La politique étrangère de la Turquie passée au crible après l'arrivée au pouvoir d'Erdogan

Le président russe Vladimir Poutine et son homologue turc Recep Tayyip Erdogan se serrent la main au Kremlin, à Moscou le 5 mai 2020 (Photo, AFP).
Le président russe Vladimir Poutine et son homologue turc Recep Tayyip Erdogan se serrent la main au Kremlin, à Moscou le 5 mai 2020 (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 30 mai 2023

La politique étrangère de la Turquie passée au crible après l'arrivée au pouvoir d'Erdogan

  • Les experts estiment que le président devra gérer les pressions américaines concernant les sanctions contre la Russie et l'élargissement de l'OTAN
  • L'énergie, les contrats d'armement et l'immigration seront probablement les priorités du gouvernement

ANKARA: La direction que prendra la politique étrangère de la Turquie n'est plus un secret puisque le président sortant Recep Tayyip Erdogan a remporté dimanche dernier un nouveau mandat de cinq ans. Il poursuivra donc les stratégies défendues par le passé.

Selon Ozgur Unluhisarcikli, directeur du bureau d'Ankara du German Marshall Fund of the US, la principale priorité d'Erdogan sera d'assurer le flux continu de fonds en provenance de la Russie et des pays du Golfe, tout en évitant les frictions avec l'Europe et les États-Unis afin d'attirer les investissements de l'Occident.

«Bien qu'il soit peu probable que les relations de la Turquie avec l'Europe et les États-Unis soient remises sur les rails, elles peuvent au moins être stabilisées, car Erdogan et ses homologues occidentaux en tireraient profit», a-t-il déclaré à Arab News.

«Les messages de félicitations adressés par l'Europe et les États-Unis suggèrent que cette tendance est également partagée par l'Occident.»

Le président Joe Biden a félicité Erdogan pour sa réélection, affirmant sur Twitter: «Je me réjouis de continuer à travailler ensemble, en tant qu'alliés de l'OTAN, sur des questions bilatérales et des défis mondiaux communs.»

Pour Unluhisarcikli, Erdogan aura des décisions difficiles à prendre au début de son troisième mandat présidentiel.

«Les États-Unis, qui ont fait preuve de retenue jusqu'à présent en raison des élections en Turquie, insisteront davantage sur les sanctions à l'encontre de la Russie et sur l'élargissement de l'OTAN au cours de la période à venir. Les décisions d'Erdogan sur ces questions et les développements aux États-Unis concernant la demande d'achat de nouveaux F-16 par la Turquie pourraient faire pivoter les relations entre la Turquie et les États-Unis dans n'importe quelle direction», a-t-il ajouté.

Le gouvernement de Donald Trump a retiré la Turquie du programme d'avions de cinquième génération F-35 en 2019 en raison de son acquisition du système de missiles russe S-400.

Les experts soulignent également qu'avec la victoire d'Erdogan, la Turquie poursuivra ses récentes mesures visant à rapatrier des centaines de milliers de réfugiés syriens dans des zones sous contrôle turc, conformément au droit international.

Bien que suscitant la méfiance de Washington, les efforts de normalisation avec le président syrien Bachar al-Assad devraient par ailleurs se poursuivre. En effet, Erdogan et ses nouveaux alliés ultranationalistes et anti-immigrés au parlement voient dans le rétablissement des liens avec la Syrie le seul moyen de renvoyer les réfugiés syriens en Turquie dans leur pays d'origine.

Le nouvel allié d'Erdogan, Sinan Ogan, qui s'est présenté comme troisième candidat à la présidence lors des premières élections, puis a soutenu la candidature d'Erdogan au second tour, a affirmé pendant sa campagne qu'il envisagerait de rapatrier les réfugiés par la force si nécessaire.

Karol Wasilewski, analyste pour 4CF The Futures Literacy Company et fondateur de l'Institute for Turkiye Studies, basé à Cracovie, s'attend à une continuité à court terme dans la diplomatie et le processus décisionnel turcs en matière d'économie et de politique étrangère.

«Erdogan poursuivra certainement sa politique étrangère ambiguë dans laquelle la Turquie, d'une part, donne à ses alliés occidentaux des raisons d'être encore considérée comme un allié – c'est pourquoi je ne serai pas surpris de voir Erdogan accepter l'adhésion de la Suède – et, d'autre part, défend résolument ses intérêts, au risque de nuire à la cohésion interne de l'OTAN», a-t-il déclaré à Arab News.

Fort du soutien qu'il a reçu lors des élections de dimanche, et ayant retrouvé une certaine flexibilité dans ses manœuvres politiques et diplomatiques, Erdogan devrait également opérer quelques volte-face sans risquer un retour de bâton de la part de son électorat.

La candidature de la Suède n'a pas encore été approuvée par Ankara. Son adhésion, rejetée depuis longtemps par Erdogan, qui l'accuse d'abriter des terroristes, pourrait également servir d'atout pour obtenir une promesse américaine de vente d'avions de combat F-16 avant le prochain sommet de l'OTAN en juillet, au cours duquel Erdogan et Biden devraient se rencontrer.

L'admission de la Suède par la Turquie permettrait à l'administration américaine de faire pression sur le Congrès pour la vente de F-16.

Cependant, les réticences d'Erdogan à l'égard du soutien américain aux milices kurdes syriennes – les Unités de protection du peuple (YPG) – ne devraient pas évoluer sous son troisième mandat. Son gouvernement considère en effet les YPG comme une extension du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), proscrit en Turquie.

Vendredi, le ministre de l'Intérieur Suleyman Soylu a déclaré qu'après les élections, «quiconque poursuit une politique pro-américaine en Turquie sera qualifié de traître», laissant présager une éventuelle relation transactionnelle avec Washington après les élections.

Pour Wasilewski, la victoire d'Erdogan pourrait être une nouvelle chance pour les groupes euro-asiatiques en Turquie de se renforcer au sein de l'appareil de sécurité.

«Sur une période de cinq ans, cette situation pourrait assombrir davantage les relations de la Turquie avec l'Occident», a-t-il déclaré.

Une autre dimension du processus post-électoral serait la position des alliés occidentaux à l'égard de la Turquie, maintenant que la poussière des élections est retombée.

«Je ne serais pas surpris que les États-Unis décident d'accroître la pression sur la Turquie dans des domaines qui semblent vitaux pour leurs intérêts, tels que les sanctions contre la Russie», a indiqué Wasilewski.

«La manière dont Erdogan répondra à cette éventuelle pression sera l'un des (autres) facteurs déterminant les relations de la Turquie avec l'Occident», a-t-il ajouté.

En ce qui concerne les relations turco-russes, Ankara devrait poursuivre ses relations politiques et économiques actuelles avec le Kremlin et renforcer la coopération dans le domaine de l'énergie, en s'appuyant sur les relations personnelles entre les deux dirigeants.

Des liens étroits avec la Russie et le Golfe permettront également à Erdogan d'atteindre son objectif d'accroître l'indépendance de l'économie turque à l'égard des marchés occidentaux. Ankara n'a pas adhéré aux sanctions occidentales contre la Russie, mais continue de fournir un soutien militaire à Kiev.

La première centrale nucléaire turque, d'une valeur de 20 milliards de dollars (1 dollar = 0,93 euro), qui sera détenue pendant les 25 premières années par le constructeur, l'entreprise énergétique russe Rosatom, a récemment été inaugurée lors d'une cérémonie virtuelle. Il s'agit du plus grand projet de construction nucléaire au monde qui, selon le dirigeant russe Vladimir Poutine, resserre les liens entre la Turquie et la Russie.

La Russie a ainsi différé le paiement par la Turquie d'une partie de son approvisionnement en gaz naturel au début du mois de mai, à l’approche des élections générales.

La Turquie compte enfin attirer un grand nombre de touristes russes pour maintenir son économie à flot pendant l'été. Par ailleurs, M. Erdogan poursuivra sa campagne électorale en vue des prochaines élections municipales, prévues en mars 2024.

«Poutine est bien conscient que les liens étroits entre la Russie et la Turquie sont vitaux pour ses intérêts, surtout après l'agression russe contre l'Ukraine. Il continuera à déployer des efforts considérables pour les préserver», a indiqué Wasilewski.

«Alimenter les rêves de la Turquie de devenir une plaque tournante du gaz sert le discours d'Erdogan, qui considère la Turquie comme une grande puissance.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Trump reçoit Netanyahu à la recherche d'un accord à Gaza

Le président américain Donald Trump rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu dans la Salle bleue de la Maison Blanche à Washington, DC, le 7 juillet 2025. (AFP)
Le président américain Donald Trump rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu dans la Salle bleue de la Maison Blanche à Washington, DC, le 7 juillet 2025. (AFP)
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  • M. Netanyahu a de nouveau exclu la création d'un Etat palestinien à part entière, affirmant qu'Israël conserverait "toujours" le contrôle de la sécurité dans la bande de Gaza
  • Selon des sources palestiniennes proches des discussions, l'accord comprend une trêve de 60 jours, pendant laquelle le Hamas relâcherait dix otages encore en vie et remettrait des corps de captifs morts, en échange de la libération de Palestiniens détenus

WASHINGTON: Donald Trump, qui se dit déterminé à mettre fin à la guerre à Gaza, a reçu Benjamin Netanyahu à dîner à la Maison Blanche lundi soir, lequel a dit avoir présenté le président américain pour le Nobel de la Paix.

La troisième visite à Washington du Premier ministre israélien M. Netanyahu depuis le retour au pouvoir de Donald Trump intervient à un moment crucial, le président américain espérant profiter de l'élan donné par la récente trêve entre Israël et l'Iran après une guerre de 12 jours.

"Je ne pense pas qu'il y ait de blocage. Je pense que les choses se passent très bien", a déclaré M. Trump aux journalistes au début du dîner, lorsqu'on lui a demandé ce qui empêchait la conclusion d'un accord de paix.

Assis l'un en face de l'autre autour d'une grande table, le président américain s'est dit convaincu que le Hamas était prêt à accepter un cessez-le-feu à Gaza.

"Ils veulent une rencontre et ils veulent ce cessez-le-feu", a-t-il dit.

Le Premier ministre israélien a lui annoncé avoir présenté la nomination du président américain pour le prix Nobel de la paix, en lui remettant la lettre qu'il a envoyée au comité Nobel.

"A l'heure où nous parlons, il rétablit la paix dans un pays (après l'autre), dans une région après l'autre", a loué M. Netanyahu.

La rencontre lundi intervient en pleins pourparlers indirects entre Israël et le Hamas.

Depuis dimanche, deux sessions de pourparlers indirects entre Israël et le Hamas se sont tenues à Doha, selon des sources palestiniennes proches des négociations. "Aucune percée" n'a été encore réalisée, a indiqué à l'AFP l'une d'elles.

Mardi matin, l'armée israélienne a annoncé que cinq soldats avaient été tués et deux autres grièvement blessés au combat dans le nord de la bande de Gaza.

L'émissaire américain Steve Witkoff doit se rendre dans la semaine à Doha, selon la Maison Blanche.

Auparavant, la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt, avait indiqué que "la priorité absolue du président au Moyen-Orient est de mettre fin à la guerre à Gaza et le retour de tous les otages".

La guerre a été déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre 2023 contre Israël, à laquelle l'armée a riposté en lançant une offensive d'envergure à Gaza qui a fait des dizaines de milliers de morts et provoqué un désastre humanitaire.

Dimanche, Donald Trump a estimé qu'il existait "de bonnes chances" de parvenir à un accord "cette semaine".

Les négociations indirectes, menées via les médiateurs qatari, égyptien et américain, portent "sur les mécanismes de mise en oeuvre" d'un accord de cessez-le-feu et d'un "échange" d'otages retenus à Gaza contre des Palestiniens détenus en Israël, selon un responsable palestinien.

- "Inacceptables" -

La délégation du Hamas se trouvait dans une salle et la délégation israélienne dans une autre, dans le même bâtiment, a-t-il précisé.

"Le Hamas est sérieux et soucieux d'aboutir à un accord pour mettre fin à la guerre et à la souffrance de notre peuple, à condition que la partie israélienne fasse preuve de bonne foi et ne cherche pas à entraver ou à faire traîner le processus", a affirmé le responsable palestinien.

Lundi soir, M. Netanyahu a de nouveau exclu la création d'un Etat palestinien à part entière, affirmant qu'Israël conserverait "toujours" le contrôle de la sécurité dans la bande de Gaza.

"Maintenant, les gens diront que ce n'est pas un Etat complet, que ce n'est pas un Etat. Nous nous en moquons", a-t-il dit.

Selon des sources palestiniennes proches des discussions, l'accord comprend une trêve de 60 jours, pendant laquelle le Hamas relâcherait dix otages encore en vie et remettrait des corps de captifs morts, en échange de la libération de Palestiniens détenus par Israël.

- "On ne savait plus où aller" -

Des dizaines de personnes, dont des parents d'otages détenus à Gaza, se sont rassemblées lundi soir devant l'antenne de Tel-Aviv de l'ambassade des Etats-Unis en Israël pour demander à M. Trump de parvenir à un cessez-le-feu.

Les manifestants ont brandi des drapeaux américains, des affiches portant des photos d'otages et une grande pancarte sur laquelle on pouvait lire "Président Trump, faites l'histoire, ramenez-les tous à la maison, mettez fin à la guerre".

Sur les 251 personnes enlevées lors de l'attaque du Hamas du 7-Octobre, 49 sont toujours retenues à Gaza, dont 27 déclarées mortes par l'armée israélienne.

Une première trêve d'une semaine en novembre 2023, puis une deuxième de deux mois début 2025, ont permis le retour de nombreux otages en échange de la libération de Palestiniens détenus par Israël.

Sur le terrain à Gaza, la Défense civile a fait état de 12 Palestiniens tués par des frappes israéliennes, dont six morts dans la clinique Al-Rimal de Gaza-ville (nord), qui "abrite des centaines de déplacés".

"On a été surpris par des missiles et des explosions à l'intérieur du bâtiment. On ne savait plus où aller à cause de la poussière et des dégâts", témoigne auprès de l'AFP Salman Qoudoum, en exhortant à un accord de cessez-le-feu. "On ne peut plus attendre".


Le Japon se tourne vers les pays du CCG pour assurer la stabilité au Moyen-Orient

Les deux parties sont convenues de maintenir une coopération étroite pour contribuer à la paix et à la stabilité au Moyen-Orient. (MOFA)
Les deux parties sont convenues de maintenir une coopération étroite pour contribuer à la paix et à la stabilité au Moyen-Orient. (MOFA)
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  • Le ministre des Affaires étrangères Takeshi Iwaya rencontre le Dr Jasem Al-Budaiwi du CCG
  • L'industrie pétrolière mondiale et l'instabilité au Moyen-Orient ont été abordées.

TOKYO : Le ministre japonais des Affaires étrangères, M. Takeshi Iwaya, a rencontré lundi le secrétaire général du CCG, M. Jasem Al-Budaiwi, pour discuter de l'industrie pétrolière mondiale et de l'instabilité croissante au Moyen-Orient.

Iwaya a déclaré que les pays du CCG jouaient un rôle de plus en plus important dans le contexte de l'agitation régionale et internationale, a indiqué le ministère japonais des Affaires étrangères.

Le Japon souhaite approfondir la coopération politique et économique avec le CCG afin d'apporter la paix et la stabilité à la région, y compris la conclusion des négociations de l'accord de partenariat économique entre le Japon et le CCG.

M. Al-Budaiwi a déclaré que le bloc régional espérait également l'achèvement des négociations de l'APE et la poursuite de la coopération dans le cadre du plan d'action Japon-CCG.

M. Al-Budaiwi a ajouté que Tokyo était un partenaire important et a lancé une invitation pour une réunion des ministres des affaires étrangères des deux parties.

Les fonctionnaires ont parlé franchement des questions relatives au Moyen-Orient, notamment du conflit entre Israël et l'Iran, des attaques contre la bande de Gaza et de la situation en Syrie.

M. Iwaya a déclaré que le Japon poursuivrait ses efforts diplomatiques pour faire en sorte que l'accord de cessez-le-feu entre Israël et l'Iran soit mis en œuvre et que les voies du dialogue soient rouvertes.

M. Al-Budaiwi s'est fait l'écho de ce point de vue et a déclaré que les pays du CCG restaient attachés au dialogue.

Les fonctionnaires ont fait part de leurs préoccupations concernant les actes qui menacent les routes maritimes et les attaques contre les installations pétrolières.

- Cet article est également publié sur Arab News Japan


Face à Trump, les Brics s'inquiètent des droits de douane «unilatéraux»

Les Brics ont exprimé dimanche à Rio de Janeiro leurs "sérieuses préoccupations" face à la guerre commerciale menée par Donald Trump qui a en retour menacé d'imposer des droits de douane supplémentaires au bloc des onze grands pays émergents et à ceux qui "s'alignent" sur eux. (AFP)
Les Brics ont exprimé dimanche à Rio de Janeiro leurs "sérieuses préoccupations" face à la guerre commerciale menée par Donald Trump qui a en retour menacé d'imposer des droits de douane supplémentaires au bloc des onze grands pays émergents et à ceux qui "s'alignent" sur eux. (AFP)
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  • Les dirigeants n'ont pas nommé les Etats-Unis et Donald Trump, alors que de nombreux pays, dont la Chine, sont engagés dans des négociations avec Washington sur ce lourd dossier
  • Le président américain a réagi sur la plateforme Truth Social. "Tout pays s'alignant sur les politiques anti-américaines des Brics se verra appliquer un droit de douane SUPPLEMENTAIRE de 10%. Il n'y aura pas d'exception à cette politique", a-t-il écrit

RIO DE JANEIRO: Les Brics ont exprimé dimanche à Rio de Janeiro leurs "sérieuses préoccupations" face à la guerre commerciale menée par Donald Trump qui a en retour menacé d'imposer des droits de douane supplémentaires au bloc des onze grands pays émergents et à ceux qui "s'alignent" sur eux.

"Nous exprimons de sérieuses préoccupations face à l'augmentation de mesures douanières et non-douanières unilatérales qui faussent le commerce", affirment dans une déclaration les dirigeants du groupe menés par le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud, réunis pour deux jours.

De telles mesures "affectent les perspectives de développement économique mondial", alertent les Brics, qui représentent près de la moitié de la population mondiale et 40% du PIB de la planète.

Mais les dirigeants n'ont pas nommé les Etats-Unis et Donald Trump, alors que de nombreux pays, dont la Chine, sont engagés dans des négociations avec Washington sur ce lourd dossier.

Le président américain a réagi sur la plateforme Truth Social. "Tout pays s'alignant sur les politiques anti-américaines des Brics se verra appliquer un droit de douane SUPPLEMENTAIRE de 10%. Il n'y aura pas d'exception à cette politique", a-t-il écrit.

Il a également annoncé que les premières lettres menaçant de droits de douane exorbitants les pays récalcitrants à conclure un accord commercial avec Washington seront envoyées lundi à 16H00 GMT.

Le ministre américain du Trésor Scott Bessent avait auparavant affirmé que faute d'accord avec Washington dans les prochains jours, les surtaxes — pouvant atteindre 50% — entreraient en vigueur le 1er août.

"Effondrement" 

"Nous assistons à un effondrement sans précédent du multilatéralisme", a déploré à l'ouverture l'hôte du sommet, le président brésilien de gauche Luiz Inacio Lula da Silva.

Le rendez-vous annuel des Brics est en outre affaibli par l'absence de plusieurs poids lourds. Le président chinois Xi Jinping n'y participe pas pour la première fois depuis son arrivée au pouvoir en 2012, alors que son pays est la puissance dominante du bloc.

Le président russe Vladimir Poutine, visé par un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour crime de guerre présumé en Ukraine, n'a pas non plus fait le déplacement, mais a célébré en visioconférence "l'autorité et l'influence" des Brics.

Quant à la délégation d'Arabie saoudite, pays allié des Etats-Unis, elle n'a pas participé aux séances plénières, selon une source gouvernementale brésilienne qui n'a pas fourni d'explication.

"Réserves" iraniennes 

La situation au Moyen-Orient s'est aussi imposée dans les discussions, occasionnant des tiraillements avec l'Iran, membre des Brics depuis 2023 et qui sort très affaibli d'une guerre de douze jours avec Israël et les Etats-Unis.

Les Brics ont "condamné les attaques militaires" contre l'Iran en juin, dénonçant une "violation du droit international".

Ils n'ont toutefois pas cité les Etats-Unis et Israël, dont l'objectif était d'empêcher l'Iran de se doter de l'arme nucléaire, une ambition démentie par Téhéran.

Dans leur déclaration, les pays émergents réclament aussi un "cessez-le-feu immédiat" et le "retrait complet" des forces israéliennes de la bande de Gaza, où elles sont en guerre contre le mouvement islamiste palestinien Hamas depuis 21 mois.

Les Brigades al-Qassam, la branche armée du Hamas, ont salué dans un communiqué la position des Brics, les appelant à "faire pression" sur Israël pour mettre fin au "siège criminel imposé à 2,5 millions de personnes" dans le petit territoire côtier dévasté par la guerre.

Des négociations indirectes entre Israël et le Hamas ont commencé dimanche soir à Doha pour tenter de trouver un accord sur une trêve et une libération d'otages israéliens retenus à Gaza.

Ennemi juré d'Israël dont il nie l'existence, l'Iran a cependant, selon une source diplomatique iranienne, "exprimé des réserves" sur le soutien des Brics à une "solution à deux Etats" israélien et palestinien côte à côte.

De son côté, Lula a appelé à ne "pas rester indifférent face au génocide perpétré par Israël à Gaza".

"Régulation" de l'IA 

Créé pour rééquilibrer l'ordre mondial au bénéfice du "Sud global" face à l'Occident, le groupe des Brics s'est élargi depuis 2023 avec l'Arabie saoudite, l'Egypte, les Émirats arabes unis, l’Éthiopie, l'Iran puis l'Indonésie.

Mais en grossissant, le groupe est devenu de plus en plus hétéroclite, compliquant l'élaboration de positions communes.

Dans un texte distinct, les Brics ont d'une même voix appelé à une "régulation" dans le secteur de l'intelligence artificielle, en pleine expansion. Ils ont réclamé une "protection des droits de propriété intellectuelle" et de "justes mécanismes de rémunération".

"Le développement de l'intelligence artificielle ne peut être réservé à quelques pays ou être un moyen de manipulation aux mains de milliardaires", a lancé Lula.