Accusations d'antisémitisme sur les campus américains: une polémique qui ne retombe pas

Des affiches politiques sont accrochées dans la cour de Harvard pour dénoncer ses récentes décisions à l'Université Harvard à Cambridge, Massachusetts, le 12 décembre 2023 (Photo de Joseph Prezioso / AFP).
Des affiches politiques sont accrochées dans la cour de Harvard pour dénoncer ses récentes décisions à l'Université Harvard à Cambridge, Massachusetts, le 12 décembre 2023 (Photo de Joseph Prezioso / AFP).
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Publié le Mercredi 13 décembre 2023

Accusations d'antisémitisme sur les campus américains: une polémique qui ne retombe pas

  • La polémique a déjà coûté son poste à une présidente d'université et pourrait avoir des retombées sur la liberté d'expression dans les facultés, notamment sur le discours pro-palestinien, avertissent certains observateurs
  • Les trois responsables ont été assaillies de questions sur la manière dont leurs établissements entendaient combattre l'antisémitisme

WASHINGTON: Depuis le début du conflit entre Israël et le Hamas, de prestigieuses universités américaines sont la cible de toutes les attaques, accusées de ne pas faire assez contre l'antisémitisme sur leurs campus.

La polémique a déjà coûté son poste à une présidente d'université et pourrait avoir des retombées sur la liberté d'expression dans les facultés, notamment sur le discours pro-palestinien, avertissent certains observateurs. Retour sur une affaire dont s'est emparée la classe politique et qui n'en finit pas de susciter des réactions aux Etats-Unis.

Où en est-on aujourd'hui?

Sommée de démissionner par des élus et des donateurs après une audition tendue devant le Congrès la semaine dernière, la présidente de Harvard, Claudine Gay, a échappé à la sanction. Après un conseil d'administration extraordinaire, l'instance dirigeante de son établissement lui a renouvelé sa confiance.

La présidente du Massachusetts Institute of Technology (MIT) Sally Kornbluth a elle aussi reçu le soutien de son institution.

Mais après d'intenses pressions, Elizabeth Magill, la présidente de l'université de Pennsylvanie (UPenn) a dû présenter sa démission.

Les trois responsables avaient été convoquées le 5 décembre par une commission parlementaire dont l'objectif affiché était de leur "faire rendre des comptes" après "d'innombrables manifestations antisémites".

Que s'est-il passé pendant l'audition?

Les trois responsables ont été assaillies de questions sur la manière dont leurs établissements entendaient combattre l'antisémitisme. L'élue républicaine Virginia Foxx leur a notamment dit que leurs universités comptaient des enseignants et des étudiants qui "haïssent les juifs, haïssent Israël", en dénonçant une "déliquescence intellectuelle et morale" sur leurs campus.

Les échanges qui leur ont valu d'être clouées au pilori sont intervenus après des questions offensives de l'élue de la droite trumpiste Elise Stefanik.

Mme Stefanik a notamment assimilé les appels de la part de certains étudiants à l'"intifada" - terme arabe signifiant "soulèvement" et renvoyant notamment à la première révolte palestinienne de 1987 contre l'occupant israélien - à une exhortation à un "génocide contre les juifs en Israël et dans le monde".

Lorsque l'élue lui a demandé sans détour si "appeler au génocide des juifs violait le règlement sur le harcèlement à Harvard, oui ou non?", Claudine Gay a répondu "cela peut, en fonction du contexte", avant d'ajouter "si c'est dirigé contre une personne".

Visiblement soucieuses de ne pas remettre en cause le sacro-saint droit à la liberté d'expression et de coller à la politique de leurs établissements, les trois responsables s'en sont tenues dans leurs réponses à une ligne très légaliste.

"Si le discours devient acte, cela peut devenir du harcèlement", a répondu Mme Magill à la même question. "C'est une décision qui dépend du contexte, Madame la députée".

Sally Kornbluth a de son côté répondu n'avoir "pas entendu d'appels au génocide des juifs sur notre campus".

"J'ai entendu des slogans pouvant être antisémites, selon le contexte", et "cela ferait l'objet d'une enquête pour harcèlement si c'était répandu et grave", a dit la responsable, qui a rappelé être juive pendant l'audition.

Qu'en pensent les experts?

Leurs réponses ont provoqué un tollé. Pourtant chez experts et universitaires, plusieurs voix se sont élevées pour dire que les trois femmes n'avaient pas tort.

"Oui, le contexte compte", ont ainsi écrit dans une tribune publiée dans le Los Angeles Times Eugene Volokh, professeur de droit à UCLA, et Will Creeley, de la Fondation pour les droits et l'expression individuels.

"Appeler à l'+intifada+ pendant une marche pacifique est généralement une déclaration politique protégée" par le principe de la liberté d'expression, ont-ils ajouté.

"Mais dans un contexte différent, un slogan d'+intifada+ peut constituer une véritable menace - si par exemple, quelqu'un disait cela à un étudiant israélo-américain tout en avançant de façon menaçante vers cet étudiant pendant une manifestation devenue violente. Et associé à d'autres comportements ciblés et inopportuns, cela pourrait constituer un harcèlement discriminatoire punissable", ont-ils dit.

Pour Jenna Leventoff, de l'organisation de défense des droits civiques ACLU, le Premier amendement de la Constitution américaine "et les principes de la liberté académique exigent que les établissements d'enseignement supérieur garantissent tous les discours protégés – même lorsque ces discours sont controversés ou offensants".

Et Ryan Enos, professeur de sciences politiques à Harvard, estime que "les conservateurs veulent faire cesser la liberté d'expression sur les campus". "Ils ont déjà réussi dans une certaine mesure à faire taire les voix pro-palestiniennes sur les campus universitaires", a-t-il dit à l'AFP.


Trump a écrit au président israélien pour lui demander de gracier Netanyahu

Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence. (REUTERS)
Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence. (REUTERS)
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  • "Le président Herzog tient le président Trump en très haute estime et continue d'exprimer sa profonde gratitude" pour son "soutien indéfectible" à Israël
  • "Monsieur le Président Herzog, écoutez le Président Trump", a écrit sur X le ministre d'extrême-droite Itamar Ben Gvir, tout en accusant la justice israélienne d'être biaisée à l'égard de M. Netanyahu

JERUSALEM: Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence.

M. Herzog a reçu "ce matin" une lettre de Donald Trump, "l'invitant à envisager d'accorder une grâce" à M. Netanyahu, détaille un communiqué du bureau présidentiel, qui précise que "toute personne souhaitant obtenir une grâce présidentielle doit présenter une demande officielle".

M. Netanyahu est poursuivi dans son pays pour corruption et est régulièrement entendu dans le cadre d'au moins trois procédures judiciaires, dans lesquels aucun jugement n'a encore été rendu.

"Le président Herzog tient le président Trump en très haute estime et continue d'exprimer sa profonde gratitude" pour son "soutien indéfectible" à Israël, "sa contribution considérable au retour des otages, à la refonte de la situation au Moyen-Orient et à Gaza en particulier, et à la garantie de la sécurité de l'Etat d'Israël", précise le communiqué.

Aussitôt plusieurs personnalités politiques israéliennes ont réagi.

"Monsieur le Président Herzog, écoutez le Président Trump", a écrit sur X le ministre d'extrême-droite Itamar Ben Gvir, tout en accusant la justice israélienne d'être biaisée à l'égard de M. Netanyahu.

Une députée également d'extrême-droite mais dans l'opposition, Yulia Malinovsky, du parti Israel Beitenou ("Israël est notre maison" en hébreu), a de son côté suggéré que le président américain faisait cette demande dans le cadre d'un accord avec M. Netanyahu sur des sujets relatifs au cessez-le-feu dans la bande de Gaza.

Quant au dirigeant de l'opposition, Yaïr Lapid, du parti centriste Yesh Atid ("il y a un futur", en hébreu), il a taclé M. Netanyahu en écrivan sur X: "rappel: la loi israélienne stipule que la première condition pour obtenir une grâce est l'aveu de culpabilité et l'expression de remords pour les actes commis".

Lors d'un discours au Parlement israélien le 13 octobre, M. Trump avait déjà suggéré qu'une grâce lui soit accordée.

"J'ai une idée. Monsieur le président (Isaac Herzog), pourquoi ne pas lui accorder une grâce? Ce passage n'était pas prévu dans le discours (...) Mais j'aime bien ce monsieur", avait dit le président américain dans son allocution, mettant en avant qu'il a été "l'un des plus grands" dirigeants "en temps de guerre".

 


Famine: l'ONU alerte sur «16 zones critiques» où la situation s'aggrave

Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations.  L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante".  Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh. (AFP)
Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations. L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante". Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh. (AFP)
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  • Selon un rapport conjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM), l'insécurité alimentaire aiguë à laquelle sont confrontées 16 zones critiques dans le monde s'accentue
  • "Les conflits, les chocs économiques, les phénomènes météorologiques extrêmes et l'insuffisance critique des financements exacerbent des conditions déjà désastreuses", notent la FAO et le PAM

ROME: Des millions de personnes supplémentaires dans le monde pourraient être confrontées à la famine ou au risque de famine, ont averti mercredi les deux organes de l'ONU dédiés à l'alimentation et à l'agriculture, dans un contexte tendu par la limitation des financements.

Selon un rapport conjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM), l'insécurité alimentaire aiguë à laquelle sont confrontées 16 zones critiques dans le monde s'accentue.

"Les conflits, les chocs économiques, les phénomènes météorologiques extrêmes et l'insuffisance critique des financements exacerbent des conditions déjà désastreuses", notent la FAO et le PAM, tous deux basés à Rome, dans un communiqué commun.

Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations.

L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante".

Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh.

"Nous sommes au bord d'une catastrophe alimentaire totalement évitable qui menace de provoquer une famine généralisée dans de nombreux pays", a mis en garde Cindy McCain, directrice générale du PAM, citée dans le communiqué, ajoutant que "ne pas agir maintenant ne fera qu'aggraver l'instabilité".

Le financement de l'aide humanitaire est "dangereusement insuffisant", alerte également le rapport, précisant que sur les 29 milliards de dollars nécessaires pour venir en aide aux populations vulnérables, seuls 10,5 milliards ont été reçus, précipitant notamment l'aide alimentaire aux réfugiés "au bord de la rupture".

Le PAM indique avoir réduit son assistance aux réfugiés et aux personnes déplacées en raison des coupes budgétaires et suspendu les programmes d'alimentation scolaire dans certains pays.

La FAO prévient de son côté que les efforts pour protéger les moyens de subsistance agricoles sont menacés et alerte sur la nécessité d'un financement urgent pour les semences et les services de santé animale.

"La prévention de la famine n’est pas seulement un devoir moral – c’est un investissement judicieux pour la paix et la stabilité à long terme", a rappelé le directeur général de la FAO, Qu Dongyu.

 


UE: quatre pays bénéficiaires de l'aide à la répartition des migrants

Des migrants, interceptés dans les eaux italiennes, débarquent après l'arrivée d'un navire transportant 49 migrants au port albanais de Shengjin, le 28 janvier 2025.(AFP)
Des migrants, interceptés dans les eaux italiennes, débarquent après l'arrivée d'un navire transportant 49 migrants au port albanais de Shengjin, le 28 janvier 2025.(AFP)
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  • La Commission européenne propose de relocaliser au moins 30.000 demandeurs d’asile depuis l’Italie, l’Espagne, la Grèce et Chypre vers d’autres États membres pour alléger la pression migratoire sur ces pays
  • Les 27 pays de l’UE doivent désormais négocier : chaque État devra soit accueillir des migrants, soit verser 20.000 € par personne — un débat déjà tendu entre pays réticents

BRUXELLES: La Commission européenne a annoncé mardi que l'Italie, l'Espagne, la Grèce et Chypre devraient recevoir de l'aide pour répartir ailleurs au moins 30.000 demandeurs d'asile et ainsi alléger la "pression migratoire" pesant sur ces pays.

Cette annonce va ouvrir des négociations délicates entre les 27 États membres de l'Union européenne (UE), dont nombre d'entre eux se montrent réticents à l'idée d'en accueillir.

L'UE a adopté en 2024 une réforme de sa politique sur la migration et l'asile, qui va bientôt entrer en vigueur.

L'élément clé est un nouveau système de "solidarité" visant à aider les pays méditerranéens considérés par Bruxelles comme étant sous "pression migratoire".

Les autres pays devront soit accueillir une partie des demandeurs d'asile en provenance de ces pays, soit leur verser une aide financière de 20.000 euros par migrant.

Les États membres ont cherché à influencer la décision de la Commission, ce qui a retardé son annonce d'un mois.

"La Grèce et Chypre subissent une forte pression migratoire du fait du niveau disproportionné des arrivées au cours de l'année écoulée", a déclaré mardi la Commission dans un communiqué.

"L'Espagne et l'Italie subissent également une forte pression migratoire du fait d'un nombre disproportionné d'arrivées à la suite d'opérations de sauvetage et de recherche en mer durant la même période", a-t-elle ajouté.

Cette annonce servira de base aux négociations entre États membres sur le nombre supplémentaire de demandeurs d'asile que chacun est disposé à accueillir, ou le montant de l'aide financière qu'il est prêt à apporter.

Certains pays ont déjà assuré qu'ils n'accueilleraient personne dans le cadre de ce dispositif et qu'ils se limiteraient à verser de l'argent.

Au moins 30.000 migrants devront être "relocalisés" chaque année dans le cadre du nouveau système. Le nombre définitif reste à déterminer, et la décision de qui ira où doit être prise d'ici fin décembre.