La position de la Chine en tant que troisième médiateur le plus apprécié des Palestiniens, selon un sondage Arab News YouGov, derrière la Russie et l'UE, n'est pas une surprise. Ce classement correspond à la perception des Palestiniens et trouve un écho dans la position équitable de la Chine et ses contributions réfléchies à la paix au Moyen-Orient. La Chine a notamment joué un rôle central dans la négociation du rapprochement entre l'Arabie saoudite et l'Iran en mars, soulignant son engagement à favoriser le dialogue et à réduire les tensions dans la région.
Le dégel entre Riyad et Téhéran souligne l'importance d'avoir un médiateur fiable et impartial, plutôt qu'une grande puissance qui joue de ses muscles et domine les petites nations. Il est évident qu'un médiateur qui agit de bonne foi, garantissant fiabilité et équité, peut donner un nouvel élan au processus d'apaisement de l’hostilité. La contribution de la Chine, après les efforts soutenus d'Oman et de l'Irak, a contribué à faciliter la reprise des relations diplomatiques entre l'Arabie saoudite et l'Iran.
Le Moyen-Orient appartient de plein droit aux peuples de la région, et son avenir doit être déterminé par eux. Indépendamment de la complexité et des défis en jeu, une solution mutuellement acceptable ne peut être obtenue que par un dialogue sur un pied d'égalité fondé sur le respect mutuel.
Ce n'est pas un hasard si l'Arabie saoudite et l'Iran entretiennent d’importants liens commerciaux avec la Chine, qui occupe la position de premier partenaire commercial des deux pays, tout en étant le plus gros acheteur de leur pétrole. Au cours de ces dernières années, ces relations ont été renforcées grâce à des accords importants, notamment la signature d'un accord de coopération de vingt-cinq ans avec l'Iran en 2021, et un accord de partenariat stratégique global avec l'Arabie saoudite en 2022. Ces évolutions positionnent la Chine avec un pouvoir de persuasion unique et une forte motivation à plaider pour la détente.
Le rétablissement des relations diplomatiques entre l'Arabie saoudite et l'Iran devrait influer sur les développements régionaux. La réaction positive de presque tous les pays de la région témoigne de leur conviction que ces accords contribueront à la stabilité politique et au développement économique. L'accord entre l'Arabie saoudite et l'Iran peut être considéré comme la poursuite du processus de normalisation en cours au Moyen-Orient, qui a pris de l'ampleur à divers niveaux, notamment les efforts inter-Golfe/arabes.
De nombreux pays de la région ont activement diversifié leurs relations extérieures, cherchant à améliorer les liens avec différentes puissances régionales et mondiales. Cette approche stratégique vise à rompre les dépendances vis-à-vis de puissances mondiales spécifiques et à renforcer l'autonomie dans la prise de décision.
Du point de vue du peuple chinois, les remous au Moyen-Orient, notamment le conflit palestino-israélien, sont considérés comme un héritage de l'ordre géopolitique problématique établi à l'époque du colonialisme. Les puissances impériales ont divisé le Moyen-Orient, remodelé les cartes politiques et réduit la région à un fournisseur d'oléoducs et de stations-service, en grande partie pour quelques-uns. La réalité historique du Moyen-Orient, renforcée par les structures de pouvoir internationales, continue de façonner les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui.
«Il est évident qu'un médiateur qui agit de bonne foi peut donner un nouvel élan au processus d'apaisement de l'hostilité»
Henry Huiyao Wang
L'approche de la Chine au Moyen-Orient est influencée par sa propre histoire, marquée par une période d'humiliation aux XIXe et XXe siècles. Les leçons apprises ont guidé la Chine pour éviter de répéter de telles expériences et s'abstenir d'imposer sa volonté aux autres, notamment par la force ou la coercition.
La Chine rejette sans équivoque la reproduction des approches interventionnistes ratées poursuivies par d'autres. Elle recherche plutôt un engagement neutre avec toutes les parties, sur la base d'accords mutuellement bénéfiques, associé à l'empathie. La Chine a établi des relations diplomatiques officielles avec la Palestine en 1988, quatre ans avant ses relations avec Israël. En 2013, la Chine a présenté une proposition en quatre points soulignant l'importance d'un État palestinien indépendant, la coexistence pacifique entre la Palestine et Israël, et la création d'un État palestinien souverain basé sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, un droit inhérent au peuple palestinien.
L'intérêt direct de la Chine est d'être le témoin d'un Moyen-Orient pacifique
La récente escalade du conflit palestino-israélien rappelle brutalement la nécessité de régler la question palestinienne. La communauté internationale doit accorder la priorité à cette question, en la plaçant en tête de l'agenda international. S’engager fermement envers la solution à deux États, plaider pour la reprise rapide des pourparlers de paix, et répondre aux aspirations légitimes des Palestiniens sont des étapes essentielles vers la réalisation de leur rêve d'établir un État palestinien indépendant.
L'intérêt direct de la Chine est d'être le témoin d'un Moyen-Orient pacifique et prospère. Grâce à l’expansion de son économie et de ses relations commerciales, la Chine est devenue un partenaire essentiel pour les pays de la région. L'initiative chinoise de «la ceinture et la route» s'étend au Moyen-Orient et cherche à contribuer au développement d'infrastructures indispensables qui bénéficieront à long terme aux pays participants, y compris la Chine elle-même.
La Chine a déclaré qu'elle n'avait pas l'intention de modifier l'ordre international existant, ni de défier ou de remplacer les États-Unis. Au lieu de cela, elle vise à favoriser le développement, notamment en mettant en place des programmes de développement nationaux et internationaux dans tout le Moyen-Orient. À une époque où l'Occident est las des affaires de la région, les investissements, le commerce et l'aide substantiels de la Chine fournissent des biens publics qui favorisent le développement et la stabilité au Moyen-Orient.
Au vu des troubles persistants dans la région, une approche de la consolidation de la paix mérite d'être examinée. S'attaquer aux causes profondes de l'insécurité régionale, comme la stagnation économique, le taux de chômage élevé, l'insuffisance des infrastructures, la croissance démographique rapide et la fuite des cerveaux, devrait primer sur l'exportation de modèles de gouvernance. L'expansion du commerce et des investissements mutuellement bénéfiques, la facilitation de l'assistance économique et la priorisation du développement durable sont essentielles pour parvenir à une paix durable au Moyen-Orient.
Henry Huiyao Wang est le fondateur et président du Center for China and Globalization, un groupe de réflexion non gouvernemental basé à Pékin. Il a été conseiller au Conseil d'État chinois de 2015 à 2022.
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement le point de vue d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com









