L'économie malmenée du Liban stimule la contrebande à travers la frontière syrienne

Des drapeaux du Hezbollah flottent à l'entrée du village de Meiss El Jabal au Liban. Le Hezbollah utilise des routes terrestres pour faire passer des armes et de l'argent au régime syrien. (Reuters)
Des drapeaux du Hezbollah flottent à l'entrée du village de Meiss El Jabal au Liban. Le Hezbollah utilise des routes terrestres pour faire passer des armes et de l'argent au régime syrien. (Reuters)
Short Url
Publié le Lundi 14 décembre 2020

L'économie malmenée du Liban stimule la contrebande à travers la frontière syrienne

  • Baalbek-Hermel, la région frontalière entre le Liban et la Syrie, dans l'est du Liban, connaît souvent des tensions sécuritaires plus ou moins vives, en fonction des opérations de contrebande qui y sont menées
  • Samedi dernier, les gardes-frontières de l'armée syrienne ont tiré sur un certain nombre de jeunes hommes au niveau d’un des points de passage illégaux connu sous le nom de poste-frontière d'Arida

BEYROUTH: Baalbek-Hermel, la région frontalière entre le Liban et la Syrie, dans l'est du Liban, connaît souvent des tensions sécuritaires plus ou moins vives, en fonction des opérations de contrebande qui y sont menées.

Samedi dernier, les gardes-frontières de l'armée syrienne ont tiré sur un certain nombre de jeunes hommes au niveau d’un des points de passage illégaux connu sous le nom de poste-frontière d'Arida, dans le village frontalier d'El Qasr. Un Libanais a été tué et un autre blessé.

La contrebande se produit dans les deux sens, mais celle qui se pratique du Liban vers la Syrie est devenue plus courante avec la détérioration des conditions économiques dans les deux pays et les sanctions imposées à la Syrie. Cette contrebande concerne les produits de base subventionnés par l'État libanais comme la farine, le carburant et les médicaments. Il existe également des itinéraires illégaux pour la contrebande de voitures volées. Parmi les produits de contrebande introduits en Syrie, on trouve également des matières premières et des pièces de voiture.

Plus tôt au cours de ce mois, ces frontières ont été le théâtre d’un affrontement entre des passeurs et une patrouille de l'armée syrienne. Des armes légères et moyennes ont été utilisées pendant la poursuite qui a eu lieu dans une zone syrienne près de la ville frontalière libanaise de Hosh al-Sayyed Ali. Un officier de l'armée syrienne a été tué et deux membres du personnel ont été blessés.

L'armée libanaise, en coopération avec la Direction des renseignements, a alors mené un raid dans la région libanaise pour retrouver les auteurs des coups de feu, qui se sont enfuis vers le territoire libanais. Il y a deux jours, les Forces de sécurité intérieure libanaises (FSI) ont arrêté deux jeunes Syriens âgés de 19 et de 23 ans qui prévoyaient de voler des voitures et de les faire entrer clandestinement en territoire syrien. Auparavant, l'un d'eux avait fait passer des personnes de la Syrie au Liban, selon la division de l'information de la FSI.

La division de l'information a constaté qu’une nouvelle bande, dont les membres sont libanais, avait été active au Mont Liban et qu’elle avait commis plusieurs vols. Deux d’entre eux ont été arrêtés et ont avoué avoir transporté les voitures volées vers la région de la Bekaa, puis vers le territoire syrien.

L’année dernière, le Conseil suprême de la défense du Liban a dénombré «plus de cent vingt-quatre passages de contrebande entre le Liban et la Syrie». L'ancien ministre des Finances Ali Hassan Khalil a révélé lors d'une discussion sur le projet de budget au Parlement l'année dernière que les passeurs avaient l'audace de nommer leurs passages en fonction de produits, de personnes, de villes ou d’instructions spécifiques. «C'est l'un des signes les plus marquants de la dissolution de l'État dans l'exercice de ses fonctions», déclare-t-il.

EN BREF

Depuis 2012, le Hezbollah s'appuie sur un réseau de passages illégaux qui relient la vallée libanaise de la Bekaa et les villages occidentaux du Qalamoun, dans la campagne de Damas, pour faire passer des marchandises, des armes et des drogues en Syrie, selon la Coalition de l'opposition syrienne.

Cette dernière a fourni des informations au comité de l’administration américaine chargé de rédiger la loi César sur «les routes terrestres et les tunnels utilisés par le Hezbollah libanais pour faire passer des armes, de l’argent et du carburant au régime syrien». Elle déclare: «Depuis 2012, le Hezbollah s'appuie sur un réseau de passages illégaux reliant la vallée libanaise de la Bekaa et les villages occidentaux du Qalamoun, dans la campagne de Damas, pour faire passer des marchandises, des armes et des drogues en Syrie. Quatre de ces itinéraires sont des routes principales reliant les frontières entre les deux pays, en plus d'autres passages secondaires.»

Les informations soulignent également qu'il y a des personnes et des familles puissantes dans les villes entre les deux pays, qui supervisent la contrebande de marchandises en provenance du Liban.

L'avocat Ashraf al-Moussawi déclare à Arab News: «Le phénomène des vols de voitures s'est intensifié de manière alarmante, jusqu'à ce que le nombre de voitures volées dépasse cent trente-six en un mois, au rythme de quatre à cinq voitures par jour.»

Al-Moussawi indique que des voitures volées au Liban se retrouvent sur le marché automobile d'Al-Suwayda, qui publie des annonces sur les réseaux sociaux sous le titre «Une clé et une voiture».

«La victime peut poser des questions au sujet de la voiture en appelant un numéro de téléphone, par l'intermédiaire duquel elle peut accepter de reprendre la voiture en échange d'une somme d'argent, et la voiture sera livrée à la frontière libano-syrienne», révèle l’avocat.

Les personnes, souvent d'anciens condamnés ou les membres d’un gang, qui transportent des voitures volées de Beyrouth ou du Mont Liban à la frontière, peuvent gagner jusqu'à deux millions de livres libanaises (1 087 euros) en faisant cela.

Un responsable de la sécurité explique à Arab News: «Il est possible que certains d'entre eux soient des agents de sécurité libanais en service actif attirés par l'argent rapide. Il peut également s'agir de membres retraités de l'armée qui ont rejoint des bandes. Si cette personne transportait, par exemple, quatre voitures par mois, elle reçoit l’équivalent de cinq à six fois son salaire mensuel. Lorsqu'il conduit la voiture, il n'attire pas l'attention des forces de sécurité. Certains d'entre eux ont été arrêtés et ils sont toujours en détention.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur ArabNews.com

 


MSF nie les allégations de l’armée israélienne selon lesquelles il existait une «activité terroriste» sur le site d’une attaque meurtrière à Gaza

Sky News a révélé les résultats de son enquête sur cet incident, ce qui a incité l’armée israélienne à mener sa propre «enquête». (MSF)
Sky News a révélé les résultats de son enquête sur cet incident, ce qui a incité l’armée israélienne à mener sa propre «enquête». (MSF)
Short Url
  • Deux membres de la famille d’un employé tués et sept autres blessés par l’armée israélienne en février
  • Un obus de char aurait été «tiré directement dans le bâtiment», selon une enquête menée par un organe de presse

DUBAÏ: L’armée israélienne a été accusée d’avoir attaqué intentionnellement et sans provocation un centre d’hébergement de Médecins sans frontières (MSF) qui abritait 64 personnes dans la région d’Al-Mawasi, à Gaza, le 20 février, tuant deux membres de la famille d’un employé et blessant sept autres personnes.

L’attaque a eu lieu malgré le fait que l’armée israélienne a été informée de l’emplacement précis du centre, selon MSF. L’armée a affirmé qu’il existait une «activité terroriste» sur le site, ce que MSF a nié.

Mercredi, Sky News a révélé les résultats de son enquête sur cet incident, ce qui a incité l’armée israélienne à mener sa propre «enquête».

L’organe de presse a déclaré s’être rendu sur place et avoir utilisé des images prises sur le terrain, des techniques «open source» ainsi que des entretiens avec des témoins et des experts en armement pour comprendre comment l’incident s’est déroulé.

Des témoins ont affirmé à Sky News qu’ils avaient entendu des bruits forts qui semblaient provenir de chenilles de chars, tandis que d’autres ont également entendu des coups de feu.

Les preuves recueillies laissent penser que l’attaque a été déclenchée par un obus de char qui a pénétré par une fenêtre. «Il est difficile de tirer des conclusions définitives à partir d’images, mais je pense que les dégâts sont dus à un obus de char tiré directement dans le bâtiment», a expliqué Chris Cobb-Smith, ancien officier d’artillerie de l’armée britannique et directeur de Chiron Resources.

Ce dernier a réfuté toute idée selon laquelle il s’agirait d’une attaque du Hamas. Il a affirmé qu’il n’était «pas au courant de l’existence d’armes à tir direct de ce calibre utilisées par le Hamas» et qu’il était «peu probable qu’un obus de cette taille ait pu être déployé et tiré compte tenu de l’activité de l’armée israélienne dans la région».

Des témoins et des membres de MSF ont déclaré avoir entendu des coups de feu avant que le bâtiment ne soit touché.

Meinie Nicolai, directrice générale de l’organisation humanitaire, s’est rendue sur place peu après l’attaque. Elle a indiqué que des balles avaient été tirées sur la façade du centre.

L’enquête a par ailleurs révélé que le jour de l’attaque, l’armée israélienne a écrit sur sa chaîne Telegram que ses forces opéraient dans le nord, le centre et le sud de la bande de Gaza et qu’elles menaient «des opérations intensives dans l’ouest de Khan Younès». Cependant, elle n’a pas mentionné les environs immédiats du centre d’hébergement.

En outre, le porte-parole en langue arabe de l’armée israélienne, Avichay Adraee, a publié le même jour une carte d’évacuation de deux quartiers plus au nord, dans la ville de Gaza et ses environs. Cette carte ne couvrait pas la zone où se trouve le centre.

Selon l’enquête, les services d’urgence sont arrivés sur les lieux au moins deux heures et demie après l’attaque pour des raisons de sécurité.

Les blessés ont été transportés à l’hôpital de campagne de l’International Medical Corps à Rafah, a précisé MSF.

«Nous sommes indignés et profondément attristés par ces meurtres», avait commenté Mme Nicolai au mois de février. «Ces meurtres  témoignent de la triste réalité: aucun endroit à Gaza n’est sûr, les promesses de mise en place de zones sûres n’ont pas été tenues et les mécanismes de “déconfliction” ne sont pas fiables», avait-elle ajouté.

L’armée israélienne, qui mène sa propre enquête, a précisé qu’elle avait «tiré sur un bâtiment identifié comme étant le théâtre d’activités terroristes», mais elle n’a fourni aucune preuve.

Dans un communiqué publié mercredi, MSF «réfute toute allégation d’activité terroriste dans les structures gérées par la MSF».

«Le centre était utilisé par le personnel humanitaire et les membres de leurs familles. Il était identifié par un drapeau MSF et les autorités israéliennes étaient informées de son emplacement.»

«Après l’incident, des informations ont été reçues. Elles font état de la mort de deux civils innocents dans la zone. L’armée regrette tout préjudice causé aux civils et fait tout ce qui est en son pouvoir pour opérer de manière précise et exacte», a ajouté l’armée israélienne dans un communiqué.

En vertu du droit international humanitaire, les installations et les unités médicales doivent être respectées et protégées en toutes circonstances.

Oona Hathaway, professeure de droit international à la faculté de droit de Yale, a expliqué à Sky News que les installations médicales sont «présumées être des biens civils et ne doivent pas être prises pour cibles lors d’un conflit armé».

Elle a souligné que si l’armée israélienne prend intentionnellement pour cible un bien civil, cela constitue «potentiellement un crime de guerre».

La semaine dernière, l’armée a mené une opération à l’intérieur et autour de l’hôpital Al-Shifa, affirmant que de hauts responsables du Hamas étaient basés dans cet immense complexe. Des jours de combats intenses ont suivi. L’armée a signalé qu’environ 170 combattants palestiniens avaient été tués et que des centaines d’autres avaient été arrêtés ou interrogés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Tunisie: quatre accusés condamnés à mort pour l'assassinat de l'opposant Belaïd en 2013

L'avocat tunisien et leader de l'opposition Chokri Belaid (Photo, AFP).
L'avocat tunisien et leader de l'opposition Chokri Belaid (Photo, AFP).
Short Url
  • Au total, 23 personnes étaient inculpées pour l'assassinat par balles dans sa voiture devant son domicile le 6 février 2013 de l'avocat de 48 ans, critique virulent du parti islamo-conservateur Ennahdha
  • Après 11 ans d'enquêtes et poursuites judiciaires, le tribunal de première instance de Tunis a également condamné deux accusés à la prison à perpétuité

TUNIS: Quatre accusés jugés en Tunisie pour l'assassinat de l'opposant de gauche Chokri Belaïd en 2013 ont été condamnés à mort, dans le tout premier verdict prononcé mercredi dans cette affaire qui avait secoué le pays et provoqué une grave crise politique.

Au total, 23 personnes étaient inculpées pour l'assassinat par balles dans sa voiture devant son domicile le 6 février 2013 de l'avocat de 48 ans, critique virulent du parti islamo-conservateur Ennahdha, à l'époque au pouvoir en Tunisie.

Après 11 ans d'enquêtes et poursuites judiciaires, le tribunal de première instance de Tunis a également condamné deux accusés à la prison à perpétuité, a annoncé à l'aube sur la télévision nationale Aymen Chtiba, procureur général adjoint du pôle judiciaire antiterroriste.

"Justice a été rendue", a estimé le procureur, expliquant la longueur des délibérés, qui ont duré pendant près de 15 heures, par "la nature et le volume" du dossier.

Entouré de manifestants de gauche réunis comme chaque mercredi au centre de Tunis pour réclamer la vérité sur cette affaire, le frère de Chokri Belaïd, Abdelmajid, a salué auprès de l'AFP "une première bataille gagnée dans cette guerre", tout en promettant de poursuivre "sa lutte", notamment contre "la manipulation du dossier".

Les proches de Chokri Belaïd ont à de nombreuses reprises pointé du doigt Ennahdha, accusant notamment le mouvement de s'être montré "indulgent" envers le discours des islamistes extrémistes qui s'était développé à l'époque.

Quelques heures après le verdict, Zouhaier Ben Abdallah, procureur de la République près du tribunal de première instance de Tunis et responsable à ce titre du pôle judiciaire anti-terroriste, a été démis de ses fonctions, sans qu'aucune explication ne soit donnée, ont rapporté les médias.

Ennahdha a estimé dans un communiqué que les condamnations prononcées mercredi "prouvent (son) innocence". Le parti a dénoncé "une volonté de certains courants idéologiques et partis politiques de l'accuser à tort".

"Dans leur communiqué, ils affirment que les coupables ont été trouvés et que le dossier est clos mais ce n'est pas vrai", a rétorqué Abdelmajid Belaïd, assurant qu'il y aurait "bientôt un autre procès d'autres accusés qui étaient en relation directe avec Rached Ghannouchi", chef d'Ennahdha et principale figure de l'opposition, emprisonné depuis plus d'un an.

Moratoire 

Des peines de 2 à 120 ans d'emprisonnement ont aussi été prononcées contre d'autres inculpés tandis que cinq individus ont bénéficié d'un non-lieu.

Si la justice tunisienne prononce régulièrement des condamnations à la peine capitale, notamment dans des affaires de terrorisme, un moratoire est appliqué de facto depuis les dernières exécutions menées en octobre 1991 lorsque trois membres d'Ennahdha avaient été pendus sous le régime du dictateur Zine El Abidine Ben Ali.

Des jihadistes ralliés au groupe Etat islamique (EI) avaient revendiqué l'assassinat de Chokri Belaïd ainsi que celui, six mois plus tard, du député Mohamed Brahmi, une autre figure de l'opposition de gauche.

Les autorités tunisiennes avaient annoncé en février 2014 la mort de Kamel Gadhgadhi, considéré comme le principal auteur de l'assassinat de Chokri Belaïd, pendant une opération antiterroriste.

Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi s'opposaient à la politique d'Ennahdha, qui a dominé le Parlement et le gouvernement après la révolution tunisienne de 2011 jusqu'à un coup de force de l'actuel président Kais Saied qui s'est arrogé les pleins pouvoirs en juillet 2021.

Les deux assassinats avaient constitué un tournant pour la Tunisie, berceau du Printemps arabe alors en pleine transition démocratique, en provoquant des manifestations et une crise politique au terme de laquelle Ennahdha avait dû céder le pouvoir à un gouvernement de technocrates en 2014.

En juin 2022, le président Kais Saied, qui considère l'assassinat des deux "martyrs" comme une cause nationale, avait ordonné la révocation de dizaines de magistrats soupçonnant certains d'avoir entravé l'enquête, faisant écho aux récriminations des familles et de la défense des deux opposants.

Ennahdha a toujours nié toute implication et après les assassinats, avait classé comme organisation terroriste le mouvement salafiste jihadiste Ansar al-Charia, toléré dans le pays depuis la chute de Ben Ali.

A l'époque, la Tunisie avait également connu un essor des groupes jihadistes avec des milliers d'islamistes partis combattre en Syrie, Irak et Libye.

Des attentats avaient également fait des dizaines de morts, dont près de 60 touristes tués en 2015 au musée du Bardo à Tunis et dans la station balnéaire de Sousse.


Israël: la conscription des ultra-orthodoxes secoue le gouvernement Netanyahu

Les membres d’un groupe juif ultra-orthodoxe se préparent à jouer sur la tombe du rabbin Shimon Bar Yochai au mont Meron, dans le nord d’Israël, le 9 mai 2023 (Photo, AFP).
Les membres d’un groupe juif ultra-orthodoxe se préparent à jouer sur la tombe du rabbin Shimon Bar Yochai au mont Meron, dans le nord d’Israël, le 9 mai 2023 (Photo, AFP).
Short Url
  • Compte tenu de la sensibilité de cette question qui a rouvert une fracture profonde dans le pays, la coalition gouvernementale dirigée par M. Netanyahu n'est pas parvenue à un accord
  • La Cour suprême, saisie de plusieurs appels exigeant une conscription immédiate des ultra-orthodoxes

JÉRUSALEM: Le gouvernement israélien est engagé jeudi dans une course contre la montre pour trouver un compromis et répondre à la Cour suprême sur la conscription des ultra-orthodoxes, un dossier épineux pour la coalition du Premier ministre Benjamin Netanyahu.

La Cour suprême, saisie de plusieurs appels exigeant une conscription immédiate des ultra-orthodoxes, afin de respecter les lois sur l'égalité entre les citoyens, avait donné jusqu'à mercredi au gouvernement pour formuler une proposition détaillée de projet de loi.

En Israël, le service militaire est obligatoire, mais les juifs ultra-orthodoxes ("haredim" en hébreu) peuvent échapper à la conscription s'ils consacrent leur temps à étudier les textes sacrés du judaïsme, une exemption instaurée à la création de l'Etat d'Israël en 1948 et qui n'a jamais été changée depuis.

Compte tenu de la sensibilité de cette question qui a rouvert une fracture profonde dans le pays, la coalition gouvernementale dirigée par M. Netanyahu n'est pas parvenue à un accord en raison de l'opposition des partis ultra-orthodoxes qui ne veulent pas entendre parler de conscription.

La demande du gouvernement de bénéficier de quelques heures supplémentaires, jusqu'à 12H00 GMT jeudi, pour remettre sa réponse à la Cour suprême, semble indiquer que les différentes parties cherchent à trouver un compromis.

La procureure générale Gali Baharav-Miara, dont le rôle est de conseiller le gouvernement sur les questions juridiques et de le représenter devant les juridictions judiciaires, a jeté un pavé dans la mare mercredi soir en annonçant que le gouvernement aurait l'obligation de procéder à la conscription des ultra-orthodoxes à partir du 1er avril en raison d'un vide juridique.

Au moment où Israël est en guerre contre le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza depuis bientôt six mois, cette exemption est de plus en plus critiquée au sein de la société, dont une partie estime que les juifs ultra-orthodoxes devraient comme les autres apporter leur contribution à la sécurité du pays et faire leur service militaire.

La coalition gouvernementale de M. Netanyahu repose largement sur l'alliance avec les deux grands partis ultra-orthodoxes, Shass et Judaïsme unifié de la Torah, farouchement opposés à la conscription des haredim. Leur défection ferait tomber la coalition.

Défi d'un ministre 

En mai 2023, le gouvernement a voté pour les écoles talmudiques (yeshivot) un budget sans précédent de près d'un milliard d'euros (3,7 milliards de shekels).

Ces derniers avaient soutenu le projet controversé de réforme judiciaire de Benjamin Netanyahu en échange de son soutien à un projet de loi qui devait être discuté au Parlement avant la guerre sur la poursuite du report de la conscription pour les ultra-orthodoxes.

Mais fin février, le ministre de la Défense, Yoav Gallant, avait défié son Premier ministre en annonçant une réforme du service militaire visant à inclure les haredim, et exigé que l'ensemble du gouvernement la soutienne.

Le service militaire (32 mois pour les hommes et deux ans pour les femmes) est obligatoire pour les jeunes israéliens mais la quasi-totalité des ultra-orthodoxes y échappe, grâce à un accord offrant aux jeunes hommes étudiant à plein temps dans des écoles talmudiques de reporter chaque année leur service militaire. Les jeunes femmes religieuses en sont elles automatiquement exemptées.

Depuis l'invalidation par la Cour suprême israélienne en 2012 de la loi Tal, permettant la tenue de cet accord, les exonérations se sont poursuivies, régies par des accords entre les gouvernements successifs et les partis ultra-orthodoxes.

Les ultra-orthodoxes représentent environ 14% de la population juive d'Israël, selon l'Institut israélien pour la démocratie (IDI), soit près de 1,3 million de personnes.

Environ 66.000 hommes ultra-orthodoxes en âge de servir bénéficient de ce report, selon un chiffre de l'armée.

En 1948, ce report permettait à une élite de 400 jeunes de préserver le monde des études des textes sacrés en grande partie décimé pendant la Shoah.

La plupart des haredim réclament le maintien de cette exemption pour tous les étudiants, jugeant l'armée incompatible avec leurs valeurs.