Finances publiques: Le gouvernement engage un tour de vis supplémentaire pour le budget 2023

Cette annonce, faite par Matignon et le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, intervient alors que l'exécutif guette la décision de l'agence d'évaluation financière Standard & Poor's sur sa notation de la dette française, attendue le 2 juin (Photo, AFP).
Cette annonce, faite par Matignon et le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, intervient alors que l'exécutif guette la décision de l'agence d'évaluation financière Standard & Poor's sur sa notation de la dette française, attendue le 2 juin (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 24 mai 2023

Finances publiques: Le gouvernement engage un tour de vis supplémentaire pour le budget 2023

  • Après avoir atteint 4,7% en 2022, le déficit public devrait légèrement remonter cette année (4,9%) avant de refluer progressivement à partir de 2024
  • Le désendettement devrait également connaître un coup d'accélérateur, avec une dette publique représentant 108,3% du PIB en 2027

PARIS: Pour garantir son engagement à redresser des finances publiques mal en point, le gouvernement va opérer un tour de vis en gelant 1% supplémentaire des crédits de son budget 2023, une "mesure de précaution" dans un environnement économique "difficile".

Cette annonce, faite par Matignon et le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, intervient alors que l'exécutif guette la décision de l'agence d'évaluation financière Standard & Poor's sur sa notation de la dette française, attendue le 2 juin.

Une dégradation de celle-ci serait perçue comme un mauvais signal pour la signature de la France, chère au gouvernement, après un premier coup de semonce tiré par l'agence Fitch, qui avait invoqué les fortes tensions sociales autour de la réforme des retraites pour abaisser sa note fin avril.

Lors d'une réunion à Matignon mardi, la Première ministre a validé une proposition de son ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, qui consiste en "une augmentation des crédits mis en réserve – 'surgel' – dans le budget 2023, à hauteur de 1% des crédits prévus dans la loi de finances (hors traitements des fonctionnaires)", a précisé l'entourage d'Elisabeth Borne.

Cette mesure "doit nous garantir que nous tiendrons nos objectifs de finances publiques en 2023", notamment un déficit public tout juste sous 5% du produit intérieur brut (PIB) cette année, grâce à "une exécution du budget moins dépensière", a fait valoir M. Le Maire.

«10 milliards d'euros»

Il s'agit selon lui d'une "mesure de précaution supplémentaire" car malgré une croissance qui se maintient de justesse dans le vert et un taux de chômage au plus bas, l'environnement reste "difficile", a-t-il souligné.

"Nous devons être lucides sur la persistance de certains risques macroéconomiques" tels que la poursuite de la guerre en Ukraine et la remontée des taux d'intérêt qui renchérit le coût du crédit pour les entreprises et les ménages, a-t-il ajouté.

Selon le ministre, ce 1% de gel "s'applique à l'intégralité des crédits de l'État sauf les salaires", ce qui représente 1,8 milliard d'euros. Ce montant "s'ajoute aux 5% de crédits de l'État qui avaient déjà été gelés pour un montant total de crédits gelés de 10 milliards d'euros".

Après avoir atteint 4,7% en 2022, le déficit public devrait légèrement remonter cette année (4,9%) avant de refluer progressivement à partir de 2024 pour atteindre 2,7% en fin de quinquennat en 2027, dans les clous européens, selon la feuille de route du gouvernement pour les prochaines années et présentée en avril.

Le désendettement devrait également connaître un coup d'accélérateur, avec une dette publique représentant 108,3% du PIB en 2027, mais toujours très loin de l'objectif européen de 60%. Elle était à 111,6% du PIB fin 2022.

«Crédibilité»

Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement table sur une croissance plus dynamique et la fin des dépenses massives du "quoi qu'il en coûte" destinées à amortir le choc de la pandémie puis de l'inflation, avec une ligne rouge : pas d'augmentation d'impôts.

Ambitionnant une dépense publique moindre, sa stratégie repose aussi sur une revue des dépenses publiques qui a vocation à être reproduite chaque année au sein de tous les ministères.

Déjà, des mesures d'économies de 5% ont été demandées à ces derniers pour 2024, qui permettront de dégager 7 milliards d'euros devant servir notamment à financer la transition énergétique.

Des assises des finances publiques sont prévues le 19 juin, à l'occasion desquelles Bruno Le Maire détaillera les économies prévues dans le projet de loi de finances 2024.

"Aujourd'hui, il faut accélérer le désendettement de la France car sinon on va payer le prix de la remontée des taux d'intérêt", a déclaré Bruno Le Maire lundi lors du bureau exécutif de son parti Renaissance, selon des propos rapportés par son entourage à l'AFP.

"Nous allons payer des milliards pour rembourser la charge de la dette alors que nous en avons besoin pour la transition écologique ; nous allons perdre en crédibilité", a-t-il mis en garde.

Après la dégradation par Fitch, il avait déjà cherché à rassurer en réaffirmant la volonté du gouvernement de "faire passer des réformes structurantes pour le pays".


L'Etat veut puiser davantage dans les comptes dormants pour financer les associations

La secrétaire d'État française à la Jeunesse et au Service national universel, Prisca Thevenot, quitte le palais présidentiel de l'Élysée après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 20 septembre 2023. (AFP)
La secrétaire d'État française à la Jeunesse et au Service national universel, Prisca Thevenot, quitte le palais présidentiel de l'Élysée après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 20 septembre 2023. (AFP)
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  • Le FDVA finance le fonctionnement ou les projets innovants des associations, principalement petites et moyennes
  • Le gouvernement veut accélérer le déploiement du réseau des permanences Guid'asso et la plateforme internet Le Compte Asso

PARIS: Le gouvernement veut augmenter de quelque 20 millions d'euros le financement des petites associations "locales, du quotidien", "sans alourdir la dette de l'Etat", en puisant plus largement dans les comptes bancaires inactifs, a annoncé mardi la secrétaire d'Etat à la Jeunesse Prisca Thévenot.

"De nombreux comptes bancaires inactifs, non réclamés depuis des décennies, se trouvent consignés auprès de la Caisse des Dépôts. Depuis 2020, 20% sont orientés vers le financement des associations, nous allons passer à 40%", a-t-elle annoncé à l'AFP, précisant que le gouvernement porterait des amendements en ce sens dans le projet de loi de finances.

"Cela représente près de 20 millions d'euros supplémentaires chaque année, qui s'ajouteront aux plus de 50 millions versés chaque année aux associations par l'Etat dans le cadre du FDVA (Fonds pour le développement de la vie associative)", explique-t-elle.

Ce fonds finance le fonctionnement ou les projets innovants des associations, principalement petites et moyennes. Parmi elles, des associations sportives, locales, MJC, comités des seniors...

Des associations ont appelé début septembre le gouvernement à soutenir le secteur associatif "en danger de mort" face à "l’inflation et à la hausse de la demande", dans une tribune parue dans Libération.

"Les associations disent qu'elles sont à la peine. Nous voulons leur dire que l'Etat les soutient sur les plans financier et administratif, même dans un contexte de restrictions budgétaires", assure Mme Thévenot, qui reçoit mardi quelque 200 associations.

Un groupe de travail va être mis en place, incluant le Mouvement associatif et le Haut conseil à la vie associative, pour finaliser d'ici décembre des mesures de "simplification administrative".

"Par moment les toutes petites associations ont l’impression qu’elles passent beaucoup de temps à répondre à des appels à projet, à réaliser leur bilan financier. Elles me disent: +On justifie de notre action par un bilan financier, pas suffisamment par l'impact concret qu'on a sur le terrain+", a-t-elle commenté.

Pour simplifier leur quotidien, le gouvernement veut accélérer le déploiement du réseau des permanences Guid'asso et la plateforme internet Le Compte Asso.


Budget 2024: moins dépenser mais soutenir le pouvoir d'achat, la difficile équation du gouvernement

Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, quitte le Palais présidentiel de l'Élysée après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 20 septembre 2023. (AFP)
Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, quitte le Palais présidentiel de l'Élysée après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 20 septembre 2023. (AFP)
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  • Pour donner des gages de sérieux budgétaire, l'exécutif compte dégager 16 milliards d'euros d'économies dans le projet de loi de finances qu'il détaillera mercredi en Conseil des ministres
  • Privé de majorité absolue à l'Assemblée et probablement de soutiens dans l'opposition, le gouvernement pourrait se résoudre à une adoption sans vote en recourant, comme l'an dernier, à l'article 49-3 de la Constitution

PARIS: Moins dépenser sans renoncer complètement à soutenir le pouvoir d'achat: le gouvernement doit trouver un difficile équilibre dans son projet de budget pour 2024, le premier d'après-crises avec l'ambition d'assainir les finances publiques.

Pour donner des gages de sérieux budgétaire, l'exécutif compte dégager 16 milliards d'euros d'économies dans le projet de loi de finances qu'il détaillera mercredi en Conseil des ministres.

Mais les débats s'annoncent électriques au Parlement. Privé de majorité absolue à l'Assemblée et probablement de soutiens dans l'opposition, le gouvernement pourrait se résoudre à une adoption sans vote en recourant, comme l'an dernier, à l'article 49-3 de la Constitution.

Le gouvernement assure vouloir acter la fin du "quoi qu'il en coûte", confronté à une dette qui a dépassé cet été les 3 000 milliards d'euros, et à un déficit largement en dehors des clous européens qui range la France parmi les mauvais élèves de la zone euro.

«Crédibilité»

Ainsi, 10 des 16 milliards d'économies proviendront de l'extinction progressive, d'ici à la fin 2024, du bouclier tarifaire pour l'électricité permettant d'alléger les factures. S'y ajouteront notamment les réductions des aides aux entreprises (environ 4,5 milliards).

D'autres pistes d'économies ont été avancées ou confirmées comme le report d'une partie de la baisse d'impôts de production (CVAE) pour les entreprises, la suppression de l'avantage fiscal pour le gazole non routier ou une taxation des concessionnaires autoroutiers.

Dans Le Parisien, le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire a aussi soutenu une réduction de 71% à 50% de l'abattement fiscal pour les locations meublées touristiques, type Airbnb.

L'objectif est de ramener le déficit de 4,9% du PIB cette année à 4,4% en 2024, puis à 2,7% en 2027, sous la limite européenne de 3%.

L'endettement reculerait moins résolument, stable à 109,7% du PIB en 2024 pour atteindre 108,1% en fin de quinquennat, loin au-dessus du maximum européen (60%).

Pour le gouvernement, redresser les finances publiques est une question de "crédibilité" vis-à-vis des partenaires européens de la France et des marchés financiers.

Mais "il y a de moins en moins de marges de manœuvre", estime Christian de Boissieu, vice-président du Cercle des économistes, alors que la croissance économique serait l'an prochain moins dynamique qu'espéré.

Malgré la volonté affichée de dégager des économies, le gouvernement entend aussi continuer à s'ériger en défenseur du pouvoir d'achat face à une inflation tenace, un sujet politiquement sensible.

Confronté à une nouvelle envolée des prix à la pompe, il ressortira le chéquier, sa volonté d'autoriser la vente à perte de carburants n'ayant pas résisté à l'hostilité des distributeurs face à cette idée.

49.3 ?

L'indemnité de 100 euros annoncée par Emmanuel Macron pour les ménages les plus modestes qui travaillent et possèdent un véhicule devrait coûter environ 430 millions d'euros au budget 2024, tandis que l'indexation sur l'inflation du barème de l'impôt sur le revenu (4,8%), des retraites (revalorisées de 5,2% au 1er janvier) et des prestations sociales (4,6% au 1er avril) pèsera 25 milliards d'euros.

Quant au bonus pour l'achat d'un véhicule électrique, il sera augmenté pour les plus modestes, selon Bruno Le Maire.

Un projet de loi avançant le calendrier de négociations commerciales entre la grande distribution et ses fournisseurs sera aussi dévoilé mercredi en Conseil des ministres, avec l'espoir d'accélérer la baisse des prix dans les supermarchés.

S'ajoutent d'autres contraintes freinant la baisse des dépenses: une charge de la dette qui explose sous l'effet de taux d'intérêt élevés; des dépenses en hausse pour l'éducation, la défense ou la justice; la nécessité de financer la transition écologique, créditée de 7 milliards d'euros supplémentaires en 2024.

Du côté des recettes, l'exécutif maintient sa ligne rouge: pas question d'augmenter les impôts; il s'agit même de les baisser ces prochaines années.

Outre le budget, le 49.3 risque d'être aussi dégainé mercredi pour le projet de loi de programmation des finances publiques, texte fixant les objectifs budgétaires jusqu'en 2027. Pour les atteindre, le gouvernement estime à 12 milliards par an, sans les définir, les économies nécessaires dès 2025.

Cette trajectoire des finances publiques a été jugée "peu ambitieuse" par le Haut conseil des finances publiques.


Programmation des finances publiques : vers un premier 49.3 à l'Assemblée ?

Ll gouvernement, qui ne peut dégainer le 49.3 que sur un seul texte par session, hors budgets, pourrait profiter d'être dans une session extraordinaire pour l'utiliser. (AFP)
Ll gouvernement, qui ne peut dégainer le 49.3 que sur un seul texte par session, hors budgets, pourrait profiter d'être dans une session extraordinaire pour l'utiliser. (AFP)
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  • Ce texte, à ne pas confondre avec les traditionnels budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale, doit servir de feuille de route pour la trajectoire budgétaire française sur la période 2023-2027
  • Rejeté par l'Assemblée il y a un an, il prévoit notamment de ramener le déficit public de 4,8% du produit intérieur brut (PIB) en 2022 à 2,7% en 2027, sous l'objectif européen de 3%, dans un contexte où la charge de la dette explose

PARIS: La saison des 49.3 va-t-elle s'ouvrir mercredi à l'Assemblée? Le gouvernement pourrait engager sa responsabilité dès l'examen du projet de programmation des finances publiques face au rejet des oppositions, et malgré une possible abstention du RN.

Ce texte, à ne pas confondre avec les traditionnels budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale, doit servir de feuille de route pour la trajectoire budgétaire française sur la période 2023-2027.

Rejeté par l'Assemblée il y a un an, il prévoit notamment de ramener le déficit public de 4,8% du produit intérieur brut (PIB) en 2022 à 2,7% en 2027, sous l'objectif européen de 3%, dans un contexte où la charge de la dette explose.

La dette publique diminuerait d'un peu moins de 4 points, à 108,1% du PIB, encore bien au-dessus de la limite européenne de 60%. Une trajectoire "peu ambitieuse" et basée sur des hypothèses de croissance "optimistes", a tancé le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) lundi.

Reste que l'exécutif tient absolument au texte, arguant que son rejet menacerait le versement par Bruxelles à la France de 17,8 milliards d'euros sur la période 2023-2024.

Un argument qui peine à convaincre la plupart des oppositions, décidées à voter contre le projet de loi, débattu à partir de 21h30 mercredi.

"Cela reste une hypothèse, je ne la nie pas, mais ce n'est en aucun cas une certitude telle qu'elle est présentée", a insisté le président de la commission des Finances Eric Coquerel (LFI) avant l'adoption du texte en Commission.

Le patron des LR à l'Assemblée Olivier Marleix a lui aussi fermé la porte. "Il ne faut pas qu'ils comptent sur nous pour cogérer aujourd'hui la situation calamiteuse dans laquelle se trouve le pays".

«Poker menteur»

Le Rassemblement national, lui, a surpris en commission en choisissant de s'abstenir et n'a pas exclu de répéter ce geste dans l'hémicycle.

"Nous ne croyons pas à la crédibilité de votre loi de programmation", a affirmé le RN Jean-Philippe Tanguy. Mais il a aussi annoncé que le "RN fera un choix de conscience et de responsabilité" sur la question des milliards potentiellement menacés, suscitant les critiques de la gauche.

"C'est le tango de M. Tanguy qui vise la place de ministre d'ouverture dans le gouvernement de Madame Borne", a critiqué le socialiste Philippe Brun.

"La décision n'a absolument pas été actée", ont tempéré plusieurs députés RN contactés par l'AFP mardi.

Jean-Philippe Tanguy a précisé que son groupe pourrait "éventuellement s'abstenir", à condition d'être convaincu de la menace sur les crédits européens, et si le gouvernement fait un geste sur la hausse des taxes sur le gazole non routier.

"Nous sommes nombreux à être élus de territoires ruraux, c'est important dans notre groupe", précise un député du Rassemblement national.

Mais l'idée d'une adoption "grâce" au RN ne séduit guerre dans le camp présidentiel.

Par ailleurs le gouvernement, qui ne peut dégainer le 49.3 que sur un seul texte par session, hors budgets, pourrait profiter d'être dans une session extraordinaire pour l'utiliser. Objectif: conserver une cartouche pour la session ordinaire qui commencera début octobre.

"C'est un peu le poker menteur jusqu’au bout", estime un cadre du groupe Renaissance.

Il y a "une forte probabilité qu'on passe au 49.3 rapidement", reconnaissait mardi un ministre.

D'autant que le risque de l'adoption d'une motion de censure sur ce projet de loi semble relativement faible, le patron des LR Olivier Marleix ayant précisé que son groupe n'en déposerait pas.

Il faut "banaliser cet acte-là", relève le ministre, Élisabeth Borne, en l'absence de majorité absolue à l'Assemblée, étant amenée à dégainer une dizaine de 49.3 à l'automne sur les budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale.