Liban: Quand un preneur d’otage symbolise la douleur provoquée par l’effondrement financier

La décision de libérer Bassam Hussein n'est pas surprenante car il est considéré comme un héros national (Photo, AFP).
La décision de libérer Bassam Hussein n'est pas surprenante car il est considéré comme un héros national (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 17 août 2022

Liban: Quand un preneur d’otage symbolise la douleur provoquée par l’effondrement financier

  • Alors que le monde est ébranlé par la hausse des prix des denrées alimentaires et des carburants, les Libanais vivent depuis longtemps avec l'hyperinflation et ses conséquences
  • Les banques libanaises, autrefois accueillantes et dotées de portes vitrées tournantes, sont désormais fortifiées par du métal lourd et du fil barbelé

BEYROUTH: La nouvelle selon laquelle le procureur général du Liban a libéré mardi un homme ayant pris d'assaut une banque à Beyrouth la semaine dernière et pris des otages aurait scandalisé le public dans la plupart des pays. Mais Bassam Hussein n'était pas un preneur d'otages ordinaire et le Liban n'est pas un pays ordinaire.

Le 11 août, Hussein aurait menacé des employés et des clients de la banque avec une arme afin d’exiger le versement de son propre argent. Selon l'agence nationale de l’information libanaise, lorsque sa demande de retrait d'une partie de son épargne gelée de près de 206 500 euros pour couvrir les frais médicaux de son père malade a été refusée, il a menacé de mettre le feu à la banque et de tuer tous ceux qui s'y trouvaient.

La décision du procureur général est intervenue après que la Banque fédérale a abandonné les poursuites engagées contre Hussein, qui est devenu un héros national dans un pays où les banques ont soumis leurs clients à toutes sortes de restrictions, en particulier des limites strictes sur les retraits d'épargne.

Hussein avait pris pour cible une banque, mais son acte de désespoir a été considéré par beaucoup de ses compatriotes comme emblématique d'un pourrissement bien plus important.

Le Liban, un pays autrefois décrit comme la «Suisse du Moyen-Orient», le chouchou des investisseurs, des artistes et des intellectuels étrangers, a été réduit à un État en perpétuelle défaillance, avec un taux d'inflation qui a franchi la barre des 200% cette année.

La semaine dernière, le New York Times a publié un article comparant le taux d'inflation croissant aux États-Unis - actuellement de 9% - aux 90% de l'Argentine. Ce pays a connu dans les années 1980 un taux d'inflation «incroyable» de 3 000%. Les citoyens de ce pays d'Amérique du Sud luttent pour s'en sortir, utilisant des espèces pour tout payer, que ce soit des immeubles ou un café, et stockant leur argent partout sauf à la banque, a rapporté le journal.

Le pain est l’une des seules denrées à être subventionnée par l’Etat (Photo, AFP).

À l'instar de l'Argentine, les banques libanaises, autrefois accueillantes et dotées de portes vitrées tournantes, sont désormais fortifiées par du métal lourd et du fil barbelé pour assurer leur sécurité, et toutes sont recouvertes de graffitis à l’effigie de personnes désespérées qui n'ont pas accès à leurs économies.

La crise financière paralysante qui a débuté en 2019, accompagnée d'une dévaluation rapide de la monnaie nationale et d'une inflation galopante, a poussé un nombre sans précédent de familles au Liban sous le seuil de pauvreté.

Cette tragédie est incarnée par Rachelle, veuve et mère d'un fils présentant des besoins particuliers, et dont le mari s'est suicidé il y a deux ans après une longue série de querelles familiales portant sur de grosses sommes d'argent perdues lors de l'effondrement de l'économie libanaise.

Rachelle, une habitante de Jounieh qui n'a pas voulu donner son nom de famille, ne peut retirer que 393,24 euros (400 dollars américains) maximum par mois de son compte bancaire. Elle fait partie des millions de Libanais qui ne peuvent pas accéder librement à leurs économies, car les banques ont utilisé ces fonds pour payer des taux d'intérêt déraisonnablement élevés afin d'attirer davantage de dépôts.

La crise bancaire a eu un effet immédiat sur la livre libanaise. La pénurie de dollars sur le marché des devises, le défaut de paiement du pays sur sa dette en devises (Eurobond) et la perte de confiance dans la stabilité de la monnaie locale qui en a résulté ont contribué à la dévaluation rapide de la livre.

Près de 80% de la population libanaise est désormais considérée comme vivant sous le seuil de pauvreté après l'imposition de contrôles informels des capitaux (Photo, AFP).

La monnaie libanaise a perdu plus de 90% de sa valeur depuis 2019. En conséquence, le pouvoir d'achat des gens s'est effondré, de multiples types de marchandises ont disparu des rayons et les prix ont grimpé en flèche.

Près de 80% de la population libanaise est désormais considérée comme vivant sous le seuil de pauvreté après l'imposition de contrôles informels des capitaux.

Un récent rapport de la Banque mondiale a estimé que cette crise était «délibérée» et qu’elle était l'une des pires crises économiques des temps modernes.

Rachelle survit désormais grâce à de petites sommes d'argent envoyées par sa famille et sa belle-famille depuis l'étranger, en plus des bons d'alimentation et des colis distribués par les ONG locales.

«Je ne peux pas payer mes factures; je vis dans la peur et l'angoisse constantes d'être mise à la porte de chez moi. Je suis diabétique et je suis sur le point d'abandonner complètement car je peux à peine payer mes médicaments», a-t-elle révélé à Arab News.

Comme elle, des millions de Libanais sont aujourd'hui dans l'incapacité d'acheter des médicaments, qui sont entièrement importés de l'étranger, ce qui entraîne une flambée des prix à chaque dépréciation de la livre.

Le Liban, un pays autrefois décrit comme la «Suisse du Moyen-Orient», le chouchou des investisseurs, des artistes et des intellectuels étrangers, a été réduit à un État en perpétuelle défaillance (Photo, AFP).

Le Liban est en proie à la corruption depuis des décennies, une situation qui profite aux personnes bien connectées à l'élite politique, au détriment de tous les autres. L'effondrement économique de 2019 a entraîné la disparition quasi-totale de la classe moyenne – qui est maintenant devenue des travailleurs pauvres.

«Avant la crise, nous avions une sorte de classe moyenne. Le résultat de l'inflation a fait que beaucoup de gens sont devenus pauvres ou sont passés sous le seuil de pauvreté», a déclaré à Arab News Mohammed Faour, professeur de finance à l'Université américaine de Beyrouth (AUB).

«Ce qui se trouvait au milieu a cessé d'exister», a-t-il affirmé, en faisant référence à l'aggravation des inégalités économiques au Liban. «Nous avons une nouvelle classe de nouveaux riches dont les revenus sont en dollars, mais même leur condition n'est pas tout à fait stable.»

Le problème de l'inflation galopante est aggravé par la fluctuation du taux de change, qui peut passer de 20 000 livres pour un dollar à 30 000 en une semaine, ce qui rend la planification financière impossible.

Malheureusement, même lorsque la livre s'apprécie – principalement en raison des injections de dollars sur le marché par la banque centrale – les prix baissent rarement.

Elie, un diplômé de l’Université libanaise au chômage vivant à Beyrouth, a déclaré à Arab News: «Je me suis un peu habitué aux changements de prix incontrôlables, et depuis le début de la crise, j'ai commencé à faire des compromis sur plusieurs choses et à vérifier les prix de tous les articles que j'achète.»

Il a ajouté: «Ce qui me surprend encore, c'est qu'il n'y a absolument aucun contrôle des prix, et que le même article, le même jour, peut se retrouver avec plusieurs prix radicalement différents dans différents magasins.»

Faour affirme que cette anomalie est un grief légitime, mais explique que cela n'est pas propre au Liban. «Cela arrive à tous les pays confrontés à des crises monétaires», a-t-il expliqué à Arab News.

«La valeur des biens et des devises est basée sur les attentes et au Liban, la situation est chaotique et le sentiment général est négatif.»

«Mais nous ne pouvons pas non plus négliger le grand élément d'exploitation de nombreux importateurs qui profitent des marges dues à l'incertitude», a-t-il ajouté.

La mauvaise gestion et l'inaction politique comme bureaucratique sont considérées comme des facteurs contribuant à l'inflation galopante. Selon Faour, les réformes raisonnables proposées par le Fonds monétaire international ont inévitablement été sabotées par des banquiers liés à la politique et des politiciens.

Tous les partis traditionnels et les politiciens au pouvoir au Liban ont joué un rôle dans la conduite du pays vers l'abîme, confirme-il.

«Vous avez un accord de partage du pouvoir qui ne permet aucune prise de décision. Nous devons nous attaquer aux problèmes de front, ce qui est très difficile car cela implique de se confronter aux propriétaires des banques, qui devront assumer une grande partie des conséquences de leurs décisions imprudentes en matière de prêts», a-t-il estimé.

«Nous devons être capables de dire aux épargnants ce qu'ils ont perdu et ce qu'ils peuvent encore avoir. Nous avons besoin d'un filet de sécurité pour rendre la chute moins douloureuse. La stabilisation, malheureusement, impliquera des décisions impopulaires.»

Si la valeur de la livre libanaise sur le marché a considérablement augmenté depuis le début de la crise financière, ce n'est pas ce qui est au cœur du problème, selon Faour.

«L'opinion publique pense à tort que l'inflation est due au fait que le gouvernement imprime trop d'argent, mais ce n'est pas le cas», a-t-il éclairci à Arab News.

«C'est le résultat de l'effondrement du taux de change et de la politique budgétaire du gouvernement qui a été caractérisée par l'austérité.»

Soulignant que «les salaires publics sont toujours au taux initial de 1 500 livres», il a déclaré: «En fait, le gouvernement ne dépense pas assez d'argent; le déficit budgétaire a chuté de façon spectaculaire.»

Pour le peuple libanais, ce brusque déclin économique représente bien plus que de simples chiffres sur un graphique. L'incapacité croissante à satisfaire les besoins les plus élémentaires a entraîné des répercussions sur la santé mentale des Libanais.

«Les gens autour sont, au moins en partie, dans un déni clair», a déclaré Elie, le diplômé au chômage, à Arab News, en parlant avec philosophie.

«Tout le monde en ce moment dirait s’être habitué aux changements dramatiques de la vie quotidienne par rapport à il y a seulement quelques années et que “ça aurait pu être pire”.»

«Mais au fond, ils savent que la situation ne pourrait absolument pas être pire, que tous les aspects de la vie leur paraissent parfois insupportables et psychologiquement épuisants.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L’Arabie saoudite salue la décision des États-Unis de lever les sanctions contre la Syrie

L'Arabie saoudite a salué la décision des États-Unis de lever les sanctions imposées à la République arabe syrienne en vertu de la loi César, affirmant que cette mesure favorisera la stabilité, la prospérité et le développement en Syrie. (AP)
L'Arabie saoudite a salué la décision des États-Unis de lever les sanctions imposées à la République arabe syrienne en vertu de la loi César, affirmant que cette mesure favorisera la stabilité, la prospérité et le développement en Syrie. (AP)
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  • L’Arabie saoudite estime que la levée des sanctions américaines contre la Syrie soutiendra la stabilité et le développement du pay
  • Riyad salue le rôle des États-Unis et les mesures prises par Damas pour favoriser la reconstruction et le retour des déplacés

RIYAD : L’Arabie saoudite a salué la décision des États-Unis de lever les sanctions imposées à la République arabe syrienne en vertu du Caesar Act, estimant que cette mesure soutiendra la stabilité, la prospérité et le développement du pays, et contribuera à répondre aux aspirations du peuple syrien.

Dans un communiqué publié vendredi, le Royaume a salué le rôle positif joué par le président américain Donald Trump dans ce processus, depuis l’annonce faite lors de sa visite à Riyad en mai 2025 de la décision de lever l’ensemble des sanctions contre la Syrie, a rapporté l’Agence de presse saoudienne (SPA).

Le communiqué précise que le processus a abouti à la signature par le président Trump de la loi d’autorisation de la défense nationale pour l’exercice 2026, laquelle inclut l’abrogation du Caesar Act, a ajouté la SPA.

L’Arabie saoudite a également félicité les dirigeants, le gouvernement et le peuple syriens à l’occasion de la levée des sanctions, tout en exprimant sa reconnaissance pour les mesures prises par Damas afin de rétablir la stabilité dans l’ensemble du pays.

Le Royaume a souligné que ces efforts contribueront à créer des conditions favorables à la reconstruction de l’État syrien et de son économie, ainsi qu’à faciliter le retour des réfugiés et des personnes déplacées syriennes dans leurs foyers.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Une fondation caritative saoudienne célèbre la Journée mondiale de la langue arabe avec l’UNESCO à Paris

Parmi les participants figuraient Khaled Ahmed El-Enany, directeur général de l'UNESCO, Abdulelah Altokhais, délégué permanent de l'Arabie saoudite auprès de l'organisation, et Saleh Ibrahim Al-Kholaifi, directeur général de la fondation. (Fourni)
Parmi les participants figuraient Khaled Ahmed El-Enany, directeur général de l'UNESCO, Abdulelah Altokhais, délégué permanent de l'Arabie saoudite auprès de l'organisation, et Saleh Ibrahim Al-Kholaifi, directeur général de la fondation. (Fourni)
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  • Une célébration à l’UNESCO à Paris a mis en lumière le rôle mondial de la langue arabe et son apport au dialogue interculturel
  • Le partenariat entre l’UNESCO et la fondation saoudienne prévoit plusieurs projets clés pour renforcer la promotion de l’arabe

RIYAD : La fondation caritative Sultan bin Abdulaziz Al-Saud et l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) ont célébré cette semaine à Paris la Journée mondiale de la langue arabe lors d’un événement placé sous le thème : « Des voies innovantes pour l’arabe : politiques et pratiques pour un avenir linguistique plus inclusif ».

Organisée en collaboration avec la délégation permanente du Royaume auprès de l’UNESCO, la rencontre a réuni, selon les organisateurs, un groupe distingué de dirigeants internationaux, de décideurs politiques, d’experts, d’intellectuels et de spécialistes des affaires linguistiques et culturelles venus du monde entier, afin de souligner le rayonnement mondial de la langue arabe et son rôle central dans la promotion de la diversité culturelle et du dialogue entre les civilisations.

Parmi les participants figuraient Khaled Ahmed El-Enany, directeur général de l’UNESCO, Abdulelah Altokhais, délégué permanent de l’Arabie saoudite auprès de l’organisation, ainsi que Saleh Ibrahim Al-Kholaifi, directeur général de la fondation.

Dans son discours, El-Enany a mis en avant l’importance du partenariat entre l’UNESCO et la fondation, estimant qu’il permet à l’organisation d’élargir l’ampleur de ses ambitions. Plusieurs projets majeurs sont prévus dans le cadre de cette collaboration, a-t-il ajouté.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La Défense civile de Gaza annonce cinq morts dans une frappe israélienne sur un abri

Vue générale des maisons détruites dans le camp de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 19 décembre 2025. (AFP)
Vue générale des maisons détruites dans le camp de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 19 décembre 2025. (AFP)
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  • Une frappe israélienne a touché une école servant d’abri à Gaza, faisant cinq morts selon la Défense civile; l’armée israélienne dit avoir visé des « suspects » et enquête sur les victimes
  • Le cessez-le-feu du 10 octobre reste fragile, avec des accusations mutuelles de violations, tandis que des médiateurs internationaux poussent vers une nouvelle phase du plan de paix

Gaza, Territoires palestiniens: La Défense civile de la bande de Gaza a annoncé vendredi qu'une frappe israélienne sur une école transformée en abri pour personnes déplacées avait fait cinq morts, tandis que l'armée a affirmé avoir ouvert le feu sur des suspects.

Le porte-parole de la Défense civile, Mahmoud Bassal, a déclaré à l'AFP que cinq corps avaient été retrouvés après un bombardement israélien sur l'Ecole des martyrs de Gaza, utilisée comme abri dans le quartier de Tuffah, dans l'est de la ville de Gaza.

Interrogée par l'AFP, l'armée israélienne a déclaré que "pendant des opérations dans le secteur de la Ligne jaune dans le nord de la bande de Gaza, plusieurs individus suspects ont été repérés dans des structures de commandement à l'ouest de la Ligne jaune".

En vertu du cessez-le-feu entré en vigueur le 10 octobre entre Israël et le Hamas après deux ans de guerre, les forces israéliennes se sont retirées à l'est de cette ligne de démarcation.

L'armée a ajouté que des soldats avaient "tiré sur les individus suspects pour éliminer la menace" et dit être "au courant des allégations concernant des victimes", allégations qui sont "en cours d'examen".

L'armée "regrette tout dommage causé à des personnes non impliquées", a-t-elle ajouté.

Le cessez-le-feu dans le territoire palestinien, basé sur le plan du président américain Donald Trump, reste fragile et les deux camps s'accusent mutuellement de violations.

L'émissaire américain Steve Witkoff devait participer à une réunion vendredi à Miami, en Floride, avec des représentants de la Turquie, du Qatar et de l'Egypte, médiateurs et garants de la trêve.

Les médiateurs appellent à présent à accentuer les efforts pour passer à la prochaine phase du plan de paix, qui prévoit le désarmement du Hamas, le retrait progressif de l'armée israélienne de tout le territoire, la mise en place d'une autorité de transition et le déploiement d'une force internationale.

"Notre population attend de ces pourparlers que les participants s'accordent pour mettre fin aux excès israéliens et stopper toutes les violations", a déclaré à l'AFP Bassem Naïm, membre du bureau politique du Hamas.

Le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas a annoncé jeudi qu'au moins 395 Palestiniens avaient été tués par des tirs israéliens depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu.

Trois soldats israéliens ont également été tués dans le territoire depuis la trêve.

Israël attend encore le retour d'un dernier corps d'otage retenu à Gaza avant d'entamer les tractations sur la deuxième phase de l'accord.