Au Soudan en guerre, la récolte s'annonce mauvaise et la famine menace

Sur cette photo prise le 28 mars 2023, un homme chevauche sa calèche tirée par un âne dans la ville soudanaise de Karima, à 450 km au nord de Khartoum. (AFP)
Sur cette photo prise le 28 mars 2023, un homme chevauche sa calèche tirée par un âne dans la ville soudanaise de Karima, à 450 km au nord de Khartoum. (AFP)
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Publié le Mardi 06 juin 2023

Au Soudan en guerre, la récolte s'annonce mauvaise et la famine menace

  • La saison agricole estivale, la plus importante au Soudan où avant la guerre déjà un habitant sur trois souffrait de la faim, débute avec les premières pluies fin mai
  • Mais cette année, la guerre est arrivée avant les pluies et ces terres fertiles ont été désertées par leurs exploitants depuis qu'elle a éclaté le 15 avril

GEDAREF: Mohammed Haroun a toujours été embauché dès le premier jour de la saison agricole. Mais cette année, il attend en vain des agriculteurs qui ont abandonné leurs terres et font planer la menace de la famine au Soudan en guerre.

"Je n'ai toujours aucun employeur après cinq jours" à Gedaref, dans le sud frontalier de l'Ethiopie où poussent 40% des céréales du Soudan, raconte-t-il à l'AFP au milieu de centaines de travailleurs journaliers eux aussi désœuvrés.

La saison agricole estivale, la plus importante au Soudan où avant la guerre déjà un habitant sur trois souffrait de la faim, débute avec les premières pluies fin mai.

Mais cette année, la guerre est arrivée avant les pluies et ces terres fertiles ont été désertées par leurs exploitants depuis qu'elle a éclaté le 15 avril.

"Je n'ai plus un centime, je ne sais même plus comment me nourrir", s'inquiète Mohammed Haroun qui vient chaque année du Kordofan, plus au nord, pour travailler jusqu'à la récolte de l'automne.

Banques, dettes et carburant

Mirghani Ali, qui vend semences, engrais et autres pesticides, n'a jamais vu ça, dans un pays où le secteur agricole représente près de 40% du PIB et 80% des emplois.

"Normalement à cette période de l'année, on est surchargés, mais là, on n'a reçu que très peu de clients", se désole-t-il.

La faute aux banques, "dont les sièges à Khartoum ne répondent plus depuis la mi-avril et qui ont tardé à délivrer des fonds", dit Mohammed Abdelkarim, qui cultive 4 200 hectares de maïs, de coton et de tournesol à Gedaref.

"Et même si l'argent finit par arriver, il nous faut encore du temps pour obtenir nos semences et on n'a aucune visibilité sur l'approvisionnement en carburant pour nos machines", dit-il.

Et ce, ajoute-t-il, alors que "des récoltants ne pouvaient déjà pas payer leurs dettes".

Il y a un an, des agriculteurs amers racontaient à l'AFP que le blé et le pain manquaient au Soudan, mais qu'ils étaient forcés de laisser pourrir leur récolte. La raison? Le gouvernement, qui jusqu'ici achetait chaque récolte, n'avait plus d'argent.

Aujourd'hui, la Banque centrale promet d'ouvrir des lignes de crédit aux exploitants affiliés à des coopératives et des ministres assurent que la saison agricole n'est pas en danger.

Mais déjà en 2022, elle était loin de suffire pour nourrir les 45 millions de Soudanais.

Avec 7,4 millions de tonnes de sorgho, de mil et de blé produites, il manquait toujours 3,5 millions de tonnes de blé supplémentaires.

Avec une autre guerre, celle entre la Russie et l'Ukraine, le Soudan a perdu ses deux principaux pourvoyeurs en céréales.

Pas prêts avant les pluies 

Maintenant que la guerre est sur son sol, c'est "toute la sécurité alimentaire du pays et de ses environs" qui est menacée, prévient Ibrahim al-Dakhiri, patron de l'Organisation arabe pour le développement agricole basée à Khartoum.

"La production industrielle de volailles a été totalement détruite car elle se trouve principalement à Khartoum et n'a plus de chaîne d'approvisionnement", rapporte-t-il.

Malgré tout, la culture du maïs, du mil ou des oléagineux a pu commencer "en quelques endroits" mais "avec un manque de préparation jamais vu", poursuit-il.

"Les pluies ont commencé alors que de nombreux exploitants n'avaient ni graines ni carburant. Maintenant, ils ne peuvent plus travailler leurs terres", trop humides pour les travaux agricoles, abonde Hussein Ibrahim, agriculteur à Gedaref.

Préparer la terre avant la pluie est une condition sine qua non au Soudan où, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), 95% des terres cultivées dépendent des eaux venues du ciel.

Aujourd'hui, même si cette manne est encore au rendez-vous, entre routes coupées par les tirs, import-export quasiment à l'arrêt et silos pillés, cette saison pourrait être la pire depuis des années, s'inquiètent les acteurs du secteur.

L'un de leurs poids lourds, le groupe Haggar fondé il y a près de 120 ans au Soudan et qui travaille avec des milliers d'agriculteurs, a déjà jeté l'éponge.

Dans une lettre du 29 mai, il annonce "relever de toutes leurs fonctions l'ensemble de ses employés" dans le pays.


COP28: Une vingtaine de pays appellent à tripler le nucléaire dans le monde d'ici 2050

Le président français Emmanuel Macron (au centre) quitte le lieu des réunions bilatérales en marge du sommet climatique des Nations unies COP28 à Dubaï, le 1er décembre 2023. (Photo Ludovic Marin AFP)
Le président français Emmanuel Macron (au centre) quitte le lieu des réunions bilatérales en marge du sommet climatique des Nations unies COP28 à Dubaï, le 1er décembre 2023. (Photo Ludovic Marin AFP)
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  • Dans une déclaration commune à la COP28, une vingtaine de pays ont appelé à tripler les capacités de l'énergie nucléaire dans le monde d'ici 2050
  • L'annonce a été faite par John Kerry, l'émissaire américain pour le climat

DUBAÏ, Emirats Arabes Unis : Une vingtaine de pays dont les Etats-Unis, la France et les Emirats arabes unis ont appelé samedi, dans une déclaration commune à la COP28, à tripler les capacités de l'énergie nucléaire dans le monde d'ici 2050, par rapport à 2020, pour réduire la dépendance au charbon et au gaz, grand enjeu de cette COP.

L'annonce a été faite par John Kerry, l'émissaire américain pour le climat, à Dubaï, en compagnie de plusieurs dirigeants dont le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre belge Alexander de Croo. Mais la Chine et la Russie, les principaux constructeurs de centrales nucléaires dans le monde aujourd'hui, ne figurent pas parmi les signataires.


La survie de X en question après l'insulte de Musk aux annonceurs

Elon Musk (Photo, AFP).
Elon Musk (Photo, AFP).
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  • L'agression verbale d'Elon Musk à destination des annonceurs qui boudent X (ex-Twitter) menace de fragiliser encore davantage le réseau social
  • Elon Musk lui-même a d'ailleurs évoqué, dès mercredi, une possible faillite de la plateforme

NEW YORK: L'agression verbale d'Elon Musk à destination des annonceurs qui boudent X (ex-Twitter) menace de fragiliser encore davantage le réseau social, l’entrepreneur lui-même évoquant la disparition de la plateforme, un an seulement après sa prise de contrôle.

"Ils veulent me faire du chantage avec la publicité, avec de l'argent? Allez vous faire foutre". La phrase, éructée par le milliardaire, mercredi, lors d'un entretien public à New York, continue à résonner.

Elon Musk faisait référence à la suspension, par nombre de marques de premier plan, de leur présence publicitaire sur X.

Une première vague d'annonceurs avait pris l'initiative en août après que l'observatoire des médias Media Matters avait fait état de publicités de grands noms adossées à un compte néo-nazi.

D'autres les ont rejoints ces dernières semaines, notamment Apple et Disney, en réaction à un tweet d'Elon Musk, qui relayait une théorie complotiste antisémite.

L'actionnaire majoritaire du réseau social s'est excusé pour ce message, mercredi, mais est immédiatement reparti à l'offensive contre les annonceurs réfractaires.

"Pas besoin d'être un expert pour comprendre qu'attaquer les sociétés qui paient les factures de X n'est pas bon pour les affaires", a commenté Jasmine Enberg, du cabinet Insider Intelligence. "La plupart des boycotts d'annonceurs sur les réseaux sociaux ont été de courte durée, mais celui-ci pourrait durer."

Elon Musk lui-même a d'ailleurs évoqué, dès mercredi, une possible faillite de la plateforme.

"Ce qui va se passer, c'est que ce boycott va tuer la société", a prévenu Elon Musk. "Et le monde entier saura que ces annonceurs ont tué l'entreprise."

L'homme d'affaires et son équipe ont lancé plusieurs formules payantes, mais le réseau social demeure gratuit par défaut et dépend toujours en presque totalité de ses recettes publicitaires.

Avant même la dernière polémique en date, Insider Intelligence anticipait une contraction de 54% du chiffre d'affaires tiré de la vente d'espaces promotionnels, le faisant tomber à 1,9 milliard de dollars cette année.

"Le fait que Musk refuse de chercher un compromis pourrait accélérer l'exode des annonceurs", reconnaît Dan Ives, de Wedbush Securities.

Selon des éléments fournis à l'AFP par la société d'analyse de données de marché SensorTower, la moitié des 100 premiers annonceurs américains du réseau social en octobre 2022 ont déjà complètement mis fin à leurs dépenses.

Le spectre de la dette

En se retirant, "vous laissez le champ libre à vos concurrents", prévient néanmoins Kellis Landrum, co-fondateur de l'agence de marketing digital True North Social, une opportunité dont pourraient tirer partie certaines entreprises.

Des annonceurs pourraient aussi choisir de rester faute d'alternative équivalente, le nouveau réseau de Meta, Threads, n'étant, pour l'heure, pas un concurrent légitime, fait valoir le responsable.

Quant à redistribuer son budget publicitaire vers les géants du numérique, "vous pouvez dépenser autant d'argent que vous voulez sur Google Ads (la régie publicitaire de Google), mais à partir d'un certain point, votre retour sur investissement diminue", dit-il.

Jasmine Enberg insiste, elle, sur le fait "que X n'est pas une plateforme essentielle pour beaucoup d'annonceurs, donc s'en retirer temporairement est assez indolore" - pour eux.

Si X ne communique pas de chiffres officiels, toutes les estimations font état d'une baisse sensible du nombre d'utilisateurs. SensorTower l'évalue à 45% pour les usagers mensuels sur le début du quatrième trimestre par rapport à la même période de l'an dernier.

A ce phénomène, s'ajoute le désengagement apparent de dizaines de comptes très suivis, de grandes entreprises notamment comme Coca-Cola, PepsiCo, la banque JPMorgan ou Starbucks. Ces grands noms n'ont plus posté de contenu depuis des semaines alors qu'ils assuraient auparavant une présence régulière.

Aucun, parmi la dizaine contactée, n'a donné suite aux sollicitations de l'AFP.

"L'influence de X a toujours été supérieure à ce qu'il pèse en publicité", explique Jasmine Enberg. "C'était un endroit important pour permettre aux marques d'entrer en contact avec les consommateurs. (...) Mais si le contenu diminue, cela va devenir encore plus difficile de générer des revenus publicitaires."

Même en ayant réduit ses effectifs de plus des deux tiers, X compte encore environ 2.000 employés et reste soumis à des coûts fixes (locaux, serveurs) conséquents.

Autre menace, la charge de la dette colossale contractée, pour son acquisition, par Elon Musk mais désormais supportée par X et qui prévoit le versement de plus d'un milliard de dollars d'intérêts et principal chaque année.

Mercredi, le bouillant patron a laissé entendre qu'il ne renflouerait pas l'ex-Twitter en cas d'impasse financière, même s'il en aurait largement les moyens, adoptant une position jusqu'au-boutiste.

"Si la société défaille à cause d'un boycott d'annonceurs", a-t-il clamé, "elle fera faillite."


Dette: S&P ne dégrade pas la note de la France mais la garde sous perspective négative

S&P Global Ratings "a décidé de maintenir" la note de la dette de la France, s'est réjoui vendredi soir le ministre de l'Economie Bruno Le Maire (Photo d'illustration, AFP).
S&P Global Ratings "a décidé de maintenir" la note de la dette de la France, s'est réjoui vendredi soir le ministre de l'Economie Bruno Le Maire (Photo d'illustration, AFP).
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  • Les experts de l'agence estiment qu'il existe toujours «des risques qui pourraient, s'ils se réalisaient, réduire encore la flexibilité budgétaire de la France»
  • S&P indique vendredi anticiper «une diminution de la dette publique en pourcentage du PIB à partir de 2025»

PARIS: L'influente agence de notation S&P Global Ratings "a décidé de maintenir" la note de la dette de la France, s'est réjoui vendredi soir le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, mais cette note reste sous perspective négative faisant courir le risque d'une dégradation ultérieure.

S&P clôt les revues d'automne des grandes agences de notation pour la France. La note AA qu'elle lui donne actuellement est équivalente au Aa2 de Moody's. Fitch est un cran en dessous avec AA-, après avoir abaissé la note en avril.

Mais là où Moody's attribue une perspective "stable" à sa note, S&P a une perspective négative aux allures d'épée de Damoclès.

Vendredi, cette épée ne s'est pas abattue sur les finances publiques françaises, malgré un contexte de taux d'intérêt élevés.

S&P indique vendredi anticiper "une diminution de la dette publique en pourcentage du PIB à partir de 2025, quoique très progressivement", et estime que "la répercussion de la hausse des coûts d'emprunt due aux taux d'intérêt élevés sera progressive".

Les experts de l'agence estiment toutefois qu'il existe toujours "des risques importants qui pourraient, s'ils se réalisaient, réduire encore davantage la flexibilité budgétaire de la France", citant par exemple des "conditions de financement plus strictes" ou "une fragmentation politique accrue" qui compliquerait la mise en oeuvre des politiques.

"Plus que jamais, nous restons déterminés à réduire les dépenses publiques et à accélérer le désendettement de la France", a réagi Bruno Le Maire sur X (ex Twitter), jugeant qu'il en allait "de notre indépendance et du respect de nos engagements nationaux et européens".

A ses yeux, le maintien de la note de la France est une décision "cohérente avec les choix du gouvernement en matière de finances publiques".

"Je prends le maintien de la note de la France comme un signal positif, qui nous encourage à garder le cap sur notre trajectoire de finances publiques", a de son côté réagi dans un communiqué le député (Renaissance) Jean-René Cazeneuve, rapporteur général du budget.

Malgré une contraction de 0,1% de l'activité économique de la France au troisième trimestre, M. Le Maire continue de tabler sur une croissance de 1% cette année, puis de 1,4% en 2024.

Parole crédible

Dans un contexte d'économie européenne au ralenti, le consensus des économistes pour la croissance de la France n'est qu'à 0,8% pour 2024, et a été rejoint mercredi par l'OCDE, qui prévoyait encore 1,2% en septembre.

En juin, S&P avait prévenu des "risques" sur l'exécution des objectifs budgétaires, et donc sur la capacité de réduire une dette de plus de 3.000 milliards d'euros, dont le remboursement annuel deviendra le premier poste de dépenses de l'Etat en 2027, devant l'Education.

Dans une note diffusée plus tôt vendredi, la banque italienne UniCredit estimait que S&P pouvait laisser son évaluation inchangée pour l'heure "afin d'évaluer le résultat des examens de dépenses publiques récemment lancés par le gouvernement avec l'objectif de réduire pour de bon les dépenses publiques".

"Les réformes des retraites et du travail ont plu à l'agence de notation", relevait également Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management.

Toutefois "même si la France maintenait une note AA cette fois, le risque resterait d'une dégradation ultérieure", observait-il, par exemple si l'endettement n'est pas réduit assez rapidement.

La Commission européenne a prévenu en novembre que la France risquait de ne pas être dans les clous en 2024, et une peu glorieuse procédure de déficit excessif pourrait viser le pays en juin prochain.

M. Le Maire avance actuellement des propositions pour assurer le plein emploi et alléger les dépenses publiques, comme l'abaissement de la durée d'indemnisation des chômeurs de plus de 55 ans. Selon un conseiller gouvernemental, une dégradation équivaudrait à "une remise en cause du bilan sur la politique économique de la France".