Crise bancaire au Liban: les procès à l’étranger auront un effet domino limité

Le gouverneur de la Banque du Liban,  Riad Salamé, sera convoqué pour être interrogé le 16 mai en France. (AFP).
Le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé, sera convoqué pour être interrogé le 16 mai en France. (AFP).
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Publié le Lundi 08 mai 2023

Crise bancaire au Liban: les procès à l’étranger auront un effet domino limité

  • Le gouverneur de la banque centrale, Riad Salamé, sera convoqué pour être interrogé le 16 mai en France
  • «Les Libanais ne disposent d’aucun levier juridique pour récupérer leurs droits devant les tribunaux étrangers»

BEYROUTH: Alors que, au Liban, il semble que les déposants libanais aient perdu tout espoir de récupérer leur argent, à l’étranger, des enquêtes et des procès relancent le débat sur l’efficacité des actions judiciaires hors du pays du Cèdre.

En effet, la semaine dernière, Beyrouth a été le théâtre de plusieurs interrogatoires menés par des enquêteurs européens dans le cadre d’une enquête sur des soupçons de malversations financières impliquant Riad Salamé, le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), et son frère Raja. Des magistrats français, allemands et luxembourgeois sont venus enquêter sur des commissions perçues lors de ventes de titres financiers de la banque centrale par la société Forry Associates Ltd, qui appartient à Raja Salamé.

Parallèlement, le banquier et ex-ministre libanais Marwan Kheireddine, qui dirige la banque privée Al-Mawarid, a été inculpé et placé sous contrôle judiciaire à la fin du mois de mars dans le cadre d’une enquête menée en France sur le patrimoine européen de Riad Salamé. M. Kheireddine est «soupçonné d’association de malfaiteurs, notamment en vue de commettre des détournements de fonds publics par un agent public au préjudice de l’État du Liban, des abus de confiance aggravés, de corruption active et passive d’agent public», selon des informations rapportées par l’AFP. Il est également poursuivi pour blanchiment en bande organisée, toujours selon l’agence.

Les juges français ont obtenu de nouvelles pièces à conviction dans ce cadre qui contiennent une série de relevés de comptes bancaires utilisés par Riad Salamé pour dissimuler sa fortune.

Salamé convoqué à Paris

De leur côté, le gouverneur de la BDL et son frère sont suspectés d'avoir été les bénéficiaires de trois comptes que l’on soupçonne d’avoir été falsifiés dans la banque Al-Mawarid en contrepartie d'avantages pour cette dernière. Riad Salamé sera convoqué pour être interrogé le 16 mai en France. Selon l’agence Reuters, les juges français ont obtenu de nouvelles pièces à conviction qui contiennent une série de relevés de comptes bancaires utilisés pour dissimuler sa fortune. Ces derniers, qui auraient contenu à leur ouverture l’équivalent de 15 millions de dollars (1 dollar = 0,90 euro), auraient généré des bénéfices qui auraient atteint 150 millions de dollars en 2019.

Vent de panique

Ces nombreuses actions judiciaires contre le gouverneur de la BDL et d’autres banquiers, combinées à quelques plaintes déposées dans plusieurs pays européens ainsi qu’aux États-Unis contre des établissements bancaires par des déposants lésés, semblent présager une mauvaise passe pour les hauts dirigeants de banque au Liban. Certaines rumeurs ont même fait état d’un vent de panique parmi certains responsables d’établissements bancaires qui redoutent de subir le même sort que M. Kheireddine, «n’osant plus quitter le territoire libanais».

«L’affaire Salamé peut avoir un effet domino, d’autant que des poursuites judiciaires ont déjà été entreprises à l’encontre de banquiers libanais en Europe. Des politiciens libanais peuvent en outre être visés par des sanctions, notamment aux États-Unis, à travers la loi César [qui sanctionne toute personne, institution ou entreprise qui faciliterait l'effort de guerre en Syrie] et l’Office of Foreign Assets Control [l’Ofac, le bureau de contrôle des actifs étrangers aux États-Unis]. C’est un dossier qui risque d’évoluer à l’international», confie à Arab News en français Ghassan Abou Adal, expert bancaire et financier.

«Toute comparaison mise à part, dans le temps, les autorités américaines n’ont pas pu inculper Al Capone, faute de preuve. Ils ont finalement pu l’arrêter dans une petite affaire d’évasion fiscale.»

 - Ghassan Abou Adal, expert bancaire et financier

Au sujet de Riad Salamé, il faut distinguer deux volets. D’une part, sa politique monétaire depuis trente ans, qui a judicieusement dissimulé les politiques catastrophiques des gouvernements libanais successifs qui ont entraîné la crise financière et économique dans laquelle est plongé le Liban depuis 2019. D’autre part, les soupçons de corruption qui pèsent contre lui dans différents dossiers.

Pour ses sympathisants, les enquêtes et plaintes qui le visent ne sont en fait qu’une chasse aux sorcières dont le but est de lui faire payer sa politique en faisant de lui un bouc émissaire.

Pour Ghassan Abou Adal, «si les Européens utilisent ce dossier pour mettre au jour d’autres affaires de corruption, en faisant pression sur Riad Salamé, c’est une théorie plausible. Toute comparaison mise à part, dans le temps, les autorités américaines n’ont pas pu inculper Al Capone, faute de preuve. Ils ont finalement pu l’arrêter dans une petite affaire d’évasion fiscale».

Dans l’affaire Forry Associates Ltd., l’expert financier estime qu’il «y a principalement un conflit d’intérêts entre le gouverneur de la banque centrale et la société qui appartient à son frère Raja. Théoriquement, ce n’est pas éthique. Il ne fallait pas le faire. Mais, dans tous les cas, une société financière aurait dû prendre en charge la gestion des euro-obligations et aurait légalement touché sa commission».

En effet, toujours d’après M. Abou Adal, «il faut être réaliste, ce ne sont pas les prétendus 300 millions de dollars de commission qui sont à l’origine de la crise financière au Liban, et ils ne sont sûrement pas la solution. Ce sont plutôt les dizaines de milliards de dollars que l’État a dépensés et a dilapidés, et qu’il refuse de rendre».

Procès à l’étranger contre les banques

Les banques libanaises à l’étranger courent-elles un danger? «Il faut faire une différence. Si une banque libanaise à l’étranger est, par ses capitaux, intimement liée à la banque mère, elle sera affectée», explique l’expert financier. «En revanche, si ces banques sont indépendantes, elles seront moins touchées – s’il existe une séparation des deux entités, même si, au fond, les actionnaires sont les mêmes. En tout état de cause, les banques libanaises à l’étranger sont régies par les lois des pays dans lesquels elles sont implantées.»

Par ailleurs, pour intenter un procès à l’étranger contre une banque libanaise (agence ou succursale), il faut pouvoir «retenir la compétence juridictionnelle d’un tribunal étranger». Que ce soit en France, au Royaume-Uni ou aux États-Unis, par exemple, il faut que les tribunaux de ces pays reconnaissent leur compétence territoriale. «D’une manière générale, il y a trois conditions qui se fondent sur une directive européenne. Il faut d’abord qu’il s’agisse d’un consommateur. Il faut qu’il soit résident dans le pays concerné au moment de l’ouverture du compte. Enfin, il faut que ce consommateur soit marchandé ou approché par la banque en question dans le pays où le procès a lieu», explique Paul Harb, avocat et juriste spécialisé dans le droit bancaire. C’est pour cette raison que certaines banques – comme Audi, Byblos, Fransabank ou Saradar – ont pu être poursuivies en France.

«Selon ces conditions précises, les Libanais n’ont pas la capacité de poursuivre des banques libanaises à l’étranger si les critères précités ne sont pas applicables. Cela réduit considérablement le champ d’action des déposants libanais hors du Liban. «Les Libanais ne disposent donc d’aucun levier juridique pour récupérer leurs droits devant les tribunaux étrangers», ajoute le juriste.

Rareté des procès

Un autre problème de taille se pose pour les déposants qui veulent porter plainte, «c’est le fait que les banques en question aient des actifs dans les pays concernés. En France, par exemple, on peut geler les comptes de ces institutions et confisquer leurs biens meubles ou immeubles. Cette procédure pourrait être plus difficile dans d’autres pays, s’il n’y a rien à saisir. Elle sera donc superflue. D’où, aussi, la rareté de tels procès», précise l’avocat.

«Même s’il peut y avoir quelques procès contre certaines banques, le principe d’équité concernant les déposants libanais est bafoué. Seul le Libanais aisé qui réside en Europe peut récupérer son argent, alors que le citoyen lambda n’a aucune chance d’y parvenir.»

 - Paul Harb, avocat et juriste spécialisé dans le droit bancaire

Une fois qu’on a un jugement étranger, est-il exécutable au Liban? «Il faut différencier deux possibilités», répond Paul Harb. «S’il existe entre ces pays et le Liban des accords d’entraide judiciaire ou non. Dans le premier cas, comme en France, il est plutôt simple d’avoir un exequatur afin d’appliquer le verdict au Liban. Dans le second cas, la procédure est assez compliquée et, parfois, la loi interdit l’exécution des jugements étrangers si le principe de réciprocité entre les deux pays n’est pas appliqué. Ce principe est en vigueur dans les pays européens.»

Principe d’équité bafoué

Le juriste note par ailleurs un point important dans ce contexte: «Même s’il peut y avoir quelques procès contre certaines banques, le principe d’équité concernant les déposants libanais est bafoué. Seul le Libanais aisé qui réside en Europe peut récupérer son argent, alors que le citoyen lambda n’a aucune chance d’y parvenir.»

Pour tout le reste, il n’y a que les tribunaux libanais qui peuvent intervenir. «Jusqu’à présent, il n’y a pas une jurisprudence constante sur ce sujet qui permet de rendre justice aux déposants libanais qui sont en outre victimes des mesures de facto de contrôles des capitaux usées par les banques, sans oublier la récente décision du gouvernement qui confirme l’application des circulaires de la BDL concernant les restrictions bancaires. Tout cela empêche toute plainte efficace pour récupérer les droits des déposants au Liban», dénonce-t-il.

En outre, ce qui est encore plus grave, de récentes études estiment que «tous les actifs de toutes les banques libanaises aujourd’hui ne suffiront pas à rembourser les déposants. Afin de trouver une solution équitable pour tous les Libanais, ce n’est pas une plainte en France ni un jugement au Liban qui pourrait convenir», estime-t-il.

La source du problème est politique

Ghassan Abou Adal renchérit: «Il ne faut pas oublier que la crise du secteur bancaire est la résultante de la crise économique et de la faillite de l’État libanais. Ce n’est pas l’inverse. Si c’était seulement une crise liée aux banques, elle n’aurait pas nécessairement provoqué la chute de la livre libanaise ni la paralysie des administrations de l’État. La source du problème est donc la défaillance de l’État libanais.»

Selon lui, «l’État, les différents gouvernements successifs et la banque centrale ont utilisé l’argent des déposants à travers les banques, pour certaines en connaissance de cause, et pour d’autres à leur insu». Et quand le flux de capitaux a cessé de rentrer au Liban après le déclenchement de la guerre en Syrie et la position de certains Libanais sur la guerre au Yémen, la classe politique a donc dilapidé l’argent qui existait.

«La résolution de la crise du secteur bancaire est principalement liée à une volonté politique qui, malheureusement, n’existe pas, que ce soit au sujet des réformes ou d’une meilleure gouvernance», conclut l’expert financier.


Lors d'une cérémonie en Irak, les premiers combattants kurdes du PKK ont brûlé leurs armes

Une trentaine de combattants kurdes du PKK, le Parti des Travailleurs du Kurdistan en guerre contre Ankara depuis quatre décennies, ont entamé vendredi en Irak le début d'un désarmement censé mettre fin à quatre décennies de violences. (Reuters)
Une trentaine de combattants kurdes du PKK, le Parti des Travailleurs du Kurdistan en guerre contre Ankara depuis quatre décennies, ont entamé vendredi en Irak le début d'un désarmement censé mettre fin à quatre décennies de violences. (Reuters)
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  • Selon une journaliste de l'AFP, quatre commandants du mouvement et leurs hommes ont déposé et brûlé leurs armes lors d'une cérémonie, vendredi matin, à 50 km à l'ouest de Souleimaniyeh, dans la région autonome du Kurdistan, dans le nord de l'Irak
  • Celle-ci s'est déroulée dans la grotte de Casene, connue pour avoir notamment abrité une imprimerie qui a publié l'un des premiers journaux kurdes, a-t-elle précisé

SOULEIMANIYEH: Une trentaine de combattants kurdes du PKK, le Parti des Travailleurs du Kurdistan en guerre contre Ankara depuis quatre décennies, ont entamé vendredi en Irak le début d'un désarmement censé mettre fin à quatre décennies de violences.

Selon une journaliste de l'AFP, quatre commandants du mouvement et leurs hommes ont déposé et brûlé leurs armes lors d'une cérémonie, vendredi matin, à 50 km à l'ouest de Souleimaniyeh, dans la région autonome du Kurdistan, dans le nord de l'Irak.

Celle-ci s'est déroulée dans la grotte de Casene, connue pour avoir notamment abrité une imprimerie qui a publié l'un des premiers journaux kurdes, a-t-elle précisé.

Le PKK a salué une "opération historique et démocratique".

Les combattants devaient ensuite regagner les montagnes proches où ils sont basés, avait indiqué précédemment à l'AFP un responsable du PKK.

Des représentants du gouvernement autonome du Kurdistan irakien et de son président Nechirvan Barzani ont assisté aux opérations, mais il n'a pas été précisé qui avait été dépêché par Ankara, hormis des membres des services de renseignements selon les médias turcs.

Les autorités locales kurdes avaient annoncé peu avant avoir abattu deux drones à proximité des positions des forces kurdes, quelques heures avant le début des opérations.

Un processus de paix initié depuis l'automne doit permettre de tourner la page de plus de quatre décennies de violences qui ont fait au moins 40.000 morts, et résoudre la question kurde tant au niveau national que régional, selon les experts.

"Responsabilité historique" 

Le 27 février, le chef du PKK Abdullah Öcalan, 76 ans dont vingt-six en prison, a appelé le mouvement à "déposer les armes et (...) à se dissoudre", affirmant "assumer la responsabilité historique de cet appel".

Parmi un nombre restreint d'invités conviés vendredi, officiellement pour des raisons de sécurité, figurent des élus du parti turc prokurde DEM, médiateur entre le PKK et le gouvernement turc.

Pour la Turquie, comme pour ses alliés occidentaux, le PKK est considéré comme un mouvement terroriste.

C'est paradoxalement l'allié du président turc Recep Tayyip Erdogan, le chef du parti nationaliste MHP, Devlet Bahceli, qui a tendu la main à l'ennemi public, lui proposant d'appeler les combattants à renoncer à la lutte armée et à "venir s'exprimer devant le Parlement".

Mercredi, dans un message vidéo en turc, "Apo" (oncle) comme l'appellent ses fidèles, a confirmé l'imminence du désarmement.

"Je crois au pouvoir de la politique et de la paix sociale et non des armes. Et je vous appelle à mettre ce principe en pratique", insistait-il dans cette longue adresse.

Le chef de l'Etat turc a récemment exprimé sa confiance de voir "une Turquie sans terroriste", espérant que "ce processus prometteur se conclurait avec succès le plus rapidement possible, sans obstacle, ni risque de sabotage".

"Geste de bonne volonté" 

Selon un commandant du PKK, cette première cérémonie était un "geste de bonne volonté".

Abdullah Öcalan, lui, est toujours détenu sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul, et ne réclame pas d'en sortir, alors que ses commandants faisaient de sa libération un des termes de l'équation.

"La situation de notre chef, Apo, affecte le processus et le ralentit", jugeait la semaine dernière un haut responsable du PKK, Mustafa Karasu.

En refusant de lier son sort personnel à l'avenir du processus de paix, M. Öcalan "contredit les conditions posées par le Parti qui demandait son élargissement afin qu'il puisse mener à bien le processus de paix", note l'historien des mouvements kurdes Boris James.

Le chercheur relève par ailleurs l'absence "d'acteur tiers pour garantir la probité du processus" et insiste: "Une très forte défiance subsiste entre le PKK et l'Etat turc, or l'Etat a donné peu de gages" aux combattants kurdes.

Ces derniers ont régulièrement dénoncé la poursuite des bombardements turcs sur leurs positions en Irak malgré le processus en cours.

Depuis les derniers violents combats qui avaient ensanglanté la ville turque à majorité kurde de Diyarbakir (sud-est) en 2015, les combattants du PKK sont principalement restés cantonnés dans les montagnes de Qandil, en Irak, soumis également aux opérations de ratissage de l'armée turque.

 


Dix personnes secourues après l'attaque meurtrière d'un navire en mer Rouge

Après plusieurs mois d'accalmie, les Houthis ont attaqué le navire Magic Seas dimanche, dont l'équipage a été évacué par la marine émiratie, puis l'Eternity C lundi et mardi, coulant les deux bâtiments. (Reuters)
Après plusieurs mois d'accalmie, les Houthis ont attaqué le navire Magic Seas dimanche, dont l'équipage a été évacué par la marine émiratie, puis l'Eternity C lundi et mardi, coulant les deux bâtiments. (Reuters)
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  • Après plusieurs mois d'accalmie, les Houthis ont attaqué le navire Magic Seas dimanche, dont l'équipage a été évacué par la marine émiratie, puis l'Eternity C lundi et mardi, coulant les deux bâtiments
  • Trois membres d'équipage philippins et un membre grec de l'équipe de sécurité à bord du Eternity C ont été récupérés en mer dans la nuit, "portant le nombre total de personnes secourues à 10", a indiqué jeudi la mission navale de l'Union européenne sur X

DUBAI: Dix personnes ont été secourues après l'attaque d'un navire en mer Rouge par les rebelles houthis du Yémen, tandis que trois autres ont été tuées et douze sont toujours portées disparues, selon la mission européenne Aspides déployée dans la zone.

Cette attaque, l'une des plus meurtrières menées par les Houthis contre la marine marchande, marque une escalade dans cette zone maritime essentielle pour le commerce mondial, menaçant une trêve conclue en mai avec les Etats-Unis censée préserver la liberté de navigation.

Après plusieurs mois d'accalmie, les Houthis ont attaqué le navire Magic Seas dimanche, dont l'équipage a été évacué par la marine émiratie, puis l'Eternity C lundi et mardi, coulant les deux bâtiments.

Trois membres d'équipage philippins et un membre grec de l'équipe de sécurité à bord du Eternity C ont été récupérés en mer dans la nuit, "portant le nombre total de personnes secourues à 10", a indiqué jeudi la mission navale de l'Union européenne sur X.

Au total, 25 personnes se trouvaient à bord de ce vraquier battant pavillon libérien.

Mardi, Aspides avait déclaré à l'AFP que trois personnes avaient été tuées et au moins deux blessées, parmi lesquelles un électricien russe qui a perdu une jambe, lors de l'attaque menée par les rebelles yéménites.

Le sort des autres membres de l'équipage reste incertain.

Mercredi, les Houthis ont affirmé avoir "secouru" un nombre indéterminé de personnes à bord du navire et les avoir emmenés dans un " lieu sûr". L'ambassade des Etats-Unis au Yémen les a accusés d'avoir enlevé les survivants.

Les insurgés ont également diffusé une vidéo montrant une puissante explosion sur le pont du cargo, qui a ensuite coulé.

"Profonde inquiétude" 

Depuis fin 2023, les Houthis ont attaqué des dizaines de navires qu'ils estiment liés à Israël, affirmant agir par solidarité avec les Palestiniens de la bande de Gaza, en proie aux bombardements israéliens depuis le début de la guerre le 7 octobre 2023.

Ces attaques ont contraint de nombreux armateurs à éviter la mer Rouge, par où transite 12% du commerce mondial, d'après la Chambre internationale de la marine marchande (ICS).

Les Houthis, qui contrôlent la capitale Sanaa et de larges pans du Yémen, en proie à une guerre civile depuis 2014, avaient interrompu leurs attaques maritimes cette année après un cessez-le-feu à Gaza conclu en janvier et qui a pris fin deux mois plus tard.

En mai, ces rebelles proches de l'Iran avaient averti qu'ils continueraient à s'en prendre aux navires israéliens ou liés à Israël, malgré une trêve avec les Etats-Unis qui a mis fin à des semaines de bombardements américains des cibles rebelles au Yémen.

Leur chef, Abdel Malek al-Houthi, a répété jeudi que ces opérations se poursuivront "tant que l'agression et le siège de Gaza perdureront", en affirmant que les navires visés appartiennent à des compagnies "violant l'interdiction" de se rendre en Israël.

Selon le Centre conjoint d'information maritime, géré par une coalition navale occidentale, le Magic Seas et l'Eternity C ont probablement été attaqués "en raison de précédents passages dans des ports israéliens ou de liens entre leurs propriétaires ou gestionnaires et d'autres navires ayant fréquenté Israël".

L'émissaire de l'ONU pour le Yémen, Hans Grundberg, a fait part de sa "profonde inquiétude", en déplorant des "pertes civiles, des blessés, ainsi qu'un risque potentiel de dommages environnementaux".

L'attaque contre l'Eternity C est la plus meurtrière depuis l'attaque de missile contre le navire marchand True Confidence en mars de l'année dernière, qui avait fait trois morts.

Les Houthis ont également capturé le Galaxy Leader en novembre 2023 et coulé le Rubymar, qui transportait 21.000 tonnes d'engrais, en février 2024.


Gaza: la Défense civile annonce 66 morts dont des enfants devant une clinique

La Défense civile locale a fait état de 66 morts jeudi dans les opérations militaires israéliennes à Gaza, dont 17, y compris des enfants, dans une frappe devant une clinique de Deir al-Balah où l'armée a dit avoir visé un combattant du Hamas. (AFP)
La Défense civile locale a fait état de 66 morts jeudi dans les opérations militaires israéliennes à Gaza, dont 17, y compris des enfants, dans une frappe devant une clinique de Deir al-Balah où l'armée a dit avoir visé un combattant du Hamas. (AFP)
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  • La clinique de Deir al-Balah est gérée par l'ONG humanitaire Project HOPE, qui a rapporté de son côté la mort de 15 personnes, dont dix enfants et deux femmes
  • "Les cliniques de Project HOPE sont des lieux de refuge à Gaza, où les gens amènent leurs jeunes enfants, où les femmes reçoivent des soins pendant et après leur grossesse, où l'on traite la malnutrition"

GAZA: La Défense civile locale a fait état de 66 morts jeudi dans les opérations militaires israéliennes à Gaza, dont 17, y compris des enfants, dans une frappe devant une clinique de Deir al-Balah où l'armée a dit avoir visé un combattant du Hamas.

Un raid aérien a touché en matinée un groupe de personnes qui patientaient devant un établissement médical de Deir al-Balah, a indiqué à l'AFP Mohammad al-Moughayyir, un responsable de l'organisation de premiers secours. Parmi les 17 morts figurent huit enfants au moins, selon lui.

L'armée israélienne a indiqué à l'AFP avoir ciblé à Deir al-Balah un membre d'une unité d'élite du mouvement islamiste palestinien Hamas, la Noukhba, ayant participé selon elle "au massacre du 7 octobre" 2023, à l'origine de la guerre à Gaza.

Elle a dit regretter "tout dommage causé à des personnes non impliquées" et oeuvrer "autant que possible à limiter les atteintes aux civils".

"Il n'y a eu aucun avertissement, juste une frappe directe au milieu des civils", a raconté à l'AFP Mohamed Abou Ouda, qui était dans la file d'attente devant la clinique. "Qu'avons-nous fait et qu'ont fait nos enfants pour mériter cela?"

"Nous étions des dizaines à attendre", a déclaré un autre témoin, Youssef Al-Aydi. "Soudain, nous avons entendu le bruit d'un avion s'approcher, puis l'explosion a retenti. Le sol a tremblé sous nos pieds et autour de nous ce n'était que sang et cris déchirants".

"Familles innocentes" 

La clinique de Deir al-Balah est gérée par l'ONG humanitaire Project HOPE, qui a rapporté de son côté la mort de 15 personnes, dont dix enfants et deux femmes.

"Les cliniques de Project HOPE sont des lieux de refuge à Gaza, où les gens amènent leurs jeunes enfants, où les femmes reçoivent des soins pendant et après leur grossesse, où l'on traite la malnutrition", a commenté dans un communiqué le responsable de l'ONG, Rabih Torbay.

"Pourtant, ce matin, des familles innocentes ont été attaquées sans pitié alors qu'elles faisaient la queue en attendant l'ouverture des portes", a-t-il ajouté, appelant à un cessez-le-feu immédiat.

Selon l'Unicef, l'un des enfants tués devant la clinique avait tout juste un an et venait de prononcer ses premiers mots quelques heures plus tôt d'après sa mère.

"Aucun parent ne devrait avoir à faire face à une telle tragédie", a commenté la directrice de l'agence onusienne Catherine Russell. "Tuer des familles qui tentent d'avoir accès à une aide vitale est quelque chose d'inconcevable".

L'armée israélienne n'a pas commenté les autres incidents rapportés par la Défense civile, dont l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les bilans et les affirmations compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain.

L'attaque du 7-Octobre a entraîné côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles.

Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 49 sont toujours retenues à Gaza, dont 27 ont été déclarées mortes par l'armée israélienne.

Au moins 57.762 Palestiniens, majoritairement des civils, ont été tués dans la campagne de représailles militaires israéliennes à Gaza, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, jugées fiables par l'ONU.