Les Palestiniens doivent d'abord faire la paix avec eux-mêmes

Le président palestinien Mahmoud Abbas s'exprime dans un message diffusé lors de la 75e session de l'AGNU le 25 septembre 2020, au siège de l'ONU. (AP)
Le président palestinien Mahmoud Abbas s'exprime dans un message diffusé lors de la 75e session de l'AGNU le 25 septembre 2020, au siège de l'ONU. (AP)
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Publié le Dimanche 27 septembre 2020

Les Palestiniens doivent d'abord faire la paix avec eux-mêmes

Les Palestiniens doivent d'abord faire la paix avec eux-mêmes
  • Le point de vue de Netanyahu et de ses alliés de droite est celui de la complaisance, sans aucun sentiment d’urgence de changer le statu quo avec les Palestiniens
  • Mis à part le calcul israélien, il y en a un, palestinien, qui, pour l'instant, semble être principalement motivé par la colère et l'amertume

Au-delà de leurs expressions de déception, il incombe désormais à la direction et à la politique palestiniennes divisées de trouver d'abord et avant tout un moyen de rassembler toutes les principales factions de Cisjordanie et de Gaza, principalement les mouvements du Fatah, du Hamas et de l'OLP, pour former une plate-forme commune et mettre de côté leurs différences. Leur récente réunion et leur accord sur un « leadership de terrain unifié » peuvent être un pas vers une telle unité de but, mais pour le moment, les déclarations ont été principalement des déclarations de défi et de « résistance populaire globale », plutôt que d’avoir formulé une unité de gouvernance, de raison d’être et de stratégie pour y parvenir.

Le discours sur un gouvernement d'unité est irréaliste et inutile; au lieu de cela, la première étape devrait être de relancer le processus politique qui permettrait aux Palestiniens d'élire pour la première fois, en plus de 15 ans, leur président, et en plus de 14 ans, leurs représentants au Conseil législatif palestinien, et de réformer également l'OLP. Un certain nombre d'accords antérieurs entre le Fatah et le Hamas fixaient les élections comme un objectif, mais aucune des deux parties n’y tenait vraiment, dissuadée par les sondages d'opinion peu flatteurs et donc contente de s'en tenir au statu quo.

Si le régime politique palestinien souhaite regagner la confiance de son propre peuple et le soutien actif d’éléments sympathisants de la communauté internationale, des élections justes et libres doivent être la première étape. Ces politiciens devraient également être à l’écoute des jeunes en les responsabilisant et les encourageant à faire partie du système politique. Sans ces changements, le soutien de masse critique et désespérément nécessaire aux dirigeants palestiniens à l’intérieur du pays et à l’étranger, et la croyance en la juste cause de l’autodétermination et de l’indépendance palestiniennes ne se matérialiseront jamais.

Si certains préconisent un retour à la lutte armée, il n'y a pas vraiment d'appétit pour cela en Cisjordanie ou à Gaza, et d'après l'expérience passée, sans parler de l'environnement international actuel, il est peu probable que cela aboutisse à quelque chose de tangible en plus de la souffrance et de la misère. Mais ce n’est pas au-delà de toute possibilité que certains éléments de la société palestinienne concluent que c’est le seul moyen qui leur reste pour tenter de sortir de l’impasse avec Israël, d’attirer l’attention sur leur situation difficile, ou même simplement comme une expression de pure frustration.

 Un gouvernement palestinien qui s'est uni et a reçu un mandat de son peuple pourrait se réengager avec la communauté internationale et plaider avec plus de force contre l'enracinement et la cruauté de l'occupation. 

Yossi Mekelberg

Cependant, un gouvernement palestinien qui s’unirait et qui aurait un mandat de son peuple pourrait reprendre contact avec la communauté internationale et plaider avec plus de force contre l’enracinement et la cruauté de l’occupation. La sympathie avec la juste cause des Palestiniens ne s’est pas évaporée, que ce soit dans le Golfe, dans l’UE ou ailleurs, mais plus que jamais, ces acteurs ne voient aucun avantage à investir du temps et des ressources dans un processus de paix qui a échoué ou dans une société palestinienne divisée. Il appartient donc aux Palestiniens de s'appuyer sur le succès des accords de normalisation pour empêcher leur annexion par Israël, et de mobiliser les États du Golfe pour qu'ils jouent un rôle proactif en apportant une solution juste au conflit avec Israël, sur la base de l’introduction d’un chemin réaliste, constructif et réalisable vers la paix, conformément aux résolutions de l'ONU et au droit international.

Il incomberait alors à Israël de répondre en nature et de prouver à ceux qui ont si courageusement tendu la main de la paix que c'est une incitation à retirer l'occupation, et non à la perpétuer, et à aller de l’avant vers le règlement du conflit avec les Palestiniens. À ce stade historique, ce qui est demandé des Palestiniens, c'est d'abord de faire la paix entre eux, puis d'exploiter les nouveaux développements régionaux pour faire avancer leur cause.

Yossi Mekelberg est professeur de relations internationales à la Regent’s University de Londres, où il dirige le programme des relations internationales et des sciences sociales. Il est également membre associé du programme MENA à Chatham House. Il contribue régulièrement aux médias internationaux écrits et électroniques.

Twitter: @YMekelberg

NDLR: les opinions exprimées par les rédacteurs dans cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com