En ce jour de Pâques, la résurrection d'un nouveau Moyen-Orient pourrait avoir lieu

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Publié le Dimanche 09 avril 2023

En ce jour de Pâques, la résurrection d'un nouveau Moyen-Orient pourrait avoir lieu

  • En effet, nous assistons à un «tsunami de la paix» initié par l'Arabie saoudite, comme l'a décrit l'analyste politique saoudien Salmane al-Ansari
  • La seule mauvaise nouvelle de cette fête de Pâques vient malheureusement de la Terre Sainte elle-même

Pour la première fois depuis des décennies, un vent d'espoir souffle sur le Moyen-Orient en ce jour de Pâques. Le moment ne pouvait être mieux choisi pour les chrétiens arabes qui célèbrent aujourd'hui le dimanche de Pâques, les musulmans qui ont jeûné pendant le mois de Ramadan et les juifs qui viennent de célébrer la Pâque juive.

L'accord de paix entre l'Arabie saoudite et l'Iran, soutenu par Pékin, vient de franchir une nouvelle étape; les ministres des Affaires étrangères des deux pays ayant officiellement signé le pacte jeudi dernier. Une fois mis en œuvre, nous assisterons non seulement au rétablissement des relations diplomatiques, à la reprise des vols et à la délivrance de visas, mais aussi à un accord de non-agression et de respect de la souveraineté qui pourrait résoudre plusieurs différends régionaux opposant les deux pays de longue date.

Si Téhéran joue le jeu, l'accord entre l'Arabie saoudite et l'Iran peut permettre aux deux puissances régionales de discuter des moyens d'aider les pays arabes qui souffrent depuis longtemps de la présence des milices iraniennes. Cela pourrait essentiellement se traduire par une amélioration de la qualité de vie des habitants de la Syrie, du Liban et de l'Irak.

Toutefois, l'accord a déjà eu des répercussions positives sur le Yémen, où l'on observe une trêve qui, reste jusqu'à présent, la plus longue depuis que le conflit a éclaté. Nous entendons également parler des efforts déployés par les Saoudiens et les Omanais pour profiter de la vague positive actuelle et essayer de parvenir à un accord de paix permanent entre les factions belligérantes du Yémen qui, s'il était signé, mettrait fin au conflit et réorienterait les efforts vers la reconstruction et la réhabilitation.

L'année dernière, nous avons assisté à une reprise des relations entre l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l'Égypte avec la Turquie. Cela indique que, quoi qu'il arrive lors des prochaines élections turques, les relations auront une chance de s'améliorer sous la présidence de Recep Tayyip Erdogan ou de démarrer sur une base nouvelle et positive avec un nouveau président.

En 2021, grâce à l'accord d'Al-Ula, la reprise des relations avec le Qatar voisin a mis fin au boycott de ce pays, juste à temps avant le déroulement de la Coupe du monde 2022, qui a été décrite comme l'une des meilleures jamais organisées.

En effet, nous assistons à un «tsunami de la paix» initié par l'Arabie saoudite, comme l'a décrit l'analyste politique saoudien Salmane al-Ansari lors d'une récente interview accordée à ce journal. Si cette dynamique se poursuit, je crois que nous assisterons à la manifestation de la vision du prince héritier, Mohammed ben Salmane, selon laquelle le Moyen-Orient peut devenir la «nouvelle Europe». Il a évoqué ceci comme étant son espoir pour la région lors d'un panel à la conférence Future Investment Initiative de 2018 à Riyad.

La seule mauvaise nouvelle de cette fête de Pâques vient malheureusement de la Terre Sainte elle-même. Depuis janvier, la situation entre les Israéliens et les Palestiniens s'est malheureusement détériorée, principalement en raison de l'entrée en fonction d'un gouvernement d'extrême droite dirigé par le Premier ministre, Benjamin Netanyahou.

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«Les Israéliens ont une réelle opportunité de tirer parti de la dynamique positive dans la région, s'ils le souhaitent.»

Faisal J. Abbas

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Les provocations incessantes, telles qu'un membre actif du Conseil des ministres israélien déclarant que le peuple palestinien n'existait pas ou l’attaque et l’arrestation par l’armée israélienne de fidèles musulmans priant dans la mosquée Al-Aqsa, ne font que compliquer la situation.

En fait, comme je l'ai précisé à plusieurs reprises sur ce média, de telles actions du gouvernement israélien embarrassent les pays arabes qui ont signé les accords d'Abraham de bonne foi et posent davantage de problèmes pour convaincre ceux qui ne l'ont pas fait — comme l'Arabie saoudite — du fait que la prise de position en faveur d'Israël doit être précédée par la résolution de la question palestinienne, ce qui encouragera l'État juif à devenir un acteur plus rationnel.

Naturellement, l'ampleur de cette perturbation du statu quo déclencherait également une escalade dans des régions telles que le Liban et Gaza. Certes, Israël dira — à juste titre — qu'il a le droit de se défendre, mais il y a un consensus écrasant parmi les experts et les observateurs selon lequel le récent comportement provocateur à Al-Aqsa est une tentative de détourner l'attention des énormes manifestations israéliennes et de la colère contre les changements judiciaires proposés par Netanyahou.

Indépendamment de la manière dont l'équipe de Netanyahou perçoit la situation ou de ce qu'elle pense des dirigeants palestiniens, il existe une véritable occasion de tirer parti de la dynamique qui se manifeste aujourd'hui dans la région, si elle le souhaite. Il est vraiment surréaliste et malheureux que l'actuelle poussée arabe pacifiste soit concomitante à un gouvernement israélien extrêmement belliciste. Pourtant, cette situation pourrait se transformer en opportunité si Netanyahou parvient à faire preuve d'un véritable leadership, à contenir les extrémistes et à convaincre l'extrême droite que la paix est la voie la meilleure et la plus sûre pour l'avenir.

Si l'accord de paix entre l'Iran et l'Arabie saoudite se concrétise, Israël peut bien devenir la seule pièce manquante d'une nouvelle carte régionale fondée sur la paix et la prospérité. Je conseille sincèrement le gouvernement israélien de comparer les gains à court terme qu'il obtient en multipliant les provocations de la droite à ce qui est réellement en jeu à long terme. Il devrait se rappeler que dans une interview accordée en 2022 à The Atlantic, le prince héritier, Mohammed ben Salmane, a déclaré que l'État juif pourrait être un allié potentiel de l'Arabie saoudite.

«Nous ne considérons pas Israël comme un ennemi, mais comme un allié potentiel, avec de nombreux objectifs que nous pouvons réaliser ensemble. Mais nous devons résoudre certains problèmes avant d'en arriver là.»

 

Faisal J. Abbas est le rédacteur en chef d'Arab News. Twitter: @FaisalJAbbas

 

L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com