Les États-Unis devraient cesser de soutenir le pays ingrat qu’est Israël

De nombreux ministres du gouvernement extrémiste d’Israël critiquent les dirigeants de Washington, dont l’ambassadeur américain Tom Nides (Photo, AFP)
De nombreux ministres du gouvernement extrémiste d’Israël critiquent les dirigeants de Washington, dont l’ambassadeur américain Tom Nides (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 28 février 2023

Les États-Unis devraient cesser de soutenir le pays ingrat qu’est Israël

Les États-Unis devraient cesser de soutenir le pays ingrat qu’est Israël
  • Malgré le considérable soutien américain à Israël, les ministres extrémistes du gouvernement Netanyahou disent ouvertement aux dirigeants de Washington de «se mêler de leurs affaires»
  • Quelle autre nation continuerait à fournir une aide financière et des privilèges à un pays si ouvertement ingrat?

Les États-Unis ne sont pas seulement l’allié le plus puissant d’Israël et son bouclier contre les demandes de justice à l’ONU depuis de nombreuses années, mais ils sont aussi l’un de ses plus grands soutiens financiers. Les États-Unis fournissent à Israël un minimum de 3,8 milliards de dollars (1 dollar = 0,95 euro) chaque année dans le cadre d’un programme décennal approuvé par l’ancien président Barack Obama. Ce dernier, comme de nombreux présidents américains avant lui, n’a pas eu la volonté morale de s’opposer aux atrocités commises par Israël.

Les États-Unis n’ont jamais rien demandé à Israël en échange de son soutien soumis, consistant à faire l’autruche. Mais peut-être les choses devraient-elles changer, d’autant plus que plusieurs dirigeants extrémistes du gouvernement israélien s’en prennent désormais aux États-Unis et disent ouvertement aux dirigeants de Washington de «se mêler de leurs affaires». 

Amichai Chikli, ministre israélien des Affaires de la diaspora et membre du Likoud, a utilisé ces mots en s’adressant à l’ambassadeur américain en Israël, Tom Nides, après que ce dernier a suggéré au Premier ministre Benjamin Netanyahou de «freiner» une législation qui affaiblirait l’État de droit, ou ce qu’il en reste, en Israël.

En décembre dernier, M. Chikli faisait également partie des membres de la Knesset qui ont attaqué l’UE après que celle-ci a critiqué les politiques israéliennes de démolition de maisons et d’agressions en Cisjordanie occupée. Dans son esprit, les Palestiniens n’ont aucun droit et toute personne qui les défend est antisémite.

Par ailleurs, M. Chikli a récemment proposé un effort pour modifier la loi israélienne du retour, qui permet à toute personne juive dans le monde de s’installer en Israël et de devenir automatiquement citoyen de l’État. Il a été proposé que cette loi ne devrait plus s’appliquer aux «personnes qui ne sont pas traditionnellement considérées comme juives», c’est-à-dire aux convertis, aux Palestiniens qui épousent des Juifs et à quelques autres catégories, notamment les Juifs trop libéraux sur le plan religieux.

M. Chikli est un extrémiste, mais il est loin d’être la pire personnalité extrémiste ou anti-arabe du parti Likoud, qui sert de base au gouvernement de coalition de M. Netanyahou. Il y a des personnes bien pires qui s’exposent par leur rhétorique incendiaire et haineuse, comme le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, et le ministre des Finances, Bezalel Smotrich. Ces deux-là semblent rivaliser pour savoir qui peut dire les pires choses sur les Palestiniens. Ils ont également critiqué Tom Nides.

«Les États-Unis se ridiculisent face aux autres vraies démocraties»

Ray Hanania

M. Nides a ensuite été attaqué par Yaïr Netanyahou, le fils du Premier ministre, qui a partagé une photo de l’ambassadeur américain s’entretenant avec Mansour Abbas, citoyen palestinien d’Israël et chef de la Liste arabe unie, avec pour légende «Vous avez compris ?», sous-entendant un lien entre M. Abbas et le commentaire de l’ambassadeur sur la réforme judiciaire proposée par Israël.

La réforme du système judiciaire israélien, proposée par le ministre de la Justice, Yariv Levin, permettrait au gouvernement de contrôler la nomination des juges, y compris les juges de la Cour suprême, de limiter fortement la capacité de la Haute Cour de justice à annuler des lois et de permettre à la Knesset de légiférer à nouveau sur les lois que la Cour parvient à annuler à la majorité simple. Cette initiative est considérée comme une volonté de la part des partenaires de M. Netanyahou d’empêcher sa condamnation dans trois procès pour corruption qu’il a déjà réussi à repousser.

Plusieurs Israéliens plus raisonnables, opposés au gouvernement immoral et contraire à l’éthique de M. Netanyahou, soutiennent que les États-Unis ont tout à fait le droit d’exprimer son opinion sur ce qui se passe en Israël. C’est ce que font les vraies démocraties.

Comme le savent tous ceux qui vivent dans une vraie démocratie, la critique du gouvernement est la pierre angulaire de la démocratie. C’est pourquoi Israël n’est pas vraiment une démocratie. Il n’autorise pas les critiques. Par exemple, il contraint les médias à modérer les reportages critiques. Les médias israéliens, à l’exception d’un petit nombre d’entre eux, comme Haaretz et +972 Magazine, agissent comme s’ils étaient payés pour être les porte-paroles d’Israël.

Quel que soit leur raisonnement, je pense qu’Amichai Chikli, Yaïr Netanyahou, Bezalel Smotrich, Itamar Ben-Gvir et les autres ministres du gouvernement israélien qui critiquent Tom Nides ont raison de dire que les États-Unis devraient se mêler de ses affaires. Pour ce faire, ils devraient mettre fin à tout soutien financier et suspendre tous les programmes destinés à Israël. 

Pourquoi par exemple ne pas mettre fin à l’accord de libre-échange de 1985, en vertu duquel tous les droits de douane avec Israël ont été supprimés?

Quelle autre nation continuerait à fournir une aide financière et des privilèges à un pays qui est si ouvertement ingrat? Les États-Unis se ridiculisent face aux autres vraies démocraties. Ils ferment les yeux sur le racisme d’Israël, qui est discriminatoire envers tous les Palestiniens.

Les États-Unis se sont montrés timorés face aux violations israéliennes, notamment en ne demandant pas justice pour les citoyens américains qu’ils ont tués, comme Rachel Corrie et Shireen Abu Akleh. En outre, les gouvernements américains ont été encore moins sensibles au fait que les forces de défense israéliennes ont tué des milliers de femmes et d’enfants et en ont blessé des centaines de milliers d’autres lors d’attaques que beaucoup comparent aux pogroms qui visaient les Juifs en Union soviétique. Les États-Unis sont même montés au front pour libérer les Juifs russes.

Le pire, c’est que les États-Unis ont fermé les yeux sur les preuves qui confirment qu’Israël viole les droits de l’homme. Amnesty International a récemment publié un rapport détaillant les arguments qui font d’Israël un État d’apartheid. Ce sont les États-Unis qui ont mené la lutte contre l’apartheid sud-africain, mais ont timidement modifié leur boussole morale face aux politiques d’apartheid d’Israël.

Oui, laissons les Américains se mêler de leurs affaires. En tant qu’Américain, je suis fatigué de payer pour les atrocités d’Israël. J’en ai assez que mon pays ferme les yeux sur les violations des droits civils et humains. Pire encore, les membres du Congrès défendent Israël alors qu’ils reçoivent d’importants dons de campagne des nombreux comités d’action politique pro-Israël.

Israël achète leur silence sur ses atrocités et leur ordonne de crier chaque fois que les victimes de celles-ci se défendent. J’en ai assez de travailler dur chaque jour pour voir une partie de mes impôts servir à un État étranger ingrat qui rabaisse et calomnie mon pays.

Oui, mêlons-nous de nos affaires et cessons tout ce que nous faisons pour protéger Israël. Laissez-les se protéger eux-mêmes.

 

 

Ray Hanania est un éditorialiste et ancien journaliste politique primé auprès de l’hôtel de ville de Chicago. Il peut être joint sur son site Web personnel à l'adresse www.Hanania.com. Twitter: @RayHanania
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement le point de vue d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com