L'infanticide au cœur du génocide de Gaza

Israël viole clairement et directement une poignée d'instruments juridiques internationaux qui protègent les enfants dans les conflits armés. Il s'agit notamment de la quatrième convention de Genève de 1949, qui établit des protections fondamentales pour les civils, y compris les enfants, en temps de guerre. (AFP)
Israël viole clairement et directement une poignée d'instruments juridiques internationaux qui protègent les enfants dans les conflits armés. Il s'agit notamment de la quatrième convention de Genève de 1949, qui établit des protections fondamentales pour les civils, y compris les enfants, en temps de guerre. (AFP)
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Publié le Mercredi 23 juillet 2025

L'infanticide au cœur du génocide de Gaza

L'infanticide au cœur du génocide de Gaza
  • Environ 17 000 enfants souffriraient de malnutrition sévère en raison de la pénurie de médicaments due à cette crise humanitaire
  • Les professionnels de la santé signalent que les mères sont incapables d'allaiter en raison de leur malnutrition, ce qui les oblige à recourir à des méthodes d'alimentation dangereuses


Alors que des dizaines de nourrissons et d'enfants palestiniens meurent chaque jour de faim - conséquence directe d'une politique israélienne délibérée visant à priver plus de deux millions de Gazaouis d'un accès illimité à la nourriture, à l'eau, au lait maternisé, au carburant et aux médicaments depuis le mois de mars - la guerre contre Gaza entre dans sa phase finale : l'extermination ou le dépeuplement. Les images d'enfants affamés sont poignantes, mais l'incapacité du monde à arrêter cette catastrophe d'origine humaine est stupéfiante et honteuse. Cette tragédie multiforme n'est pas le résultat d'une catastrophe naturelle, mais d'un crime de guerre, d'un crime contre l'humanité et d'une forme de génocide qui est une politique approuvée du gouvernement israélien. C'est indéfendable.

L'extermination des habitants de Gaza, que ce soit par les bombardements israéliens constants sur les maisons, les écoles, les hôpitaux, les lieux de culte, les abris et les camps de tentes ou par d'autres moyens, est désormais normalisée. Le blocus israélien est un fait avéré. La mort de plus de 20 000 enfants depuis le 7 octobre 2023 est une simple statistique. Selon l'ONU, plus de 70 000 enfants de moins de cinq ans risquent de souffrir de malnutrition aiguë dans l'année si le blocus et le conflit persistent.

Environ 17 000 enfants souffriraient de malnutrition sévère en raison de la pénurie de médicaments due à cette crise humanitaire. Les professionnels de la santé signalent que les mères sont incapables d'allaiter en raison de leur malnutrition, ce qui les oblige à recourir à des méthodes d'alimentation dangereuses.

La presse rapporte que des personnes âgées de Gaza tombent dans les rues ou dans les centres de distribution d'aide gérés par Israël, qui sont devenus des pièges mortels et ont coûté la vie à plus de 1 000 personnes au cours des deux derniers mois. Les enfants sont devenus une cible facile dans ces centres, dont le personnel est composé d'entrepreneurs américains et israéliens. Les médecins occidentaux qui ont travaillé dans les rares centres de santé et hôpitaux de Gaza parlent d'enfants blessés par balle à la tête, au torse, au cou et aux jambes.

Les agences d'aide des Nations unies ayant déclaré que leurs entrepôts étaient désormais vides dans toute la bande de Gaza assiégée, le nombre d'enfants mourant de faim ne fera qu'augmenter chaque jour. Mais nous n'avons pas encore vu d'action sérieuse de la part du Conseil de sécurité de l'ONU, de l'administration Trump, de l'UE ou du Royaume-Uni pour ordonner à Israël d'arrêter le carnage et d'ouvrir les frontières afin que l'aide puisse affluer dans la bande de Gaza. La déclaration faite lundi par le Royaume-Uni, la France et plus de 20 autres pays ne servira à rien si elle n'est pas soutenue par des actions.

Israël fait déjà l'objet d'accusations de génocide devant la Cour internationale de justice. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la défense sont recherchés par la Cour pénale internationale pour crimes contre l'humanité. Mais la liste des accusations ne devrait pas s'arrêter là. Israël viole clairement et directement une poignée d'instruments juridiques internationaux qui protègent les enfants dans les conflits armés. Il s'agit notamment de la quatrième convention de Genève de 1949, qui établit des protections fondamentales pour les civils, y compris les enfants, en temps de guerre. Israël viole également la Convention relative aux droits de l'enfant, adoptée en 1989, qui est le traité sur les droits de l'homme le plus largement ratifié au monde.

Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté plusieurs résolutions sur cette question, en particulier la résolution 1612 de 2005, qui établit des mécanismes de surveillance et de communication de l'information sur les violations graves commises à l'encontre des enfants dans les conflits armés.

Le recours d'Israël à la punition collective contre les Palestiniens n'est pas nouveau. Il a déjà eu recours à de tels actes criminels par le passé, tant à Gaza qu'en Cisjordanie. Depuis ce mois-ci, les forces israéliennes ont tué au moins 204 enfants palestiniens en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, depuis le 7 octobre 2023, ce qui représente environ 20 % de tous les enfants tués en Cisjordanie depuis l'an 2000.

Malgré la condamnation croissante par les agences de l'ONU et les organisations de défense des droits de l'homme de la militarisation de la nourriture par Israël et de son utilisation de la famine comme politique d'État, rien n'indique qu'Israël est sur le point de revenir sur sa politique. Les gouvernements occidentaux, en particulier les États-Unis, ne font pas suffisamment pression sur Israël pour qu'il mette fin à son blocus illégal et laisse entrer l'aide à Gaza.

Il redouble d'efforts en étendant les zones sous son contrôle militaire, sans rien faire pour remédier à la famine qui s'étend et à la famine délibérée. Elle poursuit le transfert forcé de millions de personnes vers Rafah, où elle prévoit de construire un camp de concentration avant de pousser les habitants de Gaza à quitter la bande. En moyenne, il tue entre 80 et 120 personnes par jour, la majorité d'entre elles étant abattues dans les centres de distribution de nourriture qu'il contrôle.

Le sentiment d'impunité d'Israël s'accroît, même lorsque ses militaires déclarent que le déplacement de populations par la force est un crime de guerre. Israël n'a pas à se défendre lorsque des images d'enfants affamés à Gaza sont diffusées sur les réseaux sociaux. Cette tâche est confiée aux législateurs américains et à la Maison Blanche, qui s'empressent d'imposer des sanctions aux tribunaux internationaux et à la rapporteuse spéciale des Nations unies, Francesca Albanese, pour s'être opposés au génocide en cours.

Alors que les négociations sur le cessez-le-feu à Doha n'aboutissent à rien, Netanyahou profite de l'impasse pour pousser les habitants de Gaza au bord du gouffre et procéder à des déplacements massifs. Même si une trêve temporaire est conclue, rien ne garantit que Netanyahou ne reprendra pas la guerre, sous de faux prétextes, pour atteindre son objectif final.

Deux considérations essentielles doivent être prises en compte. Premièrement, la reconstruction de Gaza - une tâche de plusieurs milliards de dollars qui prendra des décennies - a peu de chances de se produire. Si et quand la guerre s'arrêtera, Gaza connaîtra une crise humanitaire endémique qui occupera le monde pendant des années. De nombreux enfants mourront de maladie et de malnutrition. Des dizaines de milliers d'enfants survivants auront besoin d'un traitement physique et psychologique pendant des années. Il y a des milliers d'amputés et d'orphelins qui n'ont pas de parents survivants.

Les installations de stockage de l'aide étant désormais vides, le nombre d'enfants mourant de faim ne fera qu'augmenter chaque jour.

Osama Al-Sharif

Plus d'un demi-million d'enfants de Gaza sont privés d'éducation depuis près de deux ans. Qu'adviendra-t-il d'eux, puisque plus de 90 % des écoles de Gaza ont été détruites par Israël ?

Le deuxième point concerne la responsabilité. Les crimes israéliens à Gaza sont imprescriptibles. Tout accord conclu à Gaza ne devrait pas affecter le droit de chaque victime palestinienne, morte ou vivante, de demander justice au plus haut niveau international. L'impunité d'Israël a déjà rompu l'ordre mondial et sapé le droit humanitaire international. Toute tentative de fournir à Israël un filet de sécurité ou un renflouement doit être empêchée à tout prix.

Cette responsabilité doit être étendue à tous les gouvernements qui ont permis le génocide et l'infanticide d'Israël à Gaza. Une telle responsabilisation a eu lieu à la fin de la Seconde Guerre mondiale, lorsque les crimes de guerre de l'Allemagne ont été traités. Il n'y a aucune raison pour que cela ne se reproduise pas, cette fois-ci avec Israël face à ses victimes et à ses accusateurs.

Osama Al-Sharif est un journaliste et commentateur politique basé à Amman.

X : @plato010

NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs dans cette section leur sont propres et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.