Jordanie: Abdallah II ou l'obsession de la stabilité

Fils aîné du roi Hussein et d'une ressortissante britannique, Antoinette Gardiner, il accède au trône à la mort de son père en juin 1999, quelques semaines seulement après avoir été désigné prince héritier. (Photo, AFP)
Fils aîné du roi Hussein et d'une ressortissante britannique, Antoinette Gardiner, il accède au trône à la mort de son père en juin 1999, quelques semaines seulement après avoir été désigné prince héritier. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 06 avril 2021

Jordanie: Abdallah II ou l'obsession de la stabilité

  • En 2011, le souverain hachémite parvient à éviter que le Printemps arabe ne l'emporte; il qualifiera ce qui s'est passé dans son pays «de printemps civilisé»
  • Confronté à des mouvements de protestation, Abdallah II est à chaque fois parvenu ces dernières années à les contenir par des réformes politiques

AMMAN: Abdallah II de Jordanie, confronté à une fracture inédite au sein de la famille royale, est un ancien militaire de carrière, allié de l'Occident, qui a fait de la stabilité du pays sa grande priorité depuis deux décennies.

Fils aîné du roi Hussein et d'une ressortissante britannique, Antoinette Gardiner, devenue la princesse Muna, il accède au trône à la mort de son père en juin 1999, quelques semaines seulement après avoir été désigné prince héritier.

A l'époque, âgé de 37 ans, cet ancien pensionnaire de l'académie britannique de Sandhurst mène une carrière militaire remarquée. «Il adorait cette vie et c'est presque à regret qu'il l'a abandonnée pour devenir roi», affirme une personne qui l'a bien connu.

Des années plus tard, le roi Abdallah II avouera que rien ne l'avait préparé à diriger un Etat dans un environnement si troublé, avec à ses portes l'Irak, la Syrie et le conflit israélo-palestinien.

«Cela n'a ressemblé en rien à ce que je pensais trouver», a-t-il confié à un journaliste britannique, évoquant un plongeon soudain «dans le grand bain».

Mais si, depuis 1999, se sont multipliées les menaces extérieures comme l'invasion américaine de l'Irak ou la guerre en Syrie, c'est à une crise au sein même du système monarchique que le souverain hachémite est aujourd'hui confronté avec l'assignation à résidence de son demi-frère Hamza, sur fond de rumeurs de tentative de déstabilisation du trône.

Parachutiste et pilote

Agé de 59 ans, Abdallah II, 41e descendant direct du prophète Mahomet selon la généalogie officielle, est né le 30 janvier 1962 à Amman.

Enfant, il fait sa scolarité à Amman, puis au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Mais c'est l'uniforme militaire qui l'attire.

Après sa sortie de l'académie de Sandhurst en 1980, il va même servir dans l'armée britannique en Allemagne.

De retour en Jordanie, il occupe différentes positions, passe son brevet de parachutiste, devient commandant de char et apprend à piloter un hélicoptère, avant de diriger les forces spéciales.

En 1993, il épouse Rania al-Yassine, d'origine palestinienne, qui travaille alors au service marketing d'Apple.

Le couple affiche sa modernité. En 1995, le prince fait même une apparition dans la série américaine Star Trek, dont il est fan.

Quatre enfants naissent de leur union, dont l'ainé Hussein qui hérite du titre de prince héritier en 2004 aux dépens du prince Hamza, fils de la reine Noor, quatrième et dernière épouse du roi Hussein.

Au moment où Abdallah II prête serment le 9 juin 1999, après plus de quatre décennies de règne de son père, beaucoup doutent de sa capacité à mener à bien la fragile embarcation monarchique.

Dos rond

En 2003, le roi s'oppose à l'intervention américaine en Irak, qui bouleverse la région et donnera ensuite naissance à l'une des plus redoutables organisations jihadistes, le groupe Etat islamique, qui sévira aussi en Jordanie au milieu des années 2010.

En 2011, Abdallah II parvient à éviter que le Printemps arabe ne l'emporte --il qualifiera ce qu'il s'est passé dans son pays «de printemps civilisé».

Autre axiome du roi: empêcher à tout prix que son pays ne devienne une patrie de substitution pour les Palestiniens, comme le souhaite notamment l'ultra-droite israélienne.

Allié de l'Occident, Abdallah II a entretenu d'excellentes relations avec le président américain Barack Obama. Mais il doit faire le dos rond sous Donald Trump, en s'arc-boutant sur le principe du droit des Palestiniens à se doter d'un Etat avec Jérusalem comme capitale et sur la défense de ses prérogatives sur les lieux saints.

Abdallah II a aussi dû faire face à l'arrivée massive de réfugiés syriens (quelque 700 000 inscrits auprès de l'ONU mais les autorités parlent de 1,3 million), après avoir accueilli des dizaines de milliers d'Irakiens ayant fui la guerre civile et la terreur de l'EI dans leur pays.

Sur le plan économique, dès son accession au trône, il lance un large programme de libéralisation pour attirer les investissements, dans un pays dépourvu d'hydrocarbures.

En 2012, il supprime notamment les subventions sur les produits pétroliers.

Confronté à des mouvements de protestation, Abdallah II est à chaque fois parvenu ces dernières années à les contenir par des reformes politiques, tout en s'attirant les critiques d'ONG sur des atteintes aux droits humains.


Explosion du port de Beyrouth: un juge libanais en Bulgarie pour l'enquête

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  • Un tribunal bulgare avait refusé le 10 décembre d'extrader Igor Grechushkin, un citoyen russo-chypriote de 48 ans, faute d'assurances suffisantes du Liban qu'il n'appliquerait pas la peine de mort
  • Arrêté à l'aéroport de Sofia en septembre sur la base d'une notice rouge d'Interpol, il est accusé par les autorités judiciaires libanaises d'"introduction d'explosifs au Liban"

BEYROUTH: Le juge libanais Tarek Bitar s'est déplacé mercredi en Bulgarie pour interroger le propriétaire du navire lié à l'explosion meurtrière dans le port de Beyrouth en 2020, a indiqué un responsable judiciaire à l'AFP.

Un tribunal bulgare avait refusé le 10 décembre d'extrader Igor Grechushkin, un citoyen russo-chypriote de 48 ans, faute d'assurances suffisantes du Liban qu'il n'appliquerait pas la peine de mort.

M. Grechushkin est désigné par les autorités libanaises comme le propriétaire du Rhosus, le navire qui transportait le nitrate d'ammonium débarqué dans le port de Beyrouth dans un entrepôt, où il avait explosé suite à un incendie, faisant plus de 200 morts, des milliers de blessés et d'importants dégâts.

Arrêté à l'aéroport de Sofia en septembre sur la base d'une notice rouge d'Interpol, il est accusé par les autorités judiciaires libanaises d'"introduction d'explosifs au Liban, acte terroriste ayant entraîné la mort d'un grand nombre de personnes et désactivation de machines dans le but de faire couler un navire", selon le parquet bulgare.

"M. Bitar est parti pour Sofia mercredi" et doit interroger M. Grechushkin jeudi, a précisé sous couvert d'anonymat un responsable de la justice libanaise à l'AFP.

L'ambassade libanaise à Sofia s'est occupée de trouver un traducteur et un huissier chargé de prendre en note l'interrogatoire, qui se fera en présence d'autorités judiciaires bulgares, a précisé la même source.

La justice libanaise espère obtenir des informations sur la cargaison de nitrate d'ammonium et en particulier son commanditaire. Elle veut aussi savoir si Beyrouth était la destination finale du navire.

Le juge indépendant Tarek Bitar avait repris en début d'année l'enquête qu'il avait dû interrompre en janvier 2023, se heurtant à l'hostilité d'une grande partie de la classe politique, notamment du Hezbollah qui l'accusait d'impartialité, avant d'être poursuivi pour insubordination.

Son enquête a pu reprendre après l'entrée en fonction du président Joseph Aoun et de son Premier ministre, qui ont promis de préserver l'indépendance de la justice, à la suite de la guerre entre Israël et le Hezbollah dont le mouvement chiite soutenu par l'Iran est sorti très affaibli à l'automne 2024.


«Des habitants meurent de froid»: Gaza frappé par de nouvelles intempéries

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
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  • "Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa)
  • "Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré

GAZA: De nouvelles pluies hivernales se sont abattues cette semaine sur la bande de Gaza, déjà ravagée par la guerre, faisant au moins 18 morts depuis le début des intempéries.

Des Palestiniens poussant une voiture dans une rue inondée, une charrette tirée par un âne progressant difficilement à travers les eaux, des tentes et des abris de fortune de déplacés inondés: la situation s'aggrave dans un territoire palestinien en ruines.

"Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa).

"Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre après deux années de guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Nourrissons «en danger»

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs.

Trois enfants étaient décédés dans des conditions similaires la semaine dernière, d'après la Défense civile, organisation de premiers secours opérant sous l'autorité du mouvement islamiste.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Environ 1,3 million de personnes, sur une population de plus de deux millions d'habitants dans le territoire, ont actuellement besoin d'un hébergement d'urgence, selon les Nations unies, qui mettent en garde contre un risque croissant d'hypothermie.

Les nourrissons encourent particulièrement un "grand danger" avec les conditions hivernales, avertit l'organisation.

«Reconstruire le territoire»

La Défense civile de Gaza avait indiqué vendredi qu'au moins 16 personnes étaient mortes en 24 heures des suites de l'effondrement de bâtiments ou des effets du froid.

Outre le nourrisson, le porte-parole de l'organisation, Mahmoud Bassal, a fait état mardi d'un autre décès après l'effondrement du toit d'un bâtiment à la suite de fortes pluies dans le nord-ouest de la ville de Gaza.

Il a précisé que la maison avait déjà été endommagée par des frappes aériennes pendant la guerre.

Des images de l'AFP montrent des secouristes extraire le corps d'un Palestinien des décombres d'un bâtiment. Non loin, des proches en deuil pleurent.

"Nous appelons le monde à résoudre nos problèmes et à reconstruire le territoire afin que nous puissions avoir des maisons au lieu (...) de vivre dans la rue", a déclaré Ahmed al-Hossari, qui a perdu un membre de sa famille.

La bande de Gaza connaît généralement un épisode de fortes pluies à la fin de l'automne et en hiver, mais l'état de dévastation du territoire, des conséquences de la guerre, a rendu ses habitants plus vulnérables.

 


Négociations de paix au Soudan: le chef de l'armée prêt à «collaborer» avec Trump

Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
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  • Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)"
  • Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise

PORT-SOUDAN: Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt.

Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)", a déclaré le ministère des Affaires étrangères pro-armée dans un communiqué publié à l'issue d'un déplacement officiel à Ryad, à l'invitation du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane.

Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise.

Les négociations de paix menées par les Etats-Unis avec le groupe de médiateurs du Quad (réunissant Egypte, Arabe Saoudite et Emirats) sont à l'arrêt depuis que le général al-Burhane a affirmé que la dernière proposition de trêve transmise par M. Boulos était "inacceptable", sans préciser pourquoi.

Le militaire avait alors fustigé une médiation "partiale" et reproché à l'émissaire américain de reprendre les éléments de langage des Emirats, accusés d'armer les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Abou Dhabi nie régulièrement fournir des armes, des hommes et du carburant aux FSR, malgré des preuves fournies par des rapports internationaux et enquêtes indépendantes.

De leur côté, les FSR ont annoncé qu'ils acceptaient la proposition de trêve mais les attaques sur le terrain n'ont pas pour autant cessé au Kordofan, région au coeur de combats intenses.

Pour l'instant, aucune nouvelle date de négociations n'a été fixée, que ce soit au niveau des médiateurs du Quad ou de l'ONU qui essaie parallèlement d'organiser des discussions entre les deux camps.

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée, qui contrôle le nord et l'est du pays - aux FSR, dominantes dans l'ouest et certaines zones du sud.

Depuis la prise du dernier bastion de l'armée dans la vaste région voisine du Darfour, les combats se sont intensifiés dans le sud du pays, au Kordofan, région fertile, riche en pétrole et en or, charnière pour le ravitaillement et les mouvements de troupes.

Le conflit, entré dans sa troisième année, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, déraciné des millions de personnes et provoqué ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire au monde".