Quiconque suit l'évolution de la situation au Moyen-Orient aura remarqué une nette augmentation de l'engagement de l'Arabie saoudite en faveur de la cause palestinienne depuis le 7 octobre 2023. Cette dynamique va au-delà d'une position politique ou humanitaire, elle reflète une vision stratégique. Le Royaume a renforcé cet engagement en parrainant des conférences internationales, en nouant de larges alliances avec des nations partenaires et en fournissant des fonds essentiels pour l'approvisionnement en nourriture et en médicaments des Palestiniens de la bande de Gaza et de la Cisjordanie.
Les efforts saoudiens ont évolué régulièrement, passant d'un plaidoyer vocal à la direction d'un processus politique visant à établir un État palestinien indépendant, renforcé par un partenariat solide avec les nations européennes.
La conférence internationale sur la solution des deux États, qui s'est tenue en juillet au siège des Nations unies à New York et qui était coprésidée par l'Arabie saoudite et la France, a rassemblé des représentants de plus de 125 pays. Le sommet visait à lancer un processus politique clair pour mettre fin à la guerre à Gaza et plaider en faveur de la reconnaissance d'un État palestinien basé sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, conformément aux résolutions des Nations unies.
La conférence a adopté une déclaration présentant un cadre global avec des mesures claires et assorties d'un calendrier. Celles-ci comprennent un cessez-le-feu immédiat dans la bande de Gaza, le transfert du contrôle administratif à l'Autorité palestinienne et le déploiement d'une mission internationale temporaire sous la supervision des Nations unies pour aider à stabiliser la situation.
Le ministre saoudien des affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, a souligné que "ces résultats offrent un ensemble complet de propositions englobant des dimensions politiques, humanitaires, sécuritaires, économiques, juridiques et stratégiques", formant "un cadre pratique et réalisable pour mettre en œuvre la solution à deux États et garantir une paix et une sécurité durables pour tous". Il a appelé "tous les États membres des Nations unies à approuver la déclaration finale avant la fin de la prochaine session de l'Assemblée générale en septembre".
Le ministre français des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a exhorté toutes les nations à considérer la conférence comme un tournant décisif pour faire avancer la solution des deux États et mettre fin à la guerre à Gaza. Il a insisté sur la nécessité urgente de cesser les attaques contre les civils et de s'engager sur la voie d'une paix durable.
La conférence internationale sur la solution à deux États a marqué un tournant décisif.
Hassan Al-Mustafa
La diplomatie active de l'Arabie saoudite a fermement souligné que la normalisation avec Tel-Aviv n'aura pas lieu tant qu'Israël ne mettra pas fin à l'occupation des territoires palestiniens et ne s'engagera pas dans un processus de paix sérieux et crédible. Cette position sans équivoque a été clairement énoncée par le prince héritier Mohammed bin Salman devant le Conseil saoudien de la Shoura en septembre 2024, lorsqu'il a déclaré : "Le Royaume ne faiblira pas dans ses efforts inlassables pour établir un État palestinien indépendant avec Jérusalem-Est comme capitale, et nous affirmons que le Royaume ne nouera pas de relations diplomatiques avec Israël sans cela."
La conférence internationale a atteint plusieurs objectifs stratégiques clés, notamment la relance de la dynamique mondiale en faveur de la solution à deux États après des années de relâchement et la guerre à Gaza depuis octobre 2023 ; la réaffirmation de la légitimité et de l'autorité de l'Autorité palestinienne ; et l'établissement d'un lien clair entre la normalisation et un cadre politique concret. En substance, la paix et la normalisation sont désormais fermement liées à la création d'un État palestinien indépendant, jetant ainsi les bases d'une paix durable au Moyen-Orient.
Une autre réalisation politique majeure - longtemps source d'inquiétude pour Israël et de malaise pour l'administration américaine - a été l'impulsion donnée aux principaux pays européens pour qu'ils reconnaissent l'État de Palestine. La France devrait prendre la tête de cette initiative en septembre, aux côtés d'autres nations telles que l'Irlande, le Portugal et le Royaume-Uni.
La conférence a également établi un lien solide entre le processus de paix et l'arrêt de l'expansion des colonies, le rejet de l'annexion illégale des terres palestiniennes et la fin de la violence à l'encontre des civils palestiniens. Cette position a été soulignée par l'utilisation explicite du terme "terrorisme" pour décrire les attaques violentes menées par des colons extrémistes contre des Palestiniens non armés et leurs biens.
Ce sommet n'était pas une réitération des initiatives passées, mais plutôt une déclaration politique unifiée visant à redéfinir le cadre de négociation et à établir un nouvel équilibre politique et juridique. Il s'oppose directement aux politiques d'Israël, qui ont démantelé les dynamiques régionales antérieures par l'usage de la force, la famine et les déplacements forcés.
Pour la première fois depuis des décennies, la solution des deux États a été avancée en dehors du cadre de la domination américaine traditionnelle, sous le parrainage conjoint de l'Arabie saoudite et de la France. Cette évolution met en lumière l'influence diplomatique croissante du Moyen-Orient, qui a réussi à rallier des nations européennes influentes et à établir des partenariats stratégiques durables.
Le message sous-jacent est sans équivoque : Israël ne peut plus compter exclusivement sur la protection des États-Unis pour écarter les revendications palestiniennes. Les négociations ont évolué. Elles ne sont plus définies par un déséquilibre flagrant entre une puissance dominante sur le plan militaire et une contrepartie s'appuyant uniquement sur la force du droit international et de la légitimité morale.
La décision de la France de reconnaître un État palestinien en septembre n'est pas un simple geste symbolique, mais un changement significatif aux implications sérieuses, ce qui explique l'inquiétude d'Israël.
Paris rompt avec la position européenne traditionnellement passive ou hésitante, notamment celle de l'Allemagne, et adopte au contraire une approche diplomatique plus affirmée et proactive.
La France s'efforce de consolider son rôle d'interlocuteur clé, d'acteur alternatif et de "médiateur parallèle" aux États-Unis. Bien qu'un déséquilibre de pouvoir et d'influence subsiste - et que Washington continue de jouer un rôle central dans les affaires du Moyen-Orient - cette évolution de la diplomatie française renforce l'émergence d'une approche multipolaire de la résolution des conflits. Il exerce également une pression croissante sur Israël pour qu'il reconnaisse que son occupation n'est plus considérée comme légitime ou acceptable aux yeux du monde occidental, d'autant plus que son image auprès de larges segments de l'opinion publique européenne est désormais profondément ternie par des associations avec la violence et les effusions de sang.
Que nous réserve l'avenir ? Sur le plan politique, la pression sur Israël devrait s'intensifier, en particulier si la France procède à la reconnaissance de l'État de Palestine et est suivie par d'autres pays, notamment le Royaume-Uni. Sur le plan diplomatique, nous pouvons nous attendre à un engagement saoudien actif dans les forums internationaux pour soutenir de nouvelles résolutions sur la Palestine, ainsi qu'à des efforts renouvelés à Washington pour convaincre l'administration du président Donald Trump qu'un processus de paix crédible sert les intérêts des États-Unis, du Moyen-Orient et même d'Israël. Sans un tel engagement, la région risque de sombrer davantage dans le chaos et l'hostilité, favorisant des générations sans espoir.
- Hassan Al-Mustafa est un écrivain et chercheur saoudien qui s'intéresse aux mouvements islamiques, à l'évolution du discours religieux et aux relations entre les États du Conseil de coopération du Golfe et l'Iran.
X : @Halmustafa
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