L'Iran consolide d'un cran son emprise politique et économique sur l'Irak

Le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani. (Photo, AFP)
Le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani. (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 11 décembre 2022

L'Iran consolide d'un cran son emprise politique et économique sur l'Irak

Le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani. (Photo, AFP)
  • Soudani a salué l'Iran pour la fourniture d'un tiers des besoins irakiens en gaz et en électricité
  • Premier importateur de biens iraniens, l'Irak représente un «poumon économique» pour l'Iran

BAGDAD: Avec des partis pro-iraniens dominant le Parlement en Irak et un gouvernement issu de cette majorité, l'Iran consolide son emprise sur son voisin devenu son "poumon économique", estiment des experts, au grand dam des Etats-Unis.

En visite à Téhéran fin novembre, le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani et ses interlocuteurs ont plaidé pour une coopération accrue dans tous les domaines, alors que les deux pays, majoritairement chiites, sont déjà étroitement dépendants l'un de l'autre sur le plan économique.

M. Soudani a salué l'Iran pour la fourniture d'un tiers des besoins irakiens en gaz et en électricité. Cet approvisionnement se poursuivra tant que l'Irak ne pourra pas produire le gaz nécessaire au fonctionnement de ses centrales, a-t-il dit.

Premier importateur de biens iraniens, l'Irak représente un "poumon économique" pour l'Iran, sous le coup de sévères sanctions occidentales, souligne Ihsan al-Shammari, professeur de sciences politiques à l'Université de Bagdad.

"D'autant plus que les sanctions (...) s'accentuent et que les négociations sur le nucléaire (avec les grandes puissances) semblent mener à un accord défavorable à l'Iran", souligne M. Shammari.

D'où le "besoin urgent" pour Téhéran de "garder l'Irak dans son giron", selon lui. "Le rôle de l'Iran sera plus important que lors des gouvernements précédents", pronostique l'analyste.

Après l'invasion américaine qui renversa en 2003 Saddam Hussein (dont le régime avait mené une guerre de huit ans avec l'Iran), Téhéran a développé un réseau d'influence en Irak grâce aux liens tissés avec les barons chiites qui orchestrent aujourd'hui la vie politique irakienne.

«Pays disputé» 

"L'Irak est un pays disputé entre les Etats-Unis et l'Iran, avec en troisième position la Turquie qui exerce une forte influence économique et militaire dans le nord", résume Fabrice Balanche, de l'Université Lumière Lyon 2.

"Avec un pro-iranien à la tête de l'Etat irakien, l'Iran va pouvoir mieux tirer profit de l'économie irakienne", confirme-t-il, rappelant que M. Soudani a fait "l'essentiel de sa carrière politique dans l'ombre de Nouri al-Maliki", ex-Premier ministre proche de Téhéran.

L'emprise iranienne s'illustre par les liens avec les ex-paramilitaires du Hachd al-Chaabi. Intégrés aux forces régulières irakiennes après la lutte contre les djihadistes du groupe Etat islamique (EI), ils jouissent désormais d'un rôle politique incontournable.

Au Parlement, leur coalition du Cadre de coordination est la première force de l'hémicycle avec 138 députés sur 329. L'alliance regroupe plusieurs factions pro-Iran, dont celle de Nouri al-Maliki.

Et ce pouvoir va en s'institutionnalisant. Fin novembre, le gouvernement irakien a confié au Hach al-Chaabi la gestion d'une entreprise de travaux publics dotée d'un capital d'environ 68 millions de dollars.

La société a été appelée "Al-Mouhandis", en hommage à Abou Mehdi al-Mouhandis, numéro deux du Hachd al-Chaabi qui avait été tué en janvier 2020 avec le général iranien Qassem Souleimani en Irak par un drone armé américain.

Dans un pays riche en pétrole mais ravagé par des décennies de conflits, l'entreprise aura pour mission de "réhabiliter et développer les provinces: infrastructures, logements, hôpitaux, usines", indique à l'AFP un responsable communication du Hachd, sous couvert de l'anonymat.

«Equilibre» 

Le chef de la diplomatie irakienne, le Kurde Fouad Hussein, a récemment jugé "injuste" d'accuser son gouvernement d'être "rattaché" aux autorités iraniennes. Et d'arguer que le gouvernement de Bagdad affiche un "équilibre" entre ses différentes forces.

Mais les partis pro-Iran semblent bien avoir désormais les coudées franches après un été durant lequel leur adversaire Moqtada Sadr a tenté, en vain et malgré des combats meurtriers, d'empêcher la nomination de M. Soudani.

Si l'Iran jouit d'une influence grandissante en Irak, les Etats-Unis n'en ont pas pour autant été évincés.

Des troupes américaines stationnent toujours dans le pays dans le cadre de la coalition internationale antidjihadistes. Et des internautes ont récemment raillé le rythme soutenu des rencontres entre le Premier ministre et l'ambassadrice américaine.

"L'influence américaine demeure en Irak à travers la menace des sanctions financières", ajoute M. Balanche, évoquant la surveillance par Washington des flux financiers et du système bancaire, pour s'assurer qu'il n'est pas utilisé par l'Iran pour contourner les sanctions.

Et de souligner: "les Etats-Unis restent en Irak pour ne pas abandonner le pays complètement à l'Iran".


L'Arabie saoudite : un acteur clé dans la lutte contre la criminalité financière, selon Nathalie Goulet

La sénatrice française Nathalie Goulet a salué l'ambition et l'engagement de l'Arabie saoudite dans la lutte contre le blanchiment d'argent et la criminalité financière. (AFP)
La sénatrice française Nathalie Goulet a salué l'ambition et l'engagement de l'Arabie saoudite dans la lutte contre le blanchiment d'argent et la criminalité financière. (AFP)
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  • Le Royaume, selon Nathalie Goulet, dispose aujourd’hui des moyens économiques et techniques pour s’imposer comme acteur clé du dispositif mondial AML/CFT
  • L'Arabie saoudite ouvre une nouvelle ère de transparence, selon M. Goulet

DUBAÏ: À quelques semaines de la conférence internationale “Sanctions, AML & CFT for Banking and Finance in the Kingdom of Saudi Arabia”, qui se tiendra à Riyad les 21 et 22 octobre 2025, la sénatrice française Nathalie Goulet, dans un entretient accordé à Arab News en français, salue l’ambition et l'engagement de l’Arabie saoudite dans la lutte contre le blanchiment d'argent et la criminalité financière.

« L'Arabie saoudite a été en tête de ‘No Money for Terror’ dans le temps. Elle en est absolument capable, et en plus, elle a un leader très fort et une vision claire, » declare la sénatrice.

Une volonté politique affirmée

Pour Nathalie Goulet, l’évolution du Royaume ne fait aucun doute.

« Le Prince Mohammed Ben Salman, dès son arrivée au pouvoir, a immédiatement réglé les questions de corruption. Il a insufflé une politique et une volonté. »

Cette transformation accompagne l’ouverture rapide du Royaume, notamment dans le cadre de la Vision 2030, et s’inscrit dans un effort plus large pour assainir le climat des affaires et attirer des investissements étrangers dans un cadre juridico-financier stable.

« Ça se passe très bien. Mais c’est aussi une question de volonté. Et la volonté en Arabie saoudite est très marquée. »

Riyad, prochain centre de gravité régional pour la compliance

L’événement d’octobre réunira régulateurs, banquiers, juristes et spécialistes de la conformité du monde entier. Pour Nathalie Goulet, c’est une opportunité cruciale :

« Ce que j’attends, ce sont des échanges de bonnes pratiques très concrets. Car parfois, ce ne sont pas les lois qui changent les choses, ce sont aussi les interactions entre professionnels, au quotidien. »

Elle y partagera notamment son expérience sur les enjeux de transparence financière et de coopération internationale.

Des progrès significatifs et une coopération régionale renforcée

À la suite de sa participation au sommet Fighting Financial Crime à Abou Dhabi les 10 et 11 septembre derniers, Nathalie Goulet a salué les efforts des Émirats arabes unis, récemment sortis de la liste grise du GAFI.

« Il y a une vraie volonté au plus haut niveau. Et cette volonté est contagieuse. On voit aussi une forte implication saoudienne, par exemple par l'intermédiaire de Nazaha, l'autorité de lutte contre la corruption. »

Pour elle, la dynamique régionale est en marche : extraditions facilitées, respect accru des règles de coopération judiciaire, montée en compétence des autorités locales.

Un enjeu global et des réponses encore fragmentées

Malgré ces progrès, selon la sénatrice, le constat demeure alarmant : entre 2 et 5 % du PIB Mondial, seraient issus du blanchiment d’argent, mais seulement 1 à 2 % des fonds sont effectivement récupérés.

« Ce sont des milliards qui échappent aux écoles, aux hôpitaux, aux routes. Et un immense manque à gagner pour les citoyens. »

Outre l’utilisation massive de cryptoactifs non régulés et le traffic de migrants, Nathalie Goulet alerte sur les techniques des réseaux criminels de plus en plus inventives : trafic d’or déguisé en café et cargaisons de bananes trafiquées.

Enjeux spécifiques au Moyen-Orient

Le Moyen-Orient n’échappe pas à ces mutations. Nathalie Goulet pointe plusieurs problématiques: le trafic d’or, l’usage débridé des crypto-actifs, et la contrefaçon massive.

« La contrefaçon, ce ne sont pas que des faux sacs. Ce sont aussi des faux médicaments, des pièces détachées défectueuses, du tabac illicite… Le coût global est estimé à 650 milliards de dollars par an. » (Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle, 2022)

Elle insiste sur la nécessité de renforcer la traçabilité, même dans des réseaux informels comme les systèmes de transfert d’argent ou certaines plateformes numériques.

La coopération et la formation au cœur de la réponse

Face à ces défis, Nathalie Goulet appelle à une action multilatérale renforcée : formations spécialisées, partage d’informations, benchmarking international et adoption des nouvelles technologies.

« Il faut former les magistrats, les douaniers, les régulateurs. Mais aussi renforcer la coopération entre pays et partager les bonnes pratiques. »

Elle évoque aussi le rôle central de l’intelligence artificielle dans la détection des flux suspects, et appelle à la création de bourses d’étude sur les crypto-actifs et leurs mécanismes.

Arabie saoudite : vers un rôle structurant dans le système international

Alors que l’Arabie saoudite s’impose de plus en plus comme un hub régional de la finance, la question de son influence future au sein d’organisations comme le GAFI se pose.

« Le Royaume a les moyens, l’ambition et la volonté. Il applique déjà les règles, coopère efficacement, et montre l’exemple. »

La récente nomination d’un responsable émirien à la tête d’Interpol, le général de division Ahmed Naser Al-Raisi, ajoute-t-elle, reflète également l’influence croissante de la région dans la gouvernance sécuritaire mondiale.

Un combat global au service des citoyens

Selon Nathalie Goulet, l’enjeu dépasse largement les frontières des États et des institutions financières et ne peut être reléguée au second plan, même en temps de crise économique.

« Justement, parce que le climat économique est dégradé, on ne peut pas laisser l’argent échapper à la société. La criminalité détourne les ressources publiques. C’est un combat pour le citoyen, pour l’école, pour l’hôpital, » explique la sénatrice.

Riyad marquera une nouvelle étape. Et pour elle, chaque conférence, chaque échange entre professionnels, chaque progrès technique ou réglementaire contribue à une économie plus saine et plus équitable.


Israël rejette une enquête de l'ONU l'accusant de «génocide» à Gaza

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
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  • "Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué
  • Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens

JERUSALEM: Israël a "rejeté catégoriquement" mardi le rapport d'une commission d'enquête internationale indépendante des Nations unies qui l'accuse de commettre un "génocide" dans la bande de Gaza depuis octobre 2023.

"Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens, mettant en cause le Premier ministre Benjamin Netanyahu et d'autres responsables israéliens.

En riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, Israël a lancé une offensive dans la bande de Gaza qui a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste palestinien a pris le pouvoir en 2007.

La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU et est vivement critiquée par Israël, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produit à Gaza et continue de (s'y) produire", a déclaré à l'AFP sa présidente, Navi Pillay.

Elle a conclu que les autorités et les forces de sécurité israéliennes avaient commis "quatre des cinq actes génocidaires" définis par la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime du génocide.

A savoir: "meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; et mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe".

Cette commission a conclu que le président israélien, Isaac Herzog, Benjamin Netanyahu et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, avaient "incité à commettre un génocide et que les autorités israéliennes (n'avaient) pas pris de mesures" pour les en empêcher.

Le ministère des Affaires étrangères israélien a accusé les auteurs du rapport de "servir de relais au Hamas", affirmant qu'ils étaient "connus pour leurs positions ouvertement antisémites — et dont les déclarations horribles à l'égard des Juifs ont été condamnées dans le monde entier."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien.

L'ONU y a déclaré la famine, ce qu'Israël dément.


«Gaza brûle», déclare le ministre israélien de la Défense après des frappes intenses

Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
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  • "Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas"
  • "Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza.

"Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas", a déclaré M. Katz sur X.

"Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée", a-t-il ajouté.