La visite de Biden en Arabie saoudite, un retour à la norme, non une «réorientation»

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Publié le Mercredi 13 juillet 2022

La visite de Biden en Arabie saoudite, un retour à la norme, non une «réorientation»

La visite de Biden en Arabie saoudite, un retour à la norme, non une «réorientation»
  • Rien de tout cela n'est une «réorientation», c'est la norme: en fait, c'est la base même de nos relations bilatérales
  • Le bilan n'a pas toujours été négatif. En de nombreuses occasions, nos efforts et nos politiques ont reçu des éloges bienvenus

Le président américain, Joe Biden, arrive en Arabie saoudite cette semaine à l'invitation du roi Salmane. Il rencontrera vendredi à Djeddah, le roi et le prince héritier, Mohammed ben Salmane, et assistera à une réunion extraordinaire des six États du CCG plus l'Égypte, la Jordanie et l'Irak.

Bien qu'il soit évident, ici au Royaume, que cette visite revêt une grande importance pour les deux pays, certains des critiques du président ne sont peut-être pas aussi lucides que lui ou son équipe. C'est peut-être la raison pour laquelle Biden a rédigé une chronique soigneusement formulée, publiée dans le Washington Post la semaine dernière, intitulée «Pourquoi je vais en Arabie saoudite», dans laquelle il a clairement indiqué qu'en tant que président des États-Unis, son objectif n'était pas de «rompre», mais de «réorienter» les relations entre nos deux pays.

Le ton de la chronique était beaucoup plus équilibré, éloquent et représentatif de la longue carrière de Biden en tant que politicien chevronné que certains de ses discours précédents ; par exemple, son vœu de campagne électorale de faire de l'Arabie saoudite «un paria». Une telle déclaration explique pourquoi le légendaire ancien ambassadeur saoudien à Washington, le prince Bandar ben Sultane, avait l'habitude de décrire les périodes électorales américaines comme la «saison des absurdités», et il n'est pas nécessaire d’y attacher beaucoup d’importance. Après tout, qui, sain d'esprit, voudrait rompre une relation stratégique avec un pays de la taille et de l'importance de l'Arabie saoudite, le berceau de l'Islam, le lieu de culte de deux milliards de personnes et le plus important pays producteur de pétrole au monde?

Cependant, c'est la partie «réorientation» de la chronique de Biden avec laquelle je dois respectueusement être en désaccord. Il affirme qu'il vient à Djeddah parce que le Royaume a contribué à rétablir l'unité du Golfe, a soutenu la trêve au Yémen, s'efforce de stabiliser les marchés pétroliers et a contribué à maintenir la force et la sécurité de l’Amérique. Mais rien de tout cela n'est une «réorientation», c'est la norme: en fait, c'est la base même de nos relations bilatérales. Vous pourriez y ajouter la coopération pour mettre fin à l'invasion soviétique de l'Afghanistan, la lutte côte à côte pour libérer le Koweït, la coopération continue pour combattre le terrorisme, la collaboration dans l'exploration spatiale et la création d'entreprises conjointes pour créer des centaines de milliers d'emplois tant pour les Saoudiens que pour les Américains.

Qui, sain d'esprit, voudrait rompre une relation stratégique avec un pays de la taille et de l'importance de l'Arabie saoudite?

Faisal J. Abbas, Rédacteur en chef

En fait, toute déviation de cette norme a été, malheureusement, le fait des États-Unis. Concernant le Yémen, par exemple, la politique initiale de l'administration actuelle consistait à se désengager, à retirer les Houthis soutenus par l'Iran de la liste des terroristes et à retirer les batteries de missiles Patriot du Royaume, alors que les civils et les infrastructures pétrolières saoudiens étaient attaqués. Des civils, ne l'oublions pas, dans un pays que Biden décrit dans sa propre colonne comme un «partenaire stratégique depuis quatre-vingt ans», et des installations pétrolières qui étaient visées à un moment où les prix mondiaux de l'énergie n'avaient jamais été aussi élevés.

Toutefois, depuis que son administration a commencé à s'engager davantage, à accepter les faits et à rejeter la faute sur les personnes concernées, nous avons réussi ensemble à obtenir une trêve au Yémen qui est la plus longue à ce jour. On ne peut qu'espérer de nouveaux progrès avec l'aide de Washington, et une résolution finale pour une guerre à laquelle tout le monde souhaite mettre fin le plus tôt possible.

Comme l'ont clairement démontré les rapports publiés par le département d'État et d'autres agences américaines, ces sujets ont toujours été abordés. Les critiques étaient acceptées lorsqu'elles étaient légitimes, et rejetées lorsqu'elles ne l'étaient pas.

Faisal J. Abbas, Rédacteur en chef

Je me dois également de désapprouver respectueusement la suggestion selon laquelle mon pays bénéficiait auparavant d'une «politique du chèque en blanc», que l'administration américaine actuelle a inversée. Si cela signifie que le Royaume a bénéficié d'un laissez-passer en matière de droits de l'homme sous n'importe quelle administration précédente, alors c’est tout simplement faux. Comme l'ont clairement démontré les rapports publiés par le département d'État et d'autres agences américaines, ces sujets ont toujours été abordés. Les critiques étaient acceptées lorsqu'elles étaient légitimes, et rejetées lorsqu'elles ne l'étaient pas.

Le bilan n'a pas non plus toujours été négatif. A plusieurs occasions, nos efforts et nos politiques ont reçu des éloges bienvenus ; tout récemment de la part de Deborah Lipstadt, l'envoyée personnelle de Biden pour surveiller et combattre l'antisémitisme. Lors d'une visite à Riyad, où se trouve notre siège à Arab News, elle n'a eu que des mots chaleureux pour les réformes sociales et religieuses menées par le prince héritier.

Aucun pays n'est exempt de défauts, un truisme qui s'applique également aux États-Unis, où les divisions raciales et politiques croissantes, les brutalités policières et le maintien du camp de prisonniers de Guantanamo sont autant d'éléments plutôt alarmants pour nous, en tant qu’Arabes, qui attendons mieux d'un pays aussi grand que l'Amérique.

Pour ma part, je suis impatient de voir ce qui ressortira des réunions de vendredi. Je suis encore plus impatient de voir ce que les quatre-vingt prochaines années de relations entre l'Arabie saoudite et les États-Unis peuvent accomplir. À l'heure où de grandes opportunités se présentent, telles que les réformes religieuses, économiques et sociales dans mon pays, et où les défis mondiaux en matière de politique, de sécurité, de santé et de nutrition sont aussi redoutables, les relations entre Riyad et Washington sont plus importantes que jamais pour la paix, la stabilité et la prospérité de la planète entière.

 

Twitter : @FaisaljAbbas

Les opinions exprimées par les auteurs de cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com