Dans la Corne de l'Afrique, 22 millions de personnes menacées par la sécheresse

Un éleveur marche avec des ânes dans une zone située à 30 kilomètres de la ville de Gode, en Éthiopie, le 13 janvier 2023. Les cinq dernières saisons des pluies depuis la fin de 2020 ont échoué, déclenchant la pire sécheresse depuis quatre décennies en Éthiopie, en Somalie et au Kenya. (AFP).
Un éleveur marche avec des ânes dans une zone située à 30 kilomètres de la ville de Gode, en Éthiopie, le 13 janvier 2023. Les cinq dernières saisons des pluies depuis la fin de 2020 ont échoué, déclenchant la pire sécheresse depuis quatre décennies en Éthiopie, en Somalie et au Kenya. (AFP).
Short Url
Publié le Lundi 30 janvier 2023

Dans la Corne de l'Afrique, 22 millions de personnes menacées par la sécheresse

  • Dans la Corne de l'Afrique, près de 5,6 millions de personnes se trouvent aujourd'hui en situation d'«insécurité alimentaire aiguë» en Somalie, 12 millions en Ethiopie et 4,3 millions au Kenya, selon l'ONU
  • Plus de 1,7 million de personnes ont quitté leurs foyers en quête d'eau et de nourriture, selon un dernier rapport du Programme alimentaire mondial publié le 23 janvier

K'EFALO : Du sud de l'Ethiopie au nord du Kenya en passant par la Somalie, 22 millions de personnes sont menacées par la faim, victimes d'une sécheresse historique débutée fin 2020 et amenée à durer dans les prochains mois.

Ce chiffre a presque doublé depuis début 2022, lorsque 13 millions de personnes étaient confrontées à la faim dans la Corne de l'Afrique.

Dans cette région où la population vit majoritairement de l'élevage et de l'agriculture, près de 5,6 millions de personnes se trouvent aujourd'hui en situation d'"insécurité alimentaire aiguë" en Somalie, 12 millions en Ethiopie et 4,3 millions au Kenya, selon l'ONU.

Plus de 1,7 million de personnes ont quitté leurs foyers en quête d'eau et de nourriture, selon un dernier rapport du Programme alimentaire mondial publié le 23 janvier.

Une interminable sécheresse

La Corne de l'Afrique est une des régions les plus durement touchées par le changement climatique.

Depuis 2016, huit des treize saisons des pluies ont été inférieures à la normale, selon les données du Centre d'étude des risques climatiques (Climate Hazards Centre), organisme de référence qui regroupe notamment des universitaires et le Réseau des systèmes d'alerte précoce contre la famine (Fews).

La sécheresse actuelle est causée par un enchaînement de cinq saisons des pluies défaillantes depuis fin 2020, du jamais vu depuis au moins 40 ans. Aucune famine n'a toutefois été pour l'instant officiellement déclarée.

La dernière famine dans la région, qui avait fait 260 000 morts dont la moitié d'enfants de moins de six ans en Somalie en 2011, avait résulté de deux saisons des pluies insuffisantes consécutives.

A travers la Corne de l'Afrique, les cultures, déjà ravagées par une invasion de criquets, ont été anéanties et les troupeaux, en manque d'eau et de pâturages, décimés. Plus de 9,5 millions de têtes de bétail sont mortes, estimait le Bureau de coordination humanitaire de l'ONU (Ocha) en novembre.

Cette crise a été aggravée par les répercussions de la guerre en Ukraine, qui a renchéri le prix des céréales et des carburants et capté de nombreux fonds d'aide humanitaire.

La situation va encore empirer dans les mois à venir, alertent les organisations humanitaires, avec une sixième saison des pluies, de mars à mai, également annoncée inférieure à la moyenne.

Somalie, l'épicentre

La Somalie est le pays le plus sévèrement touché, avec plus de la moitié de sa population (7,85 millions de personnes) affectée par cette sécheresse.

Officiellement, les seuils nécessaires pour déclarer une famine n'ont pas été atteints, notamment grâce à une mobilisation financière de dernière minute fin 2022.

Mais sans une amplification de la réponse humanitaire, "une famine devrait se produire entre avril et juin 2023 dans le sud de la Somalie parmi les populations agropastorales des districts de Baidoa et Burhakaba, et parmi les populations déplacées dans la ville de Baidoa et à Mogadiscio", a prévenu Ocha en décembre.

Le nombre de personnes en situation de "catastrophe" alimentaire, dernier stade avant la famine selon la terminologie internationale, devrait passer de 214 000 à 727 000 d'ici mi-2023, selon Ocha.

Enfants en danger

Selon l'Unicef, près de deux millions d'enfants à travers la Corne de l'Afrique "ont besoin d'un traitement urgent contre la malnutrition aiguë sévère, la forme la plus mortelle de la faim".

L'Unicef estimait en septembre que 730 enfants étaient morts entre janvier et juillet 2022 dans des centres de nutrition en Somalie, un chiffre qu'elle jugeait probablement inférieur à la réalité.

En manque d'eau, de lait et de nourriture, vivant souvent dans des conditions insalubres, les plus jeunes se retrouvent considérablement affaiblis, leur organisme rendu plus vulnérable aux maladies (rougeole, choléra...) et leur croissance altérée sur le long terme.

Accompagnant leurs familles déplacées ou envoyés quotidiennement à la recherche de nourriture, 2,7 millions d'enfants ont par ailleurs quitté l'école et quatre millions d'autres risquent d'abandonner leur scolarité.

Appels à financement

"Il n'y a pas de fin en vue pour la crise de la faim", estime le directeur de l'ONG Save The Children pour l'Ethiopie, Xavier Joubert: "Les besoins sont devenus énormes. Des fonds supplémentaires (...) sont désespérément nécessaires".

Aujourd'hui, seuls 55,8% des 5,9 milliards de dollars réclamés par l'ONU pour pallier cette crise en 2023 ont été financés.

En 2017, une mobilisation humanitaire précoce avait permis d'éviter une famine en Somalie.


Afghanistan: un gouverneur taliban tué dans un attentat suicide

Le gouverneur par intérim d'une province afghane a été tué dans un attentat suicide mardi, ont annoncé des responsables, quelques mois après que le chef de la police locale a été tué dans une attaque similaire revendiquée par le groupe Etat islamique. (AFP)
Le gouverneur par intérim d'une province afghane a été tué dans un attentat suicide mardi, ont annoncé des responsables, quelques mois après que le chef de la police locale a été tué dans une attaque similaire revendiquée par le groupe Etat islamique. (AFP)
Short Url
  • Le kamikaze a conduit une voiture remplie d'explosifs dans la ville de Faizabad et visé le véhicule transportant Nisar Ahmad Ahmadi, le gouverneur adjoint de la province de Badakhshan
  • Son chauffeur a également été tué et six autres personnes ont été blessées dans cette attaque, qui n'a pas pour l'instant été revendiquée

FAIZABAD: Le gouverneur par intérim d'une province afghane a été tué dans un attentat suicide mardi, ont annoncé des responsables, quelques mois après que le chef de la police locale a été tué dans une attaque similaire revendiquée par le groupe Etat islamique.

Le kamikaze a conduit une voiture remplie d'explosifs dans la ville de Faizabad et visé le véhicule transportant Nisar Ahmad Ahmadi, le gouverneur adjoint de la province de Badakhshan (nord-est), nommé gouverneur par intérim le mois dernier.

"La cible de cette attaque était le véhicule transportant Nisar Ahmad Ahmadi", a déclaré Muazuddin Ahmadi, chef du département provincial de la Culture et de l'Information.

Son chauffeur a également été tué et six autres personnes ont été blessées dans cette attaque, qui n'a pas pour l'instant été revendiquée.

En décembre 2022, le chef de la police de cette province avait été tué dans un attentat suicide revendiqué par le groupe Etat islamique (EI). Quelques mois plus tôt, en avril 2022, le chef du département des mines avait aussi été tué dans un attentat à la bombe.

La sécurité s'est considérablement améliorée depuis que les talibans ont repris le pouvoir en août 2021 et chassé le gouvernement soutenu par les Etats-Unis, mettant fin à deux décennies d'insurrection. Le groupe Etat islamique reste toutefois la plus grande menace sécuritaire pour le gouvernement.

Depuis le retour au pouvoir des talibans, l'EI a tué et blessé des centaines de personnes dans plusieurs attentats, dont certains visaient des étrangers ou des intérêts étrangers dans le but de saper le gouvernement taliban.

L'EI et les talibans partagent une idéologie islamiste sunnite austère, mais le premier lutte pour l'établissement d'un "califat" mondial, tandis que les seconds souhaitent diriger un Afghanistan indépendant.


L'impossible décompte du bilan des civils tués en Ukraine

Des soldats ukrainiens portent le cercueil du défunt militaire ukrainien Mykola Kovalskyi lors d'une cérémonie funéraire au cimetière de Lychakiv à Lviv le 1er juin 2023, en pleine invasion russe de l'Ukraine. (AFP)
Des soldats ukrainiens portent le cercueil du défunt militaire ukrainien Mykola Kovalskyi lors d'une cérémonie funéraire au cimetière de Lychakiv à Lviv le 1er juin 2023, en pleine invasion russe de l'Ukraine. (AFP)
Short Url
  • Selon un bilan à jour publié par les autorités ukrainiennes, au moins 10 368 civils ont été tués et 14 404 blessés depuis le début de l'invasion russe en février 2022
  • Les données sont peu ou prou conformes à celles avancées par l'ONU, qui décomptait 8.709 tués et 14 666 blessés à la fin avril tout en notant que le bilan réel était sans doute «considérablement plus élevé»

OUMAN: Une frappe russe a tout pris à Oleksandre Remez: sa femme Natalia a été tuée et son appartement dans la ville ukrainienne d'Ouman ravagé. Lui a survécu, car son réveil matinal l'a éloigné de la chambre à coucher.

Fin mai, un mois après le drame, debout devant les décombres de son immeuble, il dit vouloir une chose: que toutes les victimes de cette guerre soient comptabilisées.

"Nous avons besoin de connaître les chiffres, mais aussi les noms, car personne ne doit être oublié", plaide cet homme de 63 ans, entre plusieurs sanglots.

Mais compter les morts est un exercice difficile, alors que 20% du pays environ est occupé. Selon un bilan à jour publié par les autorités ukrainiennes, au moins 10.368 civils ont été tués et 14.404 blessés depuis le début de l'invasion russe en février 2022.

Mais "ce sont uniquement les personnes connues", explique Oleg Gavrych, conseiller principal du chef du cabinet du président Volodymyr Zelensky.

"Nous estimons que le plus probable est que ce nombre est cinq fois plus élevé. Donc autour de 50.000" victimes, précise-t-il.

Les données sont peu ou prou conformes à celles avancées par l'ONU, qui décomptait 8 709 tués et 14 666 blessés à la fin avril tout en notant que le bilan réel était sans doute "considérablement plus élevé".

La Russie "doit être tenue responsable pour chaque" mort, réclame dans un cri du cœur Oleksandre Remez, devant le mémorial installé en souvenir des 23 personnes tuées, dont son épouse et quatre enfants, par la frappe russe qui le 28 avril a éventré son immeuble à Ouman.

Obstacles dans les zones occupées par la Russie, comme Bakhmout

Mais l'un des principaux obstacles pour le décompte des victimes est l'absence quasi-totale d'informations dans les zones occupées par la Russie, comme à Marioupol, où des dizaines de milliers de civils auraient trouvé la mort selon les autorités ukrainiennes lors du siège dévastateur au printemps 2022.

Selon des experts, même si les Ukrainiens parvenaient à reconquérir les territoires occupés, retrouver et compter les victimes risque d'être une tâche difficile, les Russes ayant pu cacher corps et preuves.

"Ils ont intérêt à cacher leurs crimes", observe ainsi Philip Verwimp, un expert en démographie dans les zones de conflit.

En outre, dans des zones ravagées par les combats, comme par exemple Bakhmout dans l'Est, il est souvent difficile d'établir qui a disparu, qui est mort et qui a fui.

Etablir un bilan complet pourrait donc prendre des années, comme l'a montré le conflit en Bosnie-Herzégovine dans les années 1990.

Une base de données publiée en 2007 a ainsi rassemblé les noms de près de 97.000 morts en Bosnie, un bilan deux fois moins élevé que le décompte utilisé jusque-là.

Guerre en Ukraine: «Plus jamais ça»

Selon M. Verwimp, qui a participé à l'évaluation des données de ce "Livre des morts de Bosnie", il est crucial d'obtenir des données vérifiables.

Selon lui, "les Ukrainiens sont très rapides pour faire ça: dès qu'ils reprennent des villages, ils envoient des enquêteurs pour documenter les crimes de guerre russes", exhumer des corps et interroger les témoins.

Pour Jakub Bijak, un universitaire qui a travaillé avec l'ONU afin d'établir la liste des victimes de la guerre en Bosnie, le décompte précis des victimes est important pour le deuil des familles.

Mais "c'est politiquement (important aussi) d'établir le niveau des pertes qu'un pays a subi durant une guerre", ajoute-t-il.

Dès lors, depuis le début de l'invasion russe, les autorités ukrainiennes s'efforcent d'enregistrer tous les crimes de guerre russes présumés (meurtres de civils, agressions sexuelles, destructions d'habitations et de sites culturels...).

Elles tombent par contre dans le mutisme lorsqu'il s'agit d'évoquer le bilan de ses militaires tués.

Pour Oleksandre Remez, à ce stade, sa seule source de réconfort est de documenter la mort de sa femme Natalia.

"Nous devons tout savoir, faire tout ce qui est possible pour éviter que cela ne se reproduise", jure-t-il. "Les enfants, les bébés, pourquoi meurent-ils ?"


Ukraine: un barrage partiellement détruit, Zelensky convoque son conseil de sécurité

Le barrage de Nova Khakovka dans le sud de l'Ukraine, le 28 mai 2022. (AFP)
Le barrage de Nova Khakovka dans le sud de l'Ukraine, le 28 mai 2022. (AFP)
Short Url
  • Les forces ukrainiennes ont effectué de «multiples frappes» sur le barrage de Kakhovka dans la nuit de lundi à mardi, a déclaré sur Telegram le maire de la ville de Nova Kakhovka
  • Il a affirmé qu'elles avaient détruit les robinets-vannes du barrage et provoqué un «rejet d'eau incontrôlable»

MOSCOU: Le barrage hydroélectrique de Kakhovka, situé dans les zones de la région de Kherson occupées par la Russie dans le Sud de l'Ukraine, a été partiellement détruit mardi, Moscou et Kiev s'accusant mutuellement d'en être responsables.

Les forces ukrainiennes ont effectué de "multiples frappes" sur le barrage de Kakhovka dans la nuit de lundi à mardi, a déclaré sur Telegram le maire de la ville de Nova Kakhovka, Vladimir Leontiev, en affirmant qu'elles avaient détruit les robinets-vannes du barrage et provoqué un "rejet d'eau incontrôlable".

"Le barrage n'est pas détruit et c'est un bonheur immense", a-t-il toutefois assuré.

Pour sa part, l'armée ukrainienne a accusé dans un communiqué la Russie d'avoir organisé une explosion sur le barrage. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a convoqué d'urgence son conseil de sécurité, a annoncé le chef de l'administration présidentielle ukrainienne, Andriï Iermak, sur Telegram, en dénonçant un "crime de guerre".

La montée d'eau a été constatée dans plusieurs localités situées à proximité du barrage sans que la situation devienne critique, selon l'administration de la région de Kherson, installée par la Russie.

"S'il le faut, nous sommes prêts à évacuer les habitants des villages riverains", a déclaré dans un communiqué sur Telegram le chef du gouvernement de la région de Kherson, Andreï Alekseïenko, en soulignant toutefois que leur vie n'est pas menacée et appelant à "ne pas céder à la panique".

Le barrage de Kakhovka, pris dès le début de l'offensive russe en Ukraine, permet notamment d'alimenter en eau la péninsule de Crimée, annexée en 2014 par Moscou.

Aménagé sur le fleuve Dniepr en 1956, pendant la période soviétique, l'ouvrage est construit en partie en béton et en terre.

Il s'agit de l'une des plus grandes infrastructures de ce type en Ukraine.