Tunisie: «apaisement» mais pas d'excuses après le discours de Saied sur les migrants

Le ministre tunisien des Affaires étrangères Nabil Ammar donne une interview à son bureau à Tunis, le 27 février 2023. (Photo, AFP)
Le ministre tunisien des Affaires étrangères Nabil Ammar donne une interview à son bureau à Tunis, le 27 février 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 27 février 2023

Tunisie: «apaisement» mais pas d'excuses après le discours de Saied sur les migrants

  • «Pour les migrants qui sont légaux, il n'y a aucun problème. Au contraire, nous en voulons plus», a déclaré le ministre des Affaires étrangères Nabil Ammar
  • Le président Saied a appelé le 21 février à des «mesures urgentes» contre l'immigration clandestine de ressortissants de pays d'Afrique subsaharienne, affirmant que leur présence en Tunisie était source de «violence et de crimes»

TUNIS: Le chef de la diplomatie tunisienne a affirmé lundi que son pays prônait "l'apaisement", tout en excluant de présenter des excuses après le tollé suscité par un discours dénoncé comme raciste du président Kais Saied sur les migrants subsahariens. 

Le président Saied a appelé le 21 février à des "mesures urgentes" contre l'immigration clandestine de ressortissants de pays d'Afrique subsaharienne, affirmant que leur présence en Tunisie était source de "violence et de crimes". 

Evoquant l'arrivée de "hordes de migrants clandestins", il a soutenu que cette immigration relevait d'une "entreprise criminelle" destinée à changer la composition démographique de la Tunisie afin d'estomper son caractère "arabo-musulman". 

Plusieurs ONG ont dénoncé un discours "raciste et haineux" et l'Union africaine a condamné des déclarations "choquantes", appelant les pays membres à "s'abstenir de tout discours haineux à caractère raciste". 

"C'est vraiment un mauvais procès d'interprétation fallacieuse des propos des hautes autorités tunisiennes à ce sujet. Cela fait quelques jours que cela s'est produit et il faut maintenant garder la tête froide, il faut apaiser, et les messages d'apaisement ont déjà été transmis par les canaux officiels et autres", a déclaré le ministre des Affaires étrangères Nabil Ammar. 

"Non, il n'est pas question d'excuses du tout, nous n'avons porté atteinte à personne", a-t-il ajouté. 

Selon des chiffres officiels cités par le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), la Tunisie compte plus de 21 000 ressortissants de pays d'Afrique subsaharienne, en majorité en situation irrégulière, soit moins de 0,2% d'une population totale d'environ 12 millions. 

« Flux croissants » 

"Pour les migrants qui sont légaux, il n'y a aucun problème. Au contraire, nous en voulons plus", a ajouté le ministre. "Et les migrants illégaux sont appelés à retourner chez eux mais dans le respect de leurs droits et de leur dignité". 

Après la charge du président Saied, plusieurs ONG et des témoins ont fait état d'une recrudescence d'agressions contre des migrants africains qui se sentent "livrés à la vindicte populaire" d'après des représentants de cette communauté. 

"Il ne faut pas mélanger les actes individuels et les actes des autorités. Les autorités sont en train de prendre toutes les mesures pour protéger tous les migrants en Tunisie, qu'ils soient légaux ou illégaux", a affirmé M. Ammar. 

Le ministre a défendu le discours de M. Saied, faisant valoir que "les autorités tunisiennes sont dans leur droit d'alerter quand il y a des flux croissants d'immigrés illégaux avec toutes les conséquences que cela peut entrainer". 

Les déclarations de M. Saied sur l'existence d'une "entreprise criminelle" visant à changer la composition démographique de la Tunisie ont suscité des comparaisons avec la théorie complotiste du "grand remplacement" endossée en France par le polémiste d'extrême droite Eric Zemmour. 

"C'est juste un élément, pourquoi les commentateurs se sont saisi de cet élément là pour en faire l'élément central ? Et quand bien même cette étude existe, quel est le problème, ce ne sont pas les autorités tunisiennes qui l'ont écrite", a affirmé M. Ammar. 

« Pris en sandwich » 

"Il y a eu même des témoignages sur des vidéos, je ne veux pas les citer parce que moi je ne veux pas participer à développer cette polémique, mais il y a eu des témoignages faits par des Subsahariens qui disaient justement ‘voilà nous sommes ici chez nous etc’", a-t-il ajouté. 

La plupart des migrants subsahariens arrivent en Tunisie pour tenter d'immigrer clandestinement vers l'Europe par la mer. Selon des ONG, la Tunisie, dont les garde-côtes interceptent régulièrement des bateaux de migrants en partance pour l'Europe, est devenue un acteur clé dans la surveillance des routes migratoires en Méditerranée. 

"Nous sommes pris en sandwich entre le nord et le sud et quand nous disons qu'il y a un problème, les gens nous taxent de racisme, vous voyez comme c'est injuste", a protesté M. Ammar. 

Il a démenti les accusations d'ONG et de l'opposition selon lesquelles le discours de M. Saied sur les migrants vise à détourner l'attention de la dégradation des conditions de vie et d'une situation politique qui s'est encore tendue en février avec une série d'arrestations. 

"Bien sûr que non, ce sont leurs interprétations, ce n'est pas la réalité", a-t-il dit. 


Négociations de paix au Soudan: le chef de l'armée prêt à «collaborer» avec Trump

Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
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  • Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)"
  • Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise

PORT-SOUDAN: Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt.

Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)", a déclaré le ministère des Affaires étrangères pro-armée dans un communiqué publié à l'issue d'un déplacement officiel à Ryad, à l'invitation du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane.

Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise.

Les négociations de paix menées par les Etats-Unis avec le groupe de médiateurs du Quad (réunissant Egypte, Arabe Saoudite et Emirats) sont à l'arrêt depuis que le général al-Burhane a affirmé que la dernière proposition de trêve transmise par M. Boulos était "inacceptable", sans préciser pourquoi.

Le militaire avait alors fustigé une médiation "partiale" et reproché à l'émissaire américain de reprendre les éléments de langage des Emirats, accusés d'armer les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Abou Dhabi nie régulièrement fournir des armes, des hommes et du carburant aux FSR, malgré des preuves fournies par des rapports internationaux et enquêtes indépendantes.

De leur côté, les FSR ont annoncé qu'ils acceptaient la proposition de trêve mais les attaques sur le terrain n'ont pas pour autant cessé au Kordofan, région au coeur de combats intenses.

Pour l'instant, aucune nouvelle date de négociations n'a été fixée, que ce soit au niveau des médiateurs du Quad ou de l'ONU qui essaie parallèlement d'organiser des discussions entre les deux camps.

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée, qui contrôle le nord et l'est du pays - aux FSR, dominantes dans l'ouest et certaines zones du sud.

Depuis la prise du dernier bastion de l'armée dans la vaste région voisine du Darfour, les combats se sont intensifiés dans le sud du pays, au Kordofan, région fertile, riche en pétrole et en or, charnière pour le ravitaillement et les mouvements de troupes.

Le conflit, entré dans sa troisième année, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, déraciné des millions de personnes et provoqué ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire au monde".

 


Le prince héritier saoudien rencontre le chef du conseil de transition soudanais pour discuter de la sécurité et de la stabilité

Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
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  • La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation
  • Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays

RIYADH : Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane a rencontré Abdel Fattah Al-Burhan à Riyad lundi pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à restaurer la sécurité et la stabilité dans le pays, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation.

Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays, a ajouté SPA.

Le ministre saoudien de la défense, le prince Khalid ben Salmane, le ministre des affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, le ministre d'État et conseiller à la sécurité nationale, Musaed bin Mohammed Al-Aiban, le ministre des finances, Mohammed Al-Jadaan, et l'ambassadeur saoudien au Soudan, Ali Hassan Jaafar, ont également assisté à la réunion.


Cisjordanie: 25 immeubles d'habitation menacés de destruction dans un camp de réfugiés

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  • "Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre"
  • "Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie

TULKAREM: L'armée israélienne va démolir 25 immeubles d'habitation du camp de réfugiés de Nour Chams, dans le nord de la Cisjordanie, ont indiqué lundi à l'AFP des responsables locaux.

Abdallah Kamil, le gouverneur de Tulkarem où se situe le camp, a déclaré à l'AFP avoir été informé par le Cogat --l'organisme du ministère de la Défense israélien supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens-- que les démolitions interviendraient d'ici la fin de la semaine.

"Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre", a indiqué à l'AFP Faisal Salama, responsable du comité populaire du camp de Tulkarem, proche de celui de Nour Chams, précisant qu'une centaine de familles seraient affectées.

Le Cogat n'a pas répondu dans l'immédiat aux sollicitations de l'AFP, l'armée israélienne indiquant se renseigner.

"Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie.

Il estime qu'elles s'inscrivent "dans une stratégie plus large visant à modifier la géographie sur le terrain", qualifiant la situation de "tout simplement inacceptable".

"Crise" 

La Cisjordanie est occupée par Israël depuis 1967.

Début 2025, l'armée israélienne y a lancé une vaste opération militaire visant selon elle à éradiquer des groupes armés palestiniens, en particulier dans les camps de réfugiés du nord, comme ceux de Jénine, Tulkarem et Nour Chams.

Au cours de cette opération, l'armée a détruit des centaines de maisons dans les camps, officiellement pour faciliter le passage des troupes.

Selon M. Friedrich, environ 1.600 habitations ont été totalement ou partiellement détruites dans les camps de la région de Tulkarem, entraînant "la crise de déplacement la plus grave que la Cisjordanie ait connue depuis 1967".

Lundi, une vingtaine de résidents de Nour Chams, tous déplacés, ont manifesté devant des véhicules militaires blindés bloquant l'accès au camp, dénonçant les ordres de démolition et réclamant le droit de rentrer chez eux.

"Toutes les maisons de mes frères doivent être détruites, toutes! Et mes frères sont déjà à la rue", a témoigné Siham Hamayed, une habitante.

"Personne n'est venu nous voir ni ne s'est inquiété de notre sort", a déclaré à l'AFP Aïcha Dama, une autre résidente dont la maison familiale de quatre étages, abritant environ 30 personnes, figure parmi les bâtiments menacés.

Disparaître 

Fin novembre, l'ONG Human Rights Watch a indiqué qu'au moins 32.000 personnes étaient toujours déplacées de chez elles dans le cadre de cette opération.

Comme des dizaines d'autres, le camp de Nour Chams a été établi au début des années 1950, peu après la création d'Israël en 1948, lorsque des centaines de milliers de Palestiniens ont fui ou été expulsés de leurs foyers.

Avec le temps, ces camps se sont transformés en quartiers densément peuplés, où le statut de réfugié se transmet de génération en génération.

De nombreux habitants ont affirmé à l'AFP ces derniers mois qu'Israël cherchait à faire disparaître les camps, en les transformant en quartiers des villes qu'ils jouxtent, afin d'éliminer la question des réfugiés.

Nour Chams a longtemps été un lieu relativement paisible où vivaient dans des maisons parfois coquettes des familles soudées entre elles.

Mais depuis quelques années, des mouvements armés s'y sont implantés sur fond de flambées de violence entre Palestiniens et Israéliens et de précarité économique.