A Gaza, des hôpitaux en ruines et des patients affamés, témoigne l'OMS

Certains patients d'Al-Ahli attendaient d'être opérés depuis des semaines ou, s'ils avaient été opérés, ils risquaient d'avoir une infection postopératoire (Photo, Dossier/AFP).
Certains patients d'Al-Ahli attendaient d'être opérés depuis des semaines ou, s'ils avaient été opérés, ils risquaient d'avoir une infection postopératoire (Photo, Dossier/AFP).
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Publié le Vendredi 22 décembre 2023

A Gaza, des hôpitaux en ruines et des patients affamés, témoigne l'OMS

  • Selon la mission de l'OMS, l'établissement Al-Ahli, qui était il y a encore deux jours débordé par des patients est désormais une «coquille vide»
  • Mercredi, une mission menée par l'agence onusienne a pu se rendre dans deux hôpitaux, Al-Chifa et Al-Ahli, dans le nord de la bande de Gaza

GAZA: L'ensemble des hôpitaux du nord de la bande de Gaza sont hors d'état de fonctionner et les patients, abandonnés à leur sort, réclament "désespérément" eau et nourriture, ont témoigné jeudi les responsables d'une mission de l'OMS sur le terrain.

"Nos équipes n'ont pas de mots pour décrire la situation plus que catastrophique à laquelle les patients et les professionnels de santé restent confrontés", a indiqué, en vidéo depuis Jérusalem, Richard Peeperkorn, représentant de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) dans la bande de Gaza et en Cisjordanie occupée.

Mercredi, une mission menée par l'agence onusienne a pu se rendre dans deux hôpitaux, Al-Chifa et Al-Ahli, dans le nord de la bande de Gaza, ravagée par les bombardements de l'armée israélienne, menés en représailles à une attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur le sol israélien le 7 octobre.

L'OMS avait déjà évoqué un "bain de sang" à l'hôpital Al-Chifa, le plus important de Gaza, visé le mois dernier par une longue opération de l'armée israélienne.

L'hôpital Al-Ahli était, depuis, le seul établissement du nord de la bande de Gaza où des interventions chirurgicales étaient possibles mais son directeur a assuré mardi que plus aucune opération n'y était pratiquée depuis un raid israélien.

«Coquille vide»

Selon la mission, l'établissement Al-Ahli, qui était il y a encore deux jours "débordé par des patients requérant des soins d'urgence", est désormais une "coquille vide", a assuré M. Peeperkorn, qui s'exprimait en vidéo devant des journalistes à Genève.

"Il n'y a plus aucun lieu d'opérations en raison du manque de carburant, d'électricité, de matériel médical et de personnels de santé (...). Ca a totalement cessé de fonctionner", a-t-il ajouté.

Selon lui, seuls neuf des 36 hôpitaux de Gaza fonctionnent encore en partie et tous se situent dans le sud du territoire palestinien assiégé. "Il n'y a plus d'hôpital en état de marche dans le Nord", a-t-il ajouté.

Les hôpitaux, en théorie protégés par le droit humanitaire international, ont été plusieurs fois visés par des frappes israéliennes depuis le 7 octobre.

L'armée israélienne accuse le Hamas d'avoir construit des tunnels sous les hôpitaux et d'utiliser les établissements de santé comme des centres de commande, une accusation rejetée par le Hamas.

Interrogé sur ce point, M. Peeperkorn a assuré que l'OMS n'était pas "en mesure de vérifier la façon dont chaque hôpital était utilisé".

Le but de la mission était de fournir du carburant mais, faute de garanties sécuritaires, seuls des médicaments et du matériel médical ont pu être acheminés.

"Sans carburant, sans équipes (...), les médicaments ne changeront rien et l'ensemble des patients mourront lentement et dans la douleur", a prédit le représentant onusien.

L'hôpital Al-Ahli ne compte plus que 10 personnels de santé alors que 80 patients sont réfugiés dans une église située sur les terrains bordant l'établissement et dans l'unité d'orthopédie.

Israël: enquête sur la mort d'un détenu palestinien après des violences présumées

La police israélienne a interrogé une vingtaine de gardiens de prison dans le cadre d'une enquête sur la mort d'un détenu palestinien, décédé suite à des violences présumées, ont indiqué jeudi des sources israéliennes et palestiniennes.

Selon l'agence de presse palestinienne Wafa, Thaer Abu Assab, 38 ans, originaire de la ville de Qalqilya, dans le nord de la Cisjordanie occupée, est décédé en novembre après avoir été battu par des gardiens de la prison du sud d'Israël où il était détenu.

"Cette semaine, 19 gardiens de prison ont été interrogés (...) et, à la fin de leur interrogatoire, ont été libérés dans des conditions restrictives", a indiqué une porte-parole de la police.

Elle a ajouté que l'enquête portait sur "un incident violent présumé qui s'est produit il y a environ un mois dans une prison du sud du pays".

Elle a refusé de donner davantage de détails, citant l'enquête en cours.

Interrogée par l'AFP, une porte-parole des services pénitentiaires n'a pas souhaité commenter.

«Insoutenable»

Sean Casey, un coordinateur de l'équipe d'urgence de l'OMS qui participait à la mission, a décrit des corps enveloppés dans des sacs de plastique s'entassant dans la cour de l'hôpital Al-Ahli, alors que retentissaient des détonations d'armes automatiques.

Dans l'église, "nous avons assisté à une scène vraiment insoutenable", a-t-il ajouté en vidéo depuis Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, décrivant près de 30 patients, dont des enfants et des blessés graves, demandant de l'eau plutôt que des soins.

"C'est un endroit où les gens attendent de mourir", a-t-il assuré, réitérant les appels onusiens à un cessez-le-feu.

"Je pense que c'est trop tard", a-t-il toutefois estimé. "Partout où nous allons, les gens nous demandent de la nourriture", a déclaré M. Casey. "Même dans les hôpitaux, des gens avec des fractures ouvertes et en sang nous demandent de la nourriture".

"Si ce n'est pas un signe de désespoir, je ne sais pas ce que c'est", a-t-il ajouté.

Des tractations sont en cours jeudi pour tenter d'arracher une trêve dans la guerre entre Israël et le Hamas, provoquée par l'attaque du 7 octobre qui a fait environ 1.140 morts selon un décompte de l'AFP basé sur le bilan israélien.

Jurant de détruire le mouvement islamiste, qui avait lancé son attaque depuis Gaza, Israël a bombardé sans relâche le territoire palestinien et mené une offensive terrestre d'envergure, provoquant la mort de plus de 20.000 personnes, majoritairement des civils, selon les chiffres du Hamas.


L'armée israélienne dit se préparer à une «  offensive décisive » contre le Hezbollah libanais

Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources. (AFP)
Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources. (AFP)
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  • "Quand le moment viendra et que nous passerons à l'offensive, ce sera une offensive décisive"
  • Dans un discours prononcé lors d'un déplacement dans le nord, le général israélien Ori Gordin, a déclaré aux soldats: "nous avons déjà éliminé plus de 500 terroristes au Liban, la grande majorité d'entre eux appartenant au Hezbollah"

JERUSALEM: Un commandant de l'armée israélienne a indiqué vendredi que les troupes dans le nord du pays, où Israël à une frontière avec le Liban, se préparaient à une "offensive décisive" contre le Hezbollah, après des mois d'échanges de tirs transfrontaliers.

Le mouvement islamiste libanais Hezbollah et l'armée israélienne échangent des tirs quasi quotidiennement depuis l'attaque le 7 octobre du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël, qui a déclenché la guerre dans la bande de Gaza.

Dans un discours prononcé lors d'un déplacement dans le nord, le général israélien Ori Gordin, a déclaré aux soldats: "nous avons déjà éliminé plus de 500 terroristes au Liban, la grande majorité d'entre eux appartenant au Hezbollah", selon un communiqué de l'armée.

Les troupes israéliennes dans le nord sont actuellement en opération pour protéger les habitants de cette partie du pays et "préparer la transition vers l'offensive", a ajouté le général Gordin, commandant les forces israéliennes dans le nord.

"Quand le moment viendra et que nous passerons à l'offensive, ce sera une offensive décisive", a-t-il encore dit.

Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources.

La plupart d'entre eux, 342 personnes, ont été confirmés comme étant des combattants du Hezbollah, mais le bilan comprend également 104 civils. M. Gordin n'a pas mentionné de victimes civiles. Dans le nord d'Israël, au moins 18 soldats israéliens et 13 civils ont été tués, selon l'armée.

Le Hezbollah, soutenu par l'Iran, affirme que ses attaques contre Israël depuis le 8 octobre ont pour objectif de soutenir son allié du Hamas.

Des dizaines de milliers d'habitants ont depuis été déplacés au Liban et en Israël en raison de cette flambée de violence transfrontalière.


Polio, eaux usées, hôpitaux surchargés: la crise sanitaire à Gaza

Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés". (AFP)
Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés". (AFP)
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  • L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait état de vives inquiétudes face à une possible épidémie de polio dans la bande de Gaza
  • De son côté, l'armée israélienne a annoncé dimanche avoir lancé une campagne de vaccination de ses soldats contre la polio

GENEVE: L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait état de vives inquiétudes face à une possible épidémie de polio dans la bande de Gaza, alors que la crise sanitaire y est déjà très grave.

Voici un aperçu de certains des défis sanitaires auxquels est confronté le territoire palestinien, selon l'OMS.

Polio dans les eaux usés

Menace largement répandue voici encore une quarantaine d'années, la poliomyélite - qui peut entraîner en quelques heures des paralysies irréversibles - a très largement disparu dans le monde grâce aux vaccins.

Mais il existe une autre forme de poliovirus qui peut se propager: le poliovirus qui a muté à partir de la source contenue à l'origine dans le vaccin antipoliomyélitique oral (VPO). C'est ce poliovirus dérivé d'une souche vaccinale (PVDVc) qui a été retrouvé à Gaza.

Lorsqu'elles se répliquent dans le tube digestif, les souches de VPO changent génétiquement et peuvent se propager dans les communautés qui ne sont pas complètement vaccinées contre la poliomyélite, en particulier dans les zones où les conditions d'hygiène et d'assainissement sont mauvaises, ou dans des zones surpeuplées.

Le 16 juillet, le Réseau mondial de laboratoires de lutte contre la poliomyélite a isolé le poliovirus de type 2 dérivé d'une souche vaccinale (PVDVc2) dans six échantillons d'eaux usées à Deir al-Balah et Khan Younès.

Aucun prélèvement humain n'a encore été effectué à Gaza de sorte que l'OMS ne sait toujours pas si quelqu'un y a été infecté par le poliovirus. L'OMS et le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) espèrent collecter cette semaine les premiers échantillons humains.

De son côté, l'armée israélienne a annoncé dimanche avoir lancé une campagne de vaccination de ses soldats contre la polio.

Manque d'eau et d'assainissement

L'OMS et ses partenaires espèrent achever l'évaluation des risques liés à la polio cette semaine. Mais l'OMS a prévenu qu'il y a "un risque élevé" de propagation du poliovirus à Gaza et au niveau international "si cette épidémie ne fait pas l'objet d'une réponse rapide et optimale".

Le Dr Ayadil Saparbekov, chef d'équipe à l'OMS pour les urgences sanitaires dans les territoires palestiniens, espère que des recommandations pourront être publiées dimanche.

Mais "étant donné les limites actuelles en matière d'hygiène et assainissement de l'eau à Gaza, il sera très difficile pour la population de suivre le conseil de se laver les mains et de boire de l'eau salubre", a-t-il relevé mardi, lors d'un point de presse.

"Avec le système de santé paralysé, le manque d'eau et d'assainissement, ainsi que le manque d'accès de la population aux services de santé... la situation s'annonce très mauvaise", a-t-il souligné.

Au-delà de la polio, l'OMS est "très inquiète" face à de possibles épidémies dans la bande de Gaza.

Système de santé dévasté 

Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés" dans le complexe médical Nasser après de nouveaux bombardements lundi à Khan Younès, dans un contexte de "grave pénurie de réserves de sang, de fournitures médicales et de lits d'hôpitaux".

Avant le conflit à Gaza, déclenché le 7 octobre par les attaques du Hamas, il y avait environ 3.500 lits d'hôpitaux dans le territoire palestinien. Aujourd'hui, l'OMS estime qu'il y en a 1.532.

Seulement 45 des 105 établissements de soins de santé primaires sont opérationnels. Huit des dix hôpitaux de campagne sont opérationnels, dont quatre seulement partiellement.

Dans une telle situation, "il se peut que davantage de personnes meurent de maladies transmissibles que des blessures" liées à la guerre, a averti le Dr Saparbekov.

Selon ce responsable de l'OMS, "jusqu'à 14.000 personnes pourraient" avoir besoin d'une évacuation médicale hors de Gaza.


Les EAU proposent une mission internationale temporaire pour l'après-guerre à Gaza

Reem bint Ebrahim Al-Hashimy, ministre d'État émiratie pour la coopération internationale, a déclaré que la mission contribuerait à rétablir l'ordre public et à répondre à la crise humanitaire dans Gaza d'après-guerre. (Archive/AFP)
Reem bint Ebrahim Al-Hashimy, ministre d'État émiratie pour la coopération internationale, a déclaré que la mission contribuerait à rétablir l'ordre public et à répondre à la crise humanitaire dans Gaza d'après-guerre. (Archive/AFP)
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  • Elle a souligné le rôle clé des États-Unis dans le succès de la mission
  • La mission ouvrirait la voie à la réunification de Gaza et de la Cisjordanie occupée sous une Autorité palestinienne unique et légitime

ABOU DHABI : Les Émirats arabes unis ont appelé à l'établissement d'une mission internationale temporaire pour poser les jalons d'une nouvelle gouvernance à Gaza après la guerre.

Jeudi, dans un communiqué relayé par l'agence de presse nationale, Reem Al-Hashimy, ministre d'État pour la coopération internationale,  a déclaré que cette mission viserait à rétablir l'ordre et à faire face à la crise humanitaire dans Gaza post-conflit.
Selon la ministre, la mission devrait être déployée à l'invitation du gouvernement palestinien, sous la houlette d'un "nouveau Premier ministre crédible et indépendant", pour répondre aux besoins des Palestiniens et reconstruire Gaza. 

Elle préparerait le terrain pour la réunification de Gaza et de la Cisjordanie occupée sous une Autorité palestinienne unique et légitime.

Al-Hashimy a souligné qu'un retour à la situation d'avant le 7 octobre ne garantirait pas une paix durable, cruciale pour la stabilité régionale. 

Elle a exhorté les États-Unis à mener les efforts internationaux pour reconstruire Gaza, parvenir à la solution à deux États et faciliter les réformes palestiniennes, autant d'éléments qui contribueraient au succès de la mission internationale.

Israël, a-t-elle ajouté, doit également respecter le droit humanitaire international.

"Gaza ne peut se relever sous un blocus continu, ou si l'Autorité palestinienne légitime est empêchée d'assumer ses responsabilités", a-t-elle affirmé, appelant à l'arrêt des colonies israéliennes illégales et des violences en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. 

La ministre a réitéré le soutien des EAU aux efforts internationaux pour la solution à deux États.
"Notre ambition dépasse les frontières de Gaza et exige une collaboration internationale. L'établissement de la paix n'est pas seulement une nécessité régionale, mais un enjeu global qui profiterait à tout le Moyen-Orient et au monde entier", a-t-elle souligné pour conclure.