Séisme: à Alep, rester chez soi malgré tout

Ali al-Bash et sa mère Amina Raslan boivent du café chez eux, dans un bâtiment endommagé par le séisme de magnitude 7,8, dans le quartier al-Masharqa de la ville d'Alep, le 21 février 2023. (AFP).
Ali al-Bash et sa mère Amina Raslan boivent du café chez eux, dans un bâtiment endommagé par le séisme de magnitude 7,8, dans le quartier al-Masharqa de la ville d'Alep, le 21 février 2023. (AFP).
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Publié le Mercredi 22 février 2023

Séisme: à Alep, rester chez soi malgré tout

  • Le tremblement de terre du 6 février, qui a violemment secoué la grande ville du nord de la Syrie, a provoqué l'effondrement du bâtiment contigu à celui d'Oum Mounir, emportant avec lui une des façades de son immeuble
  • Mais cette veuve de 55 ans refuse de rejoindre la cohorte d'habitants d'Alep qui se sont réfugiés dans des centres d'accueil ou chez leurs proches

ALEP : Le séisme a laissé un trou béant dans sa chambre à coucher, mais Oum Mounir s'entête à rester chez elle: cette Alépine affirme qu'elle ne quittera sa maison que pour aller au cimetière.

Le tremblement de terre du 6 février, qui a violemment secoué la grande ville du nord de la Syrie, a provoqué l'effondrement du bâtiment contigu à celui d'Oum Mounir, emportant avec lui une des façades de son immeuble.

Mais cette veuve de 55 ans refuse de rejoindre la cohorte d'habitants d'Alep qui se sont réfugiés dans des centres d'accueil ou chez leurs proches.

"Rien ne me fera sortir de ma maison, sauf la mort. A ce moment-là, j'irai directement au cimetière", dit-elle calmement, montrant son lit recouvert de pierres, et les armoires et commodes endommagées.

Son appartement se situe au quatrième étage d'un immeuble dévasté du quartier de Macharka à Alep, déjà durement touché par les combats entre 2012 et 2016.

"Nous avions de l'argent, la guerre a changé notre situation mais nous gardons notre dignité", assure Oum Mounir, mère de deux enfants qui sont à l'étranger. "Nous n'avons pas fui, même au plus fort de la guerre" civile déclenchée en 2011.

Emmitouflée dans un manteau noir en raison du froid, elle reconnait que l'immeuble risque de s'effondrer en cas de nouvelles secousses.

Deux séismes de forte puissance (6,4 et 5,8) ont de nouveau secoué la région lundi soir, provoquant la panique à Alep.

A chaque fois que la terre tremble, Oum Mounir se réfugie dans la rue avec sa voisine. "Je suis convaincue que Dieu nous protègera", assure-t-elle.

Plus de trente personnes ont été tuées dans l'effondrement de deux immeubles dans son

quartier, qui était sur la ligne de front avant que les forces loyalistes reprennent le contrôle total d'Alep en décembre 2016.

Le séisme de magnitude 7,8 qui a frappé la Turquie et la Syrie le 6 février a fait près de 45 000 morts dans les deux pays, dont plus de 3.600 en Syrie.

«Nulle part où aller»

Voisin de Oum Mounir, Ali el-Bach a également décidé de rester chez lui, au premier étage de l'immeuble. Lui aussi a vu sa chambre se transformer en balcon, avec vue imprenable sur le cratère laissé par l'effondrement du bâtiment à côté.

"Nous n'avons nulle part où aller", dit cet homme de 55 ans, assis sur une pierre, à côté de la cage de son fidèle canari. "De toute façon, nous sommes habitués au danger, pendant la guerre notre immeuble a été touché par des obus."

Lundi soir, il a couru avec son épouse, sa mère et ses enfants se réfugier dans un parc voisin, comme il le fait à chaque secousse depuis le séisme dévastateur du 6 février.

Sa mère Amina Raslan, 85 ans, qui habite le même immeuble, ravale ses larmes en montrant les destructions dans son appartement. "Ici, il y avait un tableau peint par mon fils, à côté il y a une armoire et une pendule (...) tout s'est effondré quand l'immeuble est tombé", dit cette femme qui a perdu deux fils dans la guerre.

Entourée de ses petits-enfants et de ses deux chats, sa main tremble lorsqu'elle raconte, avec force détails, la nuit du séisme.

"Nous vivons ici depuis cinquante ans, je ne pourrai pas aller ailleurs. Je ne suis pas habituée à vivre chez quelqu'un ou dans un centre d'accueil, et nous n'avons pas les moyens de louer un appartement", dit-elle.

Mohammad Jawich, qui vivait dans un appartement de 100 mètres carrés, n'a pour sa part pas eu le choix.

Assis devant une tente blanche offerte par une ONG sur une place dans le quartier de Boustan al-Bacha, il regarde, les larmes aux yeux, ses petits-enfants jouer avec un ballon usé.

"J'ai tout perdu, ma maison, mes économies, je dois repartir à zéro", dit cet homme de 63 ans, un bonnet noir enfoncé sur la tête. "Je ne sais plus quoi faire, j'ai peur de mourir de chagrin."


Le président syrien à la Maison Blanche le 10 novembre

Le président syrien Ahmad al-Chareh rencontrera le président Trump à la Maison Blanche lundi. (Reuters/Archives)
Le président syrien Ahmad al-Chareh rencontrera le président Trump à la Maison Blanche lundi. (Reuters/Archives)
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  • Le président syrien Ahmad al-Chareh sera reçu lundi à la Maison-Blanche par Donald Trump, une première historique qui s’inscrit dans les efforts américains pour la paix mondiale
  • Les discussions porteront sur la levée des sanctions, la lutte contre l’État islamique et la reconstruction de la Syrie, après plus de 14 ans de guerre

WASHINGTON: La porte-parole de la Maison Blanche Karoline Leavitt a indiqué mardi que le président syrien Ahmad al-Chareh serait reçu lundi à la Maison Blanche par Donald Trump.

Il sera le premier chef d'Etat syrien à faire cette visite, qui "fait partie des efforts" du président américain "pour la paix dans le monde", a déclaré la porte-parole pendant une conférence de presse.

Elle a rappelé que Donald Trump, pendant un voyage dans le Golfe en mai, avait annoncé la levée des sanctions américaines contre la Syrie, un sujet qui figurera très haut sur l'ordre du jour de la réunion lundi.

Karoline Leavitt a par ailleurs jugé que la Syrie avait fait "des progrès" sur la voie de la paix avec ce nouveau dirigeant.

Ce sera la deuxième visite aux Etats-Unis d'Ahmad al-Chareh après son passage en septembre à l'ONU à New York, où cet ancien jihadiste est devenu le premier président syrien depuis 1967 à s'adresser à l'Assemblée générale.

Selon le ministre syrien des Affaires étrangères Assaad al-Chaibani, la discussion avec Donald Trump portera aussi sur la lutte contre le groupe Etat islamique et sur la reconstruction en Syrie, après plus de 14 ans de guerre.

Le président américain avait dressé en mai un portrait élogieux d'Ahmad al-Chareh, parlant d'un "gars costaud" et assurant que leur première rencontre, qui a eu lieu en Arabie saoudite, s'était "très bien passée".

Il l'avait pressé à l'époque de rejoindre les accords d'Abraham, une initiative diplomatique dont Donald Trump est particulièrement fier, et qui avait vu plusieurs pays arabes reconnaître Israël en 2020.


Soudan: le ministre de la Défense affirme que la guerre va continuer

Des Soudanais déplacés blessés qui ont fui les violences à El-Fasher sont soignés dans une clinique de fortune gérée par Médecins Sans Frontières (MSF), alors que les affrontements entre la RSF et l'armée soudanaise se poursuivent à Tawila, dans le nord du Darfour. (Reurters)
Des Soudanais déplacés blessés qui ont fui les violences à El-Fasher sont soignés dans une clinique de fortune gérée par Médecins Sans Frontières (MSF), alors que les affrontements entre la RSF et l'armée soudanaise se poursuivent à Tawila, dans le nord du Darfour. (Reurters)
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  • Le ministre soudanais de la Défense, Hassan Kabroun, a annoncé la poursuite de la guerre contre les paramilitaires des FSR, malgré une proposition américaine de cessez-le-feu
  • Depuis la chute d’El-Facher, des exactions massives sont rapportées, tandis que l’aide humanitaire reste bloquée

PORT-SOUDAN: Le ministre soudanais de la Défense a affirmé mardi que la guerre contre les paramilitaires allait continuer, après une réunion gouvernementale qui a discuté d'une proposition américaine de cessez-le-feu.

"Les préparatifs pour la bataille du peuple soudanais sont en cours", a déclaré le ministre, Hassan Kabroun, dans un discours télévisé.

"Nous remercions l'administration Trump pour ses efforts et ses propositions afin de parvenir à la paix", a-t-il dit, tous en affirmant que la guerre était "un droit national légitime".

Aucun détail sur la proposition américaine n'a été rendu public.

Le gouvernement américain "est tout à fait impliqué" pour tenter de trouver une issue "pacifique" au conflit qui ravage le Soudan, a assuré mardi la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt, tout en reconnaissant que "la situation sur le terrain est très compliquée".

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée du général Abdel Fattah Al-Burhane à son ancien allié Mohamed Hamdane Daglo, chef des Forces de soutien rapide (FSR) qui ont pris le 26 octobre El-Facher, dernière ville de la vaste région du Darfour, dans l'ouest, qui échappait à leur contrôle.

Les combats se concentrent désormais sur la région voisine du Kordofan, dans le centre du Soudan, où l'ONU a fait état d'exactions et de déplacements massifs de population ces derniers jours.

- "Incontrôlable" -

Mardi, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a exhorté les belligérants à "venir à la table des négociations" et "mettre fin à ce cauchemar de violence, dès maintenant".

"La crise terrifiante au Soudan (...) est en train de devenir incontrôlable", a-t-il prévenu, alors que le Conseil de défense et de sécurité présidé par le général Burhane s'est réuni dans la journée pour étudier une proposition américaine de trêve.

L'émissaire américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a mené ces derniers jours des entretiens au Caire dans le but de finaliser une proposition de trêve humanitaire formulée mi-septembre sous son égide par un groupe de médiateurs incluant l'Egypte, l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis.

Le groupe de médiation, dit du Quad, travaille sur un plan global de paix pour le Soudan, mais ses dernières propositions, présentées mi-septembre à Washington, sont restées lettre morte. Jusqu'à présent, le général Burhane a accueilli négativement ce plan prévoyant à la fois son exclusion et celle des FSR de la transition politique post-conflit.

- "Ne tuez pas les enfants" -

Depuis la chute d'El-Facher, après 18 mois de siège par les paramilitaires, les informations et les témoignages se multiplient sur les exécutions, les pillages, les viols, les attaques contre des humanitaires, documentés par des images satellite et par des vidéos publiées par les combattants eux-mêmes.

Le général Burhane a affirmé sa volonté de "se venger" de la prise de cette grande ville, tandis que le chef des FSR s'est dit déterminé à poursuivre les conquêtes sur le terrain.

Mardi, la représentante de l'ONU en charge des questions humanitaires, Denise Brown, a déploré que la ville d'El-Facher reste "barricadée" et fermée à l'aide humanitaire.

"La livraison d'aide de survie cruciale reste bloquée par les FSR contrairement à leurs obligations à l'égard des lois internationales", a-t-elle déclaré.

Près de 71.000 civils ont fui la ville depuis sa prise par les FSR, certains ayant trouvé refuge à Tawila, à environ 70 km à l'ouest.

"Ne tuez pas les enfants, ne tuez pas les femmes", pouvait-on lire en arabe sur une pancarte écrite à la main lors d'une manifestation lundi d'enfants à Khartoum, la capitale du pays sous contrôle de l'armée.

Le conflit, qui a fait des dizaines de milliers de morts et près de 12 millions de déplacés, selon l'ONU, se joue sur fond de rivalités régionales.

Les FSR ont reçu armes et drones des Emirats arabes unis, d'après des rapports de l'ONU, tandis que l'armée bénéficie de l'appui de l'Egypte, de l'Arabie saoudite, de l'Iran et de la Turquie, selon des observateurs. Tous nient leur implication.


Le chef de l'ONU appelle à mettre fin au «cauchemar de la violence» au Soudan

Des abris érigés par des Soudanais déplacés qui ont fui El-Fasher après la chute de la ville aux mains des Forces de soutien rapide (RSF) composent le camp d'Um Yanqur, situé à la limite sud-ouest de Tawila, dans la région du Darfour occidental, déchirée par la guerre, au Soudan, le 3 novembre 2025. (AFP)
Des abris érigés par des Soudanais déplacés qui ont fui El-Fasher après la chute de la ville aux mains des Forces de soutien rapide (RSF) composent le camp d'Um Yanqur, situé à la limite sud-ouest de Tawila, dans la région du Darfour occidental, déchirée par la guerre, au Soudan, le 3 novembre 2025. (AFP)
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  • Antonio Guterres appelle à des négociations immédiates pour mettre fin au conflit au Soudan, avertissant que la crise humanitaire et sécuritaire devient « incontrôlable » après deux ans de guerre entre l’armée et les Forces de soutien rapide (FSR)
  • La situation à El-Facher, au Darfour, illustre la gravité du drame, avec des civils pris au piège, des milliers de morts, des violations massives des droits humains et près de 12 millions de déplacés selon l’ONU

DOHA: Le patron de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé mardi à des "négociations" pour un arrêt immédiat du conflit au Soudan, mettant en garde contre une crise "en train de devenir incontrôlable".

Le secrétaire général des Nations unies a exhorté les parties au conflit à "venir à la table des négociations, (et) mettre fin à ce cauchemar de violence, maintenant".

"La crise horrifiante au Soudan (...) est en train de devenir incontrôlable", a-t-il dit lors d'une conférence de presse en marge du deuxième sommet mondial pour le développement social à Doha.

Le conflit entre l'armée et les paramilitaires dure depuis deux ans et a fait des dizaines de milliers de morts, déplacé près de 12 millions de personnes et provoqué la pire crise humanitaire au monde, selon l'ONU.

Le 26 octobre, après 18 mois de siège, les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) ont pris la ville d'El-Facher, dernier verrou stratégique de l'armée au Darfour (ouest du Soudan).

Depuis, les informations et témoignages se multiplient sur les cas d'exécutions, viols, attaques contre des humanitaires et pillages qui y sont commis, documentés par des images satellites et par des vidéos d'exactions publiées par les combattants eux-même.

"El-Facher et les zones environnantes du Nord-Darfour ont été un épicentre de souffrance, de faim, de violence et de déplacements" a souligné M.Guterres, ajoutant que depuis l'entrée des FSR dans la ville, "la situation s'aggrave de jour en jour".

"Des centaines de milliers de civils sont pris au piège par ce siège. Les gens meurent de malnutrition, de maladie et de violence. Et nous continuons à entendre des rapports sur des violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme", a affirmé M.Guterres.