L’Europe doit imposer des conséquences politiques au terrorisme iranien

Maryam Radjavi, présidente élue du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), lors de leur rassemblement à Villepinte, près de Paris, le 30 juin 2018. (Photo, Reuters)
Maryam Radjavi, présidente élue du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), lors de leur rassemblement à Villepinte, près de Paris, le 30 juin 2018. (Photo, Reuters)
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Publié le Samedi 31 octobre 2020

L’Europe doit imposer des conséquences politiques au terrorisme iranien

L’Europe doit imposer des conséquences politiques au terrorisme iranien
  • La politique iranienne de l’Occident devrait se concentrer sur le terrorisme de Téhéran qui, de toute évidence, devient de plus en plus dangereux et incontrôlé
  • L’Europe peut soit poursuivre la même politique improductive, soit éviter la mort d’innocents sur son sol en adoptant une politique ferme vis-à-vis du terrorisme de Téhéran

La menace terroriste du régime iranien contre les intérêts occidentaux a considérablement augmenté. Par conséquent, nous ne devons pas permettre que tout le débat sur la menace iranienne soit éclipsé par la question nucléaire.

La politique iranienne de l’Occident devrait se concentrer sur le terrorisme de Téhéran qui, de toute évidence, devient de plus en plus dangereux et incontrôlable. À titre d'exemple, le plus tristement célèbre: en juin 2018, Téhéran a tenté de poser une bombe lors d’un rassemblement international qui se tenait près de Paris, organisé par un groupe d'opposition, le Conseil national de la résistance iranienne (CNRI). Le complot a été déjoué à la dernière minute, mais cette tentative audacieuse était différente des incidents précédents.

Téhéran a commis de nombreux actes terroristes sur le sol étranger par le passé. Il y a trente-sept ans ce mois-ci, par exemple, ses agents ont conduit un camion transportant environ 907 kilogrammes d'explosifs dans un complexe du Corps des Marines des États-Unis situé à Beyrouth, tuant 241 militaires américains. Les tribunaux américains ont jugé que le régime iranien était à l'origine de l'attaque et lui ont ordonné de verser une compensation.

Cependant, presque rien n'a été fait politiquement pour tenir le régime responsable de l'explosion de 1983. Naturellement, les responsables du régime se sont enhardis et, en juillet 1987, Mohsen Rafiqdoost, alors ministre du Corps des gardiens de la révolution islamique, a eu l'audace de se vanter: «La TNT et l'idéologie qui, en une seule explosion, ont envoyé en enfer 400 officiers, sous-officiers et soldats au quartier général des Marines ont été fournies par l'Iran.»

Le complot terroriste de 2018 présentait des différences majeures par rapport aux complots précédents. Tout d'abord, le contexte national était différent et le régime a mené une telle opération par peur et une vulnérabilité extrêmes face à des manifestations croissantes. Deuxièmement, l'événement ciblé a attiré des dizaines de milliers de civils et des centaines de législateurs occidentaux de haut niveau, ainsi que d'anciens fonctionnaires venus des États-Unis, d'Europe et des pays arabes. Et, troisièmement, un diplomate officiel, et non un agent de renseignement de bas rang ou un agent terroriste, a été impliqué dans le complot.

Le dernier point est peut-être le plus important politiquement. Ce diplomate, Assadollah Assadi, sera jugé le mois prochain en Belgique. Ce sera la première fois dans l’histoire moderne qu’un diplomate actif est jugé pour terrorisme en Europe. Assadi est accusé d'avoir personnellement livré des explosifs et un détonateur à deux agents, dans le but de provoquer une explosion lors du rassemblement du CNRI. Au cours de son interrogatoire, tout comme Rafiqdoost, Assadi aurait eu l'audace de menacer l'Europe de nouveaux actes terroristes si les tribunaux le condamnaient.

Que signifie tout cela? Face à l'apaisement et à l'inaction de l'Occident, le régime iranien s'enhardit. À chaque fois que le régime a commis des actes terroristes, il semble l'avoir fait en toute impunité. L'Occident a fait peu, ou rien, pour le contrer.

Que faudrait-il donc faire concernant la tentative d’attentat à la bombe de 2018 en France? Premièrement, il est important de comprendre que le régime est terrifié par les soulèvements populaires comme les manifestations de novembre 2019, qui ont exprimé une énorme vague de colère publique dirigée contre la corruption et les politiques destructrices du régime. En réagissant de façon atroce, Téhéran a tué 1 500 manifestants en un peu plus d'une semaine et en a arrêté et torturé des milliers d'autres. Cette peur d’un renversement est probablement ce qui l'a poussé à tenter de poser une bombe lors de la manifestation parisienne.

En outre, tout en essayant de répondre à un régime iranien plus agressif et craintif, l'Europe se trouve maintenant à la croisée des chemins. Elle peut soit poursuivre la même politique improductive, soit éviter la mort d’innocents sur son sol en adoptant une politique ferme vis-à-vis du terrorisme de Téhéran.

Les tribunaux pourraient poursuivre non seulement Assadi, agent iranien, mais l’État lui-même, comme l’ont souligné les avocats du CNRI ainsi que des plaignants de grande renommée lors d’une conférence virtuelle sur le sujet la semaine dernière. Il semblerait que l’ordre d’exécution de l’attentat ait été donné par les plus hautes autorités, par l’intermédiaire du Conseil suprême de sécurité nationale. Cependant, des poursuites judiciaires ne suffisent tout simplement pas, comme nous l’a démontré l’attentat de Beyrouth. La réponse la plus percutante serait un changement de position politique.

L'Europe est-elle prête à adopter des mesures politiques importantes qui envoient un message rationnel à Téhéran, selon lequel les actes terroristes sur son sol ne seront plus tolérés? Si tel est le cas, elle devrait peut-être tenir compte de l’avis de la présidente élue du CNRI, Maryam Radjavi, exprimé lors de la conférence de la semaine dernière. Elle a appelé les autorités européennes à mettre sur liste noire le ministère du Renseignement et le CGRI, tous deux responsables de nombreux actes de terreur en Europe; à poursuivre et à expulser des agents du ministère du Renseignement et de la Force Al-Qods; et à fermer les ambassades du régime et les prétendues formations religieuses, qui servent de centres logistiques pour le terrorisme de Téhéran.

Beaucoup de choses sont en jeu. Si l’Europe devait se soustraire à ses responsabilités, elle rendrait un très mauvais service à ses citoyens ainsi qu’à la stabilité et à la sécurité de la région et de la communauté internationale dans son ensemble.

Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue iranien américain, diplômé de l’université de Harvard. Twitter : @Dr_Rafizadeh.

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com