Comment Charles III peut redonner sa grandeur à la Grande-Bretagne!

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Publié le Vendredi 05 mai 2023

Comment Charles III peut redonner sa grandeur à la Grande-Bretagne!

Comment Charles III peut redonner sa grandeur à la Grande-Bretagne!
  • Nous savons maintenant qu'une grande partie de la campagne du Brexit était basée sur des mensonges, et nombre de ceux qui ont voté pour, le regrettent
  • Alors que la cote de popularité de la plupart des dirigeants politiques a tendance à baisser au fur et à mesure que leur mandat se prolonge, celle du roi Charles évolue dans la direction opposée

En 2016, je venais d'achever la rédaction de mon livre sur Londres, une réflexion sur près d'une décennie passée dans la capitale britannique, dans lequel je concluais que l'homme de lettres anglais du XVIIIe siècle Samuel Johnson avait raison: «Lorsqu'un homme est fatigué de Londres, il est fatigué de la vie; car il y a à Londres tout ce que la vie peut offrir.»

Mais c'était à l'époque, et aujourd'hui, c’est une autre histoire. Sept ans après que la Grande-Bretagne a voté pour quitter l'Union européenne (UE), c'est Londres et le Royaume-Uni qui sont fatigués.

Nous savons maintenant qu'une grande partie de la campagne du Brexit était basée sur des mensonges, et nombre de ceux qui ont voté pour, le regrettent. Les derniers sondages d'opinion suggèrent que seulement 33% des Britanniques pensent que le pays a eu raison de quitter l'UE, tandis que 55 % estiment désormais qu'il s'agissait d'une erreur catastrophique.

Et au vu de ce qui s'est passé depuis le référendum de 2016, qui peut les blâmer? Il est vrai que la pandémie de coronavirus et la guerre en Ukraine ont inévitablement nui à l'économie britannique, mais tous les autres pays ont également souffert de ces effets. Bien qu'elle se soit largement rétablie, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) prévoit que l'économie britannique sera la moins performante du Groupe des sept (G7) au cours des deux prochaines années et, le mois dernier, l'économiste en chef de la Banque d'Angleterre a déclaré aux Britanniques qu'ils devraient simplement accepter d'être plus pauvres qu'avant.

Entre-temps, la porte tournante du 10 Downing Street n'a pas vraiment été propice à la stabilité politique intérieure. Theresa May a été remerciée en 2019 pour avoir échoué à mener à bien le Brexit, et elle a été remplacée par Boris Johnson. Après trois années controversées et le «partygate», Boris Johnson a cédé sa place à Liz Truss, dont la période de quarante-cinq jours a été la plus courte de l'Histoire politique britannique et a été comparée à la durée de conservation d'une laitue de supermarché. L'actuel titulaire du poste, Rishi Sunak, a au moins rétabli le calme, mais les résultats des élections locales de jeudi soir suggèrent qu'il est lui aussi susceptible de perdre sa place lors des prochaines élections générales, probablement en octobre 2024.

La politique intérieure britannique étant en pleine tourmente, il n'y a pas de meilleur moment pour que le pays joue sa carte maîtresse: la puissance douce, l'Histoire et la tradition, représentées par un monarque populaire et efficace - Faisal J. Abbas

Sur le plan international, l'Empire britannique a bien sûr disparu depuis longtemps. Les membres de son remplaçant, le Commonwealth, en particulier l'Australie et les îles des Caraïbes, sont de plus en plus réticents à l'idée d'avoir un chef d'État étranger. La «relation spéciale» tant louée avec les États-Unis semble dépendre de l'humeur du président en exercice. Et depuis que la Grande-Bretagne a quitté l'UE, de nombreux pays en viennent à la considérer comme une île isolée au large de l'Europe.

Si tout cela ressemble à de la sinistrose... Eh bien, c'est le cas. Mais ce n'est pas nécessaire. Alors que les dirigeants du monde entier se réunissent à Londres pour le couronnement, samedi, du roi Charles III, se pourrait-il que le nouveau monarque ait ce qu'il faut pour (pour reprendre une expression) redonner à la Grande-Bretagne sa grandeur d'antan?

Le peuple britannique semble en tout cas le penser. Alors que la cote de popularité de la plupart des dirigeants politiques a tendance à baisser au fur et à mesure que leur mandat se prolonge, celle du roi Charles évolue dans la direction opposée. Selon un sondage réalisé en mars, 39% des Britanniques pensaient qu'il serait un bon roi, mais le sondage réalisé cette semaine indiquait que ce chiffre atteignait même 62%.

La politique intérieure britannique étant en pleine tourmente, il n'y a pas de meilleur moment pour que le pays joue sa carte maîtresse: la puissance douce, l'Histoire et la tradition, représentées par un monarque populaire et efficace.

Peu de gens connaissent mieux les «images» nationales que Simon Anholt, la plus grande autorité internationale en la matière. Et Anholt est sans équivoque. Comme il l'a déclaré à Arab News lors d'une interview en novembre dernier, une monarchie efficace est un bon rapport qualité-prix pour l'argent des contribuables. «Ce qu'elles rapportent réellement à l'image du pays en termes de valeur est de l'ordre de plusieurs milliards. Les gens aiment les monarchies, surtout ceux qui n'y vivent pas eux-mêmes. Sans la monarchie, le Royaume-Uni serait beaucoup moins intéressant pour les gens qu'il ne l'est.»

Sans la monarchie, le Royaume-Uni serait beaucoup moins intéressant pour les gens qu'il ne l'est.» - Simon Anholt

Alors, comment le roi Charles peut-il faire la différence? Tout d'abord, il y a sa passion de toujours pour la protection de l'environnement. Liz Truss n'a peut-être pas fait long feu en tant que Première ministre, mais elle est restée suffisamment longtemps en fonction pour empêcher le nouveau roi d'assister à la Conférence sur le changement climatique (COP27), qui s'est tenue en Égypte en novembre. Comme je l'avais écrit à l'époque, ce n'était pas judicieux. La COP28 qui se tiendra à Dubaï à la fin de l'année sera l'occasion d'y remédier avec la participation du nouveau roi, et cela ne doit pas s'arrêter là. Les initiatives vertes de l'Arabie saoudite et du Moyen-Orient sont une autre occasion pour le roi de tirer parti à la fois de ses convictions environnementales et des relations durables avec le Moyen-Orient nouées lorsqu'il était l'héritier du trône, le tout au bénéfice de la Grande-Bretagne.

Les relations plus larges avec le Golfe sont un autre domaine riche de promesses. Comme l'expert en politique commerciale britannique et européenne Paul McGrade l'a précisé à Arab News en janvier, alors que la Grande-Bretagne s’efforçait depuis le Brexit de conclure des accords de libre-échange avec des pays du monde entier, les portes du Conseil de coopération du Golfe (CCG) sont ouvertes. «Les États du Golfe sont plus importants que jamais, non seulement pour l'énergie, mais aussi pour les marchés qu'ils représentent, les investissements et les partenariats qu'ils cherchent à établir», a-t-il souligné.

Après avoir enfin compris l'importance croissante du CCG, l'UE vient de nommer Luigi Di Maio comme son premier envoyé spécial auprès des États du Golfe. Avec tout le respect dû à l'ancien ministre italien des Affaires étrangères, le roi Charles peut faire mieux pour la Grande-Bretagne, même les yeux fermés.

Comme l'a fait remarquer Simon Anholt: «Les données montrent très clairement que la première raison pour laquelle les gens admirent un pays est qu'ils pensent qu'il apporte quelque chose à l'humanité et à la planète.» Qui pourrait mieux incarner ce rôle pour son pays que le roi Charles?

 

Faisal J. Abbas est le rédacteur en chef d'Arab News. Twitter: @FaisalJAbbas

L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com