le grand défi d’aujourd’hui, assure-t-il, consiste à mettre le Liban sur les rails.

Nawaf Salam

Les accords de Taëf, qui ont mis fin à cette guerre, ont entériné un système multiconfessionnel. Ils ont mis au jour, dans le même temps, des solutions pour en sortir: le bicaméralisme, la réforme de la loi électorale, la neutralité confessionnelle de l’administration. Toutefois, ces solutions n’ont jamais été mises en œuvre.

La reconstruction de l’État, qui devait avoir lieu à l’issue de la guerre, n’a jamais vu le jour. Les différentes communautés se sont contentées des éléments qui les arrangeaient, écartant ceux qui pouvaient réduire leur influence.

Conscient des défauts et des dégâts engendré par le communautarisme, Salam affirme à Arab News en français qu’il faudra commencer par «sortir de ce carcan» et s’atteler à la construction de ce qu’il appelle «une troisième République».

Cependant, cette transition devra se faire dans la modération et à travers ce qu’il appelle «la raison des institutions». 

«Qui va porter les réformes au Liban?»

Il ne s’agit pas, pour Salam, de «construire un État contre les communautés», ni «un État toléré par elles», mais d’élaborer «un État capable de les contenir et de les transcender».

Le grand défi d’aujourd’hui, assure-t-il, consiste à mettre le Liban sur les rails. En effet, ce à quoi nous assistons «est plus qu’une crise économique et financière», estime-t-il, ajoutant: «Il y a une crise de gouvernance dans le pays.»

Ce n’est pas seulement le modèle économique du Liban «qui a vécu, c’est aussi le système politique qui a dégénéré», indique-t-il encore.

Reste à savoir qui va porter ces réformes. Sur ce point, Salam estime qu’il faut «de nouvelles forces politiques modernes», car «le projet de déconfessionnalisation, même progressive, ne peut pas être porté par des forces confessionnelles», or, «si l’on parle d’un nouveau Liban, d’un Liban moderne, il faudrait des forces modernes».

De telles forces finiront tôt ou tard par émerger. Entre-temps, on ne peut toutefois éviter de s’interroger sur la capacité du peuple libanais à survivre à la souffrance insoutenable qu’il endure.

Cette souffrance, qui s’intensifie sans cesse, peut-elle aider à la constitution apaisée d’une troisième République sans que l’on recoure à la violence, ni aux excès?

Depuis bientôt trois ans, le quotidien des Libanais se résume à une série de problèmes qui concernent tous les aspects de leur vie quotidienne.

Pendant ce temps, les dirigeants libanais de toutes confessions et de toutes tendances campent sur des acquis qu’ils sont prêts à défendre avec une âpre férocité, au détriment de tout un peuple. De fait, il semble bien que leur priorité soit d’assurer tout simplement leur propre pérennité, quitte à ne laisser derrière eux qu’un pays exsangue. Seule une nouvelle élite politique moderne et attachée à la bonne gouvernance du pays telle que le prône Salam sera à même d’inverser le destin d’une nation qui semble bel et bien, au fil des crises, être maudite.


L'armée israélienne dit avoir tué trois membres du Hezbollah dans le sud du Liban

Samedi, l'armée israélienne avait indiqué avoir suspendu "temporairement" une frappe prévue sur un bâtiment de la région méridionale de Yanouh, qu'elle avait décrit comme une infrastructure du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne avait indiqué avoir suspendu "temporairement" une frappe prévue sur un bâtiment de la région méridionale de Yanouh, qu'elle avait décrit comme une infrastructure du Hezbollah. (AFP)
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  • "Les terroristes ont participé à des tentatives visant à rétablir les infrastructures" du mouvement libanais, en violation de l'accord de cessez-le-feu de novembre 2024
  • Puis dans un autre communiqué, l'armée a précisé avoir tué "un terroriste" dans la région de Jwaya, qui avait "activé des agents (du Hezbollah) au sein des services de sécurité libanais".

JERUSALEM: L'armée israélienne a déclaré avoir tué dimanche trois membres du Hezbollah dans le sud du Liban, Beyrouth faisant état également de trois morts dans des frappes israéliennes dans la région.

"Depuis ce matin (dimanche), l'armée a frappé trois terroristes du Hezbollah dans plusieurs zones du sud du Liban", a précisé l'armée israélienne dans un communiqué.

"Les terroristes ont participé à des tentatives visant à rétablir les infrastructures" du mouvement libanais, en violation de l'accord de cessez-le-feu de novembre 2024, a-t-elle ajouté.

L'armée a ensuite affirmé avoir "éliminé" deux d'entre eux "en moins d'une heure", dans les régions de Yater et Bint Jbeil (sud du Liban).

Puis dans un autre communiqué, l'armée a précisé avoir tué "un terroriste" dans la région de Jwaya, qui avait "activé des agents (du Hezbollah) au sein des services de sécurité libanais".

Le ministère libanais de la Santé avait auparavant fait état de trois morts dans des frappes israéliennes à Yater, Safad Al-Battikh et Jwaya.

Un cessez-le-feu est en vigueur depuis novembre 2024 après plus d'un an d'hostilités entre Israël et le mouvement islamiste libanais, en marge de la guerre à Gaza.

Malgré cette trêve, Israël mène régulièrement des frappes au Liban, notamment dans le sud, bastion du Hezbollah, affirmant viser des membres et des infrastructures du mouvement libanais pour l'empêcher de se réarmer.

Samedi, l'armée israélienne avait indiqué avoir suspendu "temporairement" une frappe prévue sur un bâtiment de la région méridionale de Yanouh, qu'elle avait décrit comme une infrastructure du Hezbollah.

L'armée libanaise est censée achever d'ici la fin de l'année le démantèlement, prévu par l'accord de cessez-le-feu, des infrastructures militaires du Hezbollah entre la frontière israélienne et le fleuve Litani, situé à une trentaine de km plus au nord.

Depuis, les Etats-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe pro-iranien, et tarir les sources de financement de la formation islamiste.

Israël maintient cinq positions dans la zone, malgré son retrait du territoire libanais prévu par l'accord de cessez-le-feu.

Dans un discours samedi, le chef du Hezbollah, Naim Qassem, qui a rejeté à plusieurs reprises la perspective d'un désarmement du mouvement, a déclaré que celui-ci "ne permettra pas à Israël d'atteindre son objectif" de mettre fin à la résistance, "même si le monde entier s'unit contre le Liban".

 


Un an après la chute d’Assad, les Syriens affichent un fort soutien à al-Chareh

Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
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  • Un sondage révèle un optimisme croissant et un large soutien aux progrès du gouvernement après la chute d’Assad
  • L’Arabie saoudite apparaît comme le pays étranger le plus populaire, Trump reçoit également un soutien marqué

LONDRES : Alors que les Syriens ont célébré cette semaine le premier anniversaire de la chute de Bachar Al-Assad, une enquête menée dans le pays révèle un soutien massif au nouveau président et place l’Arabie saoudite comme principal partenaire international apprécié.

L’ancien président avait fui le pays le 8 décembre 2024, après une offensive éclair de l’opposition jusqu’à Damas, mettant fin à 14 ans de guerre civile.

La campagne était menée par Ahmad al-Chareh, aujourd’hui président du pays, qui s’efforce de stabiliser la Syrie et de rétablir des relations avec ses partenaires internationaux.

Ces efforts ont été salués dans un sondage récemment publié, montrant que 81 % des personnes interrogées ont confiance dans le président et 71 % dans le gouvernement national.

Les institutions clés bénéficient également d’un fort soutien : plus de 70 % pour l’armée et 62 % pour les tribunaux et le système judiciaire.

L’enquête a été menée en octobre et novembre par Arab Barometer, un réseau de recherche américain à but non lucratif.

Plus de 1 200 adultes sélectionnés aléatoirement ont été interrogés en personne à travers le pays sur une large gamme de sujets, notamment la performance du gouvernement, l’économie et la sécurité.

Le large soutien exprimé envers al-Chareh atteint un niveau enviable pour de nombreux gouvernements occidentaux, alors même que la Syrie fait face à de profondes difficultés.

Le coût de la reconstruction dépasse les 200 milliards de dollars selon la Banque mondiale, l’économie est dévastée et le pays connaît encore des épisodes de violence sectaire.

Al-Chareh s’efforce de mettre fin à l’isolement international de la Syrie, cherchant l’appui de pays de la région et obtenant un allègement des sanctions américaines.

Un soutien clé est venu d’Arabie saoudite, qui a offert une aide politique et économique. Le sondage place le Royaume comme le pays étranger le plus populaire, avec 90 % d’opinions favorables.

Le Qatar recueille lui aussi une forte popularité (plus de 80 %), suivi de la Turquie (73 %).

La majorité des personnes interrogées — 66 % — expriment également une opinion favorable envers les États-Unis, saluant la décision du président Donald Trump d’assouplir les sanctions et l’impact attendu sur leur vie quotidienne.

Après sa rencontre avec al-Chareh à Washington le mois dernier, Trump a annoncé une suspension partielle des sanctions, après en avoir déjà assoupli plusieurs volets.

Le sondage montre que 61 % des Syriens ont une opinion positive de Trump — un niveau supérieur à celui observé dans une grande partie du Moyen-Orient.

En revanche, l’enthousiasme est bien moindre concernant les efforts américains pour normaliser les relations entre la Syrie et Israël.

Seuls 14 % soutiennent cette démarche, et à peine 4 % disent avoir une opinion favorable d’Israël.

Lors du chaos provoqué par la chute d’Assad, l’armée israélienne a occupé de nouveaux territoires dans le sud de la Syrie et a mené de fréquentes attaques au cours de l’année écoulée.

Plus de 90 % des Syriens considèrent l’occupation israélienne des territoires palestiniens et les frappes contre l’Iran, le Liban et la Syrie comme des menaces critiques pour leur sécurité.

Dans Foreign Policy, Salma Al-Shami et Michael Robbins (Arab Barometer) écrivent que les résultats de l’enquête donnent des raisons d’être optimiste.

« Nous avons constaté que la population est pleine d’espoir, favorable à la démocratie et ouverte à l’aide étrangère », disent-ils. « Elle approuve et fait confiance à son gouvernement actuel. »

Mais ils notent aussi plusieurs sources d’inquiétude, notamment l’état de l’économie et la sécurité interne.

Le soutien au gouvernement chute nettement dans les régions majoritairement alaouites.

La dynastie Assad, au pouvoir pendant plus de 50 ans, était issue de la minorité alaouite, dont les membres occupaient de nombreux postes clés.

L’économie reste la principale préoccupation : seuls 17 % se disent satisfaits de sa performance, et beaucoup s’inquiètent de l’inflation, du chômage et de la pauvreté.

Quelque 86 % déclarent que leurs revenus ne couvrent pas leurs dépenses, et 65 % affirment avoir eu du mal à acheter de la nourriture le mois précédent.

La sécurité préoccupe aussi : 74 % soutiennent les efforts du gouvernement pour collecter les armes des groupes armés et 63 % considèrent l’enlèvement comme une menace critique.

À l’occasion de l’anniversaire de la chute d’Assad, lundi, al-Chareh a affirmé que le gouvernement œuvrait à construire une Syrie forte, à consolider sa stabilité et à préserver sa souveraineté.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël mène une série de frappes contre le Hezbollah au Liban

Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
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  • Israël a frappé vendredi plusieurs sites du Hezbollah au sud et à l’est du Liban, ciblant notamment un camp d’entraînement de sa force d’élite al-Radwan, malgré le cessez-le-feu conclu en novembre 2024
  • Ces raids interviennent alors que l’armée libanaise doit achever le démantèlement des infrastructures militaires du Hezbollah le long de la frontière israélienne d’ici le 31 décembre

BEYROUTH: Israël a mené une série de frappes aériennes contre le sud et l'est du Liban vendredi matin, selon les médias officiels, l'armée israélienne affirmant viser des objectifs du Hezbollah pro-iranien dont un camp d'entrainement.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le groupe islamiste libanais, Israël continue de mener des attaques régulières contre le Hezbollah, l'accusant de se réarmer.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani), les raids de vendredi, qualifiés en partie de "violents", ont visé une dizaine de lieux, certains situés à une trentaine de km de la frontière avec Israël.

Dans un communiqué, l'armée israélienne a affirmé avoir "frappé un complexe d'entrainement" de la force d'élite du Hezbollah, al-Radwan, où des membres de la formation chiite apprenaient "l'utilisation de différents types d'armes", devant servir dans "des attentats terroristes".

L'armée israélienne a également "frappé des infrastructures militaires supplémentaires du Hezbollah dans plusieurs régions du sud du Liban", a-t-elle ajouté.

L'aviation israélienne avait déjà visé certains des mêmes sites en début de semaine.

Ces frappes interviennent alors que l'armée libanaise doit achever le démantèlement le 31 décembre des infrastructures militaires du Hezbollah entre la frontière israélienne et le fleuve Litani, situé à une trentaine de km plus au nord, conformément à l'accord de cessez-le-feu.

Les zones visées vendredi se trouvent pour la plupart au nord du fleuve.

Le Hezbollah a été très affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth.

Depuis, les Etats-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe.