La stratégie de charme d’Ankara aura-elle du succès ?

Le président Recep Tayyip Erdogan prononçant un discours lors de la réunion des ambassadeurs de l'Union européenne le 12 janvier 2021 (Photo, AFP).
Le président Recep Tayyip Erdogan prononçant un discours lors de la réunion des ambassadeurs de l'Union européenne le 12 janvier 2021 (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 17 janvier 2021

La stratégie de charme d’Ankara aura-elle du succès ?

  • Erdogan a affirmé qu'il comptait «tourner une nouvelle page» dans les relations avec l'Europe et «établir un programme positif» en 2021
  • Ankara a également lancé la 61e série de pourparlers avec la Grèce le 25 janvier afin de résoudre les conflits de longue date

ANKARA: Le président turc Recep Tayyip Erdogan minimise les tensions entre Ankara et plusieurs autres pays tout en adoptant une stratégie de charme sur divers fronts.

En rencontrant les ambassadeurs des États membres de l'UE à Ankara le 12 janvier, Erdogan a affirmé qu'il comptait « tourner une nouvelle page » dans les relations avec l'Europe et « établir un programme positif » en 2021.

Toutefois, ses commentaires sont intervenus au moment où Bruxelles élabore une liste de sanctions visant des citoyens turcs au sujet de la décision d’Ankara de forer du gaz naturel offshore près de Chypre, en Méditerranée orientale. Ces mesures punitives devraient être annoncées en mars.

Ankara a également lancé le 61e série de pourparlers avec la Grèce le 25 janvier afin de résoudre les conflits de longue date sur les droits énergétiques et les frontières maritimes qui ont presque déclenché une guerre entre les deux pays l'année dernière.

De même, les présidents turc et français, après avoir échangé des propos piquants l'an dernier, en particulier sur leurs politiques régionales divergentes, ont récemment échangé des lettres dans lesquelles ils ont accepté de reprendre les négociations en vue d’améliorer leurs relations bilatérales. Les deux pays travaillent sur une feuille de route afin d’harmoniser leurs liens dans plusieurs domaines.

Malgré les tensions croissantes l'année dernière sur les activités de forage du navire sismique Oruç Reis dans les eaux contestées au large de la Grèce, Erdogan a également appelé à une coopération en Méditerranée orientale plutôt qu'à la rivalité.

Les experts restent sceptiques quant au succès de ce changement diplomatique et aux motivations cachées derrière celui-ci. La question est de savoir si ces démarches mèneront à des gestes concrets dans la région et dans le monde demeure encore un sujet d’inquiétude.

Ian Lesser, vice-président du Fond Marshall Américain en Allemagne, estime qu'Ankara tente d’ajuster son message de politique étrangère, surtout avec les États-Unis et l'UE.

« Une partie de cela est d'ordre tactique, y compris le désir de prévenir ou de limiter les sanctions futures, et de compenser l'influence de voix plus bellicistes au sein de l'UE », a-t-il déclaré à Arab News.

Selon Lesser, Ankara préférerait une initiative plus allemande et moins française dans les mois à venir, et cela sera également déchiffré de près par la nouvelle administration à Washington.

« À l'exception importante de la Méditerranée orientale, l'administration Trump n'était pas trop préoccupée par les relations turco-européennes ou même par l'ensemble des questions affectant ces relations. La nouvelle administration de Biden accordera probablement plus d'attention à la migration, aux droits de l'homme et à la liberté des médias, qui sont toutes les questions à l'ordre du jour de l'UE avec Ankara », a-t-il soutenu.

Mais selon Marc Pierini, chercheur invité à Carnegie Europe à Bruxelles et ancien envoyé de l'UE en Turquie, « nous avons déjà vu ce scenario ».

« Lorsque Ankara se retrouve coincée avec des choix politiques ratés, elle effectue des virages brusques, cette fois sur la politique monétaire et les relations avec les États-Unis ainsi que l'UE », a-t-il déclaré à Arab News.

En attendant, la Turquie espère instaurer ses relations avec Washington sous la direction de Joe Biden, qui n’a pas réagi de façon négative à la nomination de Brett McGurk, fervent critique de la Turquie, comme coordinateur du Conseil de sécurité nationale pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.

Pierini croit fortement que ces volte-face turcs n'ont aucune crédibilité.

« Vous ne pouvez pas dire que l'avenir de la Turquie est en Europe - quelques semaines seulement après qu’Erdogan a déclaré que l'Allemagne était « nazie » et que la France devait se débarrasser de son président souffrant de troubles mentaux », a-t-il signalé, faisant référence à la querelle entre Erdogan et son homologue français Emmanuel Macron l'année dernière, lorsque le leader turc a conseillé Macron de faire un bilan de santé mentale suite à ses commentaires sur l'islam.

« Tout en démolissant l’État de droit, semaine après semaine, les leaders turcs veulent que leurs homologues européens croient que d’importantes réformes de la gouvernance sont imminentes et que leurs ambitions d’adhésion sont vives », a avoué Pierini.

« Il en va de même avec l’OTAN, à un moment surtout lorsque Ankara a délibérément facilité les objectifs stratégiques de la Russie contre l’Alliance atlantique », a-t-il ajouté.

La position obstinée de la Turquie sur le système de défense aérien russe, le S-400 reste un élément assez dissuasif pour toute normalisation avec l'administration américaine, car le système est considéré comme incompatible avec la version de l'OTAN et pourrait être utilisé par Moscou de manière à obtenir des informations secrètes sur les avions F-35 américains.

Néanmoins, les experts sont divisés quant à savoir si ces efforts seront couronnés de succès.

Selon Lesser, la rhétorique fait une différence et la question turque est devenue si importante des deux côtés de l'Atlantique que les dirigeants et les observateurs cherchent un changement concret sur la question du S-400 et sur d'autres points de désaccord.

« Ceci ne sera aucunement facile. Il y a probablement une issue limitée dans le temps pour qu'Ankara démontre qu'il y a de la substance derrière ces multiples signaux d’apaisement », a-t-il signalé.

D’après Pierini, afin de trouver un moyen de sortir de ces multiples contradictions, les leaders européens devront trouver un équilibre entre leur propre crédulité et les récits artificiels émanant d'Ankara.

« Avant de le faire, ils devront discuter de toutes ces questions avec l'administration Biden », a-t-il déclaré.

À la fin de 2020, Erdogan a également exprimé son désir de rétablir les relations avec Israël à la suite des spéculations qui évoquaient que les deux pays veulent désigner des ambassadeurs.

Gallia Lindenstrauss, chercheuse principale à l’Institut d’études sur la sécurité nationale en Israël, a révélé plusieurs raisons au rapprochement des deux pays. Les préparatifs avant la nomination officielle de la nouvelle administration américaine ; les tensions en Méditerranée orientale et la volonté de creuser un fossé entre Israël, Chypre et la Grèce ; les accords d'Abraham ; la fin du blocus sur le Qatar qui oblige la Turquie à revoir sa politique à l'égard du Moyen-Orient, et enfin la récente guerre entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan qui a rappelé à Ankara les avantages considérables de sa coopération avec Israël.

Bien que le retour des relations diplomatiques soit un objectif réalisable, Lindenstrauss, ne s’attend à aucun changement avant les élections israéliennes de mars et la formation d’un nouveau gouvernement.

« Cependant, cela n'améliorera pas essentiellement les relations car il y a encore un sentiment de méfiance entre les deux pays », a déclaré Lindenstrauss à Arab News.

« Tel Aviv fera peut-être des demandes supplémentaires à Ankara afin de prouver que ses ouvertures sont sincères, comme l’arrêt des activités militaires du Hamas organisée sur le sol turc qui visent Israël et la Cisjordanie, ainsi qu'une plus grande transparence sur les projets de la Turquie à Jérusalem-Est », a ajouté Lindenstrauss.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Il faut «vaincre totalement» le Hamas à Gaza pour «libérer tous les otages israéliens», dit Netanyahu

Une vue de la bande de Gaza bombardée par Israël. (AFP)
Une vue de la bande de Gaza bombardée par Israël. (AFP)
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  • Israël doit "vaincre totalement" le Hamas à Gaza pour obtenir la libération "de tous les otages" israéliens encore captifs dans ce territoire palestinien, a déclaré mardi le Premier ministre, Benjamin Netanyahu
  • "Il est nécessaire de vaincre totalement l'ennemi à Gaza, de libérer tous nos otages et de s'assurer que Gaza ne constituera plus une menace pour Israël. Nous n'abandonnons aucune de ces missions'"

JERUSALEM: Israël doit "vaincre totalement" le Hamas à Gaza pour obtenir la libération "de tous les otages" israéliens encore captifs dans ce territoire palestinien, a déclaré mardi le Premier ministre, Benjamin Netanyahu.

"Il est nécessaire de vaincre totalement l'ennemi à Gaza, de libérer tous nos otages et de s'assurer que Gaza ne constituera plus une menace pour Israël. Nous n'abandonnons aucune de ces missions'", a affirmé M. Netanyahu, selon un communiqué de ses services.

 

 


Israël se prépare à une nouvelle étape de la guerre à Gaza

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  • Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, doit réunir mardi son cabinet de sécurité en vue d'enclencher une nouvelle étape de la guerre dans la bande de Gaza
  • Cette réunion, annoncée par les médias mais dont la tenue n'a pas été confirmée officiellement dans l'immédiat, doit intervenir alors que le Conseil de sécurité de l'ONU tient mardi une session consacrée à la question des otages israéliens à Gaza

JERUSALEM: Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, doit réunir mardi son cabinet de sécurité en vue d'enclencher une nouvelle étape de la guerre dans la bande de Gaza, où il a réautorisé mardi l'entrée partielle des marchandises privées.

Cette réunion, annoncée par les médias mais dont la tenue n'a pas été confirmée officiellement dans l'immédiat, doit intervenir alors que le Conseil de sécurité de l'ONU tient mardi une session consacrée à la question des otages israéliens à Gaza, initiée par Israël, qui veut porter le dossier "au centre de l'agenda mondial".

"Aujourd'hui (mardi), une réunion de sécurité restreinte se tiendra au cabinet du Premier ministre", réunissant notamment les ministres de la Défense et des Affaires stratégiques, et le chef d'état-major de l'armée,  a annoncé dans la matinée la chaîne de télévision N12.

La presse israélienne, citant des officiels s'exprimant sous couvert d'anonymat, est unanime à prédire la décision à venir:  "Netanyahu veut que l'armée israélienne conquière toute la bande de Gaza", résume la radio publique Kan.

"Le sort est jeté"

Plusieurs membres du cabinet ayant parlé avec le Premier ministre "ont confirmé qu'il a décidé d'étendre le combat aux zones où des otages pourraient être détenus", toujours selon Kan.

"Le sort en est jeté. Nous allons pour la conquête totale de la bande de Gaza", assure également le quotidien Ma'ariv.

En guerre contre le Hamas depuis l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien sur son sol le 7 octobre 2023, le gouvernement israélien fait face à une pression croissante pour trouver une issue au conflit.

En Israël sur le sort des 49 otages du 7-Octobre - dont 27 déclarés morts par l'armée - , et dans le monde pour alléger les souffrances de plus de deux millions de Palestiniens entassés sur un territoire dévasté et menacé de "famine généralisé" selon l'ONU.

Mardi matin, le Cogat, un organisme du ministère de la Défense en charge de l'administration civile à Gaza, a réautorisé l'entrée partielle des marchandises privées dans l'enclave, de manière "contrôlée et progressive".

"L'objectif est d'augmenter le volume de l'aide entrant dans la bande de Gaza, tout en réduisant la dépendance à l'égard de la collecte de l'aide par l'ONU et les organisations internationales", selon le Cogat.

Un nombre limité de commerçants locaux seront autorisés à envoyer dans Gaza "des produits alimentaires de base, aliments pour bébés, fruits et légumes et articles d'hygiène (...), sous réserve de plusieurs critères et d'un contrôle de sécurité rigoureux", a détaillé le Cogat.

L'objectif reste de "prendre toutes les mesures possibles pour empêcher l'implication" du Hamas dans "l'acheminement et la distribution de l'aide", selon le Cogat.

"Ramener les otages" 

Israël a levé fin mai le blocus humanitaire total qu'il avait imposé début mars au territoire palestinien, totalement dépendant de l'aide internationale, mais n'autorise l'entrée que de quantités très limitées, jugées insuffisantes par l'ONU.

La communauté internationale presse Israël d'y ouvrir en grand les vannes humanitaires. "Refuser l'accès à la nourriture aux civils peut constituer un crime de guerre, voire un crime contre l'humanité", a ainsi répété lundi le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'Homme, Volker Türk.

Au moins 1.373 Palestiniens ont été tués depuis la mise en place le 27 mai d'un nouveau système de distribution d'aide via la Fondation humanitaire à Gaza (GHF) soutenue par Israël et les Etats-Unis, la plupart par des tirs israéliens, "alors qu'ils cherchaient de la nourriture", a accusé l'ONU la semaine dernière.

Le Hamas accuse lui Israël d'entretenir volontairement le "chaos" et "d'organiser la famine".

L'attaque du 7 octobre 2023 a entraîné du côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 60.933 morts à Gaza, en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du Hamas, jugées fiables par l'ONU.

Des vidéos, publiées en fin de semaine dernière par le Hamas et le Jihad islamique, exhibant deux otages israéliens affaiblis et décharnés ont ravivé dans l'opinion publique le débat sur l'urgence d'un accord permettant le retour des captifs.

Familles d'otages en tête, de nombreux Israéliens exigent la fin des hostilités pour ramener "les otages chez eux". M. Netanyahu "mène Israël à sa ruine et les otages à leur mort", a accusé le Forum des familles, la principale organisation de familles des captifs à Gaza.


Israël réautorise l'entrée partielle des marchandises privées dans Gaza

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  • "L'objectif est d'augmenter le volume de l'aide entrant dans la bande de Gaza, tout en réduisant la dépendance à l'égard de la collecte de l'aide par l'ONU et les organisations internationales", selon la même source
  • Cette mesure est prise "suite à la décision du cabinet (du Premier ministre) d'élargir l'aide humanitaire et après un travail préparatoire mené par les services de sécurité"

JERUSALEM: Israël a réautorisé l'entrée partielle des marchandises privées dans la bande de Gaza assiégée et menacée de famine, a annoncé mardi le Cogat, un organisme du ministère de la Défense en charge de l'administration civile de ce territoire palestinien.

"Un mécanisme a été approuvé pour reprendre progressivement et de manière contrôlée l'entrée de marchandises via le secteur privé à Gaza", indique un communiqué du Cogat.

"L'objectif est d'augmenter le volume de l'aide entrant dans la bande de Gaza, tout en réduisant la dépendance à l'égard de la collecte de l'aide par l'ONU et les organisations internationales", selon la même source.

Cette mesure est prise "suite à la décision du cabinet (du Premier ministre) d'élargir l'aide humanitaire et après un travail préparatoire mené par les services de sécurité".

Pour "mettre en place ce mécanisme, le système de sécurité a approuvé un nombre limité de commerçants locaux, sous réserve de plusieurs critères et d'un contrôle de sécurité rigoureux", détaille le Cogat.

Le paiement des marchandises "s'effectuera uniquement par virement bancaire, sous contrôle et supervision".

"Les marchandises approuvées comprennent des produits alimentaires de base, des aliments pour bébés, des fruits et légumes et des articles d'hygiène", affirme le Cogat.

Toutes les marchandises seront soumises à un contrôle rigoureux par l'Autorité des passages terrestres du ministère de la Défense avant leur entrée dans la bande de Gaza, souligne cet organisme.

L'armée israélienne, "par l'intermédiaire du Cogat et en collaboration avec les services de sécurité, continuera à mettre en œuvre des mécanismes de contrôle et de surveillance de l'entrée de l'aide dans la bande de Gaza, tout en prenant toutes les mesures possibles pour empêcher l'implication de l'organisation terroriste Hamas dans les processus d'acheminement et de distribution de l'aide", conclut le communiqué.

Depuis le début de la guerre, Israël assiège plus de deux millions de Palestiniens entassés dans un territoire de 365 km2, déjà soumis à un blocus israélien depuis plus de 15 ans.

Il a levé fin mai le blocus humanitaire total qu'il avait imposé début mars, mais n'autorise l'entrée que de quantités très limitées, jugées insuffisantes par l'ONU.

Le territoire palestinien, totalement dépendant de l'aide humanitaire, est désormais menacé d'une "famine généralisée", selon l'ONU.