La stratégie antiterroriste américaine devrait se concentrer sur l'Iran

Joe Biden et Kamala Harris observent l'opération antiterroriste qui a abouti à la mort d'Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qurachi, le 3 février. (Photo, Wiki Commons)
Joe Biden et Kamala Harris observent l'opération antiterroriste qui a abouti à la mort d'Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qurachi, le 3 février. (Photo, Wiki Commons)
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Publié le Samedi 12 février 2022

La stratégie antiterroriste américaine devrait se concentrer sur l'Iran

La stratégie antiterroriste américaine devrait se concentrer sur l'Iran
  • L'Iran est le premier État parrain du terrorisme dans le monde
  • La communauté internationale, en particulier l'administration américaine, doit tenir l'Iran responsable du financement, de l'armement et de l’autonomisation de ces groupes terroristes

Toute stratégie antiterroriste efficace doit s’attaquer à la racine du problème. Le raid américain de la semaine dernière a entraîné la mort du chef de Daech, Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qurachi, qui s'est fait exploser au moment où les troupes américaines se rapprochaient de la maison où il se terrait dans le nord de la Syrie. Bien que cela soit considéré comme une victoire en matière de sécurité nationale pour l'administration Biden, le terrorisme mondial est loin d'être vaincu. En effet, un rapport d'experts de l'ONU, basé sur les six derniers mois de 2021, reconnaît qu'«une éventuelle résurgence de Daech dans la région centrale (Syrie et Irak) ne peut être exclue».

Tant que le régime iranien ne sera pas fermement confronté, de nombreux groupes terroristes continueront à représenter une menace majeure pour la paix et la sécurité mondiales et persisteront à mener des activités terroristes. L'un des problèmes est que les dirigeants et les institutions militaires de Téhéran jouissent de la légitimité du système d'État-nation approuvé par l'ONU. Par conséquent, les interventions, l'aventurisme militaire et les crimes contre l'humanité commis par le Corps des gardiens de la révolution islamique et la Force d’Al-Quds attirent moins l'attention. Les religieux au pouvoir échappent à leurs actions brutales depuis près de quatre décennies parce qu'ils ont un «gouvernement».

L'Iran est le premier État parrain du terrorisme dans le monde. Il soutient, tant militairement que financièrement, de nombreuses milices et groupes terroristes dans le monde entier. Il crée aussi et de façon régulière de nouveaux groupes terroristes. Peu importe les ressources que les autres gouvernements dépensent pour combattre et éradiquer les groupes terroristes, le régime iranien trouve le moyen d'en créer de nouveaux. Même lorsqu'un groupe terroriste est éliminé, le régime en forme et en finance d'autres afin de faire avancer ses intérêts révolutionnaires et paroissiaux. Selon mes recherches à l'Université de Harvard, le régime iranien aide à lui seul près de la moitié des groupes terroristes désignés dans le monde.

Il s'ensuit que le régime iranien est très probablement responsable du sang versé dans de nombreux pays et de la mort d'innombrables victimes du terrorisme. Téhéran a également placé des espions, des lobbyistes et des agents dans le monde entier, y compris aux États-Unis.

Examinons, par exemple, les relations du régime iranien avec l'un des groupes terroristes les plus puissants au monde: Al-Qaïda. Leurs liens remontent au début des années 1990. À l'époque, Téhéran considérait Al-Qaïda, comme d'autres groupes terroristes, à travers le prisme de l'opportunisme idéologique et politique. Du point de vue des dirigeants iraniens, Al-Qaïda était un groupe terroriste non étatique inestimable qui pouvait l'aider à atteindre ses trois principaux objectifs révolutionnaires: l'antiaméricanisme, la mise à mal des intérêts de l'Arabie saoudite dans la région et la déstabilisation du Moyen-Orient afin que Téhéran puisse exploiter le chaos et l’instabilité. De plus, les divisions entre sunnites et chiites n'ont jamais été un problème pour le régime iranien.

Une convergence d'intérêts entre le régime iranien et les groupes terroristes conduit généralement à un épanouissement des liens. Par exemple, l'Iran a conclu un accord avec Al-Qaïda dans les années 1990 et a utilisé le Hezbollah pour fournir des fonds, des armes et des explosifs. Oussama ben Laden a même conseillé à ses partisans de vénérer le régime iranien et a écrit que Téhéran était «la principale artère d'Al-Qaïda pour les fonds, le personnel et la communication».

«Le régime iranien aide à lui seul près de la moitié des groupes terroristes désignés dans le monde.»

Dr Majid Rafizadeh

Trois des principales institutions de l'Iran semblent jouer un rôle vital dans l’aide apportée aux groupes terroristes et aux milices: le CGRI, sa force d'élite Al-Qods et le ministère du Renseignement. Même les dirigeants iraniens ont reconnu leurs liens avec des groupes terroristes. Par exemple, l'ancien général du CGRI Saeed Ghasemi a partagé une révélation surprenante en 2019, lorsqu'il a déclaré que le gouvernement iranien avait envoyé des agents en Bosnie pour former des membres d'Al-Qaïda et que ces agents avaient caché leur identité en se faisant passer pour des travailleurs humanitaires de la Société iranienne du Croissant-Rouge.

Un autre responsable iranien, Hossein Allahkaram, a souligné: «Al-Qaïda a différents grades et le grade qui était en Bosnie était lié à nous d’une certaine manière. Parfois, certains d'entre eux, après avoir été formés dans les bases d'Al-Qaïda et avoir reçu leurs armes, pour certaines raisons, quittaient cet endroit et venaient nous rejoindre.»

Ainsi, pour qu’une stratégie antiterroriste réussisse, elle doit se concentrer sur la confrontation avec la racine du problème, à savoir le régime iranien. Téhéran et ses institutions militaires doivent être considérés comme la plus grande menace pour la sécurité nationale du monde. Le régime semble être le parrain de nombreuses organisations terroristes dans la région. La communauté internationale, en particulier l'administration américaine, doit tenir l'Iran responsable du financement, de l'armement et de l’autonomisation de ces groupes.

• Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh

NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs dans cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com