Ne pas pouvoir mettre fin à la guerre à Gaza est la «pire frustration» de Guterres

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. (Reuters)
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. (Reuters)
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Publié le Vendredi 09 février 2024

Ne pas pouvoir mettre fin à la guerre à Gaza est la «pire frustration» de Guterres

  • M. Guterres avertit qu’une «gigantesque tragédie» pourrait se produire à Rafah si Israël décide d’étendre son offensive à cette ville du sud où se réfugient plus d’un million de Palestiniens
  • Il témoigne de sa «solidarité absolue avec les horribles souffrances» à Gaza et de son «engagement total à déployer tous les efforts possibles pour parvenir à un cessez-le-feu humanitaire immédiat»

NEW YORK: Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a exprimé jeudi sa profonde tristesse face à son inaptitude à mettre fin à la guerre à Gaza, «ou du moins à mettre en place les conditions nécessaires pour faire respecter les droits international et humanitaire».

Il déclare à Arab News: «Ma pire frustration est de voir cette souffrance à une si grande échelle et de me dire que je n’ai pas le pouvoir d’y mettre fin. Mais telle est la réalité: je ne peux rien faire pour l’arrêter.»

Il ajoute: «Je peux faire entendre ma voix et je le fais. Je peux convoquer des réunions, mais il faut que les gens soient prêts à y participer.»

S’exprimant lors de sa conférence de presse annuelle, qui vise à mettre en avant ses priorités pour cette année, M. Guterres avertit qu’une «gigantesque tragédie» pourrait se produire à Rafah si Israël décide d’étendre son offensive à cette ville du sud où se réfugient plus d’un million de Palestiniens.

«La moitié de la population de Gaza est désormais entassée à Rafah. Ces personnes n’ont nulle part où aller. Elles n’ont pas de maison. Elles n’ont aucun espoir», insiste-t-il, appelant une nouvelle fois à un cessez-le-feu humanitaire immédiat, à la libération inconditionnelle des otages et à la nécessité de mettre en place des «mesures réelles, visibles et concrètes» en faveur d’une solution à deux États.

Il exprime son désaccord «avec la politique du gouvernement israélien, les colonies et plusieurs autres initiatives qui ont sapé la solution à deux États».

«Je tiens également à signaler que les opérations militaires ont été menées à Gaza de manière inacceptable et abusive en termes de morts et de destructions.»

Il poursuit en ces termes: «Je serai toujours un fervent partisan du droit d’Israël à vivre en paix et en sécurité. J’ai toujours été un combattant de premier ordre contre l’antisémitisme.»

«Mais je suis également totalement engagé envers le droit des Palestiniens à avoir leur propre État, à lutter pour l’autodétermination et à mettre fin à l’occupation.»

M. Guterres a transmis un message à la population de Gaza. Il y témoigne de sa «solidarité absolue avec les horribles souffrances» et de son «engagement total à déployer tous les efforts possibles pour mobiliser le système des Nations unies en vue de fournir l’aide nécessaire et de parvenir à un cessez-le-feu humanitaire immédiat».

La conférence de presse a eu lieu au moment où le Qatar travaille avec les États-Unis et l’Égypte pour négocier un cessez-le-feu qui impliquerait un arrêt des combats pendant plusieurs semaines et la libération de plus de 100 otages toujours détenus par le Hamas après l’attaque du 7-Octobre en Israël.

M. Guterres soutient qu’il «est dans l’intérêt de tous – particulièrement du gouvernement israélien – de s’assurer que ces négociations aboutissent», réitérant que «la quête de la libération des otages est absolument essentielle d’un point de vue humain. Je connais toute la souffrance qui en découle».

Comme il l’a fait à plusieurs reprises au cours des cinq derniers mois, M. Guterres a une nouvelle fois condamné les «horribles attaques terroristes» du Hamas du 7-Octobre. Cependant, il a également décrit la réponse d’Israël comme équivalant à une punition collective des Palestiniens de Gaza.

«Les dirigeants israéliens ne cessent de répéter qu’ils ne combattent pas le peuple palestinien, mais le Hamas.»

«Si tel est le cas, je ne comprends pas comment l’offensive a fait environ 28 000 morts, déplacé 75% de la population et détruit des quartiers entiers à Gaza. Il y a quelque chose qui ne va pas dans la manière dont les opérations militaires ont été conduites.»

À la question de savoir si le Hamas, en utilisant prétendument des civils comme boucliers humains, porte la responsabilité du lourd bilan humain, M. Guterres répond: «J’ai condamné l’utilisation de boucliers humains. J’ai même dit qu’il s’agissait d’une violation du droit humanitaire international.»

«Mais ce même droit humanitaire international stipule clairement que même lorsqu’il est question de boucliers humains, il existe une obligation de protéger les civils.»

«Donc, à cet égard, je pense que nous respectons des principes sans politique de deux poids deux mesures et il est très important d’être crédible sans discrimination aucune.»

Le 26 janvier, dans le cadre du procès intenté par l’Afrique du Sud, la Cour internationale de justice (CIJ) a émis ce qu’elle qualifie de «mesures d’urgence».

Bien que la CIJ n’ait pas accédé à la demande de l’Afrique du Sud d’ordonner à Israël de cesser immédiatement ses opérations à Gaza, elle a donné pour instruction à Israël d'empêcher son armée de commettre des actes qui pourraient être considérés comme génocidaires, de prévenir et de punir l’incitation au génocide et de permettre l’acheminement de l’aide humanitaire à la population de Gaza. Le tribunal a également statué qu’il avait le droit légal de donner suite à l’affaire de génocide.

M. Guterres a exprimé son «plein soutien» à la CIJ, affirmant qu’elle était l’entité appropriée pour se prononcer sur ces questions.

«Nous soutenons pleinement les décisions de la Cour internationale de justice et il est absolument indispensable qu’elles soient toutes appliquées», ajoute-t-il.

M. Guterres reconnaît que les États-Unis sont un allié d’Israël «et cela a été répété à maintes reprises par tous les dirigeants des États-Unis et d’Israël», mais il est également vrai («et je peux en témoigner moi-même», souligne-t-il) «que les États-Unis ont exercé une très grande pression sur Israël dans plusieurs domaines de l’aide humanitaire».

«Je me souviens de plusieurs échanges téléphoniques entre le président Joe Biden et le Premier ministre Benjamin Netanyahou pour résoudre des problèmes que nous avions sur le terrain et que nous ne pouvions pas résoudre par nous-mêmes.»

«Et je peux également témoigner qu’il y a eu une pression claire de la part des États-Unis pour que le droit international humanitaire soit pleinement respecté.»

Quant à savoir si Washington utilise suffisamment son influence pour inciter Israël à se conformer aux exigences internationales, M. Guterres dit: «Je ne sais sincèrement pas ce qu’ils sont aptes à faire.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


L'armée israélienne dit se préparer à une «  offensive décisive » contre le Hezbollah libanais

Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources. (AFP)
Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources. (AFP)
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  • "Quand le moment viendra et que nous passerons à l'offensive, ce sera une offensive décisive"
  • Dans un discours prononcé lors d'un déplacement dans le nord, le général israélien Ori Gordin, a déclaré aux soldats: "nous avons déjà éliminé plus de 500 terroristes au Liban, la grande majorité d'entre eux appartenant au Hezbollah"

JERUSALEM: Un commandant de l'armée israélienne a indiqué vendredi que les troupes dans le nord du pays, où Israël à une frontière avec le Liban, se préparaient à une "offensive décisive" contre le Hezbollah, après des mois d'échanges de tirs transfrontaliers.

Le mouvement islamiste libanais Hezbollah et l'armée israélienne échangent des tirs quasi quotidiennement depuis l'attaque le 7 octobre du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël, qui a déclenché la guerre dans la bande de Gaza.

Dans un discours prononcé lors d'un déplacement dans le nord, le général israélien Ori Gordin, a déclaré aux soldats: "nous avons déjà éliminé plus de 500 terroristes au Liban, la grande majorité d'entre eux appartenant au Hezbollah", selon un communiqué de l'armée.

Les troupes israéliennes dans le nord sont actuellement en opération pour protéger les habitants de cette partie du pays et "préparer la transition vers l'offensive", a ajouté le général Gordin, commandant les forces israéliennes dans le nord.

"Quand le moment viendra et que nous passerons à l'offensive, ce sera une offensive décisive", a-t-il encore dit.

Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources.

La plupart d'entre eux, 342 personnes, ont été confirmés comme étant des combattants du Hezbollah, mais le bilan comprend également 104 civils. M. Gordin n'a pas mentionné de victimes civiles. Dans le nord d'Israël, au moins 18 soldats israéliens et 13 civils ont été tués, selon l'armée.

Le Hezbollah, soutenu par l'Iran, affirme que ses attaques contre Israël depuis le 8 octobre ont pour objectif de soutenir son allié du Hamas.

Des dizaines de milliers d'habitants ont depuis été déplacés au Liban et en Israël en raison de cette flambée de violence transfrontalière.


Polio, eaux usées, hôpitaux surchargés: la crise sanitaire à Gaza

Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés". (AFP)
Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés". (AFP)
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  • L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait état de vives inquiétudes face à une possible épidémie de polio dans la bande de Gaza
  • De son côté, l'armée israélienne a annoncé dimanche avoir lancé une campagne de vaccination de ses soldats contre la polio

GENEVE: L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait état de vives inquiétudes face à une possible épidémie de polio dans la bande de Gaza, alors que la crise sanitaire y est déjà très grave.

Voici un aperçu de certains des défis sanitaires auxquels est confronté le territoire palestinien, selon l'OMS.

Polio dans les eaux usés

Menace largement répandue voici encore une quarantaine d'années, la poliomyélite - qui peut entraîner en quelques heures des paralysies irréversibles - a très largement disparu dans le monde grâce aux vaccins.

Mais il existe une autre forme de poliovirus qui peut se propager: le poliovirus qui a muté à partir de la source contenue à l'origine dans le vaccin antipoliomyélitique oral (VPO). C'est ce poliovirus dérivé d'une souche vaccinale (PVDVc) qui a été retrouvé à Gaza.

Lorsqu'elles se répliquent dans le tube digestif, les souches de VPO changent génétiquement et peuvent se propager dans les communautés qui ne sont pas complètement vaccinées contre la poliomyélite, en particulier dans les zones où les conditions d'hygiène et d'assainissement sont mauvaises, ou dans des zones surpeuplées.

Le 16 juillet, le Réseau mondial de laboratoires de lutte contre la poliomyélite a isolé le poliovirus de type 2 dérivé d'une souche vaccinale (PVDVc2) dans six échantillons d'eaux usées à Deir al-Balah et Khan Younès.

Aucun prélèvement humain n'a encore été effectué à Gaza de sorte que l'OMS ne sait toujours pas si quelqu'un y a été infecté par le poliovirus. L'OMS et le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) espèrent collecter cette semaine les premiers échantillons humains.

De son côté, l'armée israélienne a annoncé dimanche avoir lancé une campagne de vaccination de ses soldats contre la polio.

Manque d'eau et d'assainissement

L'OMS et ses partenaires espèrent achever l'évaluation des risques liés à la polio cette semaine. Mais l'OMS a prévenu qu'il y a "un risque élevé" de propagation du poliovirus à Gaza et au niveau international "si cette épidémie ne fait pas l'objet d'une réponse rapide et optimale".

Le Dr Ayadil Saparbekov, chef d'équipe à l'OMS pour les urgences sanitaires dans les territoires palestiniens, espère que des recommandations pourront être publiées dimanche.

Mais "étant donné les limites actuelles en matière d'hygiène et assainissement de l'eau à Gaza, il sera très difficile pour la population de suivre le conseil de se laver les mains et de boire de l'eau salubre", a-t-il relevé mardi, lors d'un point de presse.

"Avec le système de santé paralysé, le manque d'eau et d'assainissement, ainsi que le manque d'accès de la population aux services de santé... la situation s'annonce très mauvaise", a-t-il souligné.

Au-delà de la polio, l'OMS est "très inquiète" face à de possibles épidémies dans la bande de Gaza.

Système de santé dévasté 

Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés" dans le complexe médical Nasser après de nouveaux bombardements lundi à Khan Younès, dans un contexte de "grave pénurie de réserves de sang, de fournitures médicales et de lits d'hôpitaux".

Avant le conflit à Gaza, déclenché le 7 octobre par les attaques du Hamas, il y avait environ 3.500 lits d'hôpitaux dans le territoire palestinien. Aujourd'hui, l'OMS estime qu'il y en a 1.532.

Seulement 45 des 105 établissements de soins de santé primaires sont opérationnels. Huit des dix hôpitaux de campagne sont opérationnels, dont quatre seulement partiellement.

Dans une telle situation, "il se peut que davantage de personnes meurent de maladies transmissibles que des blessures" liées à la guerre, a averti le Dr Saparbekov.

Selon ce responsable de l'OMS, "jusqu'à 14.000 personnes pourraient" avoir besoin d'une évacuation médicale hors de Gaza.


Les EAU proposent une mission internationale temporaire pour l'après-guerre à Gaza

Reem bint Ebrahim Al-Hashimy, ministre d'État émiratie pour la coopération internationale, a déclaré que la mission contribuerait à rétablir l'ordre public et à répondre à la crise humanitaire dans Gaza d'après-guerre. (Archive/AFP)
Reem bint Ebrahim Al-Hashimy, ministre d'État émiratie pour la coopération internationale, a déclaré que la mission contribuerait à rétablir l'ordre public et à répondre à la crise humanitaire dans Gaza d'après-guerre. (Archive/AFP)
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  • Elle a souligné le rôle clé des États-Unis dans le succès de la mission
  • La mission ouvrirait la voie à la réunification de Gaza et de la Cisjordanie occupée sous une Autorité palestinienne unique et légitime

ABOU DHABI : Les Émirats arabes unis ont appelé à l'établissement d'une mission internationale temporaire pour poser les jalons d'une nouvelle gouvernance à Gaza après la guerre.

Jeudi, dans un communiqué relayé par l'agence de presse nationale, Reem Al-Hashimy, ministre d'État pour la coopération internationale,  a déclaré que cette mission viserait à rétablir l'ordre et à faire face à la crise humanitaire dans Gaza post-conflit.
Selon la ministre, la mission devrait être déployée à l'invitation du gouvernement palestinien, sous la houlette d'un "nouveau Premier ministre crédible et indépendant", pour répondre aux besoins des Palestiniens et reconstruire Gaza. 

Elle préparerait le terrain pour la réunification de Gaza et de la Cisjordanie occupée sous une Autorité palestinienne unique et légitime.

Al-Hashimy a souligné qu'un retour à la situation d'avant le 7 octobre ne garantirait pas une paix durable, cruciale pour la stabilité régionale. 

Elle a exhorté les États-Unis à mener les efforts internationaux pour reconstruire Gaza, parvenir à la solution à deux États et faciliter les réformes palestiniennes, autant d'éléments qui contribueraient au succès de la mission internationale.

Israël, a-t-elle ajouté, doit également respecter le droit humanitaire international.

"Gaza ne peut se relever sous un blocus continu, ou si l'Autorité palestinienne légitime est empêchée d'assumer ses responsabilités", a-t-elle affirmé, appelant à l'arrêt des colonies israéliennes illégales et des violences en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. 

La ministre a réitéré le soutien des EAU aux efforts internationaux pour la solution à deux États.
"Notre ambition dépasse les frontières de Gaza et exige une collaboration internationale. L'établissement de la paix n'est pas seulement une nécessité régionale, mais un enjeu global qui profiterait à tout le Moyen-Orient et au monde entier", a-t-elle souligné pour conclure.