L'Iran doit payer pour les attaques contre la navigation commerciale

Le 30 juillet 2021, de la fumée s'échappe du pétrolier Mercer Street après une attaque de drone menée au large des côtes d'Oman. (AP/ISNA)
Le 30 juillet 2021, de la fumée s'échappe du pétrolier Mercer Street après une attaque de drone menée au large des côtes d'Oman. (AP/ISNA)
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Publié le Vendredi 13 août 2021

L'Iran doit payer pour les attaques contre la navigation commerciale

L'Iran doit payer pour les attaques contre la navigation commerciale
  • Quelques jours seulement avant la prise de fonction de Raïssi, un pétrolier, le Mercer Street, a été attaqué par un drone à 280 kilomètres du port d'Al-Daqam
  • Deux membres de l’équipage, un citoyen britannique et un citoyen roumain, ont péri dans cette offensive

Les derniers développements dans le Golfe indiquent que le régime iranien est déterminé à conserver ses ambitions hégémoniques, son aventurisme militaire et son comportement déstabilisateur au Moyen-Orient avec plus de véhémence sous la présidence et la ligne dure du radical Ebrahim Raïssi. Le régime sera plus agressif sous son nouveau président, qui sera vraisemblablement le prochain Guide suprême du pays.

Quelques jours seulement avant la prise de fonction de Raïssi, un pétrolier, le Mercer Street, géré par la société Zodiac Maritime et propriété du milliardaire israélien Eyal Ofer, a été attaqué par un drone à 280 kilomètres du port d'Al-Daqam, dans la mer d'Oman. Deux membres de l’équipage, un citoyen britannique et un citoyen roumain, ont péri dans cette offensive.

Après cet événement, plusieurs pays, dont le Royaume-Uni, la Roumanie, le Libéria et Israël, ont envoyé une lettre au Conseil de sécurité de l'ONU (Organisation des nations unies) pour dénoncer les agissements du régime iranien. Ces nations soulignent dans leur lettre que «cette attaque a perturbé et a mis en danger la sécurité du transport maritime international» et qu’elle «constitue une violation flagrante du droit international». Les signataires estiment que «cet acte doit être condamné par la communauté internationale».

Il est important de souligner qu’il ne s’agit pas de la première implication du régime iranien dans des attaques contre des navires commerciaux ces dernières années. Ainsi, quatre pétroliers avaient été ciblés près du port de Fujaïrah, au large des côtes des Émirats arabes unis, en mai 2019. Un peu plus d’un mois plus tard, le 13 juin 2019, deux pétroliers qui traversaient le golfe d'Oman ont également été sabotés à l'explosif; l'un s’est embrasé et les deux bateaux ont dû être abandonnés.

Ces deux navires étaient le japonais Kokuka Courageous et le norvégien Front Altair. Quelques semaines plus tard, le Corps des gardiens de la révolution islamique s'est enhardi et a diffusé une vidéo qui montrait comment ses commandos, affublés de masques de ski noirs et des treillis militaires, étaient parvenus à descendre d'un hélicoptère sur un pétrolier britannique dans le détroit d'Ormuz et à saisir le navire.

Curieusement, les dirigeants iraniens ont déjà revendiqué la responsabilité de certaines des attaques contre des pétroliers commerciaux. Le porte-parole du Conseil des gardiens de la révolution iranienne, Abbas-Ali Kadkhodaei, a déclaré à l'agence de presse semi-officielle Fars que, en 2019, la saisie du pétrolier britannique s’était produite en représailles à la confiscation, au large de Gibraltar, d'un pétrolier iranien par la marine britannique. Il a indiqué que cette action visait à faire face à «la guerre économique illégitime». Il estime que «la saisie de pétroliers est une illustration de cette règle» et qu’elle «est basée sur les droits internationaux». Kadkhodaei s’est cependant gardé de mentionner que le pétrolier de Téhéran expédiait du pétrole vers la Syrie, en violation des sanctions de l'Union européenne.

Les ordres qui consistent à cibler les pétroliers commerciaux et à déstabiliser le Golfe émanent très probablement du Guide suprême iranien, Ali Khamenei, car c’est lui qui décide des politiques intérieure et étrangère de l'Iran.

Dr Majid Rafizadeh

En attaquant des pétroliers commerciaux, les dirigeants iraniens enfreignent deux lois internationales capitales. Premièrement, le comportement agressif et les agressions de l'Iran constituent une violation flagrante de la définition d'«agression» par l'Assemblée générale des nations unies. Cette dernière appelle en effet tous les États à «s'abstenir de tout acte d'agression et d’autres emplois de la force contraires à la charte des Nations unies et à la Déclaration sur les principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la charte des Nations unies».

Cette résolution précise que les opérations suivantes peuvent être qualifiées d'«actes d'agression»: «le blocus des ports ou des côtes d'un État par les forces armées d'un autre État» et «une attaque par les forces armées d'un État sur les forces aériennes, terrestres ou maritimes ou sur les flottes maritimes et aériennes d'un autre État».

Ensuite, le régime viole la Convention internationale des nations unies sur le droit de la mer (CNUDM), dont la troisième partie, intitulée «Détroits utilisés pour la navigation internationale» (article 44), stipule que «les États riverains des détroits ne doivent pas entraver la traversée en transit» et qu’ils ont l’obligation de «signaler de manière appropriée tout danger pour la navigation ou le survol à l'intérieur ou au-dessus du détroit dont ils ont connaissance». Elle précise en outre: «Il n'y aura pas de suspension de transit.»

La CNUDM indique également que la traversée en transit désigne la «liberté de navigation et de survol uniquement destinée au transit continu et rapide du détroit entre une partie de la haute mer ou une zone économique exclusive et une autre partie de la haute mer ou une zone économique exclusive».

Voilà qui met en évidence le fait que l'Iran viole de manière flagrante ce droit international traditionnel sur la liberté de navigation. Il convient de noter que l'establishment théocratique de l'Iran est signataire de la CNUDM mais qu’il s'est longtemps abstenu de la ratifier.

Les ordres qui consistent à cibler les pétroliers commerciaux et à déstabiliser le Golfe émanent très probablement du Guide suprême iranien, Ali Khamenei, car c’est lui qui décide des politiques intérieure et étrangère de l'Iran.

La communauté internationale doit donc tenir le régime iranien pour responsable d'avoir violé les lois maritimes internationales en attaquant de manière flagrante des pétroliers commerciaux.

 

 

• Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh

 

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.