«Le peuple iranien» comme alternative à l'accord sur le nucléaire affirme John Bolton à Arab News

L’ancien conseiller à la sécurité nationale des États-Unis John Bolton est interviewé par Arab News (Capture d'écran).
L’ancien conseiller à la sécurité nationale des États-Unis John Bolton est interviewé par Arab News (Capture d'écran).
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Publié le Mercredi 15 février 2023

«Le peuple iranien» comme alternative à l'accord sur le nucléaire affirme John Bolton à Arab News

  • Selon Bolton, les menaces contre les responsables américains et les dissidents étrangers démontrent «la nature fondamentalement terroriste du régime»
  • Il soutient que l’accord sur le nucléaire de 2015 avec l’Occident permet lui-même à l’Iran «de se frayer un chemin vers les armes nucléaires»

NEW YORK: Depuis qu’un agent du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) a tenté d’assassiner John Bolton en août 2022, l’ancien conseiller à la sécurité nationale des États-Unis et ancien ambassadeur auprès de l’ONU est sous la protection des Services secrets.
«Le fait de se promener en toute liberté est une toute autre vie», affirme Bolton à Arab News dans une interview exclusive de grande envergure. «Mais compte tenu de l’alternative, je suis très reconnaissant de la protection des services secrets.»
Connu pour ses opinions bellicistes sur le régime iranien et réputé être un élément moteur de la stratégie de «pression maximale» de l’ex-président américain Donald Trump, la tentative d’assassinat n’a, en tout cas, fait qu’intensifier les opinions de Bolton.
«C’est une petite raison de plus de vouloir voir le régime remplacé en Iran par un gouvernement qui reflète réellement la volonté du peuple iranien», ajoute-t-il.
L’été dernier, le ministère américain de la Justice a accusé le militaire iranien Chahram Poursafi d’avoir tenté d’assassiner Bolton, probablement en représailles à la frappe de drone de l’administration Trump en janvier 2020 qui a tué Qassem Soleimani, selon des documents judiciaires.
Soleimani était le commandant de la force extraterritoriale Al-Qods du CGRI. Cette unité d’élite est chargée d’exporter la révolution islamique dans tout le Moyen-Orient et au-delà, en recourant à la violence et aux subterfuges pour réaliser les objectifs du régime.
Peu de temps après l’arrestation de Poursafi, le romancier Salman Rushdie a été poignardé à plusieurs reprises alors qu’il s’apprêtait à donner une conférence publique à New York. L’attaque, si elle n’est pas directement liée à l’Iran, a au moins été provoquée par la fatwa lancée par le régime en 1989 contre l’écrivain.
Par ailleurs, à la fin du mois de janvier de cette année, le ministère de la Justice a inculpé trois Iraniens pour une tentative présumée de meurtre de la journaliste américaine d’origine iranienne et militante des droits de l’homme Masih Alinejad, critique virulent des abus du régime.
Lors de son interview avec Arab News, Bolton qualifie de «sans précédent» le niveau des menaces iraniennes à l'égard de responsables américains et d'opposants étrangers au régime.

Des officiers du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) prenant part à un exercice militaire dans la région d’Aras en Iran (Photo, AFP).

«(Ces menaces) démontrent vraiment la nature fondamentalement terroriste du régime lui-même, (et) explique pourquoi on ne peut pas leur faire confiance, concernant l’accord nucléaire ou autre chose, pour qu’ils fassent réellement ce à quoi ils s’engagent.»
Par ailleurs, ce «caractère fondamental» du régime iranien se manifeste «chaque jour dans la répression du peuple iranien et dans les groupes terroristes qu’il soutient dans sa région».
Bolton estime que la campagne d’assassinats ciblés du régime, qui est devenue plus audacieuse depuis le début des manifestations antigouvernementales à l’échelle nationale en septembre, est trop peu remarquée ou reconnue.
«Les gens n’ont pas encore compris que le gouvernement iranien tente systématiquement d’éliminer toute opposition virulente à ses politiques», souligne-t-il.
Les dirigeants occidentaux ont durci leur rhétorique contre l’Iran ces derniers mois, depuis que le régime a lancé une sévère répression des manifestations antigouvernementales.
Les Iraniens descendent dans la rue depuis septembre dernier, date à laquelle Mahsa Amini, 22 ans, est morte sous la garde de la police des mœurs iranienne, déclenchant un mouvement plus large contre le traitement des femmes par la théocratie et la baisse générale du niveau de vie.
Les États-Unis et plusieurs gouvernements européens ont également critiqué Téhéran pour avoir fourni des drones de combat à l’armée russe, qui seraient utilisés contre des installations civiles en Ukraine.
Reflétant la détérioration des relations déjà difficiles entre l’Occident et Téhéran au cours des derniers mois, les États-Unis, le Royaume-Uni et l’UE ont imposé de nouvelles sanctions à des dizaines de responsables et d’organisations iraniens, dont des unités du CGRI.
Les parties sanctionnées ne peuvent plus se rendre dans l’UE, et les actifs qu’elles détiennent dans l’UE peuvent être gelés. De même, des discussions sont en cours au Parlement européen pour déterminer s’il convient ou non de considérer le CGRI comme une organisation terroriste.
Malgré cela, l’administration Biden et ses alliés européens tentent toujours de relancer l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien, également connu sous le nom de Plan d’action global commun (PAGC), en vue de faire bénéficier l’Iran d’un allègement des sanctions en échange de l’abandon par le régime de son programme nucléaire.

Une photo fournie par le bureau présidentiel iranien en 2021, montrant un ingénieur à l’intérieur de l’usine d’enrichissement d’uranium de Natanz en Iran (Photo, AFP).

Rafael Grossi, directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), a qualifié l’accord sur le nucléaire de «coquille vide», dans le cadre duquel «chaque limite qui existait dans le PAGC a été enfreinte à plusieurs reprises».
L’administration Trump s’est retirée de l’accord en 2018, estimant qu’il n’allait pas assez loin pour maîtriser les ambitions nucléaires du régime, ni son programme de missiles balistiques et les activités des milices alliées dans toute la région.
«Il est clair pour moi que l’administration Biden veut toujours revenir à cet accord», indique Bolton à Arab News.
«Ils peuvent dire que ce n’est pas à l’ordre du jour, que c’est figé. Mais (comme) nous disons en Amérique, il n’est pas encore six pieds sous terre. Il est toujours vivant. Je pense que pour de nombreux membres de l’administration Biden, la résistance que nous observons en Iran aujourd’hui constitue un obstacle à leur objectif supérieur, qui est de revenir à l’accord sur le nucléaire.»
Selon les analystes, laisser la porte ouverte à la diplomatie ne reflète pas tant les espoirs de l’Occident de réaliser une véritable percée avec l’Iran, mais plutôt le dilemme auquel les puissances occidentales sont confrontées, étant à court d’alternatives pour maîtriser les ambitions nucléaires de l’Iran.
Le statu quo semble de rigueur, les parties prenantes s'accomodant implicitement qu’il n’y a pas d’accord, mais pas non plus de crise.
Bien que ce ne soit pas un scénario idéal pour l’Iran — avec des sanctions toujours en place et des actifs gelés — John Bolton estime que le statu quo profite à la République islamique.

L’administration Biden et ses alliés européens tentent toujours de relancer l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien (Photo, AFP).

«Les exportations iraniennes de pétrole sont aujourd’hui à leur plus haut niveau depuis la réimposition des sanctions en 2018 par l’administration Trump après notre retrait de l’accord sur le nucléaire. Et l’Iran n’a pas été sanctionné. Ils vendent du pétrole à la Chine. (De plus), l’Iran tire des recettes dont elle a désespérément besoin des achats de pétrole par la Chine», explique-t-il.
«Ainsi, (l’Iran) peut vivre avec le statu quo pendant longtemps alors que ses programmes d’armes nucléaires et de missiles balistiques continuent de progresser, qu’il continue de financer des groupes terroristes dans la région et des attaques terroristes contre ses ennemis dans le monde, et qu’il tente toujours de réprimer la résistance au régime lui-même à l’intérieur de l’Iran.»
L’Iran enrichit actuellement de l’uranium à un niveau de pureté de 60%, proche de la qualité militaire. Les nations occidentales craignent que le PAGC soit le seul moyen de dissuasion qui reste pour empêcher l’Iran de fabriquer une arme nucléaire.
Bolton estime que cette logique est «fondamentalement erronée».
«C’est l’accord lui-même, pas même les violations de l’accord par l’Iran, mais l’accord lui-même qui permet à l’Iran de se frayer un chemin vers les armes nucléaires», souligne-t-il.
Selon lui, la «plus grosse erreur» commise par les États-Unis et d’autres pays lors de la période précédant la conclusion de l’accord de 2015 est de ne pas avoir insisté pour que l’Iran prenne la décision claire et sans équivoque de renoncer à se doter de l’arme nucléaire.
«C’est exactement le contraire qui s’est produit. L’Iran s’est réaffirmé qu’il voulait des armes nucléaires et qu’il utiliserait cet accord afin de relancer l’économie et de fournir plus de ressources, non seulement pour le programme d’armement, mais aussi pour le programme de missiles, pour le terrorisme et pour d’autres activités malveillantes.»

EN BREF SELON JOHN BOLTON

* La révolution des femmes est une situation intenable pour les ayatollahs
* Le régime iranien est dans la position la plus faible qu’il ait connue depuis la révolution de 1979
* L’administration Biden «n’écoute pas» le point de vue arabe
* Une des erreurs fondamentales du PAGC a été l’exclusion des pays de la région

Bolton estime que l’autre erreur majeure du PAGC était de croire qu’il était possible d’isoler le programme nucléaire du soutien de l’Iran au terrorisme international et de ses activités militaires conventionnelles dans la région.
«Cependant, une erreur encore plus fondamentale était la négociation avec les ayatollahs, sans que les pays de la région ne soient à la table des négociations», poursuit-il.
«L’administration Biden reprochait à Trump de ne pas prendre davantage en compte nos alliés en n’étant pas plus inclusif dans notre politique étrangère. Pourtant, c’est toujours l’administration Biden qui ne veut pas faire participer les pays du CCG, Israël ou qui que ce soit d’autre aux négociations.
«Ce sont les pays les plus proches géographiquement de l’Iran, les plus vulnérables aux attaques terroristes et à la menace des missiles balistiques iraniens, ainsi qu’à la (menace) nucléaire.
«L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont tous deux été la cible de drones et d’obus de mortiers iraniens lancés par la milice houthie au Yémen. (Les Iraniens ont) attaqué des infrastructures civiles comme l’industrie pétrolière. Ils ont attaqué des aéroports civils.»
«L’Iran a fourni aux milices en Irak des drones et des mortiers qui ont attaqué des positions américaines et d’autres positions étrangères, attaqué des lieux sunnites, (et) vraiment essayé de déstabiliser le gouvernement. Ils aident le Hezbollah et le Hamas.
«C’est un régime qui menace tout le monde. Pourtant, aucun des pays qui ont fait les frais de ces activités terroristes n’a son mot à dire dans la négociation. Donc, je pense que s’il y avait une chance de négocier avec les ayatollahs, et à mon avis, cela ne réussirait jamais, un bon chef d’alliance devrait tenir compte des intérêts de tous ses membres.»
«Je ne pense pas que l’administration Biden écoute le point de vue arabe dans cette équation.»

Des manifestants en colère sont descendus dans les rues des grandes villes d’Iran pendant huit nuits consécutives après la mort de Mahsa Amini, 22 ans (Photo, AFP).

Dans une tribune publiée dans le New York Times en 2015, Bolton éstimait que «si quelqu’un avait cru le mantra du président Obama selon lequel “toutes les options sont sur la table” pour lutter contre le programme d’armes nucléaires de l’Iran, l’accord de Vienne aurait peut-être émergé de manière moins avantageuse pour Téhéran. Cependant, personne n’a pris au sérieux la menace de force militaire de M. Obama — un manque de crédibilité que (...) l’Iran exploite toujours. En dépit de cela, le vice-président, Joseph R. Biden Jr, tente toujours de rassurer les démocrates inquiets du Congrès en leur disant que l’accord de Vienne n’exclut pas le recours à la force par les États-Unis.»
Aujourd’hui, Bolton affirme que la menace de recourir à la force n’est plus nécessaire, car l’alternative au PAGC réside dans «le peuple iranien».
«Ils sont dans les rues de tout le pays, et ils ne scandent plus “Mort à l’Amérique”, mais plutôt “Mort à l’ayatollah Khamenei”.
«Le régime n’est plus maintenu au pouvoir par le soutien du peuple. Cela a pratiquement disparu. Il règne désormais par la force des armes, et je pense que la façon la plus probable de faire tomber le régime est de diviser le haut commandement militaire.
«Je suis convaincu que cela a plus de chances de se produire ici en raison de la nature des manifestations menées par les femmes iraniennes. Dans le CGRI et dans l’armée régulière, chacun des généraux a une mère. Ils ont des sœurs, des épouses et des filles, et ils entendent la même chose tous les jours.
«À mon avis, cela signifie qu’ils comprennent à quel point leur famille et d’autres personnes pensent que le régime est intolérable. C’est une situation insoutenable pour les ayatollahs.»

La journaliste américaine d’origine iranienne et militante des droits de l’homme Masih Alinejad à Davos, le 19 janvier (Photo, AFP).

Bolton estime que l’administration Biden et ses alliés doivent déployer davantage d’efforts pour soutenir le mouvement de protestation, «peut-être en fournissant un matériel de communication (afin) que les personnes qui soutiennent la résistance en Iran puissent mieux communiquer».
«La résistance n’a pas vraiment de direction centrale, ce qui montre à quel point elle est répandue, à quel point elle était spontanée. Toutefois, une meilleure coordination leur permettrait de se situer plus puissamment dans leur opposition au régime et leur permettrait également de communiquer avec la diaspora hors d’Iran.»
«Je crois que nous pouvons demander à l’opposition ce dont ils ont vraiment besoin. Probablement de ressources, d’aide financière, mais peut-être aussi d’autres choses. Je pense que nous devrions essayer d’amener d’autres pays dans le monde, et certainement des pays de la région, mais aussi des pays d’Europe et d’ailleurs, à s’unir pour affirmer qu’il s’agit d’une véritable opportunité d’obtenir un Iran libre.
«Vous savez, ce n’est pas seulement une manifestation contre l’oppression des femmes en Iran. En réalité, c’est une attaque directe contre la légitimité des fondements idéologiques de la révolution elle-même. Si l’on ajoute à cela le mécontentement économique qui sévit dans tout le pays depuis de nombreuses années, je pense que le régime est dans la position la plus faible qu’il ait connue depuis sa prise de pouvoir en 1979.»
«Donc, si le reste du monde ou certainement les États-Unis font clairement savoir que nous soutenons le peuple et que nous ne l’oublierons pas, et s’il y a des choses que nous pouvons faire pour l’aider, nous sommes prêts à le faire», ajoute Bolton.
«S’ils divisent le CGRI et l’armée, et que le régime tombe, nous agirons rapidement pour les réintégrer dans la communauté internationale, éliminer les sanctions, et autoriser les investissements étrangers pour ressusciter l’industrie pétrolière en Iran. Nous les aiderons également à démanteler le programme d’armes nucléaires, comme nous l’avons fait dans le cas de la Libye, et à le sortir du pays, afin d’assurer, vraiment, une meilleure sécurité pour les Iraniens.»
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'Arabie saoudite et l'Arménie: une «feuille de route» pour renforcer les relations diplomatiques, déclare le ministre des AE, Ararat Mirzoyan, à Arab News

Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, affirme qu'il n'y a «aucune limite» aux opportunités de coopération entre l'Arabie saoudite et l'Arménie. (Photo, AN)
Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, affirme qu'il n'y a «aucune limite» aux opportunités de coopération entre l'Arabie saoudite et l'Arménie. (Photo, AN)
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  • «Aucune limite» aux opportunités de coopération entre l’Arabie saoudite et l’Arménie, déclare le ministre des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, lors de sa visite «historique» à Riyad
  • Il affirme que le gouvernement arménien soutient un cessez-le-feu à Gaza et la solution des deux États pour Israël-Palestine

RIYAD: L'Arménie s'engage à établir une «feuille de route» pour renforcer ses relations diplomatiques avec l'Arabie saoudite, a déclaré Ararat Mirzoyan, ministre arménien des Affaires étrangères, lors d'une interview exclusive accordée à Arab News jeudi en marge d'une visite dans le Royaume.

Lors d'une discussion approfondie qui a couvert divers aspects, notamment le développement des liens bilatéraux, le processus de paix dans le Caucase du Sud et la guerre à Gaza, Mirzoyan a souligné que l'établissement de relations diplomatiques officielles en novembre dernier marquait le début d’une nouvelle ère de coopération entre les deux pays.

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Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, affirme qu'il n'y a «aucune limite» aux opportunités de coopération entre l'Arabie saoudite et l'Arménie. (Photo, AN)

«Il est essentiel de souligner que nos liens historiques avec le monde arabe, avec tous les pays arabes, reposent sur des relations amicales ancrées dans la tradition entre nos peuples respectifs,», a-t-il déclaré. «Nous devons garder à l’esprit que de nombreux pays arabes ont accueilli des réfugiés survivants du génocide arménien. Mais bien sûr, nos liens culturels et nos relations existaient même avant cela.»

Mirzoyan a rencontré son homologue saoudien, le prince Faisal ben Farhane, à Riyad mercredi, et il a également été reçu aux ministères saoudiens de l'Éducation et de l'Économie.

«Nous ne voulons pas nous arrêter là. Il existe de nombreux domaines où nous pouvons approfondir notre coopération et explorer de nouvelles opportunités. Nous espérons qu’après cette visite une feuille de route pour le développement des relations émergera», a-t-il ajouté.

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Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane (à droite), reçoit le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, avant leur rencontre à Riyad, le 17 avril 2024. (Photo, SPA)

Ces dernières années ont été marqués par un réchauffement progressif des relations entre les deux pays. En octobre 2021, le président arménien de l'époque, Armen Sarkissian, s'était rendu en Arabie saoudite, marquant ainsi le début d'un nouvel avenir diplomatique pour l'Arménie.

Bien que les relations diplomatiques formelles soient récentes, M. Mirzoyan est très optimiste quant aux avantages mutuels de développer ces liens.

«Franchement, il n'y a pas de limite», a-t-il déclaré. «L'éducation, les sciences, les technologies de pointe, le développement urbain, l'agriculture, le tourisme, les contacts entre les peuples, le commerce, les investissements et les infrastructures. Il se passe tellement de choses ici en Arabie saoudite, mais aussi en Arménie».

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Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, s'est également entretenu avec le ministre saoudien de l'Économie et de la Planification, Faisal F. Al-Ibrahim, à Riyad le 17 avril 2024. (Photo SPA)

Mirzoyan a salué le lancement des vols commerciaux entre Riyad et la capitale arménienne, Erevan, par la compagnie aérienne saoudienne Flynas, en juin de l'année dernière, affirmant qu'il s'attend à ce que cette initiative stimule le tourisme entre les deux nations.

Le ministre des Affaires étrangères a également félicité l'Arabie saoudite pour avoir remporté sa candidature pour l'Expo 2030, candidature que l'Arménie a soutenue en 2022.

«Notre vision est que nous devrions établir une coopération très étroite et solide avec l'Arabie saoudite, y compris en ce qui concerne les affaires régionales, mais aussi les forums internationaux», a-t-il déclaré.

«J’entrevois également la possibilité d’une coopération étroite dans les forums internationaux. Encore une fois, je tiens à mentionner que lorsque l'Arabie saoudite a présenté sa candidature pour l'Expo 2030, l'Arménie figurait parmi les pays qui l'ont soutenue.»

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Les ministres des Affaires étrangères saoudien et arménien, accompagnés de leurs délégations respectives, réunis à Riyad le 17 avril 2024. (Photo SPA)

Mirzoyan a également exprimé son soutien à une solution à deux États et à un cessez-le-feu en Palestine. En décembre de l'année dernière, l'Arménie s'est jointe à l'Arabie saoudite et à plus de 150 autres pays à l'Assemblée générale des Nations unies pour voter en faveur d'un cessez-le-feu immédiat à Gaza. En outre, l'Arménie serait prête à agir en tant que facilitateur potentiel entre les deux parties, si nécessaire et sur demande.

«L'Arménie a toujours soutenu la solution à deux États pour la Palestine et Israël, et condamne fermement la violence et le ciblage des populations civiles», a déclaré Mirzoyan, soulignant que l'Arménie avait très récemment été victime de cette violence.

«Nous condamnons fermement toute violence à l'encontre des populations civiles», a-t-insisté.

Outre les mots de soutien, l'Arménie a pris des mesures concrètes pour aider les populations civiles touchées par le conflit. Le mois dernier, elle a envoyé 30 tonnes de nourriture et de médicaments aux civils palestiniens déplacés et réfugiés à Rafah.

«L'Arménie déplore des dizaines de milliers de victimes innocentes de l'escalade des hostilités à Gaza. Nous-mêmes avons vécu l'horreur des attaques contre les civils et les infrastructures civiles, et nous nous joignons aux appels de la communauté internationale en faveur d'un cessez-le-feu immédiat à Gaza», a déclaré le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan lors d'une conférence de presse donnée à l’occasion de sa visite en Égypte pour discuter de la livraison d'aide.

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Des Palestiniens inspectent une maison détruite par une frappe israélienne à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 17 avril 2024. (Reuters)

Mirzoyan a exprimé son espoir que l’assistance «puisse aider un tant soit peu à alléger la situation et soulager la souffrance de ces personnes».

Concernant les relations plus proches, Mirzoyan a exprimé son désir d’aboutir à la paix entre l'Arménie et les autres nations du Caucase du Sud, tout en admettant que la paix durable nécessitera des efforts pour surmonter les obstacles.

«Il y a vraiment une opportunité, un élan tout à fait réaliste, pour construire une paix et une stabilité durables dans le Caucase du Sud. Mon gouvernement est pleinement engagé dans la voie de la paix, et nous sommes engagés dans des négociations de bonne foi et constructives. Cependant, pour être honnête, il reste encore quelques problèmes cruciaux où les positions des parties divergent. Le premier problème étant, bien entendu, la question des frontières et de la reconnaissance mutuelle de l'intégrité territoriale.» 

Dans le Caucase du Sud, les tensions territoriales sont fréquentes entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan depuis la chute de l'Union soviétique en 1991.

Pour normaliser les relations, Mirzoyan a souligné l’importance du respect des principes de souveraineté, de juridiction, d'égalité et de réciprocité par toutes les parties concernées.

«Nous sommes convaincus que tout peut être débloqué, y compris les voies ferrées, et nous pensons que tout ce qui sera débloqué doit rester sous la souveraineté des pays respectifs.»

«L'infrastructure sur le territoire arménien doit demeurer sous la souveraineté de l’Arménie tout comme l'infrastructure azérie sous la souveraineté de l'Azerbaïdjan. De plus, toutes ces infrastructures doivent fonctionner conformément à nos législations nationales, dans le respect des principes d'égalité et de réciprocité.»

Mirzoyan a ajouté que l'Arménie était en mesure de garantir la sécurité des personnes et des marchandises traversant son territoire sans nécessiter la présence d'un pays tiers.

Il a également expliqué que son pays avait lancé une initiative visant à améliorer les perspectives de stabilité et de paix en débloquant les infrastructures de transport dans la région.

«Nous avons proposé une initiative que nous avons baptisée “Carrefour de la paix” parce que nous croyons fermement que le déblocage complet des infrastructures de transport dans le Caucase du Sud, notamment les routes et les chemins de fer arméniens, azéris et turcs, aura non seulement des retombées économiques positives, mais constituera également un facteur majeur de paix et de stabilité dans notre région.»

Carte illustrée montrant les «carrefours de la paix» proposés par l'Arménie.

Même en dehors de l'Arménie et du Caucase du Sud, l'initiative pourrait avoir un impact mondial significatif, selon Mirzoyan.

«Il y a un intérêt croissant de la part de plusieurs pays pour la mise en œuvre de ce projet, le Carrefour de la Paix, en raison de ses avantages évidents. Je parle notamment des connexions est-ouest, mais nous devons également envisager les liens sud-nord ou nord-sud. C'est pourquoi nous le qualifions de “carrefour”», a-t-il expliqué.

Il a également souligné: «Ce projet pourrait s'avérer très bénéfique pour relier, par exemple, le monde arabe, y compris l'Arabie saoudite, avec la région de la mer Noire, et même au-delà.»

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La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock (C), accueille les ministres des Affaires étrangères de l'Arménie, Ararat Mirzoyan (G), et de l'Azerbaïdjan, Jeyhun Bayramov (D), pour des pourparlers de paix à Berlin, le 28 février 2024. (AFP/Dossier)

La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock (C), accueille les ministres des Affaires étrangères de l'Arménie, Ararat Mirzoyan (G), et de l'Azerbaïdjan, Jeyhun Bayramov (D), pour des pourparlers de paix à Berlin, le 28 février 2024. (AFP/Dossier)

L'Arménie s'apprête à établir des relations diplomatiques avec plusieurs pays et organisations multilatérales, dont l'Union européenne, s'éloignant ainsi de son allié historique le plus puissant, la Russie.

«Il convient de noter que les relations entre l'Arménie et la Fédération de Russie ne sont pas au beau fixe, dirais-je», a déclaré M. Mirzoyan. «Bien sûr, des difficultés subsistent, et nous n’en faisons pas mystère». 

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Cette photo prise le 17 novembre 2020 montre des véhicules de soldats de la paix russes stationnés à un poste de contrôle sur la route de Shusha, dans le Haut-Karabakh. Le porte-parole du président Vladimir Poutine a déclaré le 17 avril 2024 que les forces russes se retiraient de la région du Karabakh, où elles étaient stationnées en tant que forces de maintien de la paix depuis la fin d'une guerre en 2020. (Photo AP /Dossier)

«Il y a des problèmes ainsi que des interrogations au sein de la société arménienne, notamment en ce qui concerne le comportement des soldats de la paix russes au Nagorno-Karabakh, mais aussi celui de nos alliés russes lors des attaques sur nos territoires souverains en 2022, 2023 et bien avant. Il est vrai que des questions subsistent à ce sujet. Cependant, nous y travaillons.»

Les relations de l’Arménie avec l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) sont gelées depuis l'automne dernier. Fondée en 2002, l'OTSC est une alliance militaire regroupant six États post-soviétiques: Arménie, Biélorussie, Kazakhstan, Kirghizistan, Russie et Tadjikistan. Mirzoyan a déclaré dans une interview en mars avec TRT World de Turquie que la candidature de l'Arménie à l'UE était en discussion.

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Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, en visite dans le Royaume cette semaine, s'est entretenu en exclusivité avec la rédactrice en chef adjointe d'Arab News, Noor Nugali. (Photo AN)

Abordant la question avec Arab News, Mirzoyan a déclaré: «Les aspirations européennes du peuple de la république d'Arménie se renforcent de plus en plus, surtout face à la frustration ressentie par les Arméniens à l’égard des relations avec la Russie, bien que cela ne soit pas le seul élément en jeu.

«L'Arménie approfondit véritablement et de manière significative ses liens avec les États-Unis et l'UE. Ce sont nos principaux partenaires dans notre programme de réformes démocratiques. Ces derniers montrent désormais un engagement fort à soutenir l'Arménie et à renforcer sa résilience économique.

Nous entamons avec l'UE une nouvelle voie de partenariat étroit et, jusqu'à présent, personne ne peut prédire avec certitude où cela nous mènera.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L’Arabie saoudite déplore l’échec de la candidature de la Palestine à l’ONU

Le ministère a renouvelé l'appel du Royaume à la communauté internationale pour qu'elle assume sa responsabilité dans l'arrêt des attaques de l'occupation israélienne contre les civils à Gaza. (AP)
Le ministère a renouvelé l'appel du Royaume à la communauté internationale pour qu'elle assume sa responsabilité dans l'arrêt des attaques de l'occupation israélienne contre les civils à Gaza. (AP)
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  • Le Royaume réaffirme son soutien au droit du peuple palestinien à l'autodétermination
  • La Jordanie exprime également sa "sincère tristesse" face à l'incapacité du Conseil de sécurité à approuver la résolution.

DUBAI : L'Arabie saoudite a exprimé son regret face à l'échec du Conseil de sécurité des Nations Unies à adopter une résolution acceptant l'adhésion à part entière de la Palestine à l'ONU.

Dans une déclaration officielle du ministère des Affaires étrangères sur la plateforme de médias sociaux X, le Royaume a déclaré que "la non-adoption de la résolution permet à l'occupation israélienne de poursuivre ses violations du droit international sans dissuasion et ne rapprochera pas la paix souhaitée".

Le ministère a renouvelé l'appel du Royaume à la communauté internationale pour qu'elle assume sa responsabilité dans l'arrêt des attaques de l'occupation israélienne contre les civils à Gaza.

Le Royaume a également réaffirmé son soutien au droit du peuple palestinien à l'autodétermination et à l'établissement d'un État palestinien sur les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale, conformément à l'initiative de paix arabe et aux résolutions internationales pertinentes.

La Jordanie a également exprimé sa "sincère tristesse" face à l'incapacité du Conseil de sécurité à approuver une résolution qui aurait admis la Palestine comme membre à part entière des Nations unies, en raison du droit de veto des États-Unis.

Dans une déclaration, le ministère des affaires étrangères du pays a réaffirmé "que la communauté internationale est en faveur de la solution à deux États, qu'Israël est en train de saper".

"Le Conseil de sécurité doit reconnaître l'État palestinien afin d'empêcher Israël de priver le peuple palestinien de son droit à la liberté et à son propre État", a rapporté l'agence de presse nationale Petra.

"La reconnaissance de l'État palestinien et son adhésion pleine et entière sont une étape nécessaire pour imposer une paix juste qui mette fin à l'occupation et au conflit et qui respecte le droit de tous les peuples de la région à vivre dans la sécurité et la stabilité", a déclaré le porte-parole du ministère, Sufian Qudah.

"La Jordanie exige que toutes les nations reconnaissent l'État de Palestine sur les lignes du 4 juin 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, comme condition préalable à l'instauration de la paix et de la sécurité dans la région.

Le Qatar, dans une déclaration publiée par son ministère des affaires étrangères, a également exprimé son "profond regret face à l'échec du Conseil de sécurité à adopter un projet de résolution acceptant l'adhésion à part entière de l'État de Palestine aux Nations unies".

L'Organisation de la coopération islamique a également exprimé son profond regret face à l'incapacité du Conseil de sécurité "d'assumer ses responsabilités en accordant à l'État de Palestine le statut de membre à part entière des Nations unies, à un moment où le peuple palestinien est confronté aux formes les plus dures d'agression, de persécution et de génocide".

Dans une déclaration, l'organisation a affirmé que "l'utilisation du droit de veto des États-Unis contrevient aux dispositions de la Charte des Nations Unies, qui permet l'adhésion de tous les États acceptant les obligations qu'elle contient, et continue d'empêcher le peuple palestinien d'obtenir ses droits légitimes, perpétuant ainsi l'injustice historique subie par le peuple palestinien au cours des 75 dernières années", a rapporté l'agence de presse qatarie.

L'OCI a également affirmé le droit légitime de la Palestine à incarner son statut politique et juridique au sein des Nations unies, "considérant qu'il s'agit d'un droit en souffrance depuis des décennies, fondé sur les droits politiques, juridiques, historiques et naturels du peuple palestinien sur sa terre, comme le confirment les résolutions pertinentes des Nations unies".

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Un tribunal ordonne la libération d'une éminente professeure palestinien soupçonné d'incitation à la violence

La professeure a été suspendue par son université le mois dernier après avoir appelé à l’abolition du sionisme et suggéré que les récits d’agressions sexuelles lors des attaques dirigées par le Hamas contre Israël ont été fabriqués. (X/File)
La professeure a été suspendue par son université le mois dernier après avoir appelé à l’abolition du sionisme et suggéré que les récits d’agressions sexuelles lors des attaques dirigées par le Hamas contre Israël ont été fabriqués. (X/File)
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  • Nadera Shalhoub-Kevorkian était sous enquête après avoir interrogé les atrocités du Hamas, critiquant Israël
  • Justification insuffisante de l’arrestation, selon le tribunal. La détention fait partie d’une campagne plus large, selon l’avocat

LONDRES : Nadera Shalhoub-Kevorkian, éminente professeure de l'Université hébraïque de Jérusalem, a été libérée vendredi après qu'une décision de justice ait rejeté les conclusions de la police.

La criminologue et professeur de droit avait été arrêtée la veille, soupçonnée d'incitation à la haine. Elle faisait l'objet d'une enquête pour des remarques concernant les attaques du 7 octobre menées par le Hamas et pour avoir déclaré que les Israéliens commettaient des "crimes génocidaires" dans la bande de Gaza et qu'ils devaient en craindre les conséquences.

Vendredi, le tribunal a rejeté une demande de la police visant à prolonger sa détention provisoire, estimant que l'arrestation n'était pas suffisamment justifiée, selon les médias hébraïques.

Des manifestants se sont rassemblés devant le palais de justice pour protester contre l'arrestation de Mme Shalhoub-Kevorkian.

La chaîne israélienne Channel 12, qui a rapporté la nouvelle en premier, n'a pas précisé où Shalhoub avait été arrêtée, mais son avocat a confirmé plus tard qu'elle avait été appréhendée à son domicile dans le quartier arménien de Jérusalem.

"Elle n'était pas en bonne santé ces derniers temps et a été arrêtée à son domicile", a déclaré Alaa Mahajna. "La police a fouillé la maison et a saisi son ordinateur et son téléphone portable, des livres de poésie [palestinienne] et des documents liés à son travail.

M. Mahajna a décrit l'arrestation de Mme Shalhoub-Kevorkian comme faisant partie d'une campagne plus large menée contre elle, qui a comporté de nombreuses menaces de mort et de violence. 

La professeure a été suspendue par son université le mois dernier après avoir appelé à l'abolition du sionisme et suggéré que les récits d'agressions sexuelles lors des attaques menées par le Hamas contre Israël avaient été fabriqués.

La suspension a d'abord été critiquée par la communauté universitaire, qui y a vu une atteinte à la liberté académique en Israël. Toutefois, la décision a été annulée après que Mme Shalhoub-Kevorkian a présenté ses excuses et admis que des agressions sexuelles avaient eu lieu.

Depuis le début des hostilités l'année dernière, de nombreuses voix dissidentes en Israël ont été arrêtées pour avoir exprimé leur solidarité avec les victimes des bombardements à Gaza.

En octobre, le célèbre journaliste israélien ultraorthodoxe Israel Frey a été contraint de se cacher à la suite d'une violente attaque à son domicile.

Bayan Khateeb, étudiante au Technion-Israel Institute of Technology, a été arrêtée l'année dernière pour incitation après avoir posté une histoire Instagram montrant la préparation d'un plat populaire à base d'œufs épicés avec la légende : "Nous mangerons bientôt la shakshuka de la victoire".

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com